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CHAPITRE 2 : CADRE D’ANALYSE CONTEXTUEL

2.2 Le contexte géographique, démographique et institutionnel de l’étude

2.2.2 Présentation de l’étude de cas

Pour la réalisation de cette recherche, nous avons privilégié une étude de cas sur un projet de développement communautaire qui suscite l’engagement des

Secteur primaine (agriculture, élevage) 30% Secteur secondaire (mines, BTP, manufacture) 20% Secteur tertiaire (finances et télécommunications ) : 50%

femmes. Avant de présenter le projet sur lequel nous nous sommes appuyés pour la réalisation des recherches sur le terrain, il est pertinent de mentionner que, étant moi-même de nationalité burkinabè, mais née au Sénégal, l’arrimage de mes travaux de maîtrise avec le projet a été facilité par ma connaissance du contexte burkinabé. Après l’obtention de mon diplôme de lycée, j’ai poursuivi mes études au Québec où j’ai obtenu mon Baccalauréat à l’Université de Montréal, puis entamé ma maîtrise à l’Université Laval. Cette familiarité avec le Burkina Faso, le Sénégal, mais aussi avec le Québec en raison de mon parcours scolaire, a constitué un avantage pour la recherche. Ainsi, j’ai pu établir un échange réciproque avec mes collaboratrices de recherche en agissant comme plaque tournante, en quelque sorte, entre les différents partenaires et institutions du Burkina Faso, du Québec et du Sénégal.

Le projet « Investir dans le bien-être des adolescentes et jeunes femmes par approche holistique axée sur la santé sexuelle et reproductive au Burkina Faso et au Sénégal » a été mis en place par le CSI en 2018, avec la collaboration de ses partenaires terrain en Afrique et de ses partenaires régionaux au Québec. En Afrique, les partenaires terrain du CSI sont l’Association d’Appui et d’Éveil Pugsada (ADEP) au Burkina Faso et l’Association Nationale pour la Prévention et le Développement (ANPD) au Sénégal. Au Québec, ses principaux partenaires sont le Centre de santé et mieux-être collectif de Mashteuiatsh et La Boite Rouge VIF. Dans le cadre de la présente recherche, nous nous sommes intéressés uniquement au déploiement du projet au Burkina Faso.

2.2.2.1 Le Centre de Solidarité Internationale du Saguenay Lac-Saint-Jean

Créé en 1979, le CSI est un organisme de coopération internationale dont le but est de renforcer le bien-être des populations. À l’origine, son action se tournait vers l’éducation et la sensibilisation du public. C’est en 1996 que son statut change, accompagné d’une implication dans plusieurs pays, notamment le Burkina Faso,

le Mali, l’Équateur et le Nicaragua. Le Burkina Faso devient graduellement l’un des principaux pays bénéficiaires du CSI avec plusieurs actions menées depuis 2003.

Cet organisme définit la solidarité internationale comme étant « une démarche qui vise à construire collectivement un changement social de type solidaire » (CSI, s.d). Axé sur des valeurs de collaboration, engagement, ouverture d’esprit, respect et innovation, les objectifs du CSI sont les suivants : mettre en œuvre des projets de développement et des stages internationaux en collaboration avec les organisations de la société civile en Équateur, au Burkina Faso et au Sénégal; sensibiliser, informer et mobiliser la population du Saguenay-Lac-Saint-Jean aux enjeux de solidarité internationale; tisser des liens de solidarité entre les initiatives innovantes du Nord et du Sud (CSI, s.d). Focalisé sur le développement durable, l’organisme s’engage à mener des actions dans le cadre de l’égalité femme- homme, l’égalité entre les peuples et la lutte aux changements climatiques. La mission du CSI est d’accompagner les initiatives des organisations de la société civile dans les pays du sud.

2.2.2.2 L’Association d’Appui d’Éveil Pugsada

L’Association d’Appui d’Éveil Pugsada (ADEP) est une ONG créée en 1995, qui s’engage dans l’amélioration du statut et des conditions de vie des jeunes filles au Burkina Faso. Elle est régie par trois instances décisionnelles qui lui permettent de mener à bien sa mission. Ces instances correspondent à l’Assemblée générale, qui définit les orientations et les priorités d’action de l’association ; le Conseil d’administration, qui a pour mandat de s’assurer que la gestion au quotidien de l’association respecte les orientations définies par l’assemblée générale et que la gestion financière est conforme et transparente ; et le Secrétariat exécutif, qui est en charge du suivi au quotidien de l’exécution des activités programmatiques de l’organisation et contribue à animer la vie associative (ADEP, 2017).

Basée sur les valeurs de solidarité, équité, justice, transparence, partenariat, partage et écoute, l’ADEP a pour mission de renforcer le développement de la prise de conscience, la connaissance et le respect des droits des jeunes filles au sein de la communauté. Elle vise aussi à développer et renforcer les moyens, les compétences et les capacités d’autopromotion des jeunes filles, ainsi que leur capacité à agir au sein de la société (ADEP, 2017). Sa vision est celle d’une société où les droits sociaux, économiques et politiques des jeunes filles sont connus et respectés, de telle sorte que ces dernières puissent s’affirmer et contribuer au développement de la communauté.

C’est dans cette optique que l’ADEP, avec la collaboration de partenaires communautaires et d’Organisations de la Société Civile (OSC), de partenaires étatiques (Ministère en charge de la Femme, de la Solidarité Nationale et de la Famille ; Ministère en charge de la justice et des Droits Humains ; Ministère de l’Éducation Nationale et de l’Alphabétisation (MENA)) et de partenaires techniques financiers, met en place des activités de sensibilisation, de formation et de plaidoyer, axées sur une stratégie d’intervention qui encourage la participation et la responsabilisation des populations cibles. Ces dernières sont principalement les jeunes filles, mais aussi les acteurs de l’éducation, les leaders d’opinion et la communauté dans son ensemble. L’ADEP intervient dans cinq domaines principaux :

1. L’éducation des filles, à travers l’appui à la scolarisation des filles, l’alphabétisation en langue locale et en français et la formation des filles en compétences de vie courante;

2. Violences et genre, par la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles et la promotion de Genre et développement;

3. Santé et Reproduction, par le biais de formation et sensibilisation sur la Santé Sexuelle (SR) et la Planification Familiale (PF), le counseling (accompagnement/prise en charge psychosociale, sanitaire, juridique et

judiciaire des jeunes filles victimes de violences liées aux Droits Sexuels et Reproductifs), la mise en place d’un service d’écoute à l’ADEP;

4. Citoyenneté et civisme, à travers la sensibilisation et formation sur la citoyenneté et le civisme, le renforcement des filles/femmes en leadership et la participation à la vie publique;

5. Entrepreneuriat féminin, par un appui/accompagnement au développement des jeunes filles et groupements féminins, la formation en entrepreneuriat des jeunes filles/femmes, la formation professionnelle des jeunes filles aux métiers non traditionnels (mécanique, tôlerie peinture, électronique, électricité, etc.).

Les différents projets de l’ADEP se manifestent dans neuf provinces du Burkina Faso. Dans le cadre de ce projet de recherche, nous nous intéressons principalement à la province du Kadiogo, située au Centre du pays.

2.2.2.3 Mission et valeurs du projet

Au cours de leur collaboration sur plusieurs années, le CSI et l’ADEP décidèrent de mettre en place une stratégie pour le développement social des jeunes filles au Burkina Faso axée sur l’approche holistique développée au sein des communautés autochtones du Québec. Cette volonté émergea à l’issue d’un projet commun entre le Sénégal, le Burkina Faso et le CSI sur l’autonomisation des jeunes filles des Banlieues de Dakar et de Ouagadougou. En effet, les partenaires se rendent compte de l’importance de résoudre le problème de violences de genre car cette problématique constitue un frein majeur pour le développement des jeunes femmes. Quatre principaux problèmes ont été identifiés à l’issue de ce projet à savoir :

1. Le manque de connaissance des jeunes sur la SSR, les effets néfastes des violences dans les relations amoureuses ainsi que la vulnérabilité des jeunes filles qui les empêche d’exercer leurs droits ;

2. Le fait que la SSR soit un sujet tabou au Burkina Faso ;

3. Le fait que les adolescentes et adolescents utilisent faiblement les méthodes contraceptives modernes, car elles/ils ont des craintes à utiliser les services de santé de peur de la stigmatisation sociale ;

4. Le manque de dialogue entre les chargés de projets, les animatrices communautaires et les agents de santé.

C’est ainsi que le projet dans lequel nous avons pris part proposait de renforcer le développement social des communautés à travers une approche holistique de la SSR. Cette approche est définie de la manière suivante selon le CSI:

Le degré de capital social et de cohésion sociale au sein des communautés autochtones est cité comme composante essentielle de la santé dans les communautés autochtones, ce qui souligne de nouveau les croyances traditionnelles selon lesquels l’interconnexion entre les personnes, la famille et la communauté sont vitales à l’équilibre et au mieux-être (CSI, s.d).

Dans cette optique de relier la personne avec sa famille et sa communauté, le projet se déploie au Burkina Faso à travers des échanges d’expertises entre les différents partenaires et des activités de sensibilisation sur le terrain auprès des jeunes. Ces activités sont regroupées autour du volet jeunesse du projet, qui vise à « accroître l’empowerment (capacité d’agir) des jeunes femmes par l’utilisation d’une démarche de transmission cultuelle et un volet communautaire qui vise à accroître le capital social des communautés par la mobilisation d’agents de changement autour d’un scénario de référence » (CSI, s.d). À travers l’approche holistique, les différents acteurs du projet souhaitent intervenir dans le mieux-être des jeunes filles, ce qui rejoint notre question de recherche, comme le démontre

Effectivement, l’analyse contextuelle élaborée dans ce chapitre nous a permis d’explorer l’état des lieux sur la situation des femmes burkinabè. De la période coloniale à aujourd’hui, nous comprenons désormais d’où vient l’engagement social des femmes et pourquoi elles s’engagent. Néanmoins, la connaissance simple sur les initiatives d’engagement social des femmes ne permet pas d’analyser leur place dans la lutte contre la discrimination et pour le développement économique des femmes. En effet, la littérature actuelle sur le genre au Burkina Faso propose rarement une analyse centrée sur le rôle de l’éducation sexuelle dans la lutte contre la discrimination sociale et économique. Et pourtant, l’éducation sexuelle est un facteur d’autonomisation des jeunes femmes. C’est pour cette raison que, dans le cadre de ce mémoire, nous nous basons sur cette thématique pour approfondir les connaissances et apporter un regard neuf et plus actuel des dynamiques de marginalisation liées au manque de connaissance sur la SSR, mais aussi sur l’engagement social et communautaire des femmes dans l’empowerment des jeunes filles. L’analyse que nous proposons de réaliser nécessite l’appropriation de quelques concepts que nous exposerons dans le prochain chapitre.