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CADRE THÉORIQUE

2.3.2 «LES» COMPÉTENCES

4.3 INTÉGRATION DES RÉSULTATS

4.3.2 PRÉPARATION À UNE AFFECTATION EN INTERPRÉTATION

La préparation à une affectation en interprétation est également une activité professionnelle des interprètes qui faisait consensus entre les trois groupes de discussion. Un participant interprète résume quelques-unes de ses composantes :

Participant 2 (interprète) : Tout ce qui est préparation, je le mettrais ensemble : […] préparation du vocabulaire, préparation linguistique, préparer les signes avec les documents lus en classe et les vidéos, préparation psychologique, préparation physique […].

Dans cette activité, la préparation linguistique réfère à celle effectuée à partir des documents textes ou audio-vidéo abordés au cours de l’affectation. Il peut s’agir également de rencontrer les parties prenantes pour collecter de l’information ou bien faire des recherches sur un domaine dans lequel l’interprète est appelé à travailler. Elle consiste à bien comprendre le contenu à interpréter et de trouver des équivalents lexicaux entre les deux langues. La préparation psychologique réfère au fait de s’informer sur plusieurs paramètres propres à l’affectation afin de bien saisir les enjeux de la situation, tels le milieu, le contexte, le conférencier ou l’audience. La prise de conscience des possibles liens entre l’interprète et les utilisateurs en font partie. Finalement, la préparation physique réfère à l’organisation logistique sur place, tout juste avant le début de l’affectation pour s’assurer que le service soit rendu de manière optimale. Le fait qu’un interprète réfère à cette typologie n’est pas innocent : il s’agit de celle proposée par Bélanger (1996) dans un article bien connu du milieu de l’interprétation au Québec. Un des participants au groupe des employeurs résume bien les différents aspects de cette activité :

Participant 23 (employeur) : Donc, avoir toute l’information, avoir les textes à l’avance, avoir les documents quand tu te présentes. Il faut connaître l’environnement dans lequel tu vas travailler : si c’est un milieu scolaire, dans une classe, il faut connaître la classe, rencontrer l’enseignant, s’informer sur l’élève ; donc avoir le plus d’information possible pour être prêt pour travailler. Et c’est quoi le cours ? Il est important de rencontrer le prof qui est là. Est-ce que c’est un cours magistral ? Est-ce qu’il va présenter des films ? Est-ce qu’il va donner la parole aux élèves ? Si oui, qui sont ces élèves ? Donc, il y a beaucoup un travail «avant», de préparer et d’organiser pour savoir et être prêt quand tu arrives.

Concernant l’adoption du terme «préparation physique» (Bélanger, 1996), nous avons choisi d’adopter le terme «préparation logistique» afin d’enlever toute ambiguïté avec un autre type de préparation physique, soit celle qui porte sur le maintien de la santé et la sécurité en milieu de travail, comme l’évaluation de stratégies d’interprétation ergonomiques, des étirements, etc. Une petite nuance s’impose sur le consensus entre les trois groupes de discussion concernant cette activité. En effet, le groupe des employeurs en était arrivé à une catégorisation des activités où une des activités s’appelait «préparation» et l’autre «logistique et suivi». La première,

«préparation» référait à celle qui est faite avant d’arriver sur place, donc la préparation linguistique et psychologique, pour reprendre la typologie de Bélanger (1996). L’activité «logistique et suivi» référait à la préparation logistique sur place avant l’affectation en plus d’y incorporer des aspects de suivi après avec les personnes présentes. La définition adoptée pour cette activité a donc été celle proposée par les interprètes et les Sourds. Nous avons donc inclus la portion «logistique» des employeurs à cette activité et avons intégré la portion «suivi» à l’activité de sensibilisation puisque c’est dans cette activité que les interprètes y faisaient référence. À ce sujet, Perrenoud (2001) mentionne que deux situations sont professionnellement différentes lorsqu’il y a, entre autres, rupture des enjeux. Or, l’enjeu des trois types de préparation est le même, comme le démontre l’article de Bélanger (1996) qui explique que les trois types de préparation forment un tout ayant une même visée.

Finalement, pour les Sourds, la préparation est également une composante essentielle du travail de l’interprète. Un des participants donne en exemple l’impact que peut avoir un interprète qui ne prend pas au sérieux cette composante de sa pratique professionnelle :

Participant 14 (Sourd) : J’avais à présenter [un travail dans le cadre de mes études]. Trois semaines avant ma présentation, j’ai donné toute la documentation à l’interprète : […] plusieurs lectures, j’avais également commenté ma présentation PowerPoint de manière détaillée et l’interprète avait toute cette documentation. Pour me rendre compte, arrivé au jour J, que l’interprète ne s’était pas du tout préparé […]. C’est une faute grave, c’est une forme d’audisme également. L’audisme, ce n’est pas juste dans les attitudes, c’est également dans la préparation, dans le fait de bien faire son travail et j’ai eu l’air folle lors de ma présentation […], j’aurais pu échouer le cours.

Il est à noter que le terme audisme réfère à toute forme de discrimination subie par les personnes sourdes ou malentendantes en lien avec leur surdité. On peut l’apparenter aux termes «sexisme», «racisme», etc.

Parmi les attitudes requises, on mentionne la curiosité et l’intérêt pour le sujet interprété (catégorie «Prévenance»), le sens de l’organisation et l’autonomie. Parmi les connaissances requises, il y avait les modalités de préparation, naturellement.

Participant 9 (interprète) : Pour arriver à bien se préparer, il faut savoir comment. Je me souviens que pour moi, c’était compliqué au début. Ça me prenait des heures pour me préparer et aujourd’hui c’est mieux. Donc apprendre le «comment», qu’est-ce qu’on fait avec un texte.

Parmi les autres connaissances proposées, on retrouve les modalités de création de signes techniques, l’utilisation des outils technologiques pour la recherche d’information et l’utilisation de banques de signes techniques qui étaient mentionnés. On retrouve également une culture générale solide, des éléments propres à la santé et la sécurité pour la gestion du stress, une connaissance des types de clientèles ainsi que les modalités d’autoévaluation afin de bien connaître ses forces et faiblesses avant une affectation.

La liste complète des actions, attitudes et connaissances mentionnées par les groupes de discussion peut être consultée à l’Annexe 15.2.