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des hypothèses

2.3.2.1 Discussion autour de la problématique de recherche

L’une des premières remarques concerne la considération commune de données physiques et de données monétaires dans une comptabilité environnementale. De ce fait, le dimensionnement de cette dernière ne pourra en aucun cas se faire indépendamment du système de management de l’environnement en place (il est convenu dans notre approche qu’une entreprise ayant effectivement le souhait de développer une vision économique de sa

gestion environnementale aura déjà un Système de Management bien établi sur son périmètre d’activités). Plus encore, que de ne pas se développer indépendamment de ce dernier, une comptabilité environnementale y sera totalement intégrée (ou l’intégrera totalement) permettant une gestion conjointe des données monétaires et physiques. Notre étude ne porte pas spécifiquement sur les moyens de fusion de ces deux systèmes, mais il convient de garder à l’esprit que cet objectif peut dans les faits poser des difficultés.

A travers la question de recherche, nous nous interrogeons sur la capacité d’une comptabilité environnementale étendue à orienter la gestion environnementale vers la création de valeur. Il convient de revenir sur la notion de création de valeur.

Ainsi, dans notre approche, et conformément à ce qui a été établit par notre analyse bibliographique, nous considérons que la création de valeur industrielle se mesure, à long terme, exclusivement par des paramètres économiques. Orienter la gestion de l’environnement vers la création de valeur consiste alors à mettre en œuvre une stratégie de gestion de la triple performance de type « business case » (Figure 11 – p62). L’amélioration des performances environnementale et sociale ne doit, dans cette perspective, pas être vue comme un objectif indépendant de la performance financière, mais comme un paramètre pouvant y contribuer.

Nous inscrivons notre recherche dans ce cadre, où l’entreprise cherche à traduire et à intégrer les effets de préservation de l’environnement et d’amélioration du capital social, dans les mesures économiques et financières de l’entreprise.

Comme nous l’avons noté précédemment, la gestion environnementale industrielle met en jeu de nombreuses pressions et attentes issues de parties prenantes extrêmement variées. Ce contexte entraîne une responsabilisation de l’entreprise relativement à ses impacts sociaux et environnementaux, et peut même procurer des avantages compétitifs aux organisations à même de manager ces objectifs efficacement. Nous jugeons donc qu’en aucun cas une entreprise ne pourra créer de la valeur en détériorant sa performance environnementale. Ainsi, hormis dans le cas peu probable où une organisation mettrait en œuvre des procédés très coûteux induisant une performance environnementale bien supérieure aux exigences réglementaires, et pour laquelle un « retour à la norme » réduirait fortement ses coûts de production, nous estimons qu’une situation dans laquelle une détérioration de la performance environnementale peut induire une amélioration de la performance économique n’est pas possible. Cette dernière traduirait en outre un dysfonctionnement fondamental de l’économie. Enfin, le cas d’un changement de contexte réglementaire, par exemple par délocalisation, ne sera pas spécifiquement considéré, à l’exception d’étude de scénarii particuliers.

Dans notre recherche, nous observons donc les relations entre amélioration de la performance environnementale et création ou destruction de valeur.

Nous précisons à ce stade de réflexion, que les cas où des améliorations écologiques induisent une destruction de valeur sont de deux types.

Le plus courant est celui où une réglementation impose à l’entreprise une amélioration de sa performance environnementale dans un objectif d’amélioration du bien-être de la société, par exemple par une obligation de réduction des pollutions. Si l’entreprise n’a pas d’autres moyens, ou n’en trouve pas d’autres, que la mise en œuvre d’une technologie « end of pipe », qui induit nécessairement des coûts supplémentaires à supporter pour assurer la conformité réglementaire, alors effectivement l’amélioration environnementale induira une détérioration de la performance économique.

Il est également possible qu’une entreprise mette en place de manière volontaire une stratégie de réduction des pollutions qu’elle juge avantageuse économiquement, notamment en comparaison d’un statu quo, mais qu’une mauvaise estimation des paramètres anticipés dans son estimation, fasse que cette action ne soit finalement pas rentable. Comme nous l’avons déjà mentionné, il est effectivement possible que des incertitudes techniques ou réglementaires biaisent la perception de la rentabilité d’un projet par exemple de prévention des pollutions (Tableau 7 – p85).

Différentes situations peuvent également permettre à l’entreprise de créer de la valeur du fait d’une amélioration de sa performance environnementale.

En premier lieu, il est possible qu’une organisation qui « prenne conscience » des niveaux de coûts environnementaux qu’elle supporte, ou des activités qui en sont à l’origine, découvre la rentabilité de certaines actions de prévention des pollutions. Dans ce cas, la situation « win- win » existe indépendamment de toutes évolutions externes à l’entreprise.

Il se peut aussi, que ce soit un changement de paramètres externes qui implique qu’une action de préservation de l’environnement devienne rentable. Une évolution réglementaire induisant une forte augmentation des coûts de traitement des déchets peut par exemple rendre un projet de réduction à la source profitable économiquement pour l’entreprise. Une évolution des attentes des consommateurs peut aussi contribuer au succès des stratégies de différentiation. Ces dernières confèrent alors à un produit respectueux de l’environnement, une valeur supplémentaire, qui si elle est perçue par les consommateurs, peut les conduire à le préférer aux autres produits sur le marché. Un autre exemple est celui d’une entreprise qui développe et brevette une technologie propre dont les performances permettent de satisfaire à une norme future : le développement et la mise en œuvre de la technologie ne sont peut-être pas rentables eux-mêmes, mais la vente des brevets, lorsqu’une évolution contextuelle impose à certaines entreprises d’y recourir, peut générer un avantage compétitif très important.

Nous signalons pour conclure les discussions autour des notions de création et de destruction de valeur, qu’il est envisageable qu’une évolution réglementaire fasse qu’une amélioration environnementale devienne rentable pour une entreprise en comparaison d’une situation qui consisterait à ne rien faire, mais que cette évolution réglementaire handicape l’entreprise sur un marché international. Ce cas, qui est lié à la compétitivité globale d’un pays ou d’un groupe de pays, en économie ouverte, n’est pas étudié dans notre recherche.