• Aucun résultat trouvé

CADRE THÉORIQUE

2.3.2 «LES» COMPÉTENCES

3.3 MÉTHODE DE CUEILLETTE DE DONNÉES

3.3.1 DESCRIPTION DES OUTILS

Les recherches de Madore (1998) et Parisot et al. (2008) présentées dans notre cadre théorique concernant les besoins de formation des interprètes en langue des signes ont chacune utilisé un questionnaire distribué auprès de praticiens de la profession comme méthode de collecte de données. Notre principale critique des données recueillies par ce type d’instrument, et particulièrement dans ces deux recherches, consiste au fait que les types de contenus sont déjà proposés par les auteurs de ces recherches et sont ensuite validés ou réfutés par les répondants. Or, chacune de ces recherches ne précise pas comment cette liste de contenus est constituée. Afin d’être cohérents avec l’approche par compétence que nous avons définie dans notre cadre théorique, nous proposons de partir des pratiques professionnelles de référence qui ont cours afin de constituer l’outil qui servira à déterminer les contenus d’une formation professionnelle initiale en interprétation LSQ-français. Or, comment déterminer ces pratiques professionnelles de référence ?

Selon Giger et Stroumza (2007), le moyen privilégié par la recherche pour accéder au travail réel des praticiens d’une profession est la parole des praticiens. Toujours selon ces auteurs, l’analyse des pratiques ou l’analyse de travail a justement pour objectif d’adapter les formations dans une perspective de professionnalisation. Les recherches présentées dans cet ouvrage ont toutes pour objectif d’accéder au réel par le langage, c’est-à-dire comprendre les pratiques particulières de certains enseignants par le biais d’entretiens individuels et adapter les formations en fonction des

pratiques réelles sur le terrain. Toutefois, dans le cas de la présente recherche, l’objectif n’est pas de connaître certaines pratiques professionnelles spécifiques, mais bien les pratiques professionnelles de référence. C’est pourquoi nous proposons de recueillir nos données par des groupes de discussion, également appelés «focus groups».

Les groupes de discussion présentent plusieurs avantages théoriques qui répondent aux objectifs de cette recherche. Selon Duchesne et Haegel (2009, pp. 42-43), il y a deux dimensions aux groupes de discussion, qu’elles appellent «entretiens collectifs». La première est le fait que ce sont avant tout des entretiens de recherche, qui ont pour but de produire «des données discursives destinées à l’analyse, provoquées et recueillies par un chercheur». Ensuite, ils sont collectifs, c’est-à-dire que les relations sociales et les interactions entre les participants doivent être prises en compte. Les personnes qui constituent le groupe peuvent former ce que les auteurs appellent un groupe «d’inter-connaissance», c’est-à-dire qu’ils partagent une expérience commune. Comme le soutient Morissette (2009), l’interaction en situation de face-à-face avec d’autres personnes qui partagent une expérience commune contribue à la coconstruction de sens par les différents participants. Le concept de coconstruction s’inscrit dans un paradigme constructiviste où le langage produit par les praticiens est une représentation de la réalité et non la réalité comme telle. Or, dans un groupe de discussion, le discours produit par les interactions est le résultat d’une négociation du sens entre les participants à la recherche. Pour reprendre l’expression de l’auteure, les pratiques professionnelles sont «mises sur la table» par les différents participants et leur sens constamment négocié et remis en question. Au final, la représentation du réel qui résulte de ce processus intersubjectif tend à produire un discours plus normatif, car on en arrive à une compréhension partagée de certaines conventions (Duchesne & Haegel, 2009). Or, cette recherche tient justement à définir quelles sont les pratiques professionnelles de référence en interprétation LSQ-français dans l’optique de mettre en place une formation professionnelle. C’est pourquoi les groupes de discussion sont appropriés.

Un autre avantage des groupes de discussion comme méthode de collecte de données, selon Stewart et Shamdasani (2015), est l’effet d’entraînement («snowballing») que l’on retrouve en dynamique de groupe. Ainsi, un commentaire fait par un des participants entraîne généralement une chaîne de réponses par les autres. Il en résulte une synergie qui s’installe lors des groupes de discussion qui fait en sorte que l’effort combiné du groupe produit un éventail de données plus

large et plus complet que la somme d’entretiens individuels avec chacun des participants pris séparément. Il s’agit d’un avantage méthodologique dans le cadre de cette recherche. L’objectif est de constituer un profil de sortie qui couvre l’ensemble des compétences à maîtriser au terme d’un curriculum de formation professionnelle. En organisant des groupes de discussion, le chercheur maximise ainsi ses chances de couvrir toutes les facettes du travail de l’interprète. Si la dynamique lors d’un groupe de discussion peut être un aspect positif dans le fait que les données produites ont tendance à couvrir un ensemble plus large d’informations, elle peut également être un aspect négatif. Selon Duchesne et Haegel (2009), si le groupe n’est pas l’objet d’analyse de la recherche comme telle, mais est plutôt un outil de production d’un discours concernant un objet d’analyse qui est externe (ce qui est le cas de cette recherche), la dimension collective du groupe de discussion peut devenir un inconvénient, car la variété des données produites peut sortir du cadre de l’objectif de la recherche si le groupe s’emballe sur un sujet en particulier et ne répond plus concernant l’objet de la recherche tel quel. La dynamique peut donc aussi devenir une entrave à la cueillette de données pertinentes. D’où l’importance du rôle de l’animateur qui doit intervenir efficacement pour recadrer les discussions.

Maintenant que nous avons défini l’outil de cueillette de données de cette recherche et justifié pourquoi il est le plus adapté pour répondre à l’objectif spécifique de notre recherche, attardons- nous à notre échantillonnage et à la description des participants.

3.3.2 CONSTITUTION DES GROUPES ET DESCRIPTION DES