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La propension au Slack Budgétaire et la culture nationale

CHAPITRE 2 : CULTURE NATIONALE ET CONTROLE GESTON DANS LES

3. LE MODELE DE LA RECHERCHE

3.2. Les hypothèses de recherche

3.2.4. La propension au Slack Budgétaire et la culture nationale

Le concept de slack budgétaire a été mis en avant par Cyert et March en 1963 ; selon eux il

apparaît lorsqu’une coalition utilise plus de ressources que nécessaire pour achever sa tâche.

Le slack organisationnel ainsi défini peut apparaître au niveau de chaque partie prenante dans

l’organisation. Ce concept a paru dans la littérature de gestion, à la fin des années 1960, notamment à travers les articles de Schiff et Lewin (1968, 1970), Lowe et Shaw (1968) ainsi que Onsi (1973). Selon Schiff et Lewin (1970) le plus important est le slack créé par les managers et les cadres intermédiaires et qui concrétise toujours dans les budgets. Il est possible alors de définir le slack budgétaire comme « Le résultat de la sous estimation déterminée des revenus et capacités de production et/ou la surestimation des coûts et

ressources nécessaire pour réaliser une tâche » (Dunk et Nouri, 1998, P. 73). Lukka (1988)

de son côté identifie deux motivations différentes pour la création du slack dans le budget. La première est d'améliorer son pouvoir et l'estime de soi en ayant des ressources supplémentaires sous son contrôle, la seconde motivation est de garantir des performances que l'on est évalué favorablement. Il peut garantir plus de stabilité à l'organisation face à

l’incertitude de l'environnement. Les excédents de ressources accumulés durant les périodes favorables sont utilisés lors d’une baisse conjoncturelle. Cela Permet alors d'amortir les variations d'activité (Naro, 1998). Le slack budgétaire est ainsi largement répandu dans les entreprises (Jensen, 2001; Jensen, 2003; Merchant, 1985b; Schiff et Lewin, 1968). Ses auteurs

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montrent que les biais dans les estimations reflètent la perception des agents concernant leur

environnement (interne à l’entreprise et externe (y compris la culture) et n’affectent pas la

performance organisationnelle. Néanmoins, les recherches suivantes mettent généralement en avant les aspects dysfonctionnels du slack sur la performance organisationnelle et l’allocation

efficiente des ressources (Chow et al., 1988; Dunk et Nouri, 1998; Jensen, 2001; Lowe et Shaw, 1968; Merchant, 1990; Otley, 1985, Naro, 1998). Pour pallier cette situation certains auteurs proposent des systèmes incitatifs de rémunération (Chow et al., 1988; Jensen, 2001). En outre, l'impact de la culture nationale sur la propension des subordonnés à créer de slack budgétaire a généralement été négligé, même si l'importance accordée à l'impact de la culture nationale sur la construction du slack a reconnu depuis longtemps par les chercheurs en comptabilité. Par exemple, dès les années 1970, Otley (1978) souligne que la recherche sur la création de slack budgétaire est incomplète sans prendre en compte l'impact de la culture nationale. Pourtant, malgré cette reconnaissance précoce de l'influence de la culture nationale sur la création de slack budgétaire, il y a eu un manque de recherche interculturelle dans ce domaine de recherche. En revanche, des études ont montré un effet direct de la culture nationale sur la création de slack (par exemple : Ueno et Sekaran, 1992) et d’autres études

ont affirmé l'effet de l’interaction entre la culture nationale et d’autre variable comme la

participation et la pression budgétaire sur la propension des subordonnés à créer de slack (par exemple : Otley (1978) ; Chong et Ian (2004)). Nous allons essayer dans cette recherche de tester les effets directs et l’effet de l’interaction entre la culture nationale, la participation au processus budgétaire sur la propension à créer de slack.

ü Les différences significatives dans la propension à créer de slack entre les deux

groupes

En ce qui concerne le contrôle de l’incertitude, l’aversion au risque constitue selon nombre de chercheurs un facteur individuel majeur, explicatif de la propension des managers à créer du

slack budgétaire (Prudence, 2009). Dans la mesure où les sociétés ayant un niveau élevé de

cette dimension préfèrent construire plus de slack budgétaire afin de se prémunir contre les incertitudes de la future. Le slack budgétaire protège les gestionnaires contre les effets

d'événements imprévus, car ils sont capables d’utiliser les ressources supplémentaires aux

moments difficiles (Ueno et Sekaran, 1992). Ainsi, Young (1985), Chow et al. (1988) et Waller (1988) montrent que les individus averses aux risques créent plus de slack que ceux qui sont pas sujets à cette aversion. Dans une autre étude menée par Onsi (1973), 80% des 32

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managers interrogés avouent créer du slack, en raison de la pression exercée par les dirigeants et pour se protéger des incertitudes.

La dimension individualisme-collectivisme peut également jouer un rôle dans la construction

de slack budgétaire. Dans une société individualiste, non seulement chaque individu tente de

renforcer la base de son propre pouvoir et l'estime de soi, mais l'évaluation des performances est également basé uniquement sur les réalisations des objectifs attendus de chaque individu. Les individus ont alors tendance à s'engager dans des comportements calculatrice qui les invitent instamment à créer du slack budgétaire pour s'assurer que des ressources supplémentaires deviennent disponibles et que le budget est réalisable en toute sécurité. Cela garantit que la personne qui accomplit l'objectif budgétaire est évaluée favorablement et est récompensée de manière adéquate (Ueno et Sekaran, 1992). Cependant, dans les sociétés collectivistes, tel que les pays du Maghreb, l'évaluation de la performance est basée sur la performance du groupe et sur la réalisation des objectifs de l'organisation plutôt que sur la performance individuelle. L'orientation collectiviste aide également les gestionnaires à coopérer les uns avec les autres et à compenser les dépenses excessives en réalisant des projets difficiles par la sous-utilisation de crédits d'autres projets moins coûteux. Ce type

d’ajustement peut être tout à fait impossible à réaliser dans les sociétés individualistes, tels

que la France, où chaque individu tente de se protéger et de promouvoir son autonomie (Ueno et Sekaran, 1992).

Par exemple : Ueno et Sekaran (1992) ont comparé deux groupes d’individus de nationalités différentes et ont utilisé comme base d’analyse la dimension culturelle individualisme -collectivisme. Ils en concluent que les gestionnaires américains sont généralement plus

individualistes que les japonais, ce qui pourrait présager d’une plus grande propension à créer

du slack budgétaire. Étant donné que les niveaux de l’individualisme et de de contrôle de

l’incertitude sont plus élevés en France que dans les pays du Maghreb, nous proposons donc

l’hypothèse suivante :

H16. Les employés français ont plus de propension à créer de slack budgétaire que les maghrébins ;

H17. L’individualisme a un effet positif sur la propension des employées à créer du slack budgétaire ;

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H18. L’effet de l’individualisme sur la propension à créer du slack est plus fort chez les français que chez les maghrébins ;

H19. Le contrôle de l’incertitude a un effet positif sur la propension des employées à créer du slack budgétaire ;

H20.L’effet du contrôle de l’incertitude sur la propension à créer du slack budgétaire est plus fort chez les français que chez les maghrébins.

ü L’effet de l’interaction entre la participation au processus budgétaire et la pression budgétaire sur la propension à créer de slack modéré par la culture nationale (pays)

Chong et Ian (2004) suggèrent que l'effet de la culture nationale sur la propension des subordonnés à créer du slack n'est pas direct. Ces auteurs soulignent que celle-ci modère

l’effet de l’interaction entre la participation budgétaire, la pression budgétaire et l’asymétrie d’information sur la propension au slack budgétaire.

Pression budgétaire, participation budgétaire et slack budgétaire

La littérature montre que la pression et la participation budgétaire sont parmi les variables les plus importantes qui sont susceptibles d'influencer la propension à créer de slack budgétaire (Govindarajan, 1986; Merchant, 1985; Onsi, 1973; Young, 1985). En effet, la création de

slack budgétaire dépend du niveau de participation au processus budgétaire. Sans cette

dernière, Il ne peut donc y avoir de création de slack, puisque, à priori, dans ce cas, le budget est exigé par la direction. Par ailleurs, dans le budget participatif, les managers tentent

d’influencer les critères de performance intégrée au budget pour réaliser un niveau qu’ils

voient comme étant faisable (prudence, 2009). Onsi (1973) et Marchand (1985) ont montré que le niveau de participation est associé négativement avec la création du slack. Selon ces auteurs, les gestionnaires qui sont impliqués aux processus budgétaires, auraient moins besoin de construire de slack. Cependant, la corrélation négative entre la participation et la propension à construire du slackbudgétaire n’est pas toujours évidente. En effet, Onsi (1973), Camman (1976), Govindarajan (1986) et Dunk (1993) soulignent que la participation diminue

le slack budgétaire. Lukka (1988) et Young (1985) montrent par contre, des résultats opposés.

Quant à eux, le montant du slack budgétaire serait lié positivement avec le niveau de la participation budgétaire. En revanche, Collins (1978) montre qu’il n’existe pas de liens significatifs entre la participation budgétaire et la propension à créer du slack budgétaire. Par

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conséquent, les relations entre la participation et la propension à créer du slack est associée aux autres facteurs comme par exemple l’importance accordée à l’utilisation des données budgétaire pour l’évaluation de la performance.

Par ailleurs, plusieurs auteurs ont montré que la propension à créer du slack budgétaire est associée positivement à la pression budgétaire. Merchant et Manzoni (1989) soulignent, par

exemple, qu’en cas de forte pression budgétaire, les gestionnaires qui ne parviennent pas atteindre leurs objectifs budgétaires se trouvent confrontés à des interventions de leur hiérarchie, à une perte de leurs primes et probablement à une perte de leur travail. Le slack permet donc de se protéger contre un tel risque. Cependant, lorsque les managers peuvent participer à la fixation de leurs objectifs budgétaires, ils les acceptent plus volontiers et s'efforcent plus activement de les atteindre (Besson et al, 2004). Ils auraient donc moins besoin du slack budgétaire. En revanche les gestionnaires réagissent favorablement à une

combinaison compatible d’une forte pression budgétaire et une forte participation budgétaire car la participation à l’élaboration du budget permet aux subordonnés d'influencer le niveau

de leurs objectifs budgétaires (Brownell, 1982). Brownell (1982) montre ainsi que la participation budgétaire joue le rôle modérateur entre la pression budgétaire et ses conséquences.

En résumé, l'effet de la pression budgétaire sur la propension à créer de slack est susceptible d'être différente selon le niveau de participation au processus budgétaire. Ceci suggère une interaction entre la participation budgétaire et la pression budgétaire qui pourrait affecter la propension à créer du slack budgétaire. Par conséquent, nous formalisons l’hypothèse

suivante :

H21. L’interaction entre la participation au processus budgétaire et la pression budgétaire

a un effet négatif sur la propension à créer de slack budgétaire.

Etant donné que les niveaux de la participation budgétaire et de l’importance accordée à l’utilisation des données budgétaire pour l’évaluation de la performance sont plus élevés dans les pays du Maghreb qu’en France, nous pouvons donc formuler l’hypothèse suivante :

H22. L’effet de l’interaction entre pression budgétaire et participation budgétaire sur la

propension à créer du slack budgétaire est plus fort chez les maghrébins que chez les français.

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Figure (5) : Effet de l’interaction entre la participation et la pression sur la propension

au slack budgétaire modéré par la culture nationale