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Le plaste, un organite central de la synthèse des lipides chez les plantes

CDP-diacylglycérol diacylglycérol

B. Le plaste, un organite central de la synthèse des lipides chez les plantes

Les plastes sont des organites majeurs des plantes et des algues. Ils sont le lieu de réactions importantes du métabolisme (e.g. la photosynthèse, la synthèse des acides gras, etc.) et du stockage de nombreux produits comme l’amidon. Chez les plantes, la synthèse des acides gras n’a lieu qu’au niveau du plaste par l’intermédiaire de la FAS II (Voir paragraphe B-1). Il permet notamment la synthèse des acides gras (Figure 12, 1) et de glycérolipides (Figure 12, 2) qui peuvent être exportés vers le RE (Figure 12, 3) ou d’autres compartiments membranaires. Le plaste joue donc un rôle crucial pour l’ensemble des cellules végétales, y compris non photosynthétiques.

enveloppe nucléaire réticulum endoplasmique appareil de Golgii membrane plasmique CYTOSOL NOYAU Système endomembranaire enveloppe plastidiale Plaste Mitochondrie 1. Synthèse

des acides gras [acyl-ACP] 2. Synthèse de glycérolipides 3. Synthèse de glycérolipides [acyl-CoA]

Figure 12 : Schéma général des synthèses et trafics d’acyl lipides entre les organites semi-

autonomes et les membranes du système endomembranaire. La synthèse des acides gras est réalisée dans le stroma des plastes (en vert). Les acyls sont des précurseurs, soit pour une synthèse de glycérolipides au niveau du réticulum (en bleu), générant des glycérolipides de structure dite « eucaryote », soit pour une synthèse au niveau de l’enveloppe plastidiale (en rouge), générant des glycérolipides de structure dite « procaryote ». Un trafic de glycérolipides « eucaryotes » et « procaryotes » s’opère. Les galactolipides synthétisés par l’enveloppe plastidiale contribuent sous certaines conditions, à la biogenèse des membranes extraplastidiales (système endomembranaire et mitochondrie) (flèches rouges).

Tous les plastes dérivent des proplastes que l’on trouve dans les cellules embryonnaires (zygote et méristèmes, tissus peu ou indifférenciés formant une zone de croissance où ont lieu les mitoses). Chez les végétaux supérieurs, les proplastes évoluent de manière très différente suivant l’organe ou la cellule dans laquelle ils se trouvent : dans la racine, ils se différencient en amyloplastes ; dans les tissu photosynthétiques (feuilles), en chloroplastes ; dans certains fruits et au niveau des fleurs, en chromoplastes et enfin dans certaines feuilles placées à l’obscurité, en étioplastes. Les transformations d’un type plastidial à l’autre sont possibles, selon un processus appelé « interconversion plastidiale » (Figure 13).

proplaste leucoplaste chromoplaste chloroplaste proplaste amyloplaste elaioplaste

Figure 13 : Interconversion plastidiale. Tous les plastes observés dans les cellules des végétaux

supérieurs dérivent d’un plaste embryonnaire (proplaste). Les plastes peuvent être chlorophylliens ou non. Dans tous les cas, la seule structure membranaire commune est l’enveloppe (membrane interne et membrane externe).

Le plaste est un organite semi-autonome tout comme la mitochondrie. Il possède donc son propre ADN circulaire. Le génome plastidial contient environ 100 gènes codant pour des ARNt et des ARNr, des protéines impliquées dans la photosynthèse, la transcription et la traduction des gènes plastidiaux. Ceci ne représente néanmoins qu’une minorité des protéines nécessaires à la biogénèse et au maintien d’un plaste fonctionnel. Le noyau code pour la grande majorité de ces protéines qui sont importées dans les plastes. L’expression de ces protéines importées est régulée en même temps que celles synthétisées au niveau du plaste.

Les données biochimiques et moléculaires démontrent que l’ensemble des plastes serait issu de l’endosymbiose primaire unique d’une cyanobactérie Gram négative ancestrale, un des premiers organismes photosynthétiques (Palmer 2003). L’endosymbiose primaire aurait donné naissance à trois grands groupes d’eucaryotes contenant des plastes simples :

(i) les endosymbiontes primaires verts (Viridiplantae) comprenant les algues vertes, e.g. Chlamydomonas et les plantes supérieures, e.g. Arabidopsis,

(ii) les endosymbiontes primaires rouges rassemblant les algues rouges, (iii) les endosymbiontes primaires bleus, e.g. Cyanophora.

La Figure 14 résume ce modèle d’évolution.

Glaucocystophytes Algues rouges

Algues vertes

Plantes (sens strict) Cyanobactérie ancestrale

Hôte primaire

Figure 14 : Endosymbiose primaire à l’origine des cellules végétales (d’après Archiblad et Keeling,

2002).

L’endosymbiose est à l’origine de la compartimentation membranaire du plaste. En particulier, l’enveloppe formée de deux membranes qui limite le plaste serait issue des deux membranes de la cyanobactérie ancestrale (Figure 15).

Figure 15 : Endosymbiose primaire

et origine des membranes des plastes. Les deux membranes de l’enveloppe du plaste seraient isues de la membrane externe et de la membrane interne de la bactérie Gram- à l’origine du plaste. La membrane du phagosome ne serait donc pas à l’origine de la membrane externe de l’enveloppe du plaste. Les thylacoïdes étaient déjà présents dans la bactérie ancestrale et ont été conservés lors de l’endosymbiose (d’après Archiblad et Keeling, 2002).

Cyanobactérie Gram-(MI et ME)

Phagosome primaire

Thylakoïde

Enveloppe plastidiale (MI et ME)

L’enveloppe est la seule structure membranaire permanente de l’ensemble des plastes. Une méthode de séparation et de purification des différents compartiments des plastes a été mise au point au laboratoire PCV (Figure 16) (Douce et al. 1973, Joyard et al. 1983). L’analyse biochimique des différentes structures membranaires du plaste montre une composition lipidique tout à fait particulière et unique dans le monde du vivant. En effet, chez les animaux et les levures ainsi que dans les membranes extraplastidiales, les phosphoglycérolipides constituent la classe lipidique prépondérante. Les membranes plastidiales (enveloppe et thylakoïde) sont quant à elles, en majorité constituées de galactolipides (MGDG et DGDG), lipides neutres et dont la concentration peut atteindre 80% du contenu lipidique total (Tableau 5).

Figure 16 : Le chloroplaste présente un système membranaire dense et complexe. L’enveloppe est

formée d’une membrane externe et d’une membrane interne. Les thylakoïdes s’empilent sous forme de grana. Chaque compartiment peut être fractionné sur gradient de saccharose permettant l’analyse des constituants et des réactions enzymatiques.

Dans les chloroplastes, le MGDG et le DGDG constituent 50% et 30% des membranes des thylacoïdes, respectivement (Siegenthaler 1998). Les autres lipides constituant les membranes des thylakoïdes sont le SQDG et le PG, qui tous deux portent une charge négative au pH physiologique. La PC est retrouvée comme constituant mineur de la membrane externe du chloroplaste. Cette composition lipidique est conservée chez les cyanobactéries et avec certaines variations, chez l’ensemble des unicellulaires photosynthétiques.

Membranes PC PE PG PI PS DPG MGDG DGDG SQDG stérols Glyco-SL

Voie vésiculaire (flux endomembranaire)

Réticulum +Golgi 43-48 23-26 6 6 3 4-15 Tonoplaste 15-28 15-28 2 5-9 2 14-43 12-17 Membrane plasmique 8-36 9-32 1-5 1-6 1-10 5-60 6-30 Chloroplastes Membrane externe 32 10 5 17 30 6 Membrane interne 9 1 55 30 5 Thylakoides 7 1 58 27 7 Mitochondries Membrane externe 52 22 3 10 13 Membrane interne 37 33 2 4 11 13

Tableau 5 : composition lipidique des membranes des cellules végétales (en %) (d’après Moreau et

al., 1998 ; Jouhet, 2005). Glyco-SL, glycosphingolipides.

L’enveloppe joue un rôle fondamental dans la biogenèse et le fonctionnement des plastes. Elle contrôle les échanges de métabolites avec le cytosol ; elle contrôle l’import des protéines synthétisées dans le cytosol sous forme de précurseurs ; elle porte de nombreuses activités enzymatiques.

Pour la part protéique, l’import des précurseurs codés par le génome nucléaire est strictement dépendant de la présence d’une séquence d’adressage clivable, appelée transit peptide, en position N-terminale. Cet import est assuré par les complexes protéiques de translocation TOC (translocon at the outer membrane of chloroplast, au niveau de la membrane externe) et TIC (translocon at the inner membrane of chloroplast, au niveau de la membrane interne). Les complexes sont situés sur l’enveloppe des plastes (Figure 17).

Figure 17 : Modèle d’import des précurseurs chloroplastiques dans le stroma et libération de la

protéine mature (schéma modifié à partir de Soll, 2002). Les précurseurs protéiques interagissent avec le complexe TOC et s’engagent dans le processus d’import (1). Cette interaction peut être facilitée par la formation d’un complexe de « guide » avec les protéines chaperones de type 14-3-3 du cytosol. Le précurseur est transféré vers l’espace intermembranaire par l’activité ATPasique d’une autre série de protéines chaperones (2). La formation d’un supercomplexe d’import permet alors au précurseur de s’engager dans le complexe TIC. L’activité ATPasique de chaperones du stroma permet au précurseur de traverser l’enveloppe des chloroplastes (3). Enfin, dans le stroma, la protéine mature est liberée par l’activité d’une peptidase spécifique (SPP) (4).

L’insertion du transit peptide pourrait être facilitée par la présence du MGDG dans les membranes de l’enveloppe. En effet, certaines protéines importées dans le chloroplaste (Rubisco, la plastocyanine et la ferridoxine) possèdent un transit peptide qui a une affinité élevée pour le MGDG (Bruce, 1998). Certaines protéines semblent utiliser un système d’import indépendant de celui-ci (Miras et al. 2007).

L’enveloppe participe à d’autres processus critiques pour la biogenèse plastidiale. En particulier, l’enveloppe porte des activités importantes pour la synthèse de composés terpéniques tels que les caroténoïdes et les précurseurs de la chlorophylle, tous deux indispensables à la photosynthèse. De plus, l’enveloppe produit elle-même la majeure partie des lipides du plaste : les galactolipides (voir synthèse du MGDG et DGDG), les sulfolipides et le PG (pour revue Douce et Joyard, 1990). L’ensemble de ces fonctions de synthèse lipidiques caractérisées au niveau de l’enveloppe plastidiale, sont cruciales à la biogénèse du plaste.

Les galactolipides sont indispensables pour la croissance des cellules végétales en conditions de culture normale mais aussi en condition de carence en phosphate. De plus, ils semblent indispensables à une efficacité maximum du processus de photosynthèse. Le plaste constitue donc un site essentiel à la synthèse des lipides, autant pour les besoins propres de cet organite que pour les autres compartiments membranaires.

C. Synthèse et dynamique subcellulaire des galactolipides dans