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La pression budgétaire (RAPM) et la culture nationale

CHAPITRE 2 : CULTURE NATIONALE ET CONTROLE GESTON DANS LES

3. LE MODELE DE LA RECHERCHE

3.2. Les hypothèses de recherche

3.2.3. La pression budgétaire (RAPM) et la culture nationale

La recherche sur l’utilisation des données budgétaires pour l’évaluation de la performance

(Reliance on accounting performance measures (RAPM) ou encore Budget Emphasis, traduit

en français sous le terme de « pression budgétaire » (Naro, 1998) a fait l’objet de revues de

littérature (Langevin et Naro, 2003 ; Otley et Fakiolas, 2000 ; Hartmann, 2000 ; Briers et Hirst, 1990 ; Georgescu et Naro, 2010 ; Georgescu et Commeiras, 2011) sur le plan théorique mais aussi méthodologique.

Le programme de recherche RAPM a été lancé en 1972 par une étude empirique d’Anthony

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coût d’une grande entreprise américaine. La recherche, manifestant clairement un penchant

behavioriste, visait à dégager des styles d’évaluation de la performance plus ou moins

focalisés sur les budgets et les mesures comptables de la performance, et d’étudier la relation entre ces styles d’évaluation et la tension au travail, les relations avec le supérieur hiérarchique, les relations avec les pairs et la manipulation des données comptables. L’auteur

a montré dans son étude que le respect du budget, comme critère essentiel pour évaluer les performances d'un manager, aboutissait à des comportements dysfonctionnels et générait des tensions dans les relations au travail (Besson et al, 2004). D’autres auteurs ont également

utilisé et exploré le concept de la pression en expliquant les causes et surtout les conséquences en termes de dysfonctionnements (Argyris, 1952, Brownell, 1982a ; Hirst, 1987 ; Dunk, 1989, 1992, 1993a ; Savall et Zardet, 1992 ; Naro, 1998 ; Besson, 2005, Georgescu, 2010). Cependant, Otley (1978), en tentant de reprendre les études de Hopwood (1972),

montre que les managers qui s’appuient sur un budget strict comme mode de contrôle ont plus de chance d’atteindre leurs objectifs. Par conséquent, un fort degré de pression budgétaire

serait associé positivement avec les performances individuelles. Un courant de recherche s’est alors ouvert pour étudier l’aspect contradictoire de ces résultats. Par la suite, l'hypothèse la plus validée dans la littérature a été celle suivant laquelle la pression budgétaire a des effets négatives sur les comportements (Besson et al 2004, Prudence, 2009).Ainsi, les conséquences les plus courantes sont la création de slack), les manipulations comptables et l’orientation des

actions sur le court terme (dit « courtermisme »). Par ailleurs, plusieurs études observent que,

accompagné d’un management participatif, le style RAPM est corrélé positivement à la performance (Brownell, 1982a, 1983 ; Brownell et Dunk, 1991 ; Cherrington et Cherrington, 1973 ; Dunk 1996), même si des résultats opposés sont également enregistrés (Aranya, 1990 ; Dunk, 1989) (Langevin et Naro, 2003).

Harrison (1993, p. 319) le définit comme « l’accent mis par les supérieurs sur les critères de

performance quantitatifs comptables et financiers et qui sont prédéfinis en tant qu’objectifs

budgétaires ». Ou comme « l’intérêt et l’importance accordés par le manager à l’utilisation

des données budgétaires pour l’évaluation de la performance » (Harrison, 1993 : 451). En effet, le système budgétaire a souvent été défini comme une démarche volontariste au travers de laquelle les dirigeants demandent aux responsables opérationnels de se fixer eux-mêmes des objectifs (Dupuy, Rolland, 1991).

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En outre, la traduction de « pression budgétaire » (Naro, 1998) peut sous entendre, au sens

littéral une contrainte, une influence exercée sur quelqu’un. «La pression budgétaire, entendu

dans ce sens, pourrait être alors un fort accent sur l’atteinte des objectifs budgétaire, ce qui

semblerait se rapprocher du concept de « budget emphasis ». Par conséquent la traduction française du concept semble ajouter une ambigüité, voire un degré de complexité

supplémentaire dans sa compréhension » (Georgescu et Naro, 2010, P.4). De ce fait, certaines

études se concentrent sur les objectifs budgétaires fixés en terme quantitatif (Hirst, 1987 ;

Harrison, 1993) tandis que d’autres s’intéressent aux modalités d’utilisation du budget comme

un outil de contrôle (Fisher, 1995) (Georgescu et Naro, 2010).

En revanche, Hartman (1998) souligne l’importance d’étudier les effets de la culture nationale sur la pression budgétaire (RAPM). Quant à lui, l’appréciation des employés

d’utiliser les données budgétaires pour évaluer leur performance varient d’un pays à l’autre.

Cependant, les études qui se sont penchée sur ce sujet sont très rares (Harisson, 1992, 1993, Van der sted, 2001).

En fait, dans les entreprises individualistes, les employés ont tendance à se préoccuper de la réussite personnelle, les droits individuels et l'indépendance (Devine et al, 2000). Par conséquent, les subordonnés dans ces sociétés sont susceptibles de réagir défavorablement à un style d’évaluation basé sur l’utilisation des données budgétaires RAPM car ils considèrent

la comparaison entre les individus selon des critères d’évaluation basée sur le respect du

budget (budget emphasis) est incompatible avec le principe de l'unicité des individus dans ces sociétés (Harrison, 1993). En effet, dans ces société, une telle méthode d'évaluation impose la normalisation sur les individus ce qui peut nier le droit de l'individu à une évaluation spécifique et réelle de sa performance (Hosen et al., 2011).

En ce qui concerne l’aversion à l’incertitude, les individus dans les cultures caractérisées par

une incertitude élevée ne réagissent peut-être pas favorablement à la rémunération liée à la réalisation des objectifs budgétaires car cela leur fait supporter plus de risques, surtout lorsque les primes sont très discrétionnaire, plutôt que d'être basé sur une formule (Van der

Sted, 2001). Dans une situation d’incertitude, l’évaluation budgétaire n’est pas appropriée et n’est donc pas utilisée par les managers (qui ont un comportement rationnel) (Hartmann, 2000 : 471).

Puisque les niveaux de l’individualisme et de contrôle de l’incertitude sont plus élevés en France que dans les pays du Maghreb, nous proposons donc les hypothèses suivantes:

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H11. La culture française a tendance à accorder moins d’importance à l’utilisation des données budgétaires pour l’évaluation de leur performance que la culture maghrébine ;

H12. L’individualisme a un effet négatif sur l’importance accordée des employées à l’utilisation des données budgétaire pour l’évaluation de la performance;

H13. L’effet de l’individualisme sur la pression budgétaire est plus fort chez les français que chez les maghrébins ;

H14. Le contrôle de l’incertitude a un effet négatif sur l’importance accordée des

employées à l’utilisation des données budgétaire pour l’évaluation de la

performance ;

H15. L’effet du contrôle de l’incertitude sur la pression budgétaire est plus fort chez les français que chez les maghrébins.