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PARTIE I : LA STIGMATISATION ET LE TROUBLE BIPOLAIRE

1.2 LA STIGMATISATION EN SANTE MENTALE ET SES CONSEQUENCES

1.2.5 Les conséquences de la stigmatisation

1.2.5.2 Les conséquences de l’auto stigmatisation

Comme explicité précédemment, si l’on se réfère à la définition de Corrigan et Watson, l’auto stigmatisation résulte de l’internalisation de la stigmatisation publique par les personnes sujettes à la discrimination(4). Si les stéréotypes associés à la maladie mentale ont des conséquences importantes et négatives à travers le phénomène de stigmatisation publique, il apparaît que le phénomène d’auto stigmatisation s’avère tout aussi délétère pour le patient qui souffre de maladie mentale. Un tiers des personnes atteintes de maladie psychique souffre d’auto stigmatisation(71)(94)) et on ne retrouve pas d’association entre la stigmatisation internalisée et les facteurs socio démographiques (âge, sexe, origine ethnique, statut marital, statut professionnel et niveau socioéconomique) indiquant que le phénomène d’auto stigmatisation touche tous les individus atteints de maladie psychique quelque soit son environnement. En revanche, les données de la littérature mettent en évidence que le phénomène d’auto- stigmatisation a des conséquences négatives sur un ensemble de variables psychosociales que sont l’estime de soi, l’espoir, le sentiment d’efficacité personnel ainsi que le support social et d’une manière générale retentit négativement sur la qualité de vie et le rétablissement des personnes atteintes de maladie mentale.

1.2.5.2.1 Auto-stigmatisation et estime de soi

En 2007, Lysaker et al cherchent à étudier le lien entre la stigmatisation internalisée, l’insight et le fonctionnement de patients souffrant de schizophrénie (95). Les auteurs se basent sur les données de la littérature qui témoignent qu’un faible insight est source d’altération dans plusieurs domaines et notamment sur le fonctionnement social et qu’un insight développé est en lien avec une altération de l’estime de soi et de la qualité de vie. Les auteurs dégagent 3 groupes à travers leurs analyses (un groupe de patients ayant un faible insight et un niveau d’auto- stigmatisation modéré, un groupe ayant un fort insight et un faible niveau d’auto-stigmatisation et un groupe ayant un fort insight et un fort niveau d’auto stigmatisation) et évaluent l’estime de soi, l’espoir et le fonctionnement social dans ces groupes. Les auteurs valident leur hypothèse selon laquelle l’impact de l’insight sur l’estime de soi, l’espoir et le fonctionnement est médié

par le niveau de stigmatisation internalisée. A niveau d’insight comparable, les patients ayant une stigmatisation internalisée plus importante souffraient significativement plus d’une altération de l’estime de soi, de l’espoir et des relations interpersonnelles.

Livingston et Boyd en 2010 retiennent 45 articles dans leur méta analyse concernant le lien entre auto stigmatisation et plusieurs variables et retrouvent une correlation négative entre auto-stigmatisation et estime de soi (60). 88,2% des 34 études sur le sujet retrouvent un lien de correlation significatif entre un haut niveau de stigmatisation internalisée et une faible estime de soi ce qui permet aux auteurs de conclure à la puissance importante de cette association. Celle-ci reste valable lorsque les symptômes sont contrôlés par le traitement (96) (97). Dans l’étude de Corrigan et al en 2006, les auteurs retrouvaient une association négative entre stigmatisation internalisée, estime de soi et sentiment d’efficacité personnelle même à distance de la symptomatologie dépressive (97).

1.2.5.2.2 Auto-stigmatisation et espoir

Le potentiel du patient à atteindre ses objectifs de vie, notion que l’on peut retrouver dans plusieurs études, s’assimile au concept d’espoir. Introduit par Snyder et al en 1991, il s’agit de l’orientation générale d’un sujet vis à vis de son avenir. Il est établi que les personnes atteintes de maladie mentale ont rapidement et significativement moins d’espoir que la population générale et qu’un plus faible niveau d’espoir est significativement associé à une qualité de vie plus médiocre (98). Lysaker et al en 2007 mettent également en évidence que parmi leur échantillon de patients, ce sont ceux ayant le plus important niveau d’auto-stigmatisation qui avaient les scores les plus faibles à l’échelle évaluant l’espoir (95). Dans la méta analyse de Livingston et Boyd de 2010, les auteurs confirment également l’association négative entre stigmatisation internalisée et espoir (60).

1.2.5.2.3 Auto-stigmatisation et sentiment d’efficacité personnelle

Le sentiment d’efficacité personnelle a été défini par Bandura comme étant l’ensemble des croyances d’un individu sur sa capacité à réaliser des performances particulières dans diverses situations. Dans l’étude de Vauth et al en 2007, les auteurs mettent en évidence le lien entre auto stigmatisation et sentiment d’efficacité personnelle (99). La méta analyse de Livingston et al (2010) retrouvent 8 études sur le sujet avec pour

l’intégralité d’entre elles une association significative négative entre stigmatisation internalisée et sentiment d’efficacité personnelle (99).

1.2.5.2.4 Auto-stigmatisation et support social

Lysaker et al en 2007 retrouvent une association négative entre auto- stigmatisation et qualité de vie dans le domaine des relations interpersonnelles avec significativement moins de contact social récent que ce soit amical ou autre chez les patients souffrant d’un niveau important de stigmatisation internalisée (95). Yanos et al en 2008 démontrent que le phénomène d’auto- stigmatisation des personnes atteintes de maladies mentales augmente significativement les attitudes d’évitement des situations d’interactions sociales (5). A la lumière de ces données, les études suggèrent que les personnes ayant un niveau important de stigmatisation internalisée ne souffrent pas uniquement d’un faible réseau social mais semble y participer de manière active par un phénomène d’évitement et de retrait conduisant à un appauvrissement de leur soutien social. Ce soutien social défini par la variété de ressources utilisables pour faire face aux difficultés de la vie ainsi que la perception que l’individu peut avoir de ce soutien est significativement associé à des altérations dans plusieurs domaines et notamment sur la qualité de vie.

1.2.5.2.5 Auto-stigmatisation et qualité de vie

D’une manière générale, il est désormais établi que le phénomène de stigmatisation à un impact franc sur la qualité de vie des personnes souffrant de maladie psychique. Rosenfield en 1997 met en évidence un lien entre stigmatisation perçue et qualité de vie subjective avec une association significativement négative avec le niveau de satisfaction de la vie en général (santé, situation sociale et familiale, situation professionnelle)(100). Alonso et al en 2009 ont cherché à évaluer l’impact de la stigmatisation perçue par les personnes atteintes de maladie mentale et ont conclu à une association significative négative entre stigmatisation et qualité de vie (101). Dans l’étude de Mashiach et al en 2013, les auteurs mettent en évidence une corrélation statistiquement significative entre le niveau d’auto- stigmatisation et la qualité de vie des patients atteints de maladie mentale sévère (7).

1.2.6 Les mécanismes expliquant les conséquences de l’auto- stigmatisation à travers des

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