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Une diversité de situations peut s’observer dans les lieux où le risque amiante existe et produit un danger pour les personnes exposées. On peut distinguer deux grandes catégories de lieux significatifs. Les premiers sont les lieux où la présence d’amiante est clairement établie et connue des salariés, ce sont principalement les sites industriels de transformation et d’utilisation massive de l’amiante. Ils se distinguent d’un second type d’activité où l’amiante n’est pas objet direct de transformation mais intervient à titre de protection, comme dans l’industrie chimique, ou parmi les matériaux travaillés, comme dans les chantiers navals ou le bâtiment. Ces derniers secteurs, et en particulier le bâtiment, représentent aujourd’hui les principaux lieux d’exposition puisque ce ne sont plus quelques dizaines de milliers de personnes, mais plusieurs millions de travailleurs qui sont exposés à l’amiante, parfois à des doses élevées, et qui très souvent ne sont que peu ou mal informés.

Une acceptation du risque fortement contrainte

La question du rapport à un danger connu des travailleurs exposés massivement à l’amiante, qui sont majoritairement les ouvriers travaillant dans des usines où l’amiante entre dans la composition des produits en tant que matière première principale, est souvent présentée sous forme d’une alternative simple : les personnes exposées savaient-elles ou non qu’elles couraient un risque, ou, pour le dire autrement, avaient- elles conscience du danger ? Or, raisonner en ces termes laisse deux présupposés dans l’ombre, le premier qu’avoir conscience d’un danger implique automatiquement un retrait, le second que la possibilité de se retirer librement est laissée ouverte aux ouvriers exposés. Présupposés qui relèvent principalement d’une méconnaissance de la situation de domination dans laquelle est maintenu ce groupe social.

En évitant le double écueil justement souligné par Claude Grignon et Jean-Claude

Passeron1

du populisme et du misérabilisme, comprendre les dangers et les risques présents dans les situations de travail ouvrier nécessite, dans un premier temps, de replacer le groupe social ouvrier dans un système social où il occupe une position objectivement dominée.

Contre ceux qui affirmaient il y a déjà longtemps la progressive suppression de l’inégalité entre les classes, il faut souligner que, malgré cent cinquante ans de luttes et de combats, les ouvriers demeurent un groupe social particulièrement dominé dans la société française, notamment dans tous les domaines se rapportant à la vie professionnelle. Même si c’est sans comparaison avec le XIXe siècle, les stigmates des conditions de travail continuent à peser sur le groupe.2

Oublier les effets réels de la position dominée des ouvriers dans l’espace social amène à plaquer des schèmes de perception et d’analyse propres à d’autres catégories sociales. Ce sera le cas des journalistes qui auront à rendre compte a posteriori du

problème. Issus principalement de classes moyennes et supérieures3, une majorité de

1. Claude Grignon, Jean-Claude Passeron Le savant et le populaire. Misérabilisme et populisme en

sociologie et en littérature, Paris, Le Seuil, coll. Hautes études Gallimard-Le Seuil, 1989, 265 p., index.

2. Gérard Noiriel, Les ouvriers dans la société française..., op. cit., p. 245-246.

3. En 1990, presque 90 % des journalistes professionnels ont un niveau d’études secondaires (20,5 %) ou supérieures (68,8 %), seul indicateur quantitatif de position sociale utilisable dans les statistiques de la commission de la carte d’identité des journalistes professionnels, cf. Institut français de presse, Valérie Devillard, Marie-Françoise Lafosse, Christine Leteinturier, Jean-Pierre Marhuenda, Rémy Rieffel, Les

journalistes français en 1990. Radiographie d’une profession, Paris, La Documentation française-SJTI-

CCIJP, 1991, p. 27. L’enquête auprès d’un échantillon plus étroit effectuée dans le cadre de ce même ouvrage confirme que « les journalistes sont majoritairement issus d’un milieu social favorisé », Ibid., p. 26.

journalistes se trouvera incapable de rendre compte de cette situation de domination autrement que dans des termes qui leur sont socialement recevables et compréhensibles, c’est-à-dire en affirmant que les ouvriers, ignorants du danger auquel ils étaient confrontés, ont été floués ou trompés.

Face aux difficultés ultérieures rencontrées par différents acteurs sociaux à rendre compte de cette situation, il a semblé nécessaire d’apporter certains éclairages sur la construction des conditions de vie et de travail face à un danger connu, comme l’est l’amiante pour les ouvriers qui y sont directement exposés. Ils rendent nécessaire la prise en compte du rapport spécifique au travail induit par une situation de forte domination sociale. Elément essentiel à leurs conditions d’existence, le travail revêt, dans ces catégories sociales, une dimension vitale beaucoup plus accusée que dans d’autres espaces sociaux. Si certains acteurs peuvent établir un rapport assez distancié au travail, le groupe social ouvrier reste dans une fondamentale dépendance vis-à-vis de lui.

Le niveau de vie de ses membres, élément essentiel de la définition de leurs conditions d’existence, n’est pas une donnée (« économique ») à partir et autour de quoi s’organiseraient leur culture et leur mode de vie, mais le produit d’un rapport des forces dont leur résistance face au capital (et donc leur culture syndicale et politique) constitue l’un des termes. Si l’on préfère le « choix » de la lutte est ici lui-même une nécessité première, organisateur à ce titre, autant que « l’intériorisation des chances objectives » qui définissent une existence de prolétaire, des modalités de la culture ouvrière.1

Le débat actuel sur une fin annoncée du travail2 ne doit pas mener à oublier les

différences dans le rapport au travail générées par les différences de position sociale. Celles-ci tiennent à un ensemble de facteurs dont le principal est la place relative occupée par le travail et ses conséquences sur l’ensemble des activités sociales, elle- même corrélée à une plus ou moins grande précarité des conditions de vie et d’existence. Si des bouleversements transforment actuellement en profondeur les

1. Jean-Pierre Terrail, Destins ouvriers. La fin d’une classe ?, Paris, Puf, coll. Sociologie d’aujourd’hui, 1990, p. 69.

2. Voir, par exemple, Dominique Méda, Le travail. Une valeur en voie de disparition, Paris, Aubier, 1995, coll. Champs Flammarion, 362 p., ainsi que les différents points de vue développés dans la première partie « La place du travail dans la société » de l’ouvrage collectif : Jacques Kergoat, Josiane Boutet, Henri Jacot, Danièle Linhart, direction, Le monde du travail, Paris, La Découverte-Syros, coll. Textes à l’appui, 1998, p. 11-60, et en particulier les articles : André Gorz, « Le travail fantôme », p. 30- 39, Christophe Dejours, « Centralité ou déclin du travail ? », p. 40-49 et Robert Castel, « Centralité du travail et cohésion sociale », p. 50-60.

équilibres sur lesquels repose la société salariale1, avec la généralisation du chômage de masse en particulier, il reste incontestable qu’un des principaux vecteurs des processus d’assignation d’une position sociale et d’insertion dans l’espace social est encore

aujourd’hui le travail2

. Et ceci est particulièrement vrai pour les catégories sociales les plus dominées. Comme l’écrivent Christophe Dejours et Pascale Molinier, si une démonstration a contrario de la « centralité du travail » devait être recherchée, elle serait

bruyamment manifestée par l’aliénation et la pathologie résultant du chômage qui tend à exclure le sujet de toute une série de médiations avec le collectif et avec la société, le confinant à une marginalité et un isolement délétères.3

Le développement récent du chômage de masse montre en effet le rôle jusqu’aujourd’hui irremplacé du travail dans nos sociétés, rôle d’autant plus important et central que les acteurs ont moins de ressources alternatives à leur disposition. Il faut en effet rappeler que les catégories dominées sont non seulement les plus touchées par

l’inactivité4, mais de plus sont moins aptes à développer des stratégies de reconversion

par l’absence de diplôme, facteur lui aussi extrêmement discriminant dans la

distribution du chômage5. Si ses effets dévastateurs touchent particulièrement les

catégories les moins favorisées, il en est de même pour les conditions de travail et leurs

1. Voir, pour une analyse de l’extension des rapports salariaux et leurs conséquences économiques et sociales, Michel Aglietta, Anton Brender, Les métamorphoses de la société salariale. La France en

projet, Paris, Calmann-Lévy, coll. Perspectives de l’économie, 1984, 275 p.

2. Par cette affirmation, nous ne voulons ni dire que le travail serait le seul de ces vecteurs puisque l’insertion dans une cellule familiale ou l’éducation pour ne prendre que deux exemples jouent aussi des rôles importants dans ces processus ni perdre de vue que le travail est un construit historique contingent propre à certaines configurations historiques et sociales spécifiques. De la même manière qu’il est possible d’en rechercher les origines sociales et culturelles (cf. Max Weber, L’éthique protestante et

l’esprit du capitalisme, Paris, Plon, coll. Presses Pocket, 1964, 287 p.), on peut sans doute s’interroger sur

sa disparition prochaine. Mais ces recherches n’impliquent selon nous en aucune manière une remise en cause de la place qu’occupe aujourd’hui le travail dans les processus de socialisation des individus.

3. Christophe Dejours, Pascale Molinier, « Le travail comme énigme », dans « Les énigmes du travail », Sociologie du travail, Hors-série 36, 1994, p. 42.

4. Une différence de 10 points s’observe entre les taux de chômage des cadres et professions intermédiaires et ceux des employés et ouvriers. Ainsi selon l’enquête sur l’emploi de l’Insee de 1998, pour un taux de chômage de l’ensemble de la population active de 11,8 %, les taux sont respectivement pour les cadres et les professions intermédiaires de 4,5 et 6,8 % mais de 14,4 et 14,7 % pour les employés et les ouvriers, cf. Marie-Annick Mercier, François Brunet, « Le taux de chômage a reculé de 0,5 point en un an. Enquête sur l’emploi de mars 1998 », Insee Première, 593, juin 1998, 4 p. Cette distribution différentielle du chômage s’observe depuis plus de vingt ans dans les mêmes proportions comme le montre le tableau présenté dans Alain Bihr, Roland Pfefferkorn, Déchiffrer les inégalités , Paris, La Découverte-Syros, 1999 (2ème édition), p. 27.

5. La même enquête de l’Insee montre que le taux de chômage est de 17,4 % pour les sans diplôme ou CEP, 11,5 % du BEPC au baccalauréat, 8,2 pour les bac+2 et 7,3 pour les diplômes du supérieur, cf. Marie-Annick Mercier, François Brunet, « Le taux de chômage a reculé de 0,5 point en un an. Enquête sur l’emploi de mars 1998 », op. cit.

conséquences qui sont impossibles à analyser d’un point de vue ne prenant pas en compte le positionnement social des acteurs sociaux.

Le travail reste toutefois complexe à analyser puisqu’il est porteur d’une

ambivalence ou d’une « double vérité »1

fondamentale : il est en même temps l’objet d’investissements subjectifs — le travail apporte un statut, une reconnaissance, peut procurer une certaine fierté ou un accomplissement, etc. — et le vecteur de l’assignation d’une place dans une société différenciée et hiérarchisée — voire, dans certains cas, le lieu d’une véritable exploitation.

L’investissement dans le travail, donc la méconnaissance de la vérité objective du travail comme exploitation, fait partie des conditions réelles de l’accomplissement du travail, et de l’exploitation, en ce qu’il porte à trouver dans le travail un profit intrinsèque, irréductible au simple revenu en argent.2

La double dimension du travail comme lieu d’investissement subjectif et vecteur d’assignation et d’objectivation d’une position dans la société est différemment vécue selon les catégories d’acteurs sociaux et les types de profession qui s’offrent à leurs univers de possibles. La dimension subjective et valorisante prend alors plus ou moins d’importance selon la force de contrainte avec laquelle il s’impose, pouvant être vécue comme un choix, une assignation ou une résignation. Si, comme toute contrainte structurelle, le travail peut en même temps être analysé comme contraignant et

habilitant3

, c’est à la condition de souligner que les dimensions contraignantes et habilitantes des contraintes sociales sont inégalement distribuées selon les types de positions occupées dans l’espace social, jusqu’à apparaître comme pure contrainte dans le cas des catégories les plus dominées, l’éventail d’options à leur disposition étant alors extrêmement réduit.

1. Pierre Bourdieu, « La double vérité du travail », Actes de la Recherche en sciences sociales, 114, sept. 1996, p. 89-90.

2. Ibid. Une autre formulation de la même idée se retrouve dans un autre texte : « le coup de force objectivant qui était nécessaire pour constituer le travail salarié dans sa vérité objective de travail exploité a fait oublier à celui qui l’opérait que cette vérité avait dû être conquise contre la vérité subjective du travail qui ne rejoint la vérité objective qu’à la limite. », Pierre Bourdieu, « La mort saisit le vif. Les relations entre l’histoire réifiée et l’histoire incorporée », Actes de la Recherche en sciences sociales, 32- 33, 1980, p. 11, souligné par l’auteur.

3. « Toutes les formes de contrainte sont donc aussi, selon des modes qui varient, des formes d’habilité. Elles servent à rendre possibles certaines actions en même temps qu’elles en restreignent d’autres. », Anthony Giddens, La constitution de la société. Eléments de la théorie de la structuration, Paris, Puf, coll. Sociologies, 1987 (1ère édition anglaise, 1984), p. 231.

Comment se fait-il que certaines forces sociales semblent posséder un « caractère inévitable » ? Parce que les acteurs qui sont aux prises avec ces forces disposent de peu d’options, si nous admettons qu’ils se comportent de façon rationnelle — « rationnelle » signifiant, ici, que les acteurs orchestrent avec efficacité les motifs et le résultat final des actions qu’ils entreprennent. Ceci revient à dire que les acteurs ont de « bonnes raisons » de faire ce qu’ils font, des raisons que les partisans de la sociologie structurelle ont tendance à assumer de façon implicite au lieu de les attribuer explicitement aux acteurs. Etant donné que leurs bonnes raisons concernent un choix effectué à partir d’un nombre très limité de possibilités, les conduites qui en dérivent peuvent sembler déterminées par des forces implacables et semblables à des forces physiques. Il existe plusieurs forces sociales auxquelles les acteurs sont littéralement « incapables de résister », contre lesquelles ils ne peuvent rien.1

Pour les groupes sociaux les plus dominés dont les conditions d’existence sont fortement influencées par les conséquences — voire les séquelles — des conditions de

travail qu’ils endurent2, le caractère contraignant du travail prend donc le pas sur ses

autres dimensions. Sans faire ici une analyse des conditions de travail réelles des ouvriers des usines de transformation ou utilisatrices d’amiante — l’interdiction de l’amiante intervenue au premier janvier 1997 a conduit à la fermeture des lieux de production —, la lecture des entretiens parlant a posteriori de leurs conditions de travail et de vie au contact de ce toxique apporte quelques éléments pour leur compréhension. Malgré le changement de perspective induit par les mobilisations suscitées par les dangers de ce cancérogène, ils en constituent aujourd’hui l’unique voie d’accès.

Elles confrontent à la difficulté d’avoir à travailler sur les représentations d’un danger construites par un groupe social en situation de travail, dans une situation où un risque existe effectivement. Plusieurs options sont donc ouvertes dans le travail de recueil de ces représentations. La première consiste à lever toute connaissance extérieure sur l’existence réelle des risques pour se borner à recueillir les points de vue et les constructions d’une réalité. C’est ce que propose Nicolas Dodier, dans un article sur la construction des conditions de travail dans un groupe d’ouvriers exposés à un risque industriel.

1. Ibid., p. 236-237.

2. Voir sur ce point les ouvrages de Michel Verret, avec la collaboration de Joseph Creusen, La culture

ouvrière, Paris, L’Harmattan, coll. Logiques sociales, 1996 (1ère édition, 1988), 302 p. ou Idem, avec la collaboration de Paul Nugues, L’ouvrier français. Le travail ouvrier, Paris, Armand Colin, 1982, 238 p. ainsi que, plus récemment, Olivier Schwartz, Le monde privé des ouvriers. Hommes et femmes du Nord, Paris, Puf, coll. Pratiques théoriques, 1990, 531 p., bibliogr.

Confrontés à la nécessité pratique d’adopter un comportement donné vis-à-vis des protections individuelles, les ouvriers doivent donc continuellement gérer, dans leurs activités de travail, l’incertitude qui règne sur leur environnement. Cette incertitude sur des risques dont les conséquences sur la santé peuvent être spécialement néfastes se traduit, dans la présentation qu’en font les personnes aux cours des entretiens, par une oscillation fréquente entre l’affirmation et la minimisation des risques : tour à tour, dans le même entretien, les personnes évoquent les dangers éventuels malgré les protections, puis marquent l’efficacité de celles-ci, reviennent sur d’autres incertitudes, « normalisent » les risques actuels en mentionnant l’amélioration de leurs conditions de travail, mobilisent des cas de maladie ou de guérison dont l’interprétation est elle-même équivoque. Nous n’affirmons pas que les personnes « minimisent » ou « euphémisent » continuellement les risques, ce qui serait contradictoire avec notre position théorique fondamentale de suspension du jugement sur la réalité de ces risques. Nous constatons, à partir de ces oscillations, la difficulté qu’ont les ouvriers au cours des entretiens, à « élaborer d’une façon stable la réalité de ces risques. »1

Si cet article met bien en valeur les processus de construction des représentations du risque dans les populations exposées, on comprend mal à quoi correspond la

nécessité d’évacuer certains faits du champ de l’étude2. La même analyse n’aurait-elle

pas pu être menée sans cette occultation préalable de faits incontestablement réels ?3

Peut-être moins « purs » sur le strict plan théorique, les choix opérés par Denis Duclos lors de son travail sur le même type d’objet paraissent ouvrir des directions qui, si elles sont sans doute plus difficiles à tenir, rendent sans doute mieux compte des contradictions dans lesquelles se trouvent plongés ces acteurs sociaux.

La conjoncture qui s’est ainsi établie dans le champ d’une sociologie des risques paraît caractérisée par deux « maximes » que nous avons tenté de préserver dans notre recherche : la première, c’est que l’objet sociologique reste bien le mode collectif d’élaboration des critères de perception de la réalité ; la seconde, c’est que cette réalité n’en disparaît pas pour autant sous le symbolique, et qu’elle se manifeste par la dangerosité des substances, par l’insécurité des systèmes organisationnels et techniques, et enfin par les réactions de l’individu.4

1. Nicolas Dodier, « La construction pratique des conditions de travail : préservation de la santé et vie quotidienne des ouvriers dans les ateliers », Sciences sociales et santé, III, 2, juin 1985, p. 15.

2. Ce qui apparaît encore plus grave, c’est qu’en mettant en doute, ne serait-ce que méthodologiquement, l’existence des risques auxquels sont exposés les ouvriers, le travail sociologique peut contribuer à légitimer les discours tendant à dénier leur existence.

3. C’est contre le risque auquel mène une limitation fictive entre ce qui relèverait de la réalité et de la chimère que s’élèvent Mary Douglas et Aaron Wildavsky, « try not to get into an argument about reality and illusion when talking about physical dangers. There is no need to adopt any relativist standpoint about what is really out there to make our point. We are only concerned with selection and priority among real dangers. », Risk and culture..., op. cit., p. 30.

4. Denis Duclos, « La construction sociale du risque : le cas des ouvriers de la chimie face aux dangers industriels », Revue française de sociologie, 28, 1, janvier-mars 1987, p. 25. Cet auteur ajoute : « la question de la réalité du danger doit donc être prise avec prudence : mais elle ne peut pas être éludée »,

Analyser la connaissance pratique qu’élaborent les groupes sociaux au contact quotidien avec un toxique paraît plus justement rendue en prenant en compte le caractère réel de ce risque. Les stratégies mises en oeuvre pour continuer à « vivre avec » sont une modalité de construction du danger qui, si elle est socialement moins valorisée qu’une construction dans les formes scientifiques légitimes, n’en informe pas