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Plan de conservation dans le cadre des normes ouvertes

Le présent Atlas permet d’identifier les secteurs où des actions de conservation pourraient être mises en œuvre. Selon le cadre de référence des normes ouvertes (CMP, 2013), l’Atlas ne comprend que les premières étapes en vue de l’élaboration d’un plan de conservation, soit l’identification des cibles de conservation. Pour développer un plan d’action aboutissant à des stratégies de conservation concrètes et réalisables, plusieurs étapes devront être franchies, en se penchant d’abord à l’ensemble des Basses-terres du Saint-Laurent mais, éventuellement, à l’échelle d’unités territoriales plus petites vu la grande disparité de l’influence anthropique dans l’aire à l’étude.

Ces étapes brièvement décrites ci-après à partir de CMP (2013) et Lapointe et collab. (2015) sont :

1) L’analyse de viabilité des cibles 2) L’analyse des menaces

3) L’analyse de la situation

4) Identification des buts visés par cible de conservation 5) Planification des stratégies et des actions de conservation 6) Plan de suivi

15.1. L’analyse de viabilité

L’analyse de viabilité est réalisée dans le but d’identifier les attributs écologiques clés qui permettront de déterminer l’état de « santé » des cibles de conservation que ce soit un écosystème ou une population spécifique d’une espèce végétale ou animale. Plus spécifiquement, la viabilité indique la capacité d’une cible de conservation à résister ou à se remettre de la plupart des perturbations naturelles ou humaines, et ainsi de survivre pour de nombreuses générations. Un attribut écologique est un aspect de la biologie ou de l’écologie d’une cible qui, s’il venait à manquer ou était altéré, mènerait à terme à la perte ou à l’extrême dégradation de cette cible. Il y a trois catégories d’attributs qui déterminent l’état de santé d’une cible de conservation : la taille, la condition et le contexte géographique (CMP, 2013). Si c’est possible, les trois catégories d’attributs sont utilisées pour qualifier la viabilité d’une cible et généralement, le nombre d’attribut écologiques se limitent à cinq.

 La taille est une mesure de l’aire occupée par l’occurrence d’une cible (pour un écosystème) ou une mesure de l’abondance de l’occurrence d’une cible (pour une espèce ou une population).

 La condition est une mesure de la composition biologique, de la structure et des interactions biotiques qui caractérisent l’espace dans lequel se trouve la cible.

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 Le contexte géographique est une évaluation de l’environnement de la cible, incluant : a) les processus et régimes écologiques qui maintiennent la présence de la cible tels que les inondations, les régimes de feux et les autres perturbations naturelles ; et b) la connectivité qui permet aux cibles-espèces d’avoir accès aux habitats et aux ressources ou qui leur permet de répondre aux changements environnementaux via la dispersion ou la migration.

Pour chaque attribut écologique, un indicateur est déterminé. Cette unité d’information doit être mesurable dans le temps de manière à permettre de documenter les changements dans l’état de santé de la cible. Pour chaque indicateur, le degré de variation toléré ou, le seuil de viabilité, établit des critères minimum identifiant une cible de conservation comme en « bon état ». Ce degré de variation correspond aux limites de variation naturelle de la cible qui constituent les conditions minimales pour que la cible survive. Si l’attribut se situe en dehors de ces limites, il s’agit alors d’un attribut dégradé dont le maintien peut requérir des interventions de gestion humaine. Pour simplifier l’analyse des attributs écologiques clés et classifier le statut des cibles de conservation (CMP, 2013), la valeur des indicateurs est ordonnée en 4 classes :

 Faible : Restauration de plus en plus difficile; peut résulter en une extinction ;

 Moyen : En dehors du degré de variation toléré; requiert une intervention humaine ;

 Bon : Indicateur dans le degré de variation toléré; requiert quelques interventions pour son maintien ;

 Très bon : Statut écologique souhaité; requiert peu d’intervention pour son maintien.

15.2. Analyse des menaces

La liste des menaces présentées brièvement à la section 7 devra être complétée et leur description précisée par une revue de la littérature spécifique au territoire d’étude. Chacune des menaces sera évaluée de manière à déterminer celles qui auront, dans un horizon de temps donné (ex. 10 ans), les effets les plus critiques dans le maintien des cibles. Pour y arriver, les normes ouvertes suggèrent une méthode de classement des menaces qui détermine la portée, la gravité et l’irréversibilité de chaque menace pour chacune des cibles. Une évaluation préliminaire sera validée par des experts qui viennent en soutien à l’équipe de projet. Lorsque c’est possible (selon la nature de la menace et les données disponibles), une cartographie montrant l’empreinte spatiale et l’intensité de menaces particulières sera produite pour supporter l’évaluation de leur portée et de leur gravité relative. À partir de cette évaluation, les menaces seront classées des plus élevées aux plus faibles. Il est possible, que faute de données ou de connaissances, certaines menaces ne puissent être évaluées. Si, de l’opinion des experts, celles-ci sont susceptibles d’être importantes à court ou moyen terme, une stratégie d’acquisition de connaissances pourra être inscrite au plan d’action.

15.3. Analyse de la situation

L’analyse de la situation, ou diagnostic, vise à décrire de quelle façon les activités humaines passées ont modulé l’occupation du territoire et comment, dans un proche avenir, celles-ci

143 risquent d’affecter directement ou indirectement la biodiversité du territoire à l’étude. Elle permet de décrire les relations entre l’environnement biologique et les systèmes et moteurs sociaux, économiques, politiques et institutionnels qui affectent les cibles de conservation. Une brève description de la situation socioéconomique actuelle et des tendances émergentes permettra, d’une part, de circonscrire les secteurs d’activités (ex. étalement urbain) ou des activités/phénomènes spécifiques (ex. prolifération d’espèces exotiques) qui risquent d’avoir des impacts sur les cibles de conservation. À partir de ce diagnostic, il s’agira d’identifier les facteurs contribuant (aussi nommées, menaces indirectes ou causes sous-jacentes) qui contribuent aux menaces directes les plus importantes et qui, au final, influencent les cibles de conservation.

L’élaboration d’un modèle conceptuel permet de visualiser les liens (chaîne de facteurs) entre une menace ou des menaces et les facteurs. D’autre part, cette analyse vise aussi à bien cerner le contexte de conservation, c’est-à-dire les parties prenantes (personnes, organismes, institutions) et les conditions (ex. intérêts, outils règlementaires, ressources) qui pourraient constituer des contraintes ou des opportunités à la mise en œuvre du plan de conservation (ex.

nouvelle législation). Cette portion de l’analyse aide à clarifier les intérêts des parties prenantes et les relations qui méritent une attention particulière puisqu’elles peuvent influencer la réussite ou l’échec des stratégies de conservation.

15.4. Identification des buts visés par cible de conservation

Les buts sont les énoncés explicites de ce que le plan de conservation souhaite accomplir dans le territoire d’étude. Les buts sont liés aux cibles de conservation, orientés vers un impact, mesurables, limités dans le temps et spécifiques. Ils se fondent habituellement sur l’état de santé futur recherché pour chacune des cibles tel qu’établi préalablement par l’analyse de viabilité.

Étant donné que les cibles peuvent comprendre de multiples indicateurs, qui ont chacun un état futur recherché, il peut y avoir plusieurs buts pour chaque cible ou plusieurs indicateurs peuvent être combinés et incorporés dans un seul énoncé de but pour une cible. Bien que certains états futurs recherchés puissent être réalisables au cours de la mise en œuvre du plan de conservation (ex. 15 ans), dans de nombreux cas, la période requise pourra être plus longue (ex. 25, 50, 100 ans ou plus). L’élaboration de buts à aussi long terme permet à l’équipe du projet et aux partenaires potentiels de comprendre l’ampleur de ce qui est nécessaire pour assurer la protection de toute la biodiversité à perpétuité. Dans ce cas, le but de la mise en œuvre du plan de conservation sera un but intermédiaire vers l’atteinte de l’état futur recherché.

15.5. Planification des stratégies et des actions

La planification de stratégies implique de déterminer où et comment intervenir. Il faut d’abord décider sur quels facteurs contribuants une ou des interventions seraient les plus susceptibles d’atteindre les buts du plan de conservation; ce sont les points clé d’intervention. Pour chacun de ces points, une liste de stratégies basées sur la littérature, sur les pratiques courantes ou sur des mesures créatives apportées par l’équipe de projet et les experts sera produite. Chacune des stratégies retenues devra préciser le ou les résultats souhaités par sa mise en œuvre. Les normes ouvertes suggèrent de partir du modèle conceptuel pour traduire chaque chaîne de facteurs en chaîne de résultats. Ceci permet en fait de décrire les hypothèses exprimées en termes de

144 résultats attendus sur l’atténuation d’une menace directe et l’influence exercée sur un facteur contribuant. Les stratégies sont ensuite hiérarchisées pour repérer les stratégies qui auront vraisemblablement le plus d’effets sur la conservation des cibles et optimisent les intérêts primordiaux des parties prenantes, limitant ainsi les conflits possibles ou facilitant l’adhésion de partenaires.

Pour chacune des stratégies retenues, un ensemble d’actions est développé intégrant les opportunités et les contraintes de mise en œuvre. Une action est une mesure prise dans le but d'exécuter une des stratégies du projet. Les stratégies peuvent inclure une large gamme d’actions allant de la modification des orientations et des politiques gouvernementales, le renforcement de la réglementation municipale, à la restauration d’habitats, la protection des terres, l’éducation et la sensibilisation. Chaque action doit correspondre à un ensemble distinct de tâches spécifiques et complémentaires qui doivent être réalisées pour atteindre le résultat recherché. Pour chacune des actions, un objectif clair est établi; il doit être orienté vers les résultats, mesurable, limité dans le temps, spécifique et pratique.

15.6. Plan de suivi

Les normes ouvertes étant un processus de gestion adaptative, ceci exige le recours à des programmes de suivi de l'efficacité conçus de manière à intégrer la conception, la gestion et la surveillance des actions, afin que les hypothèses énoncées explicitement avant la mise en œuvre puissent être mises systématiquement à l’épreuve. Les suivis sont essentiels puisqu’il faut non seulement être capable d'identifier les stratégies et les actions qui ont réussi ou ont échoué, mais également de comprendre. Grâce à ces évaluations, il sera plus aisé de justifier la poursuite des actions entreprises ou d’adapter et de modifier les actions prévues pour en améliorer l’efficacité.

À termes, les données de suivi devront aussi fournir les informations nécessaires pour évaluer le progrès fait vers l’atteinte des buts fixés pour chaque cible dans le plan de conservation.