• Aucun résultat trouvé

dynamique des lipides chez le parasite apicomplexe Toxoplasma

A. Compartimentation membranaire des cellules de T gond

3. La pellicule et les structures associées

La pellicule est un complexe membranaire qui délimite la cellule de T. gondii. Elle est constituée d’une unité externe, la membrane plasmique et d’une unité interne, le complexe membranaire interne (Figure 29). Les deux unités sont étroitement accolées par un mécanisme encore mal connu. Ces deux compartiments membranaires sont liés d’une part à des structures dérivées du cytosquelette, le « glideosome » qui est localisé entre la membrane plasmique et l’IMC et d’autre part, aux microtubules sub-pelliculaires localisés le long de la face cytoplasmique de l’IMC. La pellicule possède à la fois un rôle structural en tant qu’empilement de membranes délimitantes et de point d’ancrage pour le glideosome et les microtubules ainsi qu’un rôle d’interface pour les échanges métaboliques entre la cellule hôte et le parasite. La composition lipidique de ce compartimement constitue donc un des éléments essentiels permettant de comprendre son fonctionnement.

plasma membrane

plasma membrane

Figure 29 : La pellicule de T. gondii est une structure composée de trois membranes et associée aux

microtubules sub-pelliculaires. L’encart de gauche est une photographie de microscopie électronique à transmission (R. Mondragon, CINEVSTAV, Mexico) qui montre la membrane plasmique et les deux membranes des vésicules applaties et suturées qui forment l’IMC. L’encart de droite correspond à la coupe transversale (vue en microscopie électronique à transmission, R. mondragon, CINEVSTAV, Mexico) symbolisée par la double flèche bleue sur le schéma de la structure du parasite (d’après Morrissette et Sibley 2002). On peut y voir des sections des microtubules sub-pelliculaires en association rapprochée avec la face cytosolique de l’IMC (membrane la plus sombre sur la photographie).

- La membrane plasmique

La membrane plasmique est au niveau structural, une simple bicouche lipidique. Lors de la vie extracellulaire du parasite, elle est en particulier responsable de la fixation de la cellule parasitaire sur son substrat et de l’ancrage des protéines transmembranaires du glideosome. Lors de la vie intracellulaire du parasite, elle est le site d’échange des éléments provenant ou allant vers l’espace de la VP. Bien que le fractionnement sub-cellulaire de la membrane plasmique de T. gondii soit possible (Lei et al. 2005), on n’en connaît pas la composition lipidique exacte. Les données relatives à ce sujet restent très fragmentaires.

La membrane plasmique possède de nombreuses protéines GPI-ancrées. C’est le cas de la protéine de surface SAG1 qui constitue l’antigène majeur de surface et qui contribue à

l’adhésion non spécifique du parasite lors de l’invasion (Mineo et Kasper 1994). On sait aussi que la membrane plasmique contient des microdomaines lipidiques resistants aux détergents, les DRMs. En effet, l’extraction de ces DRM, dont la composition lipidique et protéique sera détaillée dans la partie IV. B. 2., montre la présence des protéines GPI ancrées de surface SAG-1 et P35 (Azzouz et al. 2006). Les techniques actuelles pourraient permettre de déterminer le lipidome de la membrane plasmique, en tout cas pour les classes majoritaires de lipides.

- Le complexe membranaire interne et le réseau sous-pelliculaire

Le complexe membranaire interne (IMC) consiste en un réseau membranaire situé à une distance fixe, environ 15 nm sous la membrane plasmique. Il est formé par la fusion de vésicules applaties dont l’origine serait le réticulum endoplasmique (Vivier et Petitprez 1969). L’association entre la membrane plasmique et l’IMC est probablement médiée par des structures protéiques qui n’ont pas encore été identifiées à ce jour. L’IMC est interrompu au pôle apical, au niveau de l’anneau polaire externe, notamment pour permettre la protrusion du conoïde. On retrouve une deuxième zone d’interruption au pôle postérieur. A ce même niveau, on trouve l’anneau postérieur, une structure qui termine l’ensemble du réseau de cytosquelette sous-pelliculaire (actine et réseau sous pelliculaire). Enfin, une zone appelée micropore, correspondant à une invagination circulaire de la membrane plasmique, interrompt la pellicule dans la moitié apicale du parasite, juste au dessus du noyau. Cette structure se comporte comme un cystostome, c'est-à-dire une zone spécialisée dans l’endocytose (Nichols et al 1994). Une telle invagination pourrait être provoquée par la présence de lipides particuliers associés à des structures protéiques induisant une courbure membranaire.

L’IMC est un des composants membranaires majeurs de T. gondii. Sa composition lipidique reste inconnue. On sait cependant qu’il possède des microdomaines membranaires resistants aux détergents (DRMs) (Azzouz et al. 2006, Johnson et al. 2007). Dans la zone séparant la membrane plasmique de l’IMC, l’ancrage de la protéine GAP50, une des protéines pivot du glideosome (voir paragraphe glideosome), ne dépend pas d’interactions protéines- protéines mais est réalisé par l’intermédiaire des DRMs riches en cholestérol de l’IMC (Johnson et al. 2007).

L’IMC est associé au réseau sous-pelliculaire. Ce réseau correspond à un ensemble de protéines du cytosquelette, probablement des filaments intermédiaires (Mann et Con Beckers 2001). Il forme un motif régulier comme un grillage en deux dimensions (Morrissette et al. 1997). Les observations en cryofracture de la membrane de la face cytosolique de l’IMC montrent des rangées régulières de particules intramembranaires. Ces particules sont supposées représenter le domaine transmembranaire de protéines associées au réseau sous- pelliculaire de microtubules. Le réseau sous-pelliculaire aide à maintenir la forme crescente de la cellule, par l’intermédiaire de son interaction avec les microtubules sub-pelliculaires. Il impose également une tension mécanique à la cellule. A ce jour, trois protéines ont été décrites comme appartenant à l’IMC et associées au cytosquelette : TgIMC1, TgIMC2 (Mann

et Con Beckers 2001) et PhIL1 (Gilk et al. 2006). Il est possible d’extraire le réseau dans sa forme originelle (Figure 30) (Mann et Con Beckers 2001). L’étude des lipides associés à cette structure pourrait fournir des informations quant à la manière dont ces protéines sont ancrées dans l’IMC.

Figure 30 : Structure et localisation du réseau sous-pelliculaire. (A) Cliché du réseau sous-

pelliculaire purifié (MES, R. Mondragon, CINEVSTAV, Mexico). Les anneaux antérieurs et postérieurs (pointes de flèches) ferment ce réseau au niveau du pôle apical et postérieur, respectivement. Le réseau de microtubules sub- pelliculaires (flèche) est intact et encore lié au réseau sous-pelliculaire. (B) Schéma de la structure de la pellicule et des microtubules sub- pelliculaires qui lui sont associés. Le réseau sous-pelliculaire, probablement formé de filaments intermédiaires, se situe entre l’IMC et les microtubules sub-pelliculaires. La membrane plasmique délimite la périphérie du parasite.

B

500 nm

A B

Enfin, l’IMC est le compartiment qui sert d’échaffaudage pour la mise en place des futures cellules filles lors de la division cellulaire (voir endodyogénie, B-6). Il est donc essentiel à la ségrégation des organites dans les cellules filles.

- Les microtubules sub-pelliculaires

T. gondii possède deux populations de microtubules : les microtubules du fuseau mitotique qui permettent la séparation du matériel génétique du noyau lors de la division cellulaire et les microtubules sub-pelliculaires (Figure 31). Ces derniers, au nombre de 22, s’étendent depuis l’anneau polaire externe du conoïde jusque sous le noyau. Cet anneau polaire constitue d’ailleurs le centre organisateur de ces microtubules. En effet, l’analyse du protéome du conoïde (Hu et al. 2006) a montré la présence de gamma-tubuline, à l’origine de l’anneau gamma, structure de base des centres organisateurs (MTOC). Ces microtubules sont responsables de la forme en croissant de la cellule parasitaire grâce à la tension qu’ils imposent sur la face cytosolique de la pellicule. Leur association avec cette partie de l’IMC est réalisée par l’intermédiaire d’un réseau sous-pelliculaire. Ce réseau de microtubules est sensible uniquement aux inhibiteurs de polymérisation des microtubules de type végétaux, les dinitroanilines (Stokkermans et al 1996). On retrouve cette structure architecturale chez certaines algues du type euglenoïde (Mann et Beckers 2001).

Figure 31 : Les deux populations de microtubules chez T. gondii.

Les microtubules du fuseau mitotique ont pour centre organisateur la plaque polaire, qui est « incluse » dans l’enveloppe nucléaire à proximité des centrosomes (les microtubules sub-pelliculaires s’étendent depuis l’anneau polaire apical, (leur centre organisateur) jusqu’au 2/3 du parasite. D’après Morrissette et Sibley, 2002.

- Le glideosome

La pellicule abrite une structure responsable des mouvements du parasite pendant sa recherche de la cellule hôte (gliding) (Figure 32B) et lors de l’invasion. Cette structure appelée « glideosome » se trouve entre la membrane plasmique et l’IMC. Elle est actine- dépendante et utilise la myosine de classe XIV comme moteur moléculaire (Foth et al. 2006). Le glideosome est ancré par la protéine GAP50 au niveau de l’IMC et par le complexe MIC2- M2AP (protéines de micronèmes) dans la membrane plasmique. Lors de l’invasion de la cellule hôte et la formation de la jonction mobile, le complexe MIC2-M2AP serait associé à la protéine AMA1 (protéine de micronèmes) (Figure 32A). Les protéines transmembranaires MIC2, AMA1, GAP50 sont importantes en tant que points de pivot du complexe de motilité chez T. gondii. Elles doivent donc avoir une position précise et fixe. Ce type d’immobilisation n’est possible que par une interaction protéine-protéine ou par un ancrage via des microdomaines de la membrane. Les nombreuses études menées sur ces protéines ne mettent pas en évidence d’autres interactions qu’avec celles du glideosome lui-même. On peut donc supposer que la position de ces protéines dans leurs membranes respectives est stabilisée grâce aux microdomaines membranaires. C’est d’ailleurs ce qui semble être le cas pour la protéine GAP50 localisée dans les DRMs riches en cholestérol (Johnson et al 2007). La composition précise de ces DRMs est encore à déterminer.

A

B

Figure 32 : Le glideosome est responsable des mouvements de gliding et de l’invasion active de T.

gondii. (A) Modèle du glideosome lors de l’invasion active (d’après Carruthers et Boothroyd 2005). La

myosine (MyoA) entraine les protéines de micronèmes (TM MIC = MIC2/M2AP) vers la partie postérieure du parasite ce qui permet au parasite de se propulser à l’intérieur de la cellule hôte. Le complexe AMA1-RON2/4/5 s’associerait au complexe TM MIC au niveau de la jonction mobile (AMA1- RON2/4/5 est absent lors du gliding simple). (B) Mouvements de gliding de T. gondii visualisées par immunofluorescence grâce à un anticorps anti-SAG1 sur une lame de verre (C. Botté, ce travail). Le parasite encore présent est visible au niveau du point le plus lumineux sur la lame.