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Programme de mise à niveau du tissu industriel en Tunisie

Chapitre 2: L’activité des entreprises

3. Programme de mise à niveau du tissu industriel en Tunisie

La stratégie de mise à niveau industrielle est devenue une nécessité pour la Tunisie afin de s’adapter aux exigences imposées suite à la mise en place d’une zone de libre échange avec l’UE et à l’obligation de se conformer aux dispositions de l’OMC. En effet, l’intensification de la concurrence dans le contexte de la mondialisation était de nature à rendre obligatoire, pour des raisons de survie une restructuration de l’entreprise sur le plan organisationnel et managérial.

Cette mise à niveau nécessite des fonds importants et des mesures d’accompagnement. Outre la contrainte de financement de cette impérative modernisation / restructuration d ‘une grande partie du tissu industriel, les pouvoirs publics doivent prendre des mesures pour faciliter sa mise en place et le suivi de ce vaste programme de restructuration.

Avant l’initiation du PMN, l’entreprise tunisienne souffrait d’insuffisances profondes l’empêchant d’appréhender les mutations de son environnement et montrait divers aspects de non compétitivité à savoir :

 95 % des PME avaient une structure familiale ;  Un mode de management intuitif et centralisé ;

 Une sous-capitalisation caractérisait la majorité des entreprises ;  Un sur endettement bancaire ;

 Un taux faible d’encadrement : 1 ingénieur pour 1000 habitants, ce taux est plus faible qu’au Maroc.

Le programme de mise à niveau (PMN) a été lancé en 1996 pour accompagner la modernisation des entreprises. Il accorde des facilités pour faire établir un diagnostic du niveau de compétitivité de l’entreprise.

Le programme de mise à niveau est destiné aux entreprises en activité depuis au moins deux ans, ayant un potentiel de croissance, ne connaissant pas des difficultés économiques et relevant des secteurs industriels et des services liés à l’entreprise. Entamé en 1996, c’est un programme qui a pour objectif d’accroître la compétitivité des entreprises industrielles. Pour les grandes entreprises, il est actuellement le seul programme auquel elles sont éligibles (à l’exception des cas où elles réalisent un investissement régional ou technologique). En effet, c’est le seul instrument en Tunisie qui soutient l’investissement des entreprises sans conditions liées directement au code des incitations aux investissements. A ce titre, il 86

complète le code qui a ignoré les entreprises de grande taille (c’est-à-dire, les entreprises qui réalisent des investissements supérieurs à 3 MD).

Dans un souci de coordination des actions sélectionnées dans le cadre de la mise à niveau, la gestion du programme a été confiée au Ministère de l’Industrie et de l’Energie par l’intermédiaire du Bureau de Mise à Niveau (BMN), auquel revient la responsabilité de tracer la stratégie, de coordonner et de superviser toutes les actions du programme.

Fin 1998, 331 entreprises avaient obtenu des primes s’élevant à 111 MDT pour un montant d’investissement de 847 MDT, réparti sur 3 ans. Ces entreprises sont issues pour un tiers des industries agroalimentaires et pour un cinquième du textile, habillement, cuir et chaussure. En outre, 431 autres entreprises ont présenté un dossier. Le nombre d’entreprises passées par le PMN est donc relativement faible comparé à un total de 4000 entreprises industrielles. Il peut s’expliquer par plusieurs raisons. Premièrement, ce programme s’adresse par définition aux entreprises ayant une chance de survivre à la concurrence. Deuxièmement, certains opérateurs attendent encore avant d’agir, parce qu’ils envisagent un changement d’activité ou se sentent peu concernés car ils sont dans un secteur temporairement protégé. En réponse à cet attentisme, les organismes gouvernementaux envisagent un ciblage par secteurs prioritaires (confection, électronique, cuir et chaussures).

Une enquête réalisée en 2002 par le BMN auprès de 1103 entreprises dont le programme avait été approuvé par le comité de pilotage, montre que :

 67 % d’entre elles avaient diversifié leur production et 78 % avaient mis au point de nouvelles gammes de produit tout en améliorant leur processus de fabrication ;

 Près de 82 % des entreprises avaient amélioré leur taux d’utilisation des équipements ;

 75 % des entreprises avaient adopté un programme qualité et de certification ;  69 % des entreprises avaient entamé une restructuration de leur orientation

commerciale et axé leurs efforts sur la mise au point d’une stratégie de développement des exportations.

Au cours de la période 1997-2001, on constate que le chiffre d’affaire des entreprises acceptées dans le cadre du plan de mise à niveau a enregistré une augmentation annuelle de 11 %, contre 8,5 % pour l’ensemble du secteur manufacturier. Les entreprises affichent

également des performances à l’exportation assez remarquables. Le taux de croissance annuel du chiffre d’affaire à l’exportation a atteint 16 %, alors que celui du secteur manufacturier s’est accru de 13 %. Ce sont les entreprises du secteur cuir et chaussure qui ont réalisé la meilleure performance suivies par les firmes des industries chimiques et les unités opérant dans l’industrie du textile-habillement. Quant à l’évolution de l’emploi dans les entreprises adhérentes est marquée par une augmentation des effectifs au rythme annuel de 4 %.

Les résultats de cette enquête montrent aussi que les entreprises s’appuyant sur leur expérience reste focalisées sur le marché local et occulte la dimension internationale.

Il est à signaler également que les entreprises de grandes tailles s’en sortent le mieux en matière d’exécution des plans d’investissement. Et qu’il existe des insuffisances et des défaillances au niveau de l’encadrement des entreprises dans leur démarche de mise à niveau et de l’environnement qui caractérise la mise en application du PMN.

Tableau 24 : Evolution des approbations des dossiers de mise à niveau par secteur de 1996 à 2003

Secteurs 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 200318

IAA19 Nombre de dossiers 14 22 34 32 38 26 21 28

Invest en MDT 35 102 117 99 91 79 29 37

Part du nbre de dossiers en %

23 17 20 13 14 11 9 16

ICC20 Nombre de dossiers 3 11 17 40 9 11 10 11

Invest en MDT 17 6 11 20 12 14 5 6

Part du nbre de dossiers en %

5 9 10 17 3 5 4 6

ICH21 Nombre de dossiers 4 16 12 13 13 5 14 7

Invest en MDT 24 26 51 18 33 6 24 6 Part du nbre de dossiers en % 7 13 7 5 5 2 6 4 ID22 Nombre de dossiers 5 22 31 30 42 42 31 28 Invest en MDT 12 48 60 25 43 67 28 74 Part du nbre de dossiers en % 8 17 19 13 16 17 13 16

IMCCV23 Nombre de dossiers 4 6 11 18 20 15 14 3

Invest en MDT 13 7 48 54 141 187 30 9

Part du nbre de dossiers en %

7 5 7 8 8 6 6 2

IME24 Nombre de dossiers 8 18 19 16 39 34 22 26

Invest en MDT 24 35 59 32 47 73 57 18

Part du nbre de

dossiers en % 13 14 11 7 15 14 9 15

ITH25 Nombre de dossiers 23 33 43 90 102 109 135 70

Invest en MDT 65 37 43 51 79 63 70 42 Part du nbre de dossiers en % 38 26 26 38 39 45 55 40 Total Nombre de dossiers 61 128 167 239 263 242 247 173 Invest en MDT 189 262 388 298 446 490 243 192

Sources: rapport de BMN de juillet 2003

On note que la part des entreprises du secteur textile habillement dans le total des entreprises qui ont bénéficié du PMN est la plus importante avoisinant les 50 % sur les dernières années, suivi du secteur agroalimentaire puis de l’industrie mécanique et électrique. Ces trois secteurs bénéficient à eux seuls, en moyenne de 65 % du total des investissements.

18 Situation fin juillet 2003. 19 IAA : industrie agroalimentaire.

20 ICC : industrie du cuir et de la chaussure 21 ICH : industrie chimique

22 ID : industries diverses

23 IMCCV : Industrie des matériaux de construction céramique et verre. 24 IME : industrie mécanique et électrique.

Ceci, atteste de l’importance de ces secteurs dans le tissu industriel et de la nécessité de les restructurer.

Quant aux investissements, c’est le secteur IMCCV qui a bénéficié de la plus grande part durant les années 2000-2001.

Le rapport coût efficacité du PMN demeure mitigé et ce pour deux raisons principales :

• Le PMN est affecté par de faibles ratios de décaissement ; au cours de la période 1996- 2002, le PMN a approuvé un nombre total de 1350 demandes d’assistance tandis que le total de l’investissement engagé et des subventions approuvées a atteint respectivement 2323MD et 300MD. Seuls 92 MD de subventions ont été décaissés jusqu’à présent.

• L’impact du PMN sur l’investissement et les emplois additionnels est ambigu. Les entreprises participant au programme ont enregistré une performance quelque peu supérieure à l’ensemble du secteur manufacturier en termes de ventes et d’exportations, et marginalement supérieure en termes d’emplois. Ainsi les ventes des entreprises participantes ont augmenté à un taux annuel de 11% contre un taux moyen de croissance de 8.3 % pour l’ensemble du secteur manufacturier. L’emploi a augmenté de 4% par an contre 2.9 % pour l’ensemble du secteur. Ces résultats sont à relativiser et ne relèvent pas que de l’impact du programme, il ne faut pas perdre de vue que les entreprises participantes, répondant aux critères du programme enregistrent déjà des performances supérieures à la moyenne.

Un programme de mise à niveau est par définition, un processus continu qui vise à préparer et à adapter l’entreprise et son environnement aux exigences du libre échange. Pour le cas de la Tunisie, ce programme est parvenu à initier une prise de conscience des chefs d’entreprise de la nécessité à se moderniser face à un processus de démantèlement irrévocable. Les entreprises participantes au PMN ont pu d’une part améliorer leurs processus de production, au moyen d’investissement dans de nouveaux équipements, et d’autre part conquérir de nouveaux marchés.

Toutefois ce programme présente quelques faiblesses. En effet, les entreprises adhérentes ont déploré la bureaucratie pesante associée au programme, et le fait qu’il profite le plus aux grosses entreprises. Mais depuis les années 2000, les PME y adhèrent de plus en 90

plus. On note une évolution dans les modes de gestion des entreprises participantes au PMN et une amélioration de leur compétitivité, ce qui facilitera l’adaptation à un contexte économique plus ouvert vers l’extérieur.

Le Gouvernement a lancé en 2004 un programme plus ambitieux que le PMN appelé le Programme de modernisation industrielle ou PMI. Ce programme, conçu en coopération avec l’UE, vise à fournir une assistance technique pour appuyer la création d’entreprises, l’innovation et le renforcement de la qualité.

tunisiennes industrielles face à

l’ouverture

Chapitre 3: Ouverture et Productivité : les