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d’un site industriel

1.1.3.1 Les problèmes et limites rencontrés

Le principal problème afférant à l’estimation des coûts environnementaux d’un site industriel est induit par la multiplicité des acteurs et des supports. L’identification des activités relevant de l’environnement, puis l’estimation de leurs coûts, nécessitent en effet la consultation de toute une variété d’intervenants et de documents. Nous pouvons citer les documents comptables, les contrats gérés par des gestionnaires spécifiques, les factures d’achat, les systèmes de gestion de la production et ERP212, divers enregistrements, les inventaires et bilans de matières, etc. Bien évidemment, cela induit forcément une incertitude élevée pour les estimations.

L’un des autres points induisant une incertitude élevée dans les estimations, est la difficile allocation des coûts environnementaux, par exemple à cause de prestations facturées globalement sans que des indicateurs pertinents ne permettent une affectation des coûts aux causes. Ainsi, dans notre étude, l’un des résultats qui comporte la plus forte incertitude est celui du coût estimé pour la gestion des déchets, ce qui pose forcément un problème de visibilité vu son importance.

Comme nous le montrons dans le schéma simplifié qui suit (Figure 19), les déchets générés par les différentes activités du site sont collectés, puis envoyés en traitement interne ou externe. Une première difficulté est que, collecte et traitement font l’objet de deux prestations séparées, impliquant deux entreprises différentes. Enfin, l’autre difficulté concerne la facturation pour le traitement, qui est commune à l’établissement auquel est intégré le site ici considéré : les déchets sont stockés sur une plateforme externe au site (mais interne à l’établissement) et « mélangés » avec les déchets provenant d’autres sites. Les quantités ne sont donc pas accessibles au niveau de chaque site, à l’exception de certains types de déchets qui sont spécifiques à une seule entité. De plus, la facture étant globale et n’étant que très peu détaillée (séparation des coûts selon des catégories de déchets très larges, pesage avant traitement une fois les déchets « mélangés »), la réaffectation au site est extrêmement difficile.

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Figure 19 – Schéma de flux des déchets et périmètres de facturation du site industriel (étude de cas préliminaire)

Bien évidemment, nous ne cherchons pas par cet exemple à remettre en cause la mise en commun pour tout l’établissement de la prestation de traitement des déchets, qui est source d’économies. Nous souhaitons toutefois mettre en avant le fait que le manque de mesures (pesées supplémentaires par exemple) et de détails sur les coûts de traitements unitaires spécifiques à chaque type de déchets, est à la source de la méconnaissance des coûts réellement induits par les diverses activités du site.

Le non suivi du coût d’achat des matières consommées, qui ne sont par la suite pas intégrées au produit final, constitue également un facteur limitant dans une optique d’amélioration de l’éco-efficacité des procédés industriels. L’exemple des métaux met clairement en avant ce point. Les pertes de titane et d’aluminium sont valorisées par revente à des recycleurs, mais, le prix de vente étant bien évidemment très inférieur à celui de l’achat (les déchets sont généralement souillés, et collectés sous des formes difficiles à exploiter, tels les copeaux), le bilan économique sur ces matières est plus que négatif. Le diagramme des coûts environnementaux qui incorpore, pour le site considéré dans notre étude, la différence entre les coûts d’achat et de revente, des pertes d’aluminium et de titane, est le suivant (Figure 20).

59%

25%

5%

10%

coût des pertes de matières coût des consommations (énergie, eau) coûts environnementaux ponctuels coûts environnementaux récurrents

Figure 20 – Le coût des pertes de matières et les coûts environnementaux du site (étude de cas préliminaire)

Site industriel Traitement de surface T ra v ai l m éc an iq u e d es m ét au x Traitement des effluents C ab in es d e p ei n tu re DIS Boues, Bains usés, Sables DIB DIS Eaux (cabines de peinture) DIS Huiles de coupe C o lle ct e

Traitement externe des déchets

DIS Autres sites DIB Autres sites DIS Autres sites

Traitement interne des déchets

Ce dernier point démontre, l’importance que peuvent avoir les pertes de matières en terme de coûts pour un site industriel. Bien évidemment, l’exemple de l’aluminium et du titane ici présenté est quelque peu extrême, puisque dans le cas du site industriel considéré, les produits fabriqués sont composés de pièces usinées dans des blocs de métaux pleins, pour garantir des propriétés mécaniques, de résistance notamment (les pièces sont « creusées » dans des blocs entiers plutôt que d’être mises en forme à partir de plaques), et leur poids devant être minimum, un enlèvement important de matière est réalisé. Il reste que par transposition, nous nous interrogeons sur le montant que représente le coût d’achat des matières qui par la suite deviennent des déchets, en comparaison de leur coût de traitement.

Comme nous l’avons déjà laissé entendre, considérer les coûts des consommations d’énergie et d’eau comme étant purement environnementaux, ne semble pas forcément cohérent dans une optique d’exploitabilité des résultats. Une partie de ces consommations est effectivement utilisée dans des procédés « end of pipe », et constitue ainsi des coûts 100% environnementaux, mais une autre partie peut être vue comme une ressource exploitée dans un cadre productif. Une séparation de ces deux types d’utilisation serait, semble-t-il, utile d’autant plus que la part exploitée dans des procédés de production pourra par exemple être prise en compte à travers les coûts d’achat des pertes de matières si elle n’est pas intégrée dans le produit final. Les quantités d’eau et d’énergie utilisées à des fins de gestion ou de traitement des impacts environnementaux, devront quant à elles être affectées au médium environnemental considéré. Ainsi, dans notre étude, les consommations d’eau utilisées dans les laveurs d’air devront apparaître dans la catégorie « coût de traitement des émissions atmosphériques » et non être agrégées dans une seule catégorie « consommations d’eau ».

Pour finir, l’estimation du coût de fonctionnement des installations de prévention des pollutions s’avère difficile. En effet, les données économiques accessibles pour le fonctionnement d’un procédé sont globales ; or certains d’entre eux intègrent par exemple des unités de recyclages des matières qu’ils utilisent. Dans notre étude, les huiles de coupe sont par exemple recyclées par filtration, ce qui implique un coût à estimer (non incorporé dans notre estimation). Il convient donc dans une étude plus poussée d’effectivement considérer ces activités, afin d’en estimer l’impact économique. Cette réflexion peut être élargie à l’estimation de la part attribuable à l’environnement dans le cadre d’un investissement dans une technologie propre. Il convient de noter que ce montant est difficile à suivre dans les documents comptables.