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La polis comme régime de non-domination

Dans le document L'opposition public-privé (Page 94-122)

La polis et l’ oïkos , ainsi que leur prolongements modernes

2.4. La polis comme régime de non-domination

Précédemment, j’ai établi un tableau comparatif des propriétés de la polis et de celles de l’oïkos. Comme nous l’avons vu, les premières ont un rapport de contrariété avec les secondes. A cela, j’ai ajouté que les propriétés de l’oïkos peuvent être attribuées aux barbares. Elles peuvent même l’être généralement à la physis par opposition au nomos en tant qu’ensemble des lois justes de la polis. Pour le dire autrement, le monde extérieur est, comme l’oïkos, un état de nature. Seule la polis prise en elle-même, c’est-à-dire en tant qu’elle n’inclut pas l’oïkos, est un état de « culture », un état civilisé.

Ainsi, le monde extérieur à la polis a la contrainte physique pour modalité et cette contrainte physique trouve son issue dans la domination : le citoyen se rend maître de la nature, dont l’oïkos, comme il se rend maître de ses ennemis. Lors de la confrontation physique qu’est la guerre, il faut vaincre et dominer, ou perdre et être soi-même dominé165. De fait, il était d’usage de réduire les vaincus en esclavage, donc de les transférer du monde extérieur à sa contrepartie intérieure, l’oïkos : « La loi, en effet, est une sorte d’accord général en vertu duquel les prises de guerre appartiennent au vainqueur. »166 Dans les relations de la polis avec le monde extérieur, l’idéal de non- domination s’exprime alors dans le fait que le citoyen est aussi soldat : il défend la polis, l’espace de non-domination, contre le risque de domination extérieure. C’est d’ailleurs la raison d’être théorique des classes censitaires de citoyens, par exemple celle des chevaliers, que Solon parmi d’autres avait mises en place167. Ceux qui combattent le mieux la domination étrangère sont aussi réputés les plus aptes et les plus motivés à combattre la domination à l’intérieur, c’est-à-dire à empêcher politiquement l’émergence d’un despote. Ils se situent donc plus haut dans l’échelle de l’exercice du pouvoir par les citoyens, en vertu d’une conception de l’égalité proportionnée au mérite –la forme du

164 M

ONTAIGNE, Essais, livre I, chap. XXVIII, p. 188.

165

Clausewitz définit la guerre par l’exercice de la contrainte physique en vue d’exercer la domination sur le vaincu : « Der Krieg ist also ein Akt der Gewalt, um den Gegner zur Erfüllung unseres Willens zu

zwingen. » CLAUSEWITZ, Vom Kriege, § 2, pp. 191-192.

166 A

RISTOTE, Les politiques, 1255a.

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suffrage censitaire qu’elle a souvent pris n’en fait donc pas une conception économique de l’égalité (sur l’égalité, voir partie III, 1.2.3). En somme, la polis prise en elle-même est un espace de non-domination pris pour ainsi dire en étau entre deux espaces de domination, deux états de nature, le monde extérieur et l’oïkos. C’est de cet espace de non-domination qu’il va maintenant être question.

2.4.1. La non-domination comme alternative

Comme l’a montré Pettit, « non-domination » est une manière valable de caractériser la liberté qu’il dit « républicaine », donc les républiques168. Même si cela reste un peu simplificateur, il y a là une raison de considérer la polis comme une république : si elle ne l’est pas de manière achevée, elle l’est dans son fondement. Nous le verrons ci-dessous, « non-domination » est l’expression par laquelle on distingue la république du régime despotique, fondé sur la domination. Traditionnellement, c’est en fait par ce contraste que la république se définit, pour des raisons au moins logiques : définir une chose comme étant « de la domination » appelle à définir une autre chose de même catégorie comme étant son contraire : « de la non-domination ».

Toutefois, « non-domination » est une expression négative. Du fait qu’une société est un groupe de personnes de facto liées les unes aux autres par des relations humaines, ladite expression procède alors d’un vide explicatif : elle ne nous dit pas quelle autre relation se substitue à la domination et lie les personnes en question. Si les membres d’un régime despotique sont liés médiatement entre eux par la domination du despote, quelle relation lie donc les citoyens d’une république entre eux ? Evoquer la non-domination ne répond pas à cette question. Il faut donc en dire plus et c’est entre autres à ce titre qu’une discussion sur les autres relations humaines génériques est nécessaire.

Partant du point de vue qu’il y a trois relations humaines génériques, nous rencontrons un problème. En effet, par « non-domination », on peut entendre aussi bien « confiance véritable » que « confiance raisonnée ». Dans les faits, nous verrons que la relation qui caractérise la non-domination des républicains est la confiance raisonnée. Elle est parfois réduite à tort à la domination. Par exemple, Max Weber la réduirait à la domination légale169. On pensera encore à Hobbes, pour qui les lois sont des obstacles, ce qui revient à assimiler toute loi à une expression de la domination170. La démarche de Hobbes est à ce titre antirépublicaine, ce qui n’a rien de surprenant (voir partie III, 1)171.

En matière de relations privées, l’idéal républicain n’est pas nécessairement la non- domination, comme nous avons pu nous en rendre compte. Les relations privées peuvent

168 P

ETTIT, Républicanisme, pp. 40-46.

169 W

EBER, Max, Economie et société. I, § 125 ss., p. 291 ss.

170 H

OBBES, Leviathan, chap. XXI, p. 152 s.

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être ou bien des relations de domination, ou bien des relations de confiance véritable, comme je l’ai sommairement indiqué à propos de l’amour égalitaire. Ces deux options concernant la seule sphère privée, elles sont des possibilités républicaines. Le choix qu’on fait entre elles produit seulement une espèce du genre « république ». Dès lors, si « non- domination » définit le genre « république », c’est en faisant exclusivement référence aux relations nouées dans la sphère publique, entre les citoyens, donc à la confiance raisonnée. Dans l’attente d’une définition de cette relation, nous pouvons faire l’hypothèse de la définition suivante de la vie publique :

La vie publique est un réseau institutionnalisé de relations de confiance raisonnée entre des citoyens (cette relation est toujours effective).

D’après cette définition, la vie publique présente une asymétrie avec la vie privée : l’effectivité de la relation institutionnalisée est garantie, en quelque sorte parce que c’est la relation par défaut. En effet, elle est celle que quelqu’un a avec tous ceux qui ne sont pas ses dominés ou ceux en qui il a véritablement confiance ; en somme, avec n’importe qui. Cette asymétrie étant discutée à la partie II, j’en reste là à son sujet pour l’instant.

Remarquons que Pettit est sensible au fait d’être précis sur ce qu’on entend affirmativement par « non-domination ». Ainsi, il examine largement des choses qui se rattachent à la confiance raisonnée, car telle est la question républicaine, tout en prenant soin par ailleurs de ne pas la confondre avec la confiance véritable172. Ma systématisation des relations humaines s’inscrit donc dans une démarche similaire, mais j’y ajoute encore l’opposition public-privé.

Résumons. Dans une république, « non-domination » signifie affirmativement « confiance raisonnée dans la sphère publique (plus exactement, dans la vie publique, mais parler de « sphère » préserve la symétrie) ». Si la non-domination s’étend à la sphère privée, notamment par l’instauration du mariage égalitaire, elle signifie alors affirmativement « confiance véritable », produisant par là une espèce du genre « république », celle où la vie privée ne se confond pas avec la propriété.

Dans ce qui suit, je ne décris pas complètement la confiance raisonnée et la confiance véritable, car une telle description exige une élaboration préalable des concepts de « personne » et de « personnalité ». Les détails fouillés attendront donc la prochaine partie, tout comme ceux concernant les vies publique et privée (partie III, 9). J’aimerais néanmoins en donner déjà les définitions. Comme nous l’avons vu, la relation de domination est inégalitaire et sa définition en rend compte. Au contraire, la confiance raisonnée et la confiance véritable sont égalitaires. La première correspond à l’égalité des citoyens, à l’égalité entre personnes de jure qui ne se connaissent pas, ou encore entre celles qui font comme si elles ne se connaissaient pas, ce qui est le cas des ennemis. Elle

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décrit donc l’égalité publique. La confiance véritable décrit alors l’égalité privée. Voici les définitions :

Domination ([non égal] pouvoir) Confiance raisonnée ≡ ([égal] pouvoir) Confiance véritable ≡ ([égal] non-pouvoir)

Pour aller au plus simple, disons pour l’instant que la confiance raisonnée rend compte du fait que les citoyens sont égaux parce qu’ils sont égaux en droits. Cela suppose d’une part que chaque exercice d’un pouvoir a lieu conformément aux lois puisque personne n’est « au-dessus » d’elles. De cela découle d’autre part le fait qu’ils exercent ensemble le pouvoir politique. Par ailleurs, le point surprenant n’est pas l’affirmation de l’égalité dans les deux dernières relations humaines génériques, mais le fait que la négation du concept de « pouvoir » serve à définir la confiance véritable. Je ne suis toutefois pas le seul à affirmer de telles choses au moyen d’une distinction entre quelque chose qui ressemble à de la confiance et qu’on nomme souvent ainsi, la confiance raisonnée, et autre chose qui est véritablement de la confiance173. De la confiance véritable, disons qu’elle unit des personnes suffisamment en accord l’une avec l’autre pour que l’une n’ait pas besoin d’exiger de l’autre qu’elle fasse ceci ou cela. Autrement dit, la confiance véritable est une relation anomique ; elle ne se caractérise pas par les ordres, ni par les lois. Elle préserve en cela la pleine autonomie des relata.

C’est en définitive la cohérence logique de cette combinatoire qui fait qu’il y a une hiérarchie entre un nombre restreint et fixe de relations humaines génériques et un nombre plus grand et indéterminé de relations humaines spécifiques. Remarquons alors que ces trois relations forment un ensemble cohérent, lequel serait complété par une quatrième combinaison. La voici :

Non-maîtrise ([non égal] non-pouvoir)

La non-maîtrise n’est pas une relation humaine générique. Dans sa définition, le terme relationnel, « égal », est nié. Mais il ne l’est pas au sens de l’inégalité comme pour la domination. Il l’est au sens de l’absence d’égalité comme d’inégalité, c’est-à-dire au sens d’une absence de relation : dans la non-maîtrise, il n’y a pas d’égalité parce qu’il n’y a pas de relation humaine. Par exemple, deux Robinson Crusoé, vivant chacun sur son île déserte dans l’ignorance de l’existence de l’autre, ne sont pas égaux ni inégaux ; humainement parlant, ils ne sont simplement pas en relation. Par opposition, les relations

173

Par exemple, Pettit a relevé le caractère anomique de la confiance véritable, signalant qu’il y a une sorte de confiance qui est mise en danger par la régulation, autrement dit par le fait qu’on insère des normes dans la relation. Ce qui lui fait défaut selon moi est qu’il n’assimile pas explicitement les normes à l’exercice du pouvoir, ce qui l’écarte de la vision systématique que j’essaie de développer. PETTIT, Rules, Reasons, and

humaines génériques s’entendent donc d’une manière ou d’une autre toutes trois au titre de la maîtrise (nous aurons un aperçu de cette idée à la partie II, 4.2.1).

Nos trois relations humaines génériques peuvent être inscrites par paires dans un rapport de contrariété. Chez les Grecs, la contrariété porte sur l’égalité dans la polis et sa négation dans l’oïkos. Le pouvoir est alors affirmé dans les deux cas. Dans nos sociétés, elle porte sur le pouvoir dans la vie publique et sa négation dans la vie privée. C’est alors l’égalité qui est affirmée dans les deux cas. La règle de contrariété est donc respectée mais, comme on le voit, de deux manières différentes. Le problème que nous avions sur ce point est dès lors résolu : on peut bel et bien construire une espèce de la république où la domination ne caractérise pas les rapports que les gens ont en privé tout en respectant cette règle. Ainsi, ce qui rend appréhendable de manière ordinaire le contraste entre la confiance raisonnée et la confiance véritable ordinaire n’est plus l’opposition entre égalité et inégalité ; une opposition facilement perceptible. C’est le contraste entre une relation égalitaire impersonnelle, ou la coordination des relata exige des normes, et une relation égalitaire personnelle, ou la coordination entre les relata se passe de normes ; une opposition elle aussi facilement perceptible.

La particularité grecque à laquelle nous allons venir ci-dessous est que leur société a été structurée d’une manière problématique. Parce qu’elle est une opposition, l’opposition public-privé n’ouvre que deux options institutionnelles à des relations humaines génériques. Disons la relation publique et la relation privée. Pour les Grecs, l’opposition public-privé était donc saturée par la relation de confiance raisonnée et par celle de domination. De ce fait, l’amitié, dans mes termes la confiance véritable, ne pouvait se nouer que de manière extra-institutionnelle. Elle ne pouvait se nouer qu’en dehors du fait qu’on est statutairement citoyen ou individu. Pour ainsi dire, elle existait donc « hors sol », sans locus dans la société. Or, chose aisément saisissable, l’amitié a été considérée comme la relation humaine la plus excellente de toutes. Dès lors, comment bâtir la société la meilleure, à savoir la polis, sans y aménager de place pour l’amitié ? Pour les Grecs, ce fut à mon avis un problème écrasant. Il présida à l’utopie platonicienne du philosophe-roi mais, surtout, mena les philosophes ultérieurs à se désintéresser de la polis, société définitivement imparfaite du fait même qu’elle est politique. Les écoles de Socrate, de Platon et d’Aristote n’accueillaient en principe que des citoyens et étaient donc institutionnellement publiques. Mais celle des Cyniques, puis celles des Stoïciens et des Epicuriens, abandonneront cela. Par un refus frontal du nomos pour les deux premières écoles174 et par une pratique restée emblématique de l’amitié pour la troisième, toutes se

174 Ce thème est largement discuté dans la biographie de Diogène le Cynique. Faisant en public ce qui ne se

faisait qu’en privé (manger, dormir, avoir une activité sexuelle, etc.), Diogène étendait en fait l’oïkos à la

polis. Il étendait donc une sphère caractérisée par le pseudo-nomos, la sphère privée, afin de supprimer la

sphère du nomos, la sphère publique. Cette idée est d’une manière plus générale fondée dans le fait que Diogène se présentait comme le fils d’un falsificateur de monnaie (nomisma), qui entendait au fond falsifier le nomos (il y a un jeu de mots volontaire sur nomisma et nomos). DIOGÈNE LAËRCE, Vies et doctrines des

philosophes illustres, livre VI, 20-21, 46, 69, pp. 703-705, 722, 736. GEUSS, Public Goods, Private Goods, chap. II, pp. 12-33.

consacreront à l’établissement de l’amitié dans un cadre extra-institutionnel. Les maîtres de ces écoles fonderont pour ainsi dire leurs petites cités idéales hors de tout rapport avec la cité réelle, la polis, et finalement sans espérer parvenir à les étendre à l’échelle politique. En cela, ils seront les précurseurs des confréries modernes. Nous avons donc l’hypothèse selon laquelle les Grecs ont échoué à faire une place à la confiance véritable au sein de la polis alors qu’ils le souhaitaient au plus haut point. Dans ce qui suit, nous examinerons cet échec.

2.4.2. Les lois de la polis comme « despote »

Le présent développement consiste principalement en un commentaire de la citation d’Hérodote donnée en tête de partie. Dans ma terminologie, elle nous parle de la confiance raisonnée. Par Hérodote, nous pourrons de plus saisir la notion attenante d’« intérêt public » telle qu’elle doit se comprendre dans le cadre où elle prend naissance, le cadre républicain (elle sera par ailleurs détaillée à la partie II, 3.2).

Cette citation met en scène Xerxès, roi perse qui se prépare à envahir la Grèce, et Démarate, un roi de Sparte déchu et exilé. En passant, notons qu’il faut prendre garde au fait suivant : que Sparte ait eu des rois n’implique pas que ce furent des despotes. Afin de comprendre de quoi il retourne, il vaut mieux les concevoir comme des monarques constitutionnels, même si cela est un peu inexact. Quoi qu’il en soit, Sparte, comme les

poleïs grecques, est alors à considérer comme une république, plus exactement comme une

proto-république, au sens suivant : les citoyens de Sparte considèrent les lois spartiates comme leurs lois et non comme les lois d’un autre, les ordres d’un despote. En cela, ils sont du côté de la non-domination. Cela dit, contrairement à nombre d’Athéniens, dont Périclès se plaignait comme nous l’avons vu, les Spartiates étaient radicalement partisans de la prééminence de la sphère publique. Ils l’étaient d’une manière qui tendait au totalitarisme (sur les régimes politiques, voir partie III, 2.2)175. Mais dans ma terminologie des régimes politiques, Sparte n’en est pas moins à comprendre comme une république. Sa radicalité nous permettra d’avoir une vision plus nette des traits importants de la relation entre citoyens, à savoir la confiance raisonnée, et de l’intérêt public. D’une manière plus générale, souvenons-nous que la citation d’Hérodote est en fait la première ébauche de conceptualisation de la république, celle qui met en évidence les traits les plus importants et qui inspirera la pensée républicaine par la suite. Cette citation est élaborée au moyen d’un contraste avec le despotisme, contraste devenu canonique avec l’opposition entre domination et non-domination, mais dont j’ai noté l’insuffisance explicative :

Ayant entendu ces paroles, Xerxès se mit à rire : […] « Comment un millier d’hommes ou même dix mille ou même cinquante mille

175 Cette asymétrie entre Sparte et Athènes a été relevée à juste titre par C

ONSTANT, De la liberté des anciens

pourraient-ils s’opposer à une si grande armée, s’ils sont tous également libres [éleutheroï pantès omoïos], et ne sont pas soumis au commandement d’un seul [hénos archoménoï] ? […] S’ils étaient, à la mode de chez nous, soumis à l’autorité d’un seul, ils pourraient, par crainte de ce maître, se montrer plus braves qu’ils ne le sont naturellement [physin], et, contraints par les coups de fouet, marcher, quoique en plus petit nombre, contre des ennemis plus nombreux ; laissés libres d’agir, ils ne sauraient faire ni l’un ni l’autre. Pour moi, je pense que, même à nombre égal, les Grecs auraient de la peine à lutter contre les Perses seuls. »

[…]

A cela, Démarate répondit : « En combat singulier, [les Lacédémoniens, ndr] ne sont inférieurs à personne ; et, réunis en troupe, ils sont les plus valeureux de tous les hommes. Car, s’ils sont libres, ils ne sont pas libres en tout : ils ont un maître, la loi [dèspotès nomos], qu’ils redoutent encore bien plus que tes sujets ne te craignent. »176

Dèspotès nomos, le « despote-loi »177. Il ne fait aucun doute qu’Hérodote a choisi cette expression pour frapper les esprits. A l’évidence, elle est contradictoire, ce qui se remarque si nous repensons à Aristote et au fait que les ordres du dominant sont des pseudo-lois. En fait, il faut entendre le mot « despote » comme une métaphore destinée à souligner la « force »178 obligatoire des lois, le fait qu’on se sente obligé par elles, au point de faire parfois ce qu’elles exigent contre son intérêt propre. Cette « force » est précisément ce que Xerxès leur conteste. Pour ce dernier, la loi prise en elle-même est sans « force », c’est-à-dire inefficace, si elle n’est pas associée à la menace du despote. Sous la menace, représentée par le fouet, ses soldats tiendront les positions qui leur sont assignées jusqu’à la mort. Sans elle, ils fuiraient. Au fond, Xerxès ne comprend pas la

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