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Préparation des outardes au lâcher : condition d’élevage et alimentation

Partie II : Comparaison du régime alimentaire d’outardes houbara sauvages

2.2. Préparation des outardes au lâcher : condition d’élevage et alimentation

destinés à être lâchés. Ces derniers suivent un protocole bien précis destiné à leur assurer une bonne adaptation au milieu naturel notamment en termes de digestibilité et de comportement alimentaire.

Les outardes sont nourries d’aliments artificiels et naturels : pellets d’aliment protéiné, granulés secs, vers de farine, grillons et luzerne. Pour la digestion des granulés, les individus en captivité ont besoin d’eau alors que dans la nature les outardes ne boivent pas (Dementi'ev 1966, Mian 1984).

Jusqu’à l’âge de 10 jours, les poussins sont maintenus en box d’élevage en bâtiment et tous les aliments leur sont donnés à la pince. Cette dernière est tenue à proximité du sol de manière à inciter l’oiseau à regarder vers le sol afin de l’initier au fur et à mesure à chercher sa nourriture au sol. L’inconvénient de cette étape est qu’en absence de leur mère, les poussins dépendent entièrement des soigneurs ce qui pourra se répercuter sur

leur comportement ultérieur : ils risquent d’associer l’alimentation à la présence humaine.

Apres 10 jours les poussins passent en cage de pré-lâcher en extérieur où au fur et à mesure, les contactes avec l’homme diminuent. Ils commencent alors à consommer seuls les insectes qui leur sont donnés au sol, jetés par une petite fenêtre (ouverture pratiquée sur la partie opaque de la cage afin de dissimuler le soigneur).

Après un mois dans les cages de pré-lâcher, les outardes passent en tunnels. Les aliments leur sont déposés chaque jour dans des endroits différents, les grillons sont disposés dans les buissons. De cette manière, les individus ne s’habituent pas à des endroits précis et sont forcés à chercher leur nourriture.

Six semaines avant le lâcher les outardes sont progressivement habituées à l’absence en eau. Durant 15 jours les oiseaux reçoivent de l’eau un jour sur deux, puis l’eau est complètement retirée. L’absence d’eau est compensée par un apport supplémentaire en luzerne fraiche. Les individus sont lâchés au stade juvénile à des âges allant de 4 à 10 mois.

2.3. Etude du régime alimentaire 2.3.1. Choix des échantillons

Soixante quatorze estomacs d’outardes houbara sauvages et lâchées (Tableau 4, Figure 10) ont été prélevés, entre 2004 et 2008 lors de chasses. Les individus lâchés par l’ECWP sont équipés de bagues ou de puces électroniques grâce auxquelles nous avons pu les distinguer des individus sauvages. Ces estomacs ont été collectés sur les mêmes périodes et dans les mêmes régions en proportions statistiquement comparables (Tableau 4). Concernant la fraction végétale, sept contenus stomacaux des 32 estomacs appartenant aux individus lâchés n’ont pas pu être déterminés car ils étaient trop dégradés.

Tableau 4. Nombre d’estomacs d'outarde houbara (Chlamydotis undulata) sauvages et lâchées collectés par région et par année. Les collectes ont été réalisées en période de non reproduction.

Sauvages Lâchées

Total

Mâle Femelle Indéterminé Mâle Femelle

Missour 2004 12-14 janvier 3 5 0 6 3 17 2006 27-28 janvier 3 7 0 4 2 16 Bouârfa 2007 10-16 novembre 26 décembre 1 janvier 2008 13 8 3 7 10 41 Total 19 20 3 17 15 74 42 32*

* En ce qui concerne la fraction végétale, seulement 25 contenus stomacaux appartenant aux individus lâchés ont été utilisés dans les analyses. Les sept autres étaient trop dégradés.

2.3.2. Description du régime alimentaire

L’identification des fragments animaux et végétaux présents dans les contenus stomacaux a été réalisée par comparaison avec des collections de références : un herbier, une collection de structures cuticulaires végétales, une collection d’invertébrés et une collection de fragments d’invertébrés (Partie I). Cette identification a été effectuée sur la totalité de la fraction animale, alors que pour la fraction végétale, elle a été réalisée à partir d’un sous échantillon de 200 fragments par estomac (Partie I).

2.3.3. Analyses statistiques

Plusieurs paramètres ont été utilisés pour comparer le régime alimentaire des outardes sauvages à celui des individus lâchés : (1) les proportions relatives des deux fractions, animale et végétale, calculées sur la base des mesures de masses sèches, (2) la fréquence d’occurrence des taxons, (3) l’abondance relative des taxons, (4) l’indice de diversité H’ de Shannon (Shannon & Weaver 1949, Lambshead et al. 1983) et (5) la dissimilarité des assemblages spécifiques.

La variation de la proportion relative des deux fractions entre les contenus stomacaux des deux catégories d’outardes a été testée via une ANOVA à un facteur sous STATISTICA 6 (StatSoft 2008).

Les matrices de dissimilarité ont été calculées en utilisant l’indice de Bray-Curtis (Clarke 1993, Legendre & Legendre 1998). Dans le cas de la fraction végétale, la matrice a été calculée en se basant sur les abondances spécifiques. En revanche, pour la fraction animale, elle a été réalisée en se basant sur les abondances génériques en raison du grand nombre d’espèces indéterminées. Du fait de la forte hétérogénéité des abondances, l’indice de Bray-Curtis a été calculé après transformation des abondances en racine quadratique (Anderson & Willis 2003).

Dans la première partie, chez les sauvages, la régression multiple multivariée non paramétrique basée sur les distances de dissimilarité a montré une variation significative de la composition des fractions végétale et animale selon la région et l’année. Aucune variation selon le sexe n’a été observée. Les mêmes résultats ont été obtenus en analysant la variation de la composition des estomacs d’individus lâchés (Tableau 5). Les deux échantillons (estomacs d’individus sauvages et lâchés) ayant été collectés sur les mêmes régions et aux mêmes années, et présentant la même variance, nous avons comparé les compositions des fractions animale et végétale entre les deux catégories à l’aide d’ANOVA non paramétrique basée sur les distances de dissimilarité. Les F- statistic et les P values sont calculées après 9999 permutations des distances de dissimilarité (Anderson 2001, McArdle & Anderson 2001). Cette analyse a été effectuée à l’aide du logiciel DISTLM (Anderson 2003, Anderson 2004b).

Tableau 5. Variations de la composition des assemblages spécifiques des végétaux et génériques de la fraction animale selon la région, l’année et le sexe. Ces variations ont été testées via une régression multiple multivariée non paramétrique basée sur les distances de dissimilarité effectuée à l’aide du logiciel DISTLM forward.

Sauvages (n=39) Lâchés (n=25, 32)* Composition spécifique des végétaux Effet région F= 4,9293 ; P=0,0001 F=4,1803 ; P=0,0006 Effet année F=4,4030 ; P=0,0001 F=3,4605 ; P=0,0009 Effet sexe F=0,8992 ; P=0,5306 F=0,9218 ; P=0,5099 Composition générique des animaux Effet région F=18,8126 ; P=0.0001 F=10.6956 ; P=0.0001 Effet année F=9,8660 ; P=0.0001 F=8.7176 ; P=0.0001 Effet sexe F=1,7790 ; P=0.0994 F=0.6839 ; P=0.6748

* 25 estomacs d’individus lâchés ont été utilisés pour étudier la composition spécifique des végétaux contre 32 pour les animaux.