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pollutions, une réflexion sur l’éco-efficacité et la création de valeur

3.4.2.2 L’évaluation des activités de préventions des pollutions

Nous ne revenons pas précisément sur la définition de la prévention des pollutions (2.1.2.3 – p44). Nous rappelons cependant que l’objectif principal de ce type d’approches est de s’attaquer aux causes des pollutions plutôt que d’en gérer les conséquences. L’idée principale est donc de réduire à la source les polluants ou les consommations afin d’éviter les activités de traitements et d’éliminations plus tard. Nous rappelons toutefois que les activités de réduction à la source pures sont complétées, dans le périmètre de la prévention des pollutions, par la mise en œuvre de techniques de recyclage.

Les acronymes donnés, par certains grands groupes industriels, à leurs projets écologiques de prévention des pollutions, laissent penser que ceux-ci sont clairement à l’origine de la réalisation d’économies substantielles. Nous pouvons par exemple citer les programmes suivant : « Pollution Prevention Pays (PPP) » chez 3M, « Waste Reduction Always Pays

(WRAP) » chez Dow Chemicals, « Save Money and Reduce Toxics (SMART) » chez Chervron

[Boiral, 2003].

Le concept de Prévention des Pollutions a effectivement donné de la consistance au discours prônant l’existence de situations « win-win ». Il reste, qu’en dépit des exemples prouvant l’existence de telles opportunités, qui sont rapportés par des études scientifiques, le chemin de la prévention des pollutions n’est encore que très peu emprunté. Ceci tend à prouver que le secteur privé n’est pas à même d’identifier clairement les opportunités qui se présentent à lui [Boyd, 98].

Partant de l’observation qu’aujourd’hui, peu de choses sont connues quant aux facteurs qui font qu’une entreprise réalise ou non des projets de prévention des pollutions, Boyd [Boyd, 98], a formulé une typologie des barrières pouvant s’opposer à la réalisation de ce type d’investissement.

Pour cela, l’auteur s’est appuyé sur trois études de cas constituées de trois prises de décisions réelles, relatives à des activités de prévention des pollutions. Ces trois cas, tous situés dans le secteur de l’industrie chimique, ont été très précisément observés. Les investissements analysés dans les deux premiers cas (Dow, Monsanto) n’ont pas survécu aux processus d’évaluation d’investissements menés dans ces entreprises. Le dernier cas (DuPont) est lui constitué d’un produit destiné à procurer des avantages économiques aux clients industriels à travers une stratégie de prévention des pollutions, qui a rencontré des difficulté sur le marché. Nous ne présentons pas précisément ces cas, mais nous apportons quelques précisions nous paraissant utiles. Dans le cas « Dow », le projet présentait un Taux de Rentabilité Interne (TRI) (Équation 3 – p55) extrêmement intéressant, d’au moins 70%. Cependant, l’estimation de la rentabilité fut considérée comme trop incertaine relativement à des paramètres techniques et

réglementaires. L’investissement évalué par Monsanto, ne présentait quant à lui qu’un TRI de 11%, ce qui le situait bien en dessous des objectifs financiers stratégiques fixés. Enfin le produit « vert » mis sur le marché par DuPont n’apporta pas la rentabilité espérée du fait d’une forte surestimation de la demande. Cette analyse marketing et financière trop optimiste s’explique en partie par des hypothèses effectuées sur les évolutions réglementaires, en terme de contrôle des pollutions, s’étant révélées trop strictes relativement à la réalité.

Les barrières que doit franchir un investissement de prévention des pollutions, formulés par Boyd [Boyd, 98], sont consignées dans le tableau suivant (Tableau 7).

Paramètres clés Facteurs à prendre en compte Exemples

Les projets de prévention des pollutions présentent souvent des enjeux techniques complexes qui ont d’importantes implications dans les analyses financières.

Certains projets induisant un faible niveau de « prévention des pollutions » nécessite la revue d’un ensemble complet de procédés inter-reliés.

Les enjeux techniques

L’estimation des coûts des nouveaux procédés est souvent coûteuse.

Les analyses financières initiales peuvent s’avérer discutables si les incertitudes techniques ne peuvent être levées à un coût raisonnable.

Les incertitudes

Les incertitudes quelles soient liées au marché, aux caractéristiques techniques ou à la réglementation altèrent souvent les décisions, par exemple en induisant un délai.

Dans certains cas le report de la prise de décision concernant un projet peut avoir de la valeur. Les délais permettent la diminution des incertitudes et évitent les pertes potentielles irréversibles liées à un

investissement..

Le renforcement de certaines réglementations peut permettre le développement et le marketing de produit de prévention des pollutions.

L’augmentation des efforts à réaliser pour assurer la conformité et le contrôle, par exemple de certains effluents sous réglementés, accroît la valeur financière des nouveaux produits qui fournissent des solutions de prévention des pollutions.

Les pressions et barrières réglementaires

Certaines réglementations peuvent constituer des obstacles à la diffusion de technologies de prévention des pollutions.

Dans certains cas, des réglementations peuvent augmenter les coûts d’approvisionnement et d’utilisation de technologies de prévention des pollutions.

L’analyse financière de tout investissement est complexe. Des informations incomplètes sur les futurs marchés, les réglementations, les conditions techniques, signifient que les retours financiers doivent être considérés avec prudence.

Les techniques comptables doivent être évaluées afin de déterminer si les figures financières (par exemple le taux de rentabilité) sont considérées par les managers comme complètes et non biaisées.

La recherche de repères financiers de

rentabilité Même si les taux de rentabilité des projets de prévention des pollutions semblent être les indicateurs naturels de leurs faisabilités, ils doivent être pondérés avec d’autres facteurs.

Le taux de rentabilité d’un projet n’est approprié que s’il est comparé au coût du capital. Cependant ce dernier n’est pas facilement mesurable, d’autant qu’il dépend du risque associé au projet. L’application d’un taux de rentabilité précis pour une prise de décision requiert la connaissance de détails sur les facteurs qui contribuent aux risques.

Adapté de [Boyd, 1998]

Tableau 7 – Les barrières aux investissements de prévention des pollutions

3.4.3

La rentabilité des activités de prévention des pollutions

Comme nous l’avons vu, les activités environnementales sont difficiles à évaluer précisément d’un point de vue économique. Ceci est encore plus vrai pour les projets de préventions des pollutions qui comportent de fortes incertitudes.

Il est tout de même intéressant de considérer les rentabilités effectivement constatées pour différents investissements de prévention des pollutions. Nous allons plus précisément analyser les questions suivantes :

• Quels sont les principaux objectifs recherchés dans les projets de prévention des pollutions ?

• Quels sont les secteurs industriels les plus actifs en terme de projets de prévention des pollutions ?

• Certaines stratégies particulières de préventions des pollutions sont-elles plus rentables que d’autres ?

Nous nous basons pour répondre à ces interrogations sur une l’analyse bibliographique poussée de 134 projets de prévention des pollutions effectuée par Cagno et al. [Cagno et al., 2005].