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Profil socio‐économique des femmes incarcérées : la précarité comme point commun

a. Revue scientifique de l’enfermement des pauvres à travers le monde.

« La prison est un lieu où l’on envoie plus aisément les plus démunis (en travail, en domicile, en famille, en argent…) » (Combessie 2004 : 39). Cette assertion qui dessine le profil sociologique du public des prisons françaises résume une partie des travaux de Philippe Combessie qui a particulièrement analysé comment la situation de pauvreté avant l’incarcération influait sur la possibilité de l’expérience carcérale en cas de délit (Combessie 2000). Dans son ouvrage Les prisons de la misère, Loïc Wacquant a quant à lui démontré les liens qui existent entre l’enfermement des pauvres et l’expansion des politiques néolibérales (Wacquant 1999). En Europe et dans les sociétés dites développées, la pénalisation de la pauvreté sert à gérer les effets négatifs des politiques néolibérales au plus bas échelon de la structure sociale. Le renforcement de l’État pénal y est incarné par le duo que forment la police et le système judiciaire et pénitentiaire. Le modèle pénal néolibéral décrit par Wacquant s’applique par exemple en Russie où Iavchunovskaia et Stepanova ont démontré qu’une majorité des femmes incarcérées pour trafic de drogue étaient au chômage avant leur incarcération et sont impliquées dans le trafic de drogue alors qu’elles n’en ont jamais consommé (Iavchunovskaia and Stepanova 2009). Dans le cas du Portugal, Cunha dénonce des « procédures de masse de contrôle du crime » et du trafic de drogue qui visent particulièrement « les quartiers urbains pauvres, qui sont devenus les cibles collectives de surveillance et de rafles de routine sans distinction », ce qui rend la géographie de l’enfermement hautement prédictible (Cunha 2005). En Inde en revanche, seulement 6 % des femmes incarcérées le sont pour trafic de drogue et une majorité l’est pour meurtre. Or, leur profil social, décrit dans l’étude réalisée par Cherukuri et alii, apparaît semblable à celui que l’on retrouve dans les pays du Nord. Sous-payées ou liées au secteur du travail informel, les femmes indiennes appartiennent aux castes les plus démunies et pour lesquelles les opportunités de travail et de revenus sont les plus faibles. Les auteures concluent que si les dynamiques microsociales familiales et culturelles représentent un poids certain dans la trajectoire de ces femmes, il existe également « d’évidentes structures macros, comme

l’économie, qui influent sur le contexte dans lequel les femmes commettent le crime » (Cherukuri, et al. 2009).

À partir de ces analyses, et après avoir démontré dans le chapitre précédent la dimension essentiellement économique du trafic de cocaïne, il est intéressant de remarquer que de nombreuses études menées aujourd’hui sur les prisons à travers le monde, au Nord et au Sud, se centrent sur les personnes incarcérées pour trafic de drogue. On peut donc émettre l’hypothèse que l’entrée des acteurs dans les sphères de la délinquance et particulièrement dans le trafic de drogue résulte directement d’une situation économique et sociale précaire voire vulnérable. Comme l’a décrit Robin Cavagnoud dans le cas des adolescentes prostituées (Cavagnoud 2009), la prise de conscience des gains envisageables constitue un des premiers motifs d’entrée dans une activité de survie.

b. Femmes détenues : entre désaffiliation sociale et exclusion.

Pauvreté et précarité, exclusion et marginalisation : définitions et état des lieux.

Reprenant la définition établie par l’ONU, l’INEI fixe la pauvreté à un « niveau de dépense inférieur au coût du panier de biens de consommation alimentaires et non alimentaires » (INEI 2011b : 35), c’est-à-dire un seuil au-dessous duquel il est impossible de se procurer un « panier de biens » indispensables à la survie et donc « socialement acceptable » (Herrera 2001 : 15). Sur l’ensemble du territoire péruvien, d’après l’INEI, la pauvreté affectait 31,3 % de la population en 2010, dont 9,8 % sont considérés comme très pauvres, avec de fortes différences selon les régions et l’urbanisation. Pour la même année, la pauvreté touchait 49,1 % de la population andine, 37,3 % de la population amazonienne et 17,7 % de la population côtière. De même, 19,1 % de la population urbaine vivait en situation de pauvreté, contre 54,2 % pour la population rurale. L’agglomération de Lima connaissait un taux de pauvreté de 12,8 % à la même date. Or, comme le souligne l’INEI, si ce taux semble moindre, il est très important de considérer l’incidence de ce pourcentage à échelle nationale, car la capitale abrite un tiers de la population du pays (INEI 2011b).

Graphique nº4.1. : Pauvreté selon l’aire géographique, pour l’année 2010.

Source : (INEI 2011b).

Les termes de pauvreté et de précarité constituent un élément récurrent dans les analyses sociodémographiques péruviennes. Cavagnoud rappelle que ces deux concepts « trouvent un dénominateur commun dans la notion de nécessité »54 (Cavagnoud 2011) qui se traduit par la recherche de diverses stratégies de la part des acteurs, dont certaines réfèrent directement à la survie. Reprenant le concept de pauvreté relative de Oscar Lewis, Cavagnoud souligne que

« la pauvreté ne représente pas uniquement des limitations matérielles […], mais également un ensemble de valeurs, d’attitudes et de formes de conduite qui, structurées entre elles, constituent un style de vie qui oriente les adultes et les enfants vers des circonstances de privation et de recherche de stratégies, […] ce qui transforme la rue en un espace de référence pour un grand nombre d’acteurs à la recherche de solutions face à la précarité qui domine leur vie quotidienne » (Cavagnoud 2011 : 87).

Parallèlement, dans un de ses ouvrages sur le sujet, le sociologue Serge Paugam dresse une typologie de la pauvreté. Parmi les trois types qu’il définit, la pauvreté intégrée constitue celui qui conviendrait le mieux à l’étude de la pauvreté au Pérou, dans le sens où elle définit « la condition sociale d’une grande partie de la population », et que le débat sur la question

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Les citations de l’ouvrage de R. Cavagnoud Entre la escuela y la supervivencia, Trabajo

adolescente y dinámicas familiares en Lima, publié en 2011, sont extraites de la publication de ses

s’organise « autour de la question du développement économique, social et culturel » (Paugam 2005 : 89). À travers les définitions des concepts de pauvreté relative et de pauvreté intégrée, ce sont deux dimensions de la pauvreté, matérielle et culturelle, qui semblent les plus pertinentes pour mon analyse et m’intéressent donc particulièrement. Le risque majeur lié à la pauvreté, dans sa dimension matérielle, réside dans l’exclusion, telle que l’a définie Moreno, à savoir qu’en Amérique Latine, on ne peut plus parler de marginalisation, mais d’un « état plus radicalement séparateur » en termes de conditions de vie (Moreno 2003 : 164). Au regard du public cible de la présente étude, il apparaît nécessaire de se demander si la situation de pauvreté amène systématiquement les acteurs à une situation d’exclusion.

Si l’on considère, comme l’a fait Xiberras, que l’exclusion s’étend non seulement aux champs physique, géographique, matériel et spirituel, et qu’elle peut être revendiquée, subie ou imposée, la définition du concept d’exclusion pose un problème étymologique, notamment à cause de l’ampleur du champ à délimiter (Xiberras 1996). Je m’intéresserai particulièrement ici à la dimension sociale de l’exclusion et à son lien avec des situations de pauvreté. Paugam définit l’exclusion relative à la pauvreté intégrée « comme la phase ultime d’un processus de disqualification sociale » (Paugam 2005 : 111). L’exclusion sociale, souvent liée à l’origine ethnique, la classe, la maladie ou encore l’âge, suppose une rupture consommée entre l’individu et les sphères de socialisation essentielles des sociétés actuelles que sont l’éducation, le marché du travail et la santé. J’entends donc l’exclusion au sens de Castel, soit comme un ensemble de « situations de non intégration sociale, pensées comme restant en dehors du développement d’ensemble des sociétés modernes » (Castel 1994 : 18). Or, l’état de pauvreté déclarée par les systèmes de calculs statistiques nationaux et internationaux implique-t-il systématiquement un risque d’exclusion des acteurs concernés ? L’analyse des profils socio-économiques des détenues de Chorrillos I montre que de nombreuses femmes se trouvaient en situation de pauvreté économique avant leur incarcération. Or, cet état n’impliquait pas forcément une exclusion sociale complète, mais certainement partielle. L’exclusion partielle qui résulte notamment de la pauvreté matérielle et culturelle – entendue, comme l’a souligné Cavagnoud, comme un ensemble de valeurs qui oriente les individus vers certaines stratégies - se traduit par une situation permanente de précarité des individus, dans le sens où leur position socio-économique implique des facteurs d’instabilité et de risque, les situant en permanence dans une position à la limite entre l’entrée et la sortie de la pauvreté. La précarité reflète ainsi la présence permanente de facteurs de vulnérabilité dans la vie des individus et « la pauvreté est donc perçue comme une menace constante sur le[ur]s vies […] » (Cavagnoud 2011 : 89).

Au concept d’exclusion qui apparaît trop manichéen, je préférerai donc ceux de vulnérabilité et de désaffiliation tel que les a théorisés Robert Castel (Castel 1994; Castel 1995). Ce sociologue distingue la vulnérabilité et la désaffiliation comme deux « zones » d’intersection des domaines du travail et de l’insertion relationnelle. À partir de ces deux domaines, la zone de vulnérabilité se définit par un travail précaire et la fragilité des soutiens relationnels tandis que la zone de désaffiliation marque « l’ampleur du double décrochage : absence de travail et isolement relationnel » (Castel 1994 : 13). Ces zones ne sont pas figées et la vulnérabilité est celle où dominent l’instabilité et la précarité, « d’où le risque de basculement dans la […] zone (de marginalité ou désaffiliation), qui apparaît comme une fin

de parcours » (Castel 1994 : 16). C’est notamment grâce à cette idée de parcours et donc de

processus, parce que l’exclusion suppose un état immobile tandis que la marginalité un état changeant, qu’il semble pertinent d’utiliser cette base théorique pour analyser les données recueillies à partir des entretiens de terrain effectués à la prison Chorrillos I. Plutôt que de parler d’une exclusion sociale due à la pauvreté, je parlerai donc plutôt de nouvelles trajectoires dessinées à partir de situations de vulnérabilité ou de désaffiliation (Castel 1995).

Vulnérabilité et désaffiliation des femmes avant leur détention.

Le profil social des détenues rencontrées à Chorrillos I révèle une large majorité de femmes en situation de vulnérabilité voire de désaffiliation sociale avant leur incarcération. Le tableau nº4.1. résume la situation de travail et de rémunération des 34 détenues rencontrées en 2011, au regard de leur situation maritale et familiale. La dernière colonne de ce tableau contient des remarques sur leurs parcours de vie et les facteurs de vulnérabilité qu’elles ont connus. Les données recueillies permettent d’effectuer une analyse à la fois quantitative et qualitative de leur situation avant incarcération.

53 % des femmes interrogées sont des Péruviennes et 47 % sont étrangères. Parmi les Péruviennes, 33 % résidaient au Callao tandis que 67 % résidaient à Lima. Ces femmes sont âgées de 20 à 65 ans, avec une moyenne d’âge de 37 ans. 38 % ont entre 20 et 30 ans, 21 % ont entre 31 et 40 ans, 26 % ont entre 41 et 50 ans et 15 % sont âgées de 51 ans et plus. Le nombre d’enfant par femme connaît de fortes variations selon les personnes. Sur les 17 % de femmes qui ont déclaré ne pas avoir d’enfant, la majorité est âgée de moins de 25 ans. Les mères ont entre 1 et 9 enfants, avec une moyenne de 1,7 enfants par femme et 64 % de mères célibataires. Enfin, en termes d’emploi, on remarque que 20 % des femmes occupaient un emploi fixe, 50 % étaient en situation de sous-emploi et 30 % étaient sans emploi.

L’étude de la rémunération se révèle délicate à cause des origines géographiques diverses, des niveaux de vie et de la variation du prix des biens de consommation selon les continents et les pays. Cette variété de cas ne permet pas d’effectuer une moyenne générale qui ait un sens. Je conserverai donc pour les calculs qui suivent uniquement les données concernant les résidentes du pays sur lequel porte mon étude. Les détenues péruviennes connaissaient des niveaux de rémunération très disparates avant leur incarcération. Elles percevaient des salaires compris entre 0 et S./2 600, avec un salaire médian de S./475, situé par conséquent sous le salaire minimum, fixé à S./750.

En termes qualitatifs, il est intéressant de relever les nombreux éléments qui ont contribué, au cours de leur vie, à mener ces femmes à une situation de vulnérabilité ou de désaffiliation. Parmi ces divers éléments ressortent la séparation des parents et les conditions de croissance (personne qui les élève, conditions pauvres et/ou violentes du foyer, emploi parallèle à l’éducation), les situations de migration, l’âge du premier enfant – qui se situe à 17 ans en moyenne, l’âge auquel est occupé le premier emploi, la perte d’emploi ou de rentabilité d’un commerce, l’état de santé physique et moral ainsi que l’expérience carcérale.

Tableau nº4.1. : Situation de travail, salariale et familiale des détenues avant leur incarcération.

Détenue Age Lieu de résidence Occupe un emploi fixe En situation de sous-emploi Sans emploi Rémunération mensuelle estimée (en nuevos soles) Nombre d’enfants (dont à charge) Mère célibataire Remarques D1 28 Afrique du Sud X 1 600 2 X

Originaire d’une zone rurale. Séparée du père de ses enfants, ce dernier les a gardés avec lui sans son accord pendant

plusieurs mois sans lui laisser de droit de visite. Son combat pour récupérer ses enfants lui coûtait très cher et elle n’avait pas les moyens d’assumer ces dépenses.

D2 65 Lima

Cercado X 300 7 (0) X

Quitte l’école à 16 ans et a toujours travaillé depuis. Première incarcération pour trafic de drogue à 35 ans.

D3 38 Amsterdam,

Pays-Bas X 3 200 0

A perdu son emploi de laborantine suite à une dépression causée par une rupture conjugale, et ce quelques mois avant de faire le voyage au Pérou. Son demi-frère, qui se trouve incarcéré aux Pays-Bas, lui a recommandé d’héberger un ami, ex-détenu. C’est avec cet homme qu’elle a effectué le voyage au Pérou.

reprises pour vol. D5 27 Latvia, Lettonie X 2 000 1 X D6 55 Mpumalanga , Afrique du Sud X 0 2 X D7 44 Saint Ann, Jamaïque X 500 3 (1)

Son dernier enfant, celui dont elle a la charge, est né en détention.

D8 43 Guadalajara,

Mexique X 230 3 X

D9 47 Rimac, Lima X 1 000 3 X

Quatrième incarcération depuis l’âge de 38 ans, une première fois pour trafic de drogue, à la suite de quoi elle est recherchée constamment, car elle ne se présente pas aux contrôles alors qu’elle est soumise au régime de semi-liberté.

D10 32 Chaclacayo,

Lima X 400 -

Vivait chez ses parents avec ses 7 frères et sœurs. Elle a entrepris des études plusieurs fois sans jamais en terminer aucune.

D11 59 Chosica, Lima X 750 9(1) Ana Marín 39 Barcelone, Espagne X 4 800 1 X

Partageait un appartement avec une amie et y vivait avec son fils. Elle a perdu son emploi suite à la crise économique de 2008 et était consommatrice régulière de

cocaïne. Carmen F. 53 Miraflores, Lima X 2 000 4 Carmen Rosa 43 Ventanilla, Lima X 70 4 (3) X

Travaille depuis l’âge de 8 ans comme femme de ménage ou en lavant du linge.

Carmen

S. 38

La Victoria,

Lima X 1 300 2 X

Sa tante réside en Allemagne et l’y héberge entre 2001 et 2004. Son deuxième séjour en Europe est interrompu par une grossesse à cause de laquelle elle désire rentrer au Pérou.

Deidre 24 Toronto,

Canada X Variable 2 X

Interrompt ses études à la naissance de son premier enfant, à l’âge de 17 ans, puis vit de mannequinat occasionnel et des services sociaux. Son frère est incarcéré aux Etats-Unis et elle connaît de longue date une de ses codétenues de Chorrillos.

Première incarcération à 21 ans pour agression. Elisabeth 23 Sans domicile, Lima X 0 1

Analphabète, sans domicile fixe, elle vivait dans la rue avec un groupe d’environ 20 hommes. Mère à l’âge de 11 ans. Elle vivait de petit trafic de pâte base de cocaïne.

Elisabeth

R.D. 26 Gatteo, Italie X 3 000 2

Elevée en République

elle migre en Europe à l’âge de 15 ans.

Francesca 43 Amsterdam,

Pays-Bas X 6 400 2 X

Elle gagnait sa vie en lavant des voitures et en se prostituant. Consommatrice dépendante de drogues, elle avait fait déjà deux voyages comme mule avant de venir au Pérou. Ceux-ci lui servaient à payer ses dettes vis-à-vis des revendeurs de drogue et à s’assurer une consommation personnelle.

Janet 20 Pacheco,

Argentine X 1 800 0

Née en Argentine de père péruvien, elle y est élevée par une mère célibataire adoptive. A l’âge de 8 ans, elle migre au Pérou. A l’âge de 11 ans, elle commence à consommer et vendre de la drogue, puis elle fait de courtes études de stylisme et exerce cette profession. Son père, qu’elle retrouve au Pérou, consommait et vendait de la drogue et l’envoyait, en tant que mineure, faire la mule dans la prison de Lurigancho. Avant son incarcération, elle vivait chez sa cousine.

Karla 29 Callao X 800 3 X

Migre à Lima à l’âge de 8 ans. Elle a son premier enfant à 16 ans.

Karla

Pierina 20 Callao X 450 0

Vivait dans un foyer qui compte environ 30 personnes, dont ses parents, ses 8 frères et sœurs, ses oncles, neveux et cousins.

Kelito 22 San Martin de Porres, Lima X 200 - Laura 65 Callao X 2 500 4 (0) Originaire de Iquitos

(Amazonie), elle migre à Lima à l’âge de 3 ans. Elle tenait un petit restaurant chez elle.

Lourdes 41 Cercado de

Lima X 0 2

Luz

Melissa 23 Espagne X 5 200 0

Née en République dominicaine puis élevée à New York, depuis l’âge de 10 ans elle n’a cessé de déménager, entre l’Amérique et l’Europe. María del Mar 49 San Sebastián, Espagne X 9 600 2

Propriétaire d’un hôtel-restaurant avec son mari. Ils ressentent les effets de la crise économique de 2008 et perdent tour à tour leur commerce et leur maison. Un de leurs clients les contacte et les envoie au Pérou comme mules. Son mari est incarcéré à Lima.

Marisol 47 Algecira,

Espagne X 8 300 1 (0) X

Suivait un traitement psychiatrique avant l’incarcération.

adoptive. Travaille depuis l’âge de 12 ans. Premier enfant à 17 ans. Première incarcération pour vol à 20 ans. Elle vendait des plats cuisinés devant chez elle.

Rubí 32 San Miguel,

Lima X 2 200 3 X

Née au Pérou, elle migre une première fois à l’âge de 6 ans au Brésil, puis aux Etats-Unis et enfin en Espagne.

Sandra 21 La Perla,

Callao X 1 000 1 X

Vit du vol de sacs à main et de téléphones portables, du trafic de machines à sous et de cartes bancaires.

Sandra G. 34 Callao X 2 600 3

Née au Pérou, elle migre aux Etats-Unis à l’âge de 21 ans et a deux enfants qui y vivent toujours. Son dernier enfant, d’un autre père, est né en détention.

Silvana 26 Bruxelles,

Belgique X 0 1 X

Originaire d’une petite ville de Bulgarie, elle est arrêtée en Grèce puis déportée pour situation migratoire illégale à l’âge de 17 ans. La même année elle migre en Italie et y accouche de son enfant. Elle était

entretenue par son petit-ami. Valmarvi

da 43

Venetto,

Italie X 3 500 3 (0) X Vivait chez son oncle.

c. Situations de nécessité, de l’extérieur à l’intérieur des murs.

De la récurrence de la situation de nécessité dans le discours des femmes incarcérées.

La situation économique extrêmement précaire dans laquelle elles se trouvaient à l’extérieur revient très fréquemment dans le discours des femmes incarcérées à Chorrillos I comme le leitmotiv justifiant leur acte délinquant. Le terme « nécessité », récurrent au cours des entretiens, traduit le dénuement et la privation de biens qu’elles connaissaient avant l’incarcération, souvent aux côtés de leur famille. Carmela vend des sucreries et des produits de toilette dans un des patios de la prison. De cette façon, elle continue d’apporter un soutien économique à son fils hospitalisé. L’état de santé de ce dernier et les frais s’y rapportant seraient la raison principale pour laquelle Carmela a commis un délit :

« Je suis mère, je suis vivante et tant que je serai vivante, je dois soutenir mes enfants, parce que si moi j’ai été amenée à commettre un délit, c’était la nécessité, le désespoir. Parce que ici au Pérou, on te dit VIH et c’est comme qui dirait lépreux. À l’hôpital, ils ne veulent pas le toucher [son fils], ‘achète, achète’, il faut tout acheter, tout est jetable, ils réclament, ils réclament, et c’est bien difficile quand on est mère et père, on ne peut pas, on n’a le soutien économique de personne, y’a pas, en tant que mère célibataire il n’y a