• Aucun résultat trouvé

1. L’approche par les pratiques

Nous nous nous inscrivons dans une approche par les pratiques (Gherardi, 2008; Jarzabkowski, 2004; Knorr Cetina et al., 2005), que quelques travaux en contrôle de gestion ont adopté (Ahrens & Chapman, 2007; Méric, Bazin, & Magne, 2012). Ahrens et Chapman (2007) ont ainsi montré de quelle façon les outils et informations du contrôle de gestion constituent une ressource pour l’action et permettent de faire le lien entre les différentes activités des acteurs (Ahrens & Chapman, 2007).

Méric (2009) définit la notion de pratique comme un « agrégat d’éléments ostensifs (modèles d’action explicités dans un discours), performatifs (les actions effectivement entreprises) et d’artefacts (outils et productions matérielles), mis en œuvre dans ou par des ’actants’, et en constante interaction » (Méric, 2009, p. 113). Cette définition fait écho à notre approche qui

consiste à chercher à saisir l’articulation entre les artefacts et les usages de l’évaluation de l’impact social. Elle nous guide également dans la façon de considérer simultanément les discours, actions et outils, en regardant leurs interactions et leurs influences les uns vis-à-vis des autres.

2. Une approche sociotechnique et appropriative des instruments de gestion

Notre thèse s’appuie également sur l’approche sociotechnique pour analyser la construction de l’évaluation de l’impact social. En effet, pour comprendre l’articulation entre les outils et les usages, il nous parait intéressant d’analyser le déroulement du processus de façon dynamique en observant les rôles respectifs des actants humains et des actants non-humains (Callon, 1986), de façon à comprendre comme le processus évolue sous l’impulsion respective de l’agency humaine et de l’agency matérielle (Leonardi, 2011; Orlikowski, 1992). Pour décrire et analyser une partie de notre matériau empirique, nous avons choisi en particulier d’adopter le cadre de l’anthropologie symétrique (Latour, 1997) dérivé de la sociologie de la traduction (cf. chapitre 6).

Par ailleurs, l’analyse de la construction des instruments de gestion s’inscrit dans la « perspective appropriative » que nous avons détaillée dans le chapitre 2 (Grimand, 2012; de Vaujany, 2006b). Elle nous parait en effet pertinente pour analyser le processus de construction des instruments de gestion. D’une part, cette perspective considère que la

149

frontière entre conception et usage des outils est peu pertinente (de Vaujany, 2006b) dans la mesure où l’appropriation est un processus sur la durée qui amène souvent à modifier l’outil. Dans cette optique, la construction des outils de gestion est vue comme un processus quasi- permanent. D’autre part, la perspective appropriative invite à prendre en compte non seulement la dimension rationnelle des instruments de gestion (les fonctions gestionnaires comme l’aide à la décision, le pilotage, le contrôle), mais également les aspects socio- politiques, psycho-cognitifs ou encore symboliques des instruments de gestion (Grimand, 2012; de Vaujany, 2006b).

3. Une approche inspirée de la théorie néo-institutionnelle

Enfin, notre thèse adopte également le cadre proposé par l’approche néo-institutionnelle (DiMaggio & Powell, 1983). Ce cadre nous permet de prendre en compte et d’analyser l’articulation entre la situation de l’environnement externe en matière d’évaluation de l’impact social et les décisions et actions de l’organisation en termes de construction de l’EIS. D’une part, des éléments de l’environnement externe à l’organisation étudiée sont susceptibles de jouer un rôle dans la façon dont les acteurs organisationnels décident et agissent. En particulier, l’approche néo-institutionnelle nous permet d’élargir la prise en compte du contexte à des idées présentes dans l’environnement externe qui ne sont pas exprimées sous forme de demandes explicites par des acteurs externes, mais qui sont perçues par les acteurs internes comme des attentes implicites. En adoptant la perspective des travaux plus récents dans le champ néo-institutionnel (Boiral, 2007; Oliver, 1991), ce cadre nous permet également d’envisager une certaine complexité dans les réponses de l’organisation à son environnement institutionnel.

151

Deuxie me partie : Le terrain de la the se

La deuxième partie de la thèse présente l’ensemble des éléments méthodologiques et empiriques de la thèse. Elle est composée de quatre chapitres.

La méthodologie de la thèse est présentée dans le chapitre 4. Le chapitre traite de la constitution du projet de recherche, de la façon dont le matériau a été construit à travers notre position de recherche-intervention, et enfin du recueil et du traitement des données empiriques.

Le chapitre 5 est consacré à la présentation de ce que nous avons appelé « le cadre empirique », c’est-à-dire le contexte dans lequel s’inscrivent nos données empiriques. Il consiste à présenter de façon détaillée l’ensemble des informations utiles pour la compréhension de nos données empiriques présentées dans les chapitres 6 et 7. Une présentation détaillée de l’organisation de terrain y figure notamment.

Les chapitres 6 et 7 sont consacrés à la description des données empiriques de la thèse. Les données empiriques sont séparées en deux niveaux d’observation, qui correspondent à chacun des deux chapitres. Cette séparation correspond d’abord aux deux dimensions de notre objet de recherche que nous avons distinguées en introduction de la thèse. En effet, la construction de l’évaluation de l’impact social amène à se demander de quelle façon évaluer l’impact social d’une activité à but non lucratif, mais aussi la façon dont une pratique d’évaluation de l’impact social est déployée au sein d’une organisation à but non lucratif. Une analyse préliminaire des données empiriques collectées sur le terrain a également rendu pertinente la séparation du matériau empirique en deux niveaux d’observation.

Ainsi, le chapitre 6 traite de ce que nous avons appelé le « niveau organisation », c’est-à-dire la façon dont la question de l’évaluation de l’impact social a été abordée par les acteurs organisationnels ainsi que les actions mises en place pour qu’elle se déploie. Nous décrivons dans le chapitre la trajectoire du sujet de l’évaluation de l’impact social au sein de l’organisation de terrain.

Le chapitre 7 porte sur le « niveau entité », c’est-à-dire la façon dont l’évaluation de l’impact social d’entités spécifiques de l’organisation a été mise en place. Nous présentons cinq démarches d’évaluation dans ce chapitre. La conclusion du chapitre 7 est consacrée aux liens entre le niveau organisation et le niveau entité du matériau empirique.

152

première personne. Le « je » renvoie à notre position d’intervenant au sein de l’organisation, et est utilisée dans les chapitres 6 et 7 lors de la description des données empiriques. Nous l’utilisons également dans le chapitre méthodologique (chapitre 4) pour expliquer l’émergence de la recherche et le positionnement que nous avons adopté, dans une posture presque autobiographique. Le « nous » correspond à notre position de chercheur, et est utilisé pour rendre compte de l’analyse du sujet et des données empiriques.

153