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Le plan masse : Entre absence de composition et déstructuration

Chapitre V : Présentation du cas d’étude

10.3. L’enquête sociologique : Deux cités, une problématique à plusieurs variables

10.3.2. Présentation des cités :

10.3.3.1. Le plan masse : Entre absence de composition et déstructuration

A l’instar des cités de toutes les cités de la ZHUN de Bab Ezzouar, les cités Soummam et Rabia Tahar ne présentent aucune composition urbaine proprement dite, en effet, résultat d’une succession de programmes de logements, le plan masse ne présente aucun principe d’organisation, ni au niveau des éléments du bâti, ni au niveau des espaces extérieurs, encore moins au niveau de l’orientation ou même des spécificités géotechniques du sol. Constitué de barres et de tours, le cadre bâti à Bab Ezzouar ne présente aucune logique d’orientation dans l’implantation du bâti : Une première configuration consiste en l’organisation des blocs autour d’espaces ouverts sans définition précise avec la création d’enclos ou de cours par des groupements de bâtiments. Dans un deuxième cas de figure, l’implantation des blocs se fait le long des voies secondaires et tertiaires là encore sans règle ou logique d’ensemble qui régulent la relation entre le cadre bâti et la voirie.

En conséquence, l’espace des deux cités donne une impression de désordre et de chaos similaire à celle ressentie dans certains quartiers à émergence spontanée, en somme le fruit de malheureux hasards.

De plus, une lecture approfondie du paysage aussi bien au niveau de la cité Soummam que de la cité Rabia Tahar, montre que même les fondements des théories de l’urbanisme moderne n’ont pas été mis en pratique (la séparation de la circulation automobile et piétonne, l’aménagement des espaces extérieurs, l’importance de la verdure, les liaisons entre l’intérieur et l’extérieur……) faisant place à la logique du chemin de grue, de la quantité et de la rapidité, c’est le grand ensemble dans son expression la plus réduite et la moins noble, appauvrie et dénaturée, « Dans le domaine de l’urbanisme , l’enseignement sur la séparation des circulations

des voitures et des piétons est oublié , par contre le formalisme du quadrillage et du parallélépipède rectangle ,l’économie de la construction reprise en compte comme instrument de spéculation deviennent domaine public »187

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La structure urbaine des cités Soummam et Rabia Tahar n’a à l’évidence pas été pensée dans sa globalité. En effet, le plein et le vide, les différentes éléments structurants du bâti, de la voirie, des équipements ou encore des espaces urbains extérieurs doivent être imbriquées et conçus les uns par rapport aux autres de manière à créer leur unité, à Bab Ezzouar, ces différents éléments semblent avoir été conçus séparément brisant ainsi tous les liens qui participent à construire et à façonner l’identité d’un quartier.

Photo 15:Les terrains vagues se transforment en étendues boueuses dés les premiéres pluies .Source :

Auteur (2009)

Photo 16 :Certaines pratiques culturelles (séchage des peaux de mouton) ne trouvent pas d’espace pour

s’accomplir.Source : Auteur (2009) 10.3.3.1.1. L’espace public : Une vitrine peu attractive sur l’extérieur

L’espace urbain public à Bab Ezzouar est mal défini, sans affectation ou attributions précises, il ne bénéficie d’aucun traitement ou aménagement spécifique, créant ainsi un sentiment d’abandon et de délaissement.

De fait, au niveau des deux cités, on ne trouve aucune des caractéristiques de l’espace public en tant que lieu ou même en tant que réseau (à titre d’exemple, on peut citer la proximité physique, la complémentarité avec le bâti, la hiérarchie ….etc.), si l’on y ajoute les dysfonctionnements inhérents à ce type d’espaces et la mono fonctionnalité des constructions (logements), rien de ce qui fait la qualité de la vie en ville n’y est présent. Les plans masse des cités, qui désignent l’espace public par le terme de ‘’vide‘’ l’ont distendu, éclaté, et ne l’ont pas affecté aux divers usages qui le qualifient même si la réalisation du boulevard de l’université crée un ‘’tronçon‘’ d’espace public animé, cet espace n’est plus celui du public ni même, faute d’entretien, l’espace naturel de la charte d’Athènes.

De fait, la mono fonctionnalité des cités se traduit par le manque de lieux d’animation, peu de commerces et dans de nombreux cas pas de jardins aménagés ni de mobilier urbain, l’espace est

exclusivement vouée à l’automobile et à la circulation constituant une source de danger pour les enfants.

Eclaté et sillonné par des voies mécaniques largement dimensionnées ,peu entretenu et envahi par le stationnement ,l’espace public -ou du moins l’espace qui n’est pas privé -n’offre ni repères, ni hiérarchie ni lieux symboliques qui pourraient le qualifier.

10.3.3.1.2. Les espaces extérieurs : Des surfaces ‘’vertes‘’ mal identifiées

Les seuls critères pris en compte à Bab Ezzouar lors de la conception des espaces extérieurs sont d’ordre fonctionnel, l’espace non bâti est réduit à l’état de résidu et il n’existe aucune forme de hiérarchisation ni d’orientation de l’espace extérieur « (…..) Dans ce type de production

d’espace, les seules contingences prises en charge dans l’élaboration du projet sont d’ordre architectural au sens le plus réducteur du terme, ce qui conduit inévitablement à une vision unilatérale : l’espace non bâti n’étant qu’un espace résiduel, il manque de fait de définition, d’échelle, et de niveau d’appropriation. La logique qui sous tend une telle conception est une logique hygiéniste qui ne prend en considération que les forces intérieures inhérentes au produit architectural…. »188

Tous les espaces extérieurs sont à caractère public, à la cité Soummam, ils sont surdimensionnés et non aménagés, des terrains vagues envahis par les détritus et des objets en tous genres (matelas en éponges, objets en plastique, peaux de mouton…..etc.) sont légion. De plus les réseaux défectueux et le caractère marécageux de la zone transforment ces espaces en période hivernale en étendue boueuse impraticable.

Quant aux diverses plantations, elles constituent un point positif dans le paysage des deux cités. En effet, celles-ci ont bénéficié d’opérations de reboisement et sont dotées de plantations de Peupliers et de Pins remarquablement préservés ainsi que de l’apport des habitants cultivant en pieds d’immeubles toutes sortes de plantes (laurier, jasmin, acacia……etc.), ceci est particulièrement marqué à la cité Rabia Tahar.

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Photo 17 :Un espace impraticable à pied . Source : Auteur (2009)

Photo 18:Les pins de la cité Soummam améliorent significativement le paysage.Source : Auteur (2009)

10.3.3.1.3. Les espaces intermédiaires : Une absence de transitions

Entre la voirie et les abords du logement, l’on doit distinguer une succession progressive de lieux, de l’espace public à l’espace privé, dont l’identification et le traitement en fonction de l’usage doivent assurer la transition. Ces espaces de transition n’existent ni à la cité Soummam, ni à la cité Rabia Tahar, le passage du public au privé est brutal et se fait sans transition, la limite est matérialisée par la seule enveloppe du bâtiment.

De fait, les espaces intermédiaires sont le théâtre de pratiques sociales s’illustrant parfois par un excès d’appropriation et leur prise en compte est à la base de tout travail de réflexion quant au manque d’urbanité des ZHUN.

En effet, cette transition doit être assurée par l’entrée de l’immeuble, le jardinet en pied d’immeuble ou d’autres dispositifs qui isolent du bruit, assurent l’intimité et ménagent une distance entre la rue et l’habitation.

A Bab Ezzouar, cette transition n’existe pas, seuls des trottoirs ou de petites allées dans le meilleur des cas séparent l’entrée d’immeuble de la voirie et des places de parking.

«…. manquant de définition, les espaces urbains n’ont de sens que le sens que les habitants ont bien voulu leur donner. Il n’y a aucune ou presque aucune suggestion faite au niveau du plan si ce n’est l’indifférence la plus totale. La vie et le vécu de tous les jours ont bien eu raison d’espaces d’une platitude désolante et c’est dans le vécu qu’on peut lire quelques amorces qualitatives qui doivent être perçues comme des signaux d’un remodelage déjà engagé. Si l’on

saisit le processus, l’on ne peut qu’anticiper des fatalités qui opéreront un changement non négligeable sur la pauvreté du paysage qui prévaut »189