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PARTIE I : LA STIGMATISATION ET LE TROUBLE BIPOLAIRE

1.2 LA STIGMATISATION EN SANTE MENTALE ET SES CONSEQUENCES

1.2.2 Les principaux stéréotypes associés à la maladie mentale : dangerosité,

1.2.2.1 Le stéréotype associé à la dangerosité

La croyance associée au phénomène de dangerosité est largement répandue dans la société et plusieurs auteurs l’ont mis en évidence dans des études en population générale. En 1999, Link et al (65) utilisent un échantillon représentatif de la population américaine pour évaluer le niveau de reconnaissance, les croyances associées à la maladie mentale ainsi que les conséquences sur le comportement de la population à l’égard des malades mentaux. Cinq vignettes cliniques s’inspirant des critères DSM IV sont présentées à 1444 personnes. Les auteurs mettent en évidence que les 4 vignettes décrivant des pathologies mentales (schizophrénie, dépression, dépendance à l’alcool, dépendance aux drogues) étaient significativement associées à plus de croyances négatives concernant le niveau de dangerosité et de violence que la vignette « infra clinique » (critères quantitativement insuffisant pour faire état d’une pathologie mentale). Ainsi 87% des personnes interrogées associaient un potentiel de dangerosité pour la vignette « dépendance à la cocaïne », 71% pour la vignette « dépendance à l’alcool », 61% pour la vignette « schizophrénie » contre seulement 17% pour la vignette « infra clinique ».

Pescosolido et al en 1999 évaluent les opinions de la population générale concernant le potentiel de dangerosité pour soi et pour les autres, la capacité de la personne malade à prendre une décision concernant un traitement ou la gestion d’un budget et le désir le la

population à contraindre le malade à utiliser le système de soin (obligation d’hospitalisation, visite médicale et prise de traitement)(66). Un tiers de la population pense que les personnes atteintes de maladies mentales (dépression, schizophrénie et dépendance à l’alcool) sont très probablement dangereuses pour soi et pour les autres contre seulement 6% pour ceux ne souffrant pas de pathologies mentales. Un quart de la population pense que les patients atteints de schizophrénie sont incapables de prendre une décision concernant un traitement et la gestion d’un budget et contre une proportion nulle de personnes interrogées pour les personnes ne souffrant pas de pathologies mentales.

Corrigan utilise son modèle de stigmatisation (4) pour évaluer deux stéréotypes communément associés à la maladie mentale (dangerosité et responsabilité) à partir d’un échantillon représentatif de la population générale et à l’aide de vignettes cliniques représentant la maladie mentale, l’addiction et la maladie physique (personne en fauteuil roulant) (67). Les auteurs ont pu valider leur hypothèse selon laquelle les personnes souffrant de maladie mentale sont significativement plus touchées par les stéréotypes négatifs que les personnes souffrant d’un handicap physique avec un potentiel de dangerosité et un sentiment de peur à l’égard des malades mentaux significativement plus important. Les comportements à type de rejet associés à ses croyances étaient significativement plus importants chez les personnes atteintes de maladies mentales que chez les personnes en fauteuil roulant. De même Walker et al en 2008 (68) mettent en évidence que ces stéréotypes s’appliquent également chez les enfants avec des croyances concernant le potentiel de dangerosité significativement plus fortes pour les enfants souffrant de dépression que pour les enfants souffrant d’asthme.

1.2.2.2 Le stéréotype associé au blâme et à la punition

Les études mettent également en évidence qu’une des croyances dont fait preuve la population générale envers les personnes atteintes de maladie psychique est qu’elles sont plus souvent blâmables pour leur comportement et plus légitimes d’être rappelé à l’ordre ou « punie » par la société.

Walker et al en 2008 dans un échantillon de 1318 enfants évaluent l’ampleur des attitudes de discrimination des enfants à l’égard de leurs pairs souffrant de trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH), de dépression et d’asthme. Ils mettent en évidence que la maladie mentale (TDAH ou dépression) est significativement

associée à plus de croyances concernant le caractère honteux de la maladie que la maladie asthmatique (68). Anglin et al en 2006 analysent les opinions de 1241 participants à propos de personnes souffrant de schizophrénie et de dépression majeure et mettent en évidence que la plupart des personnes interrogées pensent que les personnes atteintes de schizophrénie sont significativement plus responsables de leur maladie et doivent être plus punies par la loi que les personnes souffrant de dépression. (69)

1.2.2.3 Le stéréotype associé à l’incompétence

Une des autres représentations sociales de la maladie mentale réside dans la croyance associée au défaut de compétence des personnes atteintes de maladie mentale. Dans l’étude de Walker et al en 2008, les enfants souffrant de dépression ou TDAH étaient perçus comme significativement plus paresseux que les enfants souffrant d’asthme. Les enfants souffrant de dépression étant eux mêmes perçus comme significativement plus paresseux que les enfants souffrant de TDAH (68). Pescosolido et al en 2009 mettent en évidence que les adultes souffrant de maladie mentale étaient perçus comme moins capables d’effectuer des actes du quotidien comme prendre un traitement et gérer un budget que les personnes ne souffrant pas de pathologies mentales (70). Comme pour la dangerosité, la croyance concernant les capacités varie selon le trouble mental. Les adultes souffrant de schizophrénie et de troubles liées à l’usage de substance sont significativement perçus comme plus incompétents dans les tâches du quotidien que les patients souffrant de dépression, avec un constat accablant que la majorité des personnes interrogées pense que les personnes atteintes de dépendance aux drogues sont véritablement incapables de prendre une décision financière (66).

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