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Les producteurs de sens et la pratique du « whitewashing »

Chapitre 3 De l'intersectionnalité dans la fan culture

4) Les producteurs de sens et la pratique du « whitewashing »

A l'instar de la représentation LGBTQ à la télévision, on recense une hausse maigre mais constante de l'inclusion de personnages de couleur dans les séries TV. En ce qui concerne le paradigme féminin, l'étude « Boxed In 2015-16 » révèle une diversification plus ample des personnages et personnalités des programmes diffusés sur le réseau de chaînes publiques américain : l'étude a enregistré une hausse du pourcentage des personnages féminins afro-américains de 15% en 2015 à 17% en 2016, une hausse également des pourcentages des personnages afro-américains et asio-américains qui sont tous les deux passés à 5% en 2016 et enfin, une hausse du pourcentage des personnages d'ethnies et de races autres qui atteint 2% en 2016268. Non seulement les chiffres de la diversité ethnique et raciale augmentent mais l'écriture elle-même s'affine et s'étoffe pour offrir des récits intéressants avec des acteurs de couleur dans des rôles de personnages complexes.

Concernant le réseau de chaînes publiques américain, c'est-à-dire ce à quoi quiconque possédant une télévision a accès sans prérequis d'abonnement, on trouve deux séries dont le personnage principal est à la fois féminin et afro-américain. Scandal269 et How To Get Away With

Murder (HTGAWM)270 sont toutes deux centrées autour de femmes afro-américaines dont la

fonction professionnelle (l'une est une experte en relations publiques, spécialisée dans la gestion de crises survenant sur la scène politique américaine, l'autre dirige son propre cabinet d'avocats) est le point focal de l'intrigue. Olivia Pope et Annalise Keating, les héroïnes respectives de Scandal et

HTGAWM, n'incarnent aucun des stéréotypes féminins et afro-américains que Hollywood tend

habituellement à véhiculer. Elles sont compétentes, volontaires, obstinées, vulnérables, faillibles : des caractéristiques qui restituent une complexité et une humanité à un profil figé traditionnellement relégué au second plan, voué à servir la caractérisation d'autres personnages plus conventionnels.

Certaines séries offrant une distribution d'ensemble, c'est-à-dire une distribution par laquelle on désigne plusieurs personnages principaux à qui l'on attribue une importance narrative similaire, surpassent la donne. Parmi les plus notables, on retrouve Orange Is The New Black271, qui présente un casting presque intégralement composé de femmes et inclut sensiblement autant de personnages de couleur que de personnages blancs. Grey's Anatomy272 et Quantico273 méritent également une 268Lauzen, Martha M., « Boxed In 2015-16: Women On Screen and Behind the Scences in Television » [document PDF], Center for the Study of Women in Television & Film, septembre 2016, 2,

http://womenintvfilm.sdsu.edu/files/2015-16-Boxed-In-Report.pdf. Accès 25 mai 2017.

269Rhimes, Shonda, créatrice, Scandal, ABC Studios, 2012.

270Nowalk, Peter, créateur, How To Get Away With Murder, ABC Studios, 2014.

271Kohan, Jenji, créatrice, Orange Is The New Black, Netflix, 2013.

272Rhimes, Shonda, créatrice, Grey's Anatomy, ABC Studios, 2005.

mention puisque la première compose avec une palette variée d'acteurs d'ethnies différentes et la seconde a pour personnage principal une femme asio-américaine. Les séries Empire274 et

Blackish275, quant à elles, sont les seules à oser un casting régulier exclusivement afro-américains et

à inviter diverses célébrités et icônes afro-américaines à faire des apparitions le temps d'un épisode. Notons que chacune de ces séries veille à traiter (régulièrement ou occasionnellement, sur un ton humoristique ou grave) la question du racisme aux États-Unis et la tournure alarmante que prend la situation depuis plusieurs années au vu des différentes occurrences de démonstrations de haine (entre autres) raciale recensées à travers le pays.

Malgré tout, ces séries plaisent. « Malgré tout » car, outre la xénophobie ambiante, outre l'usage trop automatique de stéréotypes poussiéreux dans l'inscription des personnages de couleur dans l'univers de la fiction, il persiste aux États-Unis une idée reçue qui entrave encore davantage l'amélioration de la représentation afro-américaine, celle selon laquelle les producteurs d'ouvrages culturels seraient avisés de ne pas axer leurs productions sur des personnages de couleur sous peine d'échec commercial. Notons que si la formule officieuse qui revient chaque fois que le sujet réapparaît est « black shows/movies/books don't sell », « black » est néanmoins à prendre dans le sens de « non blanc ».

Ce préjugé est susceptible d'avoir deux conséquences majeures : la première, il renforce l'hésitation des producteurs à inclure des personnages de couleur dans leurs récits ; la seconde, il favorise le « whitewashing » (que nous traduirons par « blanchissement » en français), un procédé par lequel on traite une thématique, un fait historique, une figure publique, un ouvrage populaire emblématique d'un groupe ethnique à dominance non blanche en élimant, voire en supprimant intégralement, certaines composantes caractéristiques de ce groupe en faveur de la maintenance d'une ascendance blanche dans la manière dont on construit les narrations et dans les valeurs qu'on entend leur faire véhiculer. Le « blanchissement » n'est pas à proprement parler insidieux dans le sens où il ne dissimule pas nécessairement la volonté de nuire. C'est d'ailleurs ce qui le rend si pernicieux, le fait qu'il suinte du culte aveugle de la tradition et qu'il imprègne les idéaux ; le fait qu'une fois détecté, il est difficile de le faire admettre pour ce qu'il est.

Chacune des factions du monde de la production culturelle et médiatique est affectée par le « blanchissement », y compris celle insoupçonnée de l'industrie du livre. On compte en effet de plus en plus de témoignages d'écrivains romanciers qui s'expriment sur les difficultés qu'ils rencontrent à faire apparaître des personnages de couleur sur la couverture de leurs livres. Anthony Vicino par exemple, irrité par le commentaire d'un lecteur suggérant qu'il aurait vendu plus d'exemplaires de 274Daniels, Lee et Danny Strong, créateurs, Empire, Imagine Entertainment, 2015.

son dernier livre s'il avait opté pour l'image d'une jeune fille blanche276 sur la couverture, se mit en quête d'évaluer la véracité de cette déclaration. Vicino se rendit donc dans une proche librairie où il s'employa à passer en revue 1500 livres de science-fiction et d'heroic fantasy afin d'établir un ratio entre le nombre de premières de couverture affichant un personnage blanc et celui affichant un personnage de couleur. Et les résultats sont parlants : sur les 1500 couvertures analysées, 594 affichent un personnage dont on peut déterminer l'ethnie ; 542 de ces 594 couvertures représentent des personnages blancs et seulement 52, des personnages de couleur (Vicino, « Where Are All The Characters of Color in Sci-Fi/Fantasy ? »).

« Authors do not get the final say on covers. Often they get no say at all »277, précise Justine Larbalestier, une autre auteure de science-fiction qui lutte contre ce phénomène. Dans un billet publié sur son blog personnel, Larbalestier répond à ses lecteurs américains qui s'étonnent de voir une jeune femme blanche sur la couverture de son livre alors dernièrement paru alors que le personnage principal est décrit dans le texte « black with nappy hair which she wears natural and short » (Larbalestier, « Ain't That A Shame »). Elle explique qu'elle a longuement bataillé avec la maison d'édition Bloomsbury et son équipe de marketing pour que la première de couverture soit cohérente et affiche un personnage qui corresponde à celui du récit ou ne fasse apparaître que le titre et l'auteur. Elle révèle également qu'elle s'est employée à garder ses efforts secrets par respect envers la maison d'édition qui la publie mais qu'elle espérait que le lectorat s'indigne à la parution de la version américaine afin de pouvoir répondre à la controverse et s'exprimer sur le sujet. Son souhait fut finalement exaucé : à force de commentaires interrogateurs ou révoltés à l'égard de Bloosmbury, la maison d'édition décida de rééditer le roman en utilisant la photo d'une jeune femme afro-américaine extraite d'une séance photo organisée spécialement pour l'événement278.

On dénombre seulement deux circonstances à l'issue desquelles la maison d'édition concernée entendit les revendications de l'écrivain et de son lectorat et modifia la première de couverture pour la rendre plus représentative du contenu du livre : le cas de Larbalestier et celui d'Ursula Le Guin, qui a également utilisé son blog pour pointer du doigt ce problème :

I've fought the blonde bimbos and the hairy-chested, blue-eyed Aryan heroes tooth and nail for forty years. Over and over I have been utterly defeated. Publisher's [sic] cover departments are patronizing and impenetrable. We know what sells, they say. Covers with people of color on them don't sell. Cover departments are always absolutely certain that they know what sells. Blind certainty is a hard thing to overcome, particularly when 276Vicino, Anthony, « Where Are All the Characters of Color in Sci-Fi/Fantasy? », SF Signals, 11 août 2015,

http://www.sfsignal.com/archives/2015/08/people-color-sci-fifantasy/. Accès 24 mai 2017.

277Larbalestier, Justine, « Ain't That A Shame (Updated) », Justine Larbalestier. Novels For Young Adults and Other Humans, 23 juillet 2009, http://justinelarbalestier.com/blog/2009/07/23/aint-that-a-shame/. Accès 24 mai 2017.

278Larbalestier, Justine, « The New Cover (Updated) », Justine Larbalestier. Novels For Young Adults and Other Humans, 6 août 2009, http://justinelarbalestier.com/blog/2009/08/06/the-new-cover/. Accès 24 mai 2017.

it's silently supported by a comfortably unquestioning acceptance of racial prejudice.279

Le « blanchissement » dans l'industrie du livre intervient donc aux stades de l'édition et de la publication. Larbalestier révèle par ailleurs dans son billet que la situation n'évolue pas ou peu en raison de la propension de chacun des stades du processus post-écriture à se déresponsabiliser :

Every year at every publishing house, intentionally and unintentionally, there are white-washed covers. (…) I have been hearing anecdotes from every single house about how hard it is to push through covers with people of colour on them. Editors have told me that their sales departments say black covers don't sell. Sales reps have told me that many of their accounts won't take books with black covers. Booksellers have told me that they can't give away YAs with black covers. Authors have told me that their books with black covers are frequently not shelved in the same part of the library as other YA (…). (Larbalestier, « Ain't That A Shame »)

Cette situation limite le champ d'action vers un changement des pratiques étant donné qu'on ne peut isoler et tenir pour responsable une personne ou une unique phase du procédé. Dans le mécanisme complexe que figure le processus de production d'un ouvrage destiné au grand public, le « blanchissement » n'est pas un caillou logé sous l'un des rouages qu'il suffit d'extraire pour relancer le fonctionnement. Le problème est bien là : il n'y a pas de perturbation par un élément externe, pas d'enrayage du mécanisme et donc pas d'arrêt du fonctionnement pour la simple raison que le « blanchissement » fait partie intégrante de la mécanique globale. Les éditeurs et les équipes de marketing « blanchissent » les couvertures des livres volontairement ; c'est une réalité rendue indéniable à chaque fois qu'une maison d'édition admet opter pour le visuel d'une personne blanche plutôt que d'une personne de couleur pour optimiser ses ventes.

Ce qui n'est en revanche pas volontaire, tout au moins, pas assumé, c'est ce que suggère le « blanchissement », autant dire la propension de certains intervenants dans le processus de publication à inférer d'une part, que les lecteurs sont plus enclins à acheter un livre présentant un personnage blanc sur la couverture et d'autre part, qu'une telle inférence est tolérable, bénigne et en aucun cas discriminatoire. Voilà le réel fond du problème : le refus de désigner le « blanchissement » comme l’émanation d'une structure sociale raciste, c'est-à-dire une structure construite sur la considération d'une hiérarchie de valeur entre les individus selon leur couleur de peau et leur ethnie. Eco désigne cette structure comme permettant le « fascisme en civil »280, celui 279Le Guin, Ursula, « Knowing a Book by Its Cover », Book View Café... Because You Can Never Have Too Many Ebooks, 8 décembre 2014, http://bookviewcafe.com/blog/2014/12/08/knowing-a-book-by-its-cover/. Accès 24 mai 2017.

que l'on peine à combattre non pas parce qu'il n'est pas reconnaissable mais parce que l'on refuse d'utiliser la terminologie adéquate sous prétexte qu'elle évoque des idéologies, des régimes et des événements historiques brutaux auxquels on estime ne pas adhérer. Ainsi non seulement on refuse le recours à des termes tels que « racisme » et « fascisme » mais on s'offusque envers quiconque suggère que nos actions et décisions puissent parfois faire de nous les instruments de la haine et de l'oppression.

« Ce serait tellement plus confortable si quelqu'un s'avançait sur la scène du monde pour dire : "Je veux rouvrir Auschwitz, je veux que les chemises noires reviennent parader dans les rues italiennes !" », déclare Eco. « Hélas, la vie n'est pas aussi simple. L'Ur-fascisme est susceptible de revenir sous les apparences les plus innocentes » (Eco, Reconnaître le fascisme, 39). Et c'est à notre sens ce qui se produit à chaque fois qu'une maison d'édition reste sourde aux requêtes des auteurs qu'elle publie, chaque fois qu'un publiciste prend la décision de propager une manière de faire discriminatoire au nom de la sécurité pécuniaire et chaque fois qu'un libraire prend la liberté de classifier les romans en fonction de la couverture du livre plutôt que du genre narratif du récit.

La première de couverture n'est pas anodine. Il ne s'agit pas pour les auteurs de réclamer une concordance entre le visuel du livre et l'histoire qu'il narre pour le plaisir de la contestation ; ils connaissent l'influence de l'illustration de la couverture sur l'expérience de lecture. Larbalestier insiste sur ce point et révèle qu'elle a parfois eu des retours surprenants en raison de la couverture dans les pays où la maison d'édition a opté pour la représentation d'un personnage de couleur par l'image d'un personnage blanc :

Liar is a book about a compulsive (possibly pathological) liar who is determined to stop lying but finds harder than she supposed. I worked very hard to make sure that the fundamentals of who Micah is were believable: that she's a girl, that she's a teenager, that she's black, that she's USian. One of the most upsetting impacts of the cover is that it's led readers to question everything about Micah: if she doesn't look anything like the girl on the cover, maybe nothing she says is true. (…) No one in Australia has written to ask me if Micah is really black. No one in Australia has said that they will not be buying

Liar because “my teens would find the cover insulting.” (Larbalestier, “Ain't That A Shame”)

Cette dernière déclaration fait référence à un commentaire laissé par une lectrice en réponse à une publication antérieure de Larbalestier sur son blog281. Elle entendait par ce billet répondre à l'interpellation de certains lecteurs quant à la raison pour laquelle elle créé majoritairement des 281Larbalestier, Justine, « Why My Protags Aren't White », Justine Larbalestier. Novels For Young Adults and Other Humans, 22 juillet 2009, http://justinelarbalestier.com/blog/2009/07/22/why-my-protags-arent-white/#comment-82283. Accès 24 mai 2017.

personnages de couleur alors qu'elle est elle-même blanche. Elle explique alors qu'elle est consciente du faible pourcentage de personnages de couleur dans les contenus culturels et qu'elle essaie à son échelle de contribuer à combler ce manque. Une lectrice publie alors un commentaire dans lequel elle témoigne des effets du « blanchissement » ambiant sur ses enfants et se remémore notamment la réaction de sa fille alors toute jeune qui, pourtant elle-même afro-américaine, refusa une poupée afro-américaine sous prétexte qu'elle n'était pas blanche : « See – Disney princesses weren't Black. Heroines in novels weren't Black. »282 Elle termine en déclarant regretter que les écrivains n'aient pas œuvré plus tôt et plus ardemment contre les inégalités ethniques et raciales dans la production du livre ; une amertume générée par la constatation d'un formatage social « blanc » aux conséquences nuisibles à l'estime de soi de ses enfants qui, s'étant familiarisés avec les codes d'intérêts d'une figuration monochrome de l'humanité, se trouvent décontenancés devant un ouvrage éloigné de cette uniformité : « As is – my teens would find the cover insulting and we can't purchase it. » (Christine, comments on « Why My Protags Aren't White »)

Des différents domaines de productions culturels, le cinéma est sans aucun doute celui où le « blanchissement » sévit le plus et de façon tellement notoire que la presse et la critique ne sont plus les seules plate-formes par lesquels on entend le dénoncer. En 2016 la problématique est soulevée publiquement depuis le cœur de l'institution cinématographique lorsque acteurs, réalisateurs, producteurs et spectateurs s'insurgent du manque de diversité dans la liste des nominés pour les Oscars ; et c'est ici malheureusement un euphémisme étant donné que les quatre catégories majeures (meilleur-e-s acteurs/actrices, meilleur-e-s acteurs/actrices dans un second rôle) ne comprenaient aucun acteur de couleur et ce pour la deuxième année consécutive283. La démarche semble avoir porté ses fruits puisque l'année suivante, la liste des nominés proposait au moins une personne de couleur par catégorie284 : Viola Davis remporte alors un Oscar pour son rôle dans

Fences285 et Mahershala Ali, pour son rôle dans Moonlight286 , un record pour les Oscars qui

n'avaient pas décerné de récompense à plus d'un acteur afro-américain au cours d'une même cérémonie depuis 2007287. Notons également que Ali est le premier acteur musulman à remporter un 282Christine, commentaire de l'article « Why My Protags Aren't White », Justine Larbalestier. Novels For Young Adults and Other Humans, 23 juillet 2009,

http://justinelarbalestier.com/blog/2009/07/22/why-my-protags-arent-white/#comment-82283. Accès 24 mai 2017.

283« Oscar Nominees Discuss Diversity in Hollywood Amid the #OscarsSoWhite Backlash », The Los Angeles Times, 25 février 2016, http://www.latimes.com/entertainment/la-et-oscars-so-white-reaction-htmlstory.html. Accès 28 mai 2017.

284Cox, David, « Did #OscarsSoWhite Work? Looking Beyond Hollywood's Diversity Drought », The Guardian, 25 février 2017, https://www.theguardian.com/film/2017/feb/25/did-oscars-so-white-work-looking-beyond-the-diversity-drought-in-hollywood. Accès 28 mai 2017.

285Fences, réalisé par Denzel Washington, Paramount Pictures, 2016.

286Moonlight, réalisé par Barry Jenkins, A24, 2016.

287Nolfi, Joey, « Oscars Make History With Most Black Winners Ever », Entertainment, 27 février 2017,

Oscar depuis la création des AcademyAwards en 1929288.

La polémique #OscarsSoWhite n'aura cependant eu d'effets qu'à l'échelle des Oscars car le « blanchissement » perdure dans la réalisation des films américains. La propension d'Hollywood à confier des rôles de personnages de couleur à des acteurs blancs est tellement élevée qu'elle rend la démarche de recenser chacune des occurrences de « blanchissement » futile. Aussi loin que l'on remonte dans l'histoire du cinéma occidental, on trouve une multitude d'exemples tous plus surprenants les uns que les autres : on pensera notamment à Marlon Brando et Mickey Rooney sous les traits de personnages japonnais dans The Tea House of the August Moon289 et Breakfast At

Tiffany's290 respectivement, Laurence Olivier dans le rôle d'Othello dans le film adaptation de

1965291 et plus récemment, Jake Gyllenhaal en prince iranien292 et Jim Sturgess en révolutionnaire coréen293.

Bien qu'on ne puisse apprécier une transformation tangible du cinéma occidental sur ce front puisque l'industrie persiste à « blanchir » ses films, on constate toutefois que les réactions protestataires se multiplient à chaque nouvelle occurrence, tout particulièrement depuis le film

Exodus: Gods and Kings294 qui fait polémique avant même sa sortie en salle fin 2014 du fait de son

casting dissonant : Christian Bale interprète le légendaire personnage biblique Moïse, Joel Edgerton, celui du non moins célèbre Ramsès II, Sigourney Weaver incarne la reine Mouttouya et