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Présentation des données et de la méthodologie économé- économé-triqueéconomé-trique

monétaire : Une analyse en zone euro

2.1 Analyse empirique de l’influence de la concurrence bancaire sur la transmission des taux d’intérêtbancaire sur la transmission des taux d’intérêt

2.1.3 Présentation des données et de la méthodologie économé- économé-triqueéconomé-trique

La présente section exposera, dans un premier temps, la méthodologie écono-métrique employée pour identifier les effets de la concurrence sur la transmission monétaire, avant de présenter, dans un second temps, les données nécessaires à notre exercice, en faisant parallèlement état de quelques faits saillants concernant la concurrence bancaire en Europe.

Présentation de la méthodologie économétrique

L’analyse exploratoire qui précède illustre la disparité temporelle ainsi que spa-tiale du mécanisme de transmission des taux monétaires aux taux bancaires. Afin de tester si la concurrence bancaire pourrait constituer un facteur explicatif significatif de cette hétérogénéité, le modèle de tarification au coût marginal (équation 2.1) doit être révisé et s’écrit désormais comme suit :

bri ,t= β0+ (β1+ β2∗ Zi ,t)mrt (2.4) où Zi ,t est un indicateur de l’intensité de la concurrence variant dans le temps et spécifique à chaque économie.

Dans l’équation précédente, l’ampleur de la transmission monétaire est donnée parβ12∗Zi ,t. Cela étant, l’ampleur du pass-through devient conditionnelle à l’état de la concurrence et peut donc varier à travers le temps et l’espace. Dans ce cadre, le paramètreβ2rend compte de l’effet spécifique de la concurrence sur la transmission des taux d’intérêt.

Pour estimer la forme générale du modèle 2.4, la classe de modèles statistiques la plus appropriée est celle des modèles à correction d’erreur à une seule équation. Comme nous l’avons développé précédemment, de tels modèles ont, pour propriété fondamentale, de permettre la modélisation de séries cointégrées, en modélisant les ajustements qui conduisent à une situation d’équilibre de long terme. La démarche empruntée dans cette section consiste, par conséquent, à étendre notre modèle à correction d’erreur écrit dans la section précédente en considérant : (1) des données de panel et (2) un terme d’interaction entre concurrence et taux monétaire, de sorte que l’ampleur de la transmission soit conditionnée par le niveau de concurrence.

Eu égard à ces deux éléments, nous employons, par la suite, l’approche Pooled Mean Group (PMG) de Pesaran et al. (1999) qui, dans un contexte de données de pa-nel, laisse la possibilité aux paramètres de court terme de varier d’un pays à l’autre, mais contraint les paramètres de long terme à être homogènes. Par souci de simplifi-cation, nous commençons par présenter le modèle pour données de panel à retards échelonnés proposé par Pesaran et al. (1999).

∆bri ,t= γi(bri ,t −1− βmri ,t −1) + ρi∆mri ,t −j+ µi+ εi ,t (2.5) où la portion entre parenthèses correspond à la relation de long terme entre les taux d’intérêt monétaire (mrt) et bancaire (bri ,t) et oùβ transcrit, par conséquent, le degré de transmission des taux à long terme. De façon à être dans la bonne configuration du modèle,γi, le coefficient à correction d’erreur est attendu négatif et significatif. Pour le reste,ρi relate l’effet à court terme (un mois) d’une variation des taux monétaires sur les taux bancaires. Il en résulte, par conséquent, que le nombre de mois nécessaires pour atteindre l’équilibre est donné par ((1 − ρi)/γi) (Hendry, 1995).

Pour tester, à présent, l’effet de la concurrence bancaire sur : (i) la transmission immédiate des taux, (ii) la transmission à long terme des taux et, (iii) la vitesse d’ajus-tement des taux à leur relation de long terme, l’équation (2.5) est augmentée par un terme d’interaction entre l’indice de Lerner et le taux monétaire, ainsi que, pour la bonne tenue des estimations, par l’indice de Lerner en niveau.

∆bri ,t= γi(bri ,t −1− βmri ,t −1− ϕLer neri ,t −1− λ(Ler neri ,t −1∗ mri ,t −1))

+ ρi∆mri ,t+ ψiLer neri ,t+ δi∆(Ler neri ,t∗ mri ,t) + µi+ εi ,t (2.6) où Ler neri ,t correspond à l’indice de Lerner. Selon les hypothèses énoncées dans cette section, la concurrence devrait favoriser l’efficience de la transmission mo-nétaire. Dès lors, un signe négatif est attendu pour les paramètres bλ et δbi. Cela indiquerait, en effet, que la baisse de l’indice de Lerner, c’est-à-dire une accentua-tion de la concurrence, augmente l’ampleur du pass-through.

Les équations (2.5) et (2.6) témoignent de la singularité de l’approche de Pesaran et al. (1999). L’estimateur Pooled Mean Group permet, en effet, « à la constante, aux coefficients de court terme ainsi qu’à la variance des erreurs de s’ajuster libre-ment d’un groupe à l’autre, mais contraint simultanélibre-ment les coefficients de long terme à être identiques » (Pesaran et al., 1999). En ce sens, l’estimateur PMG est un estimateur à mi-chemin entre l’estimateur Mean Group (MG) (qui consiste à estimer le modèle, de manière successive, pour chaque pays, puis à considérer la moyenne des coefficients estimés) et l’estimateur Dynamic Fixed Effect (DFE) par exemple (pour lequel les coefficients sont homogènes et où l’hétérogénéité est prise en considération à travers un effet spécifique à chaque pays).

Bien évidemment, l’utilisation d’un estimateur Pooled Mean Group, comme nous le proposons, repose sur un certain nombre d’hypothèses. Trois hypothèses doivent notamment être vérifiées :

— H1 : Les perturbations (εi ,t) doivent, en premier lieu, être indépendamment distribuées dans le temps et entre individus, et indépendamment distribuées des régresseurs.

— H2 : Les résidus de la relation de long terme (bri ,t = βmri ,t −1+ νi ,t) doivent, en second lieu, être stationnaires. Cela permet de rejeter l’hypothèse selon la-quelle les variables ne sont pas cointégrées.

— H3 : L’hypothèse portant sur l’homogénéité des coefficients à long terme doit enfin être vérifiée par les données.

Présentation des données

Il convient, à présent, d’exposer les données nécessaires à notre analyse. Celles-ci sont relativement parcimonieuses. Trois variables distinctes permettent, en effet, de mener nos investigations principales :

— un taux d’intérêt bancaire nominal, calculé à partir des nouveaux prêts ; — un taux d’intérêt nominal de court terme, établi sur le marché interbancaire et

censé refléter la politique monétaire mise en place par la BCE ;

— un proxy de l’intensité concurrentielle des différents marchés bancaires. Malgré la parcimonie des variables à considérer, il y a lieu de s’interroger, pour chacune d’entre elles, sur les séries statistiques à sélectionner. Dans ce qui suit, nous discuterons donc des séries retenues pour chacune des trois variables. Avant cela, il nous faut toutefois mentionner qu’en raison de la disponibilité des données relatives à la concurrence bancaire au moment de la réalisation de cette étude, l’analyse statistique portera sur la période s’étalant de janvier 2003 à décembre 2010 (c.-à.-d, 96 observations mensuelles par pays) et couvrira l’ensemble des pays appartenant à la zone euro en 2003.

Concernant, tout d’abord, la variable taux d’intérêt bancaire, nous dérogeons aux choix faits dans la section 2.1.2 en retenant désormais six séries de taux d’intérêt ban-caires distinctes contre deux précédemment, ce supplément d’information étant en mesure d’affiner nos conclusions. Les six séries considérées correspondent aux MIR statistics de la BCE, disponibles en fréquence mensuelle et harmonisées pour l’en-semble des pays de la zone euro. Ces six séries peuvent être classées selon deux typo-logies : ménages / entreprises et taux débiteurs / créditeurs. Pour les ménages, tout d’abord, nous avons retenu trois séries distinctes : les taux d’intérêt pour les prêts à la consommation, les taux d’intérêt pour l’acquisition d’un bien immobilier et, en-fin, les taux d’intérêt créditeurs sur les dépôts inférieurs à un an. Ensuite, pour les entreprises, nous avons également retenu trois taux d’intérêt bancaire. Le premier et le second correspondent, respectivement, aux taux offerts sur les prêts inférieurs et supérieurs à un million d’euros. Le troisième taux d’intérêt se réfère, pour sa part, aux taux pour les dépôts de court terme (inférieurs à un an)5. Une présentation des 5. On précise que l’ensemble des séries rendent compte des taux sur les nouveaux prêts. Par ailleurs, il convient également de mentionner que, dans certains cas, les données ne sont pas dis-ponibles pour l’ensemble de l’échantillon retenu.

moyennes par pays des six séries statistiques est rapportée dans le tableau 2.3.

TABLEAU2.3 – Moyennes par pays des taux bancaires en zone euro

Prêts à la Prêts Dépôts à court terme Prêts aux entreprises Prêts aux entreprises Dépôts à court terme consommation immobiliers pour les ménages < 1 me > 1 me pour les entreprises

AUT 5.47 4.03 2.43 3.93 3.35 2.42 BEL 7.94 4.2 2.3 - - 2.22 DEU 6.68 4.6 2.37 4.78 3.83 2.28 ESP 8.61 3.84 2.78 4.43 3.44 2.6 FIN 4.67 3.43 2.59 4.03 3.39 2.25 FRA 6.57 4.18 2.56 4.31 3.33 2.4 GRC 9.29 4.34 3.08 - - 2.77 IRL 6.41 3.86 2.36 4.97 4.4 2.37 ITA 8.63 4.16 1.86 4.4 3.41 2.39 NLD - 4.56 2.93 4.42 3.4 2.37 PRT 9.05 3.77 2.47 6.21 4.28 2.6 Écart-type 1.37 0.28 0.24 0.47 0.35 0.13 Source : BCE.

Considérons désormais la variable taux de court terme. Il convient, tout d’abord, de mentionner que faire le choix d’un taux de court terme indique que notre analyse de la transmission des taux suit une approche de politique monétaire et non une

approche selon les coûts des fonds6. Puisque notre intérêt se porte sur la manière dont

les décisions de politique monétaire se répercutent sur les taux d’intérêt bancaires, l’Eonia, qui résulte de la moyenne pondérée de toutes les transactions au jour le jour de prêts non garantis réalisées par un panel de banques de la zone euro, se trouve être la série statistique la plus appropriée. L’Eonia constitue, en effet, le taux interbancaire le plus fidèle au taux directeur de la BCE. Néanmoins, à la différence du taux des opérations de refinancement principales de la BCE, l’Eonia est un taux de marché, non administré. Il peut, par conséquent, fluctuer librement autour du taux de refinancement des opérations principales (en étant borné par les taux de facilité de prêt marginal et les taux de facilité de dépôt marginal). L’écart entre l’Eonia et le taux directeur de la BCE est alors, pour l’essentiel, la résultante de divergences entre l’offre et les besoins de liquidité. Outre l’Eonia, nous considérerons également, dans cette étude, l’Euribor 3 mois, un autre taux de référence monétaire7. Le graphique 2.6 illustre la variation de l’Eonia, l’Euribor 3 mois ainsi que celle du taux directeur de la BCE sur la période 1999-2011.

Finalement, notre exercice nécessite également de disposer de données permet-tant de jauger l’évolution de la concurrence bancaire. À cet égard, une remarque préliminaire s’impose. Il n’existe aucun consensus sur la manière la plus à même de mesurer l’évolution de la concurrence (Northcott et al., 2004). Cette absence de 6. Celle-ci supposerait de considérer des taux monétaires de même maturité que les taux ban-caires.

7. L’Euribor pour (Euro Interbank Offered Rate) est un taux interbancaire offert entre banques pour la rémunération de dépôts dans la zone euro. Il est obtenu en calculant une moyenne quotidienne des taux prêteurs sur 13 échéances (dont le 3 mois) d’un échantillon de 57 établissements bancaires parmi les plus actifs de la zone euro.

FIGURE2.2 – Évolution des taux monétaires et du taux de refinancement principal de la BCE

Note : Graphique extrait de l’étude d’Aristei et Gallo (2014), élaboré à partir des données de la BCE.

consensus s’explique tant par l’abondance d’indicateurs dans la littérature que par le fait que la concurrence soit un concept protéiforme. Comme nous l’avons évoqué dans le chapitre 1, un courant de réflexion - l’école structuraliste - établi autour de Bain et Mason notamment, défend ainsi, par exemple, la vision d’une relation de cause à effet entre nombre de firmes sur un marché et pouvoir de marché. Ainsi, selon cette vision dont émane le modèle SCP, la structure du marché (S) déteint sur le comportement des firmes (C) et in fine sur les performances (P). Dans cette optique, des indicateurs de concentration, qui ont l’indéniable avantage d’être directement observables et non latents, sont parfaitement en mesure de rendre compte de l’évolution de la concurrence sur un marché. Pour d’autres, et c’est le cas de l’école (libérale) de Chicago, concurrence et concentration seraient deux concepts sans lien systématique. En d’autres termes, concurrence ne rime pas nécessairement avec atomicité. La théorie des marchés contestables en est l’exemple le plus éloquent. Cette théorie met, en effet, en exergue le fait qu’un petit nombre de firmes sur un marché peut conduire à une situation de pleine concurrence, notamment si ce marché se caractérise par l’absence de barrières à l’entrée et à la sortie. Dans cette vision, le pouvoir de marché ne peut pas être approché par le niveau de concentra-tion, mais doit être estimé à partir du comportement de la firme, dérivé de modèles microéconomiques de concurrence imparfaite. Plusieurs indicateurs répondent à cette caractéristique, parmi lesquels la H-statistique, développée par Panzar et Rosse (1987), et l’indice de Lerner (1934) sont les plus réputés. À ces deux mesures peut être ajouté un indicateur récent : l’indicateur de Boone (2008). L’indicateur transcrit l’idée que la concurrence a pour premier effet de favoriser la redistribution du marché et des profits vers les firmes les plus efficientes.

Dans ce contexte et en cohérence avec le chapitre premier de cette thèse, le degré de concurrence des différents marchés bancaires de la zone euro est estimé à partir de l’indice de Lerner. Nous testerons néanmoins la sensibilité de nos conclusions en considérant l’indicateur de Boone. Formellement, pour rappel, l’indice de Lerner est

une mesure du pouvoir de monopole établie de manière dynamique à l’échelle de chaque établissement bancaire et est défini comme le rapport de la différence entre le prix (Pi ,t) et le coût marginal (MCi ,t) de l’activité bancaire, ou plus génériquement, d’un bien sur le prix8.

À la différence des exercices réalisés dans le chapitre 1, nous n’estimerons pas ici l’indice de Lerner. La base de données Global Financial Development de la Banque mondiale répertorie, en effet, des estimations de l’indice de Lerner ainsi que de l’indicateur de Boone, sur la période 1996-2010, à l’échelle macroéconomique. En conséquence, il nous a semblé préférable de nous tourner vers ces sources de données officielles9. Contrairement aux variables de taux, disponibles à une fréquence mensuelle, les données relatives à la concurrence, mises à disposition par la Banque mondiale, ont une fréquence annuelle. Par voie de conséquence, en vue d’harmoniser la fréquence d’observations de nos données, nous procédons, à l’instar de Van Leuvensteijn et al. (2013), à une interpolation linéaire des variables de concurrence.

Dans un premier temps, afin de contextualiser les données utilisées dans cette section qui s’étendent sur une période brève de 2003 à 2010, nous exploitons les résultats de quelques recherches annexes pour décrire les tendances d’évolution de la concurrence. Fernandez de Guevara et al. (2005) rapportent, en mobilisant des données s’étalant de 1992 à 1999, que la concurrence bancaire a eu tendance à stagner, voire à décliner sur cette période, marquant un contrecoup par rapport aux années quatre-vingts caractérisées par une hausse formidable de la concurrence bancaire. Il existe néanmoins a priori des raisons de penser que notre période d’étude peut être caractérisée par une modification de la concurrence. Plusieurs éléments factuels étayent cette thèse. En premier lieu, la zone euro a été confrontée, depuis 1999, à des changements institutionnels et réglementaires majeurs avec l’introduction de l’euro en 1999 et, la même année, du plan d’action pour les services financiers de la Commission européenne dont les directives ont été progressivement transposées en lois nationales. En second lieu, la crise financière de 2008 et la récession qui a suivi ont, sans doute, eu une influence sur le niveau de concurrence bancaire, dans la mesure où cela a redessiné les contours de l’industrie bancaire européenne. Des acteurs ont quitté le marché et la plupart ont dû se restructurer. On ajoutera également que la création d’un nouveau cadre réglementaire, avec pour pierre angulaire les accords de Bâle III, s’est faite à l’aune de la crise, ce qui a certainement pu modifier la concurrence du marché.

Dans un second temps, nous pouvons désormais présenter les estimations de l’indice de Lerner mises à disposition par la Banque mondiale. Les graphiques 8. Pour une présentation détaillée de la mise en pratique de ce concept, nous renvoyons le lecteur intéressé au chapitre 1 ou à l’étude de Berger et al. (2009) par exemple.

9. La base de données construite par Clerides et al. (2015), comportant des estimations de l’indice de Lerner et de l’indicateur de Boone, sera mise à profit pour tester la sensibilité de nos conclusions.

FIGURE2.3 – Évolution de la concurrence bancaire dans la zone euro d’après l’indice de Ler-ner

2.3 et 2.4 illustrent les évolutions de la concurrence bancaire en zone euro10. Le graphique 2.3 permet d’apprécier les fluctuations temporelles de l’indice de Lerner pour chacun des pays de notre échantillon. Trois enseignements majeurs peuvent être tirés de ce graphique. Les marchés bancaires sont clairement de facto hété-rogènes en zone euro, et ce, malgré l’harmonisation du cadre réglementaire et la création d’un marché bancaire unique de jure. Le graphique souligne, de surcroît, une fragmentation en deux zones de l’union : d’un côté, certains pays périphériques de l’Europe (Portugal, Grèce et Irlande) dans lesquels la concurrence est d’une faible intensité et, d’un autre côté, les pays noyaux de la zone euro caractérisés par des marchés bancaires fortement concurrentiels. Le constat dressé illustre, pour un marché spécifique mais ô combien important, les différences structurelles qui caractérisent ces pays. Enfin, le graphique souligne que le degré de concurrence s’avère être un objet en mouvement. On constate, en effet, d’amples fluctuations à travers le temps.

À bien des égards, la crise a posé la question de la convergence macroécono-mique des États membres de la zone euro. Il nous semble donc que la convergence des structures financières ne doit pas être occultée du fait des boucles de rétroactions possibles entre les structures financières et les performances macroéconomiques. L’étude de Weill (2013) se saisit de cette question et fait le constat de l’existence d’un processus de convergence de la concurrence bancaire en Europe sur la période 2002-2008. De toute évidence, les progrès de l’intégration financière pouvant être observés sur cette période seraient à mettre sur le compte de l’arsenal réglementaire mis en place depuis 1999, visant à créer les conditions pour l’émergence d’un mar-ché bancaire unique en Europe. Sans remettre en cause ce diagnostic, l’inspection visuelle de nos séries laisse à penser que la crise financière aurait contrarié ce 10. Il convient de rappeler qu’une augmentation de l’indice de Lerner témoigne d’une diminution de la concurrence bancaire.

FIGURE2.4 – Diagramme en boîte (boîte à moustaches) de la concurrence bancaire

processus de convergence. Le graphique 2.4, présentant les diagrammes en boîte de la concurrence à travers le temps, suggère, en effet, une rupture du processus de convergence en l’année 2009.

La question de la convergence de la concurrence revêt, dans le cadre de notre étude, une importance critique. Rejoignant nos développements introductifs, il nous apparaît, en effet, que les effets adverses de la concurrence dans une zone monétaire unique tiennent davantage à l’hétérogénéité qu’à l’intensité des im-perfections concurrentielles. Ce constat nous ordonne, par conséquent, de tester rigoureusement la convergence des marchés bancaires en Europe sur notre période d’étude. À cet effet, nous étendons les travaux de Weill (2013) de façon à prendre en considération la période de crise et, de cette manière, vérifier si la crise a réellement freiné ou rompu le processus d’intégration financière entamé au début des années deux mille.

En vue d’analyser la convergence, Weill (2013) use de deux approches : la bêta-convergence et la sigma-bêta-convergence utilisées d’ordinaire en théorie de la crois-sance. La bêta-convergence, tout d’abord, permet de tester si la concurrence évolue à un rythme plus soutenu dans les pays les moins concurrentiels. Formellement, la méthode statistique consiste à régresser le taux de croissance sur le niveau initial de concurrence.

∆ln(ler neri ,t) = α + βl n(l er neri ,t −1) +

11

X

i =1

ci+ εi ,t (2.7)

où l er neri ,t correspond à l’indice de Lerner estimé par la Banque mondiale pour le pays i en date t et ci un effet fixe pays. Dans l’équation précédente, le paramètre β permet de tester la présence d’un processus de convergence. On conclut, en effet, à la présence de convergence si le coefficient estimé par les Moindres Carrées Ordinaires est négatif et significativement différent de zéro.

TABLEAU 2.4 – Bêta-convergence et Sigma-convergence

Coefficient Écart-type robuste Beta-convergence Constante -1.165*** 0.102 l n(l er neri ,t −1) -0.759*** 0.049 R2 ajusté 0.563 Sigma-convergence Constante 0.297*** 0.086 Wi ,t −1 -0.810*** 0.055 R2 ajusté 0.583

Ensuite, la sigma-convergence évalue l’état de la dispersion à travers le temps des observations par pays. On considère alors, dans ce cas, qu’il y a convergence si la dispersion diminue au fil du temps. Formellement, la sigma-convergence implique l’estimation de l’équation suivante :

∆Zi ,t= α + βZi ,t −1+

11

X

i =1

ci+ εi ,t (2.8)

où Zi ,t = l n(l er neri ,t) − Moyenne(l n(l er neri ,t)). Selon l’approche de la sigma-convergence si le coefficient β est significativement négatif, cela indiquerait une convergence des structures financières en Europe sur notre période d’étude.