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Cette thèse vise à mettre au jour les fondements théoriques relatifs a) à l’apprentissage et b) aux dipositifs d’enseignement associés à l’apprentissage de la pensée historique (APH). Pour ce faire, elle pose dans le premier chapitre le problème de cet apprentissage, en passant en revue les documentations scientifique et officielle. Ce tour d’horizon permettra d’illustrer la richesse du construit d’APH, trouvant un écho variable dans ces deux types de documentation et auprès des pratiques d’enseignement. Ce chapitre sera complété par la problématisation de ces pratiques, alors que, un peu comme nous le mentionnions précédemment, les enseignants

nourrissent des objectifs d’apprentissage élevés qu’ils ne parviennent pas nécessairement à concrétiser.

Dans le deuxième chapitre, nous présenterons les deux théories, relevant des représentations sociales et de l’attribution, qui permettront d’analyser les pratiques d’enseignement en histoire. Celles-ci serviront à définir notre objectif de recherche, visant à mettre au jour les fondements théoriques relatifs à l’apprentissage et à distinguer des modèles de pratique. Ces fondements et ces modèles seront présentés successivement, dans un deuxième et un troisième temps.

Le protocole méthodologique sera abordé dans le troisième chapitre, pour décrire le type de recherche et l’échantillon d’enseignants. Les modalités de cueillette et d’analyse des données, de nature lexicométrique, seront ensuite explicitées.

Les résultats des analyses lexicométriques seront présentés dans le quatrième chapitre. Celles-ci fourniront, pour chacune des variables ciblées, les éléments d’interprétation nécessaires à l’analyse de la problématique soulevée.

Dans le cinquième chapitre, ces résultats seront discutés de manière à identifier les théories de l’apprentissage et les modèles de pratique apparaissant les plus structurants. Cette discussion permettra également de mettre en perspective ces théories, ces modèles et les objectifs d’apprentissage poursuivis.

Finalement, en conclusion, nous brosserons un portrait global de notre démarche. À la lumière de celle-ci, nous ferons succinctement état des résultats, et nous préciserons les limites et les retombées de cette recherche au regard de l’interrelation de la recherche, de la formation et de la pratique. Finalement, nous proposerons quelques pistes de recherche pertinentes, susceptibles de préciser des éléments n’ayant pu être éclaircis par cette démarche.

PROBLÉMATIQUE

Dans ce chapitre…

Au cours des prochaines pages, nous poserons les jalons de notre problème de recherche au regard de l’apprentissage de la pensée historique (APH), conduisant à la formulation d’une question de recherche, qui clôturera ce chapitre. Pour ce faire, nous présenterons les éléments contextuels éclairant sa nature, sa portée et son enjeu à l’heure actuelle.

Dans un premier temps, nous expliciterons le contexte de l’APH, soit de

l’enseignement d’une discipline scolaire. Cet angle d’entrée appréhende la question de l’enseignement et celle de l’apprentissage de manière indissociable. Il permet d’en situer le fondement au niveau d’une médiation cognitive, appuyée sur une logique de scientificité. Cette logique de scientificité de l’APH, associée à la méthode historique, est l’instrument par lequel des enseignants exercent leurs élèves pour qu’ils atteignent des finalités de l’enseignement de l’histoire. Ces finalités, visant la formation d’adultes libres et responsables, sont de nature culturelle, psychologique, de socialisation et socio-politique.

Dans les deuxième, troisième et quatrième temps, nous aborderons successivement

les trois niveaux de fonctionnement d’une discipline scolaire : théorique, institutionnel et pédagogico-didactique (pratiques effectives). Cet examen rendra compte de leur rapport respectif aux finalités et aux médiations cognitive et pédagogico-didactique définissant l’APH, dans le contexte d’enseignement du programme d’Histoire et éducation à la citoyenneté (Gouvernement du Québec, 2007) en troisième et quatrième années du secondaire.

Dans un cinquième et dernier temps, nous problématiserons le niveau pédagogico-

didactique, dont les recherches décrivent des pratiques effectives qui semblent incohérentes au regard des finalités poursuivies par les enseignants d’histoire. À la lumière de cette incohérence, nous poserons la question à savoir s’il est possible de considérer l’APH comme un objet de ces pratiques effectives.

L’apprentissage de la pensée historique (APH) fait l’objet d’un intérêt croissant dans la documentation scientifique, notamment depuis une vingtaine

d’années1. Cet intérêt a d’ailleurs été constaté par quelques recensions scientifiques (Levstik, 2008; VanSledright et Limon, 2006; Wineburg, 1996; Zajda et Whitehouse, 2009). Il se retrouve également dans la documentation francophone québécoise, par un nombre croissant de mémoires et de thèses (Boutonnet, 2013; Demers, 2011; Duquette, 2011; Leblanc, 2013; Lévesque, 2011; Moisan, 2010) soulevant la question de la pensée historique depuis la thèse de Martineau (1997). Finalement, un intérêt de cette nature a également été exprimé par le programme d’Histoire et éducation à la citoyenneté (Gouvernement du Québec, 2007), associant explicitement l’enseignement de l’histoire à l’APH, conformément à la définition de la pensée historique proposée par Martineau (1997). Il est ainsi demandé aux enseignants d’histoire d’adapter leur pratique et le contexte pédagogique pour favoriser l’APH. Un apprentissage qui se réalise par un exercice répété, intentionnellement dirigé vers le développement d’un mode de pensée historique (Charland, 2002; Husbands, 1996; Martineau, 1997; Morton, 2011).

L’APH demeure un objet important dans le champ de la recherche sur l’enseignement de l’histoire, même si l’intérêt a varié depuis une cinquantaine d’années. C’est également un objet qui a voyagé : issu des préoccupations de la communauté de recherche anglophone sur l’enseignement de l’histoire, il a franchi les barrières linguistiques pour immigrer dans la documentation francophone, et finalement infuser les programmes d’études. Il représente ainsi un angle d’entrée intéressant à l’égard de l’enseignement de l’histoire, à la fois pour comprendre l’histoire de cet enseignement et l’interrelation entre la recherche et les pratiques à laquelle il a donné lieu. Toutefois, il apparaît difficile de convenir d’une définition consensuelle du construit d’APH, car les définitions abondent et varient passablement (Brown, 2009 ; Demers, Lefrançois et Éthier, 2010 ; Duquette, 2011 ; van Hover,

1 À tout le moins dans la production anglophone, comme le révèle une brève recherche menée dans la base de données ERIC, réalisé en mai 2014, alors que les mots historical thinking et learning ont généré 94 articles traitant de l’apprentissage de la pensée historique. De ce nombre, 87 ont été publiés entre 1994 et 2014, avec une intensification des publications à partir de 2004 (cinq et plus par année) et un ralentissement marqué en 2013, avec deux publications seulement.

Hicks et Irwin, 2007 ; VanSledright, 2004). Selon Barton et Levstik (2004), il conviendrait plutôt d’attendre que des « images descriptives » de cet objet en viennent à surgir, éventuellement, dans la documentation scientifique.

La diversité des définitions de l’APH n’est pas en soi un problème; c’est d’ailleurs la norme pour tout objet de recherche dans un champ scientifique (Freitag, 1973; Hempel, 1996; Herman, De Bruyne et De Shouteethe, 1974). Néanmoins, nous pouvons nous interroger sur la nature de ces définitions et de leurs usages. Alors que différentes définitions se côtoient, certaines seulement trouvent droit de cité dans les programmes d’études. Il en est de même en ce qui concerne l’analyse des pratiques d’enseignement en histoire, appréhendées à l’aune de définitions variables. Un tour d’horizon systématique du construit d’APH dans la documentation s’impose donc pour y voir plus clair. Pour ce faire, nous puiserons au construit de discipline scolaire, permettant de rendre compte de la diversité des usages et des pratiques associés à l’enseignement et à l’apprentissage d’objets de savoir, dont relève l’APH.