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Chapitre 2 Matériel et Méthodes

I. Préparation des matériaux catalytiques

L’objectif de cette thèse est d’étudier, d’une part, l’influence de précurseurs catalytiques imprégnés sur les mécanismes de dégradation de la biomasse (chapitre 3). D’autre part, nous avons étudié l’effet catalytique de précurseurs déposés sur un support catalytique pour convertir des vapeurs de pyrolyse (chapitre 4). Dans cette partie, nous décrivons le protocole d’imprégnation utilisé pour insérer le précurseur métallique au sein de la matrice lignocellulosique de la biomasse. Dans un second temps, nous présentons le protocole mis en œuvre pour préparer des catalyseurs supportés sur charbons actifs.

1. Préparation de la biomasse imprégnée

a. Mise en forme de la biomasse

L’eucalyptus camaldulensis est un bois dur utilisé dans de nombreux pays pour des applications énergétique ou matériaux. L’eucalyptus camaldulensis est fréquemment exploité dans les plantations énergétiques en raison d’un rendement à l’hectare important [159].

Nous nous sommes procuré des troncs d’eucalyptus camaldulensis au parc Bangré Wéogho à Ouagadougou au Burkina Faso. Les troncs ont été découpés et broyés après avoir pris soin de retirer l’écorce dont la composition chimique et la teneur en cendres peut varier légèrement. Les copeaux obtenus ont été mélangés pour s’assurer d’avoir un lot homogène. Ces copeaux ont ensuite été tamisés avec une granulométrie de 0,5<φ<2mm pour les essais de pyrolyse en lit fixe et de 0,2<φ<0,5mm pour les essais en lit fluidisé.

b. Imprégnation de la biomasse sous vide

L’imprégnation consiste à intégrer un sel métallique dans la matrice lignocellulosique de la biomasse. Deux protocoles d’imprégnation ont été développés par Richardson au sein de l’unité de recherche : l’imprégnation à pression atmosphérique et l’imprégnation sous vide [27]. Dans les deux cas, la biomasse est imprégnée en excès de solution. Bien qu’elle nécessite d’utiliser une plus grande quantité de précurseur, cette technique permet une imprégnation homogène de tous les copeaux de bois.

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Nous avons choisi d’imprégner la biomasse sous vide afin de réduire le temps de contact entre la biomasse et la solution d’imprégnation. En effet, la biomasse – et plus particulièrement l’hémicellulose - est progressivement dégradée au cours de l’imprégnation avec une solution acide [24]. Le protocole utilisé a été légèrement adapté du protocole développé par Richardson [27]. La biomasse est séchée une nuit à l’étuve à 105°C avant d’être imprégnée. Les solutions d’imprégnation ont été préparées à partir de sels de nitrate ou d’acétate fourni par Sigma Aldrich (pureté >97%) : Zn(NO3)2·6H2O, Co(NO3)2·6H2O, Fe(NO3)3·9H2O, Ni(NO3)2·6H2O, Ce(NO3)3·6H2O, Cu(NO3)2·3H2O, Mn(NO3)2·4H2O et Mn(CH3COO)2.4H2O.

Le pH des solutions de nitrate métallique est acide mais il varie fortement en fonction de la nature du métal. En effet, la solution de nitrate de fer a un pH très acide alors que les solutions de nitrate de cobalt, de nickel et de cuivre sont faiblement acides. Le pH de la solution dépend directement de la dureté des acides (tableau 4) calculée selon la théorie HSAB (Hard and Soft Acids and Bases) développée par Pearson [160].

Cations Mn2+ Fe3+ Co2+ Ni2+ Cu2+ Zn2+ Ce3+

Dureté (eV) 9,3 13,1 8,2 8,5 8,3 10,9 11,9

Tableau 4 Dureté des acides de Lewis imprégnés dans la biomasse

Le pH de la solution est un paramètre crucial, en effet un pH trop acide entraîne l’hydrolyse partielle de l’hémicellulose [24]. De plus, Davidsson et al. [161] a montré que l’utilisation d’une solution acide réduit la teneur en inorganiques naturellement présent dans la biomasse (principalement K, Ca, Mg et Na). A l’inverse, lorsque le pH est trop élevé, les cations forment un précipité qui empêche d’imprégner la biomasse de manière homogène. La solution de nitrate de fer précipite pour un pH de 2,1 [162] alors que les autres solutions précipitent pour des pH plus élevés. Le pH des solutions d’imprégnation a donc été fixé à 1,9 afin d’éviter la formation de précipités tout ayant le pH le plus élevé possible pour limiter la dégradation de la biomasse.

Le précurseur métallique est dissous dans l’eau distillée (5mL/g de biomasse), puis le pH est ajusté à 1,9+/-0,1 à l’aide de quelques millilitres d’une solution diluée d’acide nitrique (ratio volumique : 1 HNO3 : 10 eau) ou avec de l’ammoniaque. Pour une imprégnation à teneur molaire constante (0,5mmol cations/g de biomasse), la concentration de la solution oscille entre 1,2 et 1,8mol/L en fonction de la nature du métal. La biomasse est placée dans un cristallisoir et est recouverte d’une grille maintenue par une masse en acier inoxydable. La solution d’imprégnation est versée dans le cristallisoir. Le volume de solution est suffisant pour immerger la biomasse. Le cristallisoir (contenant le mélange biomasse et solution d’imprégnation) est placé dans une cloche à vide pour être soumis à un vide primaire de 40mbars afin de retirer la majeure partie de l’air présent dans les pores de la biomasse (figure 27). Il est ensuite soumis à un vide secondaire (Psecondaire= 22mbars) pendant 20 minutes. Le cristallisoir est ensuite maintenu à pression atmosphérique pendant 2 heures. La biomasse est filtrée sur Büchner puis lavée avec de l’eau distillée (5mL/g de biomasse) pour retirer les ions qui ne seraient pas fixés à la structure lignocellulosique. La biomasse imprégnée est ensuite placée dans une étuve ventilée à 105°C.

Le faible pH des solutions d’imprégnation réduit la teneur en alcalins et en alcalino-terreux initialement présents dans la biomasse [161], de plus certains auteurs ont montré que ces inorganiques affectaient significativement les rendements en bio-huiles et plus particulièrement les rendements en anhydrosaccharides [163-165]. Afin de distinguer les effets liés à l’acidité de la

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solution et les effets catalytiques des cations imprégnés, nous avons préparé de la biomasse lavée en appliquant le protocole d’imprégnation ci-dessus tout en utilisant une solution aqueuse dont le pH a été ajusté à 1,9 avec quelques gouttes d’acide nitrique.

Figure 27 Dispositif expérimental d'imprégnation sous vide en excès de solution

2. Préparation de catalyseurs supportés sur charbons actifs

Un charbon actif commercial (Norit RX1.5 EXTRA) a été utilisé en tant que support catalytique. Il s’agit d’un charbon issu de biomasse, activé à la vapeur et lavé. Ce charbon possède une surface spécifique importante (1370m²/g) et une teneur en cendres faible (< 3%m). Il se présente sous la forme d’un extrudé (φ=1,5mm L=5mm). Ce charbon a été imprégné avec trois précurseurs catalytiques - Ce(NO3)3·6H2O, Fe(NO3)3·9H2O et Mn(NO3)2·4H2O – selon un protocole adapté des travaux de Gonçalves et al. [166]. Le charbon est séché une nuit à l’étuve. La solution d’imprégnation est préparée à partir du précurseur catalytique dissous sous agitation magnétique dans de l’eau distillée. La solution contient 10mL d’eau et 0,5g de précurseur catalytique par gramme de charbon actif. Le charbon actif et la solution d’imprégnation sont mélangés dans un ballon. L’ensemble est placé sur un évaporateur rotatif. Un vide primaire de 30mbars est appliqué pendant 15 minutes afin de faire pénétrer la solution d’imprégnation dans les pores du charbon. Ensuite, le ballon est placé dans le bain thermostaté préalablement chauffé à 50°C puis la pression est ajustée à 90mbars soit légèrement en dessous de la pression de vapeur saturante23. La pression est progressivement réduite jusqu’à évaporation complète du solvant (figure 28). Le charbon imprégné est séché une nuit à l’étuve ventilée à 105°C. Le charbon actif est calciné pendant 4h sous atmosphère inerte (N2) à 400°C (rampe à 5°C/min pendant 1h20 puis palier de 2h40 à 400°C). L’originalité de cette méthode d’imprégnation repose sur le fait que tous les cations métalliques en solution sont imprégnés sur le support carboné [167].

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Figure 28 Dispositif expérimental d'imprégnation mis en œuvre pour imprégner le charbon actif sous vide et à température imposée (à gauche). A droite, charbons actifs imprégnés.