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La place de la Serbie dans le développement des études slaves à Paris (1840-1873)

politiques français autour de la Serbie (1840 1877)

I. La place de la Serbie dans le développement des études slaves à Paris (1840-1873)

Le domaine de l’enseignement est révélateur des évolutions de la société. Alors que les romantiques ont initié un intérêt pour les Serbes dans la société française du début du XIXe siècle, ces derniers se font progressivement une place dans les études slaves qui se développent en France. Il faut notamment repérer les premiers cours sur la Serbie au Collège de France et retracer le rôle de Louis Leger dans l’enseignement du serbe à la Sorbonne puis à l’École des langues orientales vivantes en tant que premier médiateur académique entre la France et la Serbie. Les enjeux politiques qui sous-tendent l’introduction de la Serbie dans les grands établissements universitaires parisiens ne doivent pas être négligés, pas plus que l’influence du contexte européen. Il faut aussi sonder les conséquences de ces enseignements dans la perception de la Serbie, les croiser avec le contexte politique et voir notamment si la succession des régimes politiques influence les publications d’ouvrages scientifiques.

A. La création de la chaire de langue et littérature slave au Collège de France 1. Le développement des langues slaves à Paris439

1840 constitue un tournant dans l’évolution de la perception française de la Serbie. Aleksandra Kolaković et Anne Madelain estiment que le début du développement des études slaves françaises date de cette époque, avec l’institution d’une chaire au Collège de France440. Tomáš

Chrobák ajoute que le projet est initié par Léon Faucher, directeur du Courrier français. Son père avait épousé une cousine de la femme de Mickiewicz, et Léon Faucher manifestait une grande admiration pour le poète. Il voulait lui assurer une situation à Paris plus importante que celle de professeur de littérature latine qu’il occupait à Lausanne441. Le 20 avril 1840, un projet

est présenté à la Chambre des députés, la Chambre basse du Parlement dont la Chambre des

439 C’est vers 1830 que, progressivement, l’enseignement des langues vivantes est introduit en France dans le

cursus des collèges. Voir Michel Espagne, Françoise Lagier, Michael Werner, Philologiques II. Le maître de

langues. Les premiers enseignants d’allemand en France (1830-1850), Paris, Maison des sciences de l’homme,

1991, p. 8.

440 Aleksandra Kolaković, U službi otadžbine. Saradnja francuskih i srpskih intelektualaca 1894-1914 [Au service

de la patrie. La coopération entre les intellectuels français et serbes 1896-1914], Belgrade, Institut za političke studije, 2016, p. 49 et Anne Madelain, Une expérience française… op. cit., p. 60.

441 Tomáš Chrobàk, Pour la patrie, pour les Slaves. Les slavisants français et leur rôle dans la vie publique (1863-

1920), thèse réalisée sous la direction de Bernard Michel et de de Lud’a Klusáková, Université Paris I et Faculté

94 Pairs est la Chambre haute. Depuis 1834, la Gazette nationale, ou Moniteur officiel, retranscrit les débats, et le mardi 21 avril 1840 le Moniteur publie le compte rendu de la séance du lundi 20 avril à la Chambre des députés, sous la présidence de M. Sauzet. On peut y lire dans le sommaire :

Monsieur le ministre de l’Instruction publique a présenté aujourd’hui à la chambre des députés un projet de loi portant demande de crédits additionnels au budget de 1841 :

Pour la création d’une chaire de langue et de littérature slave au Collège de France ; Pour la création d’une Faculté de médecine et d’une faculté des sciences dans la ville de Rennes.442

Ce jour-là a lieu l’exposé des motifs par le ministre de l’Instruction publique, Victor Cousin. Il commence par souligner que les nouveaux enseignements au Collège de France sont créés à la condition que « la science d’institution nouvelle fût d’un intérêt national, et même européen »443. Il explique qu’une chaire de langue et littérature slave répondrait à ces critères

puisque « près de 70 millions d’hommes parlent les différents dialectes de cette langue. C’est près d’un tiers de la population européenne »444. Après cet argument quantitatif445, il met en

avant l’importance politique et l’intérêt scientifique d’un tel projet. D’après lui, la paix doit encourager la France à s’intéresser à des peuples dont l’avenir est inconnu et qui « ne peuvent rester étrangers à nos destinées »446. L’intérêt scientifique réside dans l’étude philologique de cette langue qui a des liens avec les langues européennes et asiatiques. Il conclut finalement son argumentaire en affirmant qu’« il suffit de cet aperçu pour faire apprécier l’utilité d’un enseignement spécial, profondément philologique et littéraire, qui initierait un auditoire français à la connaissance de ces richesses ignorées »447. Le singulier du nom de cette chaire est à souligner. D’après le ministre, il existe une « langue slave » qui doit être au cœur des

442 Gazette nationale ou le Moniteur universel, 21 avril 1840, BNF, Microfilm D-71 197, 1840/03-04, p. 747. 443 Ibid.

444 Ibid.

445 S’il inclut l’ensemble de la population parlant le russe, son estimation semble faible ; dans le cas inverse, il

semble exagéré. René Girault recense les populations à la fin du XIXᵉ siècle : voir René Girault, Diplomatie

européenne. Nations et impérialismes 1871-1914, Paris, Armand Colin, 1997, T. 1, p. 96 et 120. Pour ordre d’idée,

on estime aujourd’hui qu’environ 400 millions de personnes parlent une langue slave dans le monde. Louis Leger, en 1885, estime lui aussi à 72 millions le nombre de Slaves en Europe en 1840 (Louis Leger, Le monde slave au

XIXᵉ siècle, Paris, Léopold Cerf, 1885, p. 17). Il fait référence aux chiffres donnés par Eichhoff : Frédéric Gustave

Eichhoff, Histoire de la langue et de la littérature des Slaves, Russes, Serbes, Bohèmes, Polonais et Lettons :

considérées dans leur origine indienne, leurs anciens monuments et leur état présent, Paris et Genève, A.

Cherbuliez et Même Maison, 1839.

446 Gazette nationale ou le Moniteur universel, 21 avril 1840, op. cit., p. 747. 447 Ibid.

95 enseignements de la nouvelle chaire, avec ses « nombreux dialectes ». Ce singulier, souvent ignoré ou transformé en pluriel par les historiens448, est un signe frappant du manque de connaissances françaises sur le monde slave au moment où on discute la création d’une chaire qui doit y être consacrée. Le singulier peut s’expliquer par le fait qu’il n’y a pas encore d’État slave en dehors de la Russie, mais la chaire de « langue et de littérature slave » est aussi un indicateur de l’état lacunaire de la science dans le domaine.

Cousin propose en fin de séance un projet de loi, qui comprend la création d’une chaire de langue et de littérature slave avec un crédit de 5 000 francs, la création d’une Faculté de médecine dans la ville de Rennes avec un crédit de 58 200 francs ainsi que la création d’une Faculté de sciences dans cette même ville avec un crédit de 25 000 francs. Ce projet est ensuite discuté à la Chambre à la séance du jeudi 18 juin 1840. Ce jour-là, le ministre commence par préciser que la discussion de l’article concernant la création de la Faculté de médecine à Rennes est ajournée à l’année suivante. Ensuite, la discussion s’ouvre sur l’article à propos de la création d’une chaire de langue et de littérature slave. Le député Pierre-René Auguis, siégeant dans l’opposition libérale, prend la parole pour s’opposer au projet. Il commence par dénoncer l’incohérence du projet de loi, qui propose côte à côte une chaire de langue et littérature slave à Paris et une Faculté de sciences à Rennes. Puis, il s’adresse au ministre Cousin pour lui demander « si, dans l’état présent des connaissances linguistiques, il est bien convenable [de fonder] au Collège de France une chaire établie pour enseigner la langue slave »449. Plusieurs arguments viennent appuyer sa position. Celui, tout d’abord, selon lequel la langue slave n’est pas une langue littéraire et qu’aucun des pays cités dans l’exposé des motifs « ne possède des monumens [sic], soit littéraires, soit historiques, assez importans [sic], surtout sous le rapport de la pensée et du style, pour qu’une chaire soit fondée dans un établissement de la spécialité du Collège de France »450. Il affirme ensuite que c’est à l’École des langues orientales que le slave doit être enseigné, en tant que langue vivante mais non littéraire. D’après lui, les monuments littéraires que l’on trouve dans les pays slaves sont en langue latine et ne méritent pas l’attention de la France qui les connaît déjà. Les arguments contre ce projet de loi relèvent donc d’une vision réductrice des pays slaves. Auguis ajoute que si le Collège de France veut

448 Citons par exemple Michel Espagne qui évoque « la chaire de langue et littérature slaves » (Espagne Michel,

Le paradigme de l’étranger... op. cit., p. 325). Pourtant, en 1932, André Mazon estime déjà que ce singulier indique

que les Français ont encore beaucoup à apprendre. Voir André Mazon, « Le Collège de France et les Études slaves », dans Le Livre jubilaire composé à l’occasion du Quatrième centenaire du Collège de France, Paris, Presses universitaires de France, 1932, p. 409.

449 Gazette nationale ou le Moniteur universel, 19 juin 1840, BNF, Microfilm D-71 199, 1840/06, p. 1487. 450 Ibid.

96 enseigner des dialectes non littéraires, il devrait aussi songer à la création « d’une chaire de limousin, de gascon, de rouergat, d’auvergnat, de languedocien et de provençal »451. Aux rires

de la Chambre, le député répond que les dialectes français ont, eux aussi, leurs chants et leurs particularités, que son exemple n’est pas ridicule et qu’il faudrait commencer « par être nationaux ». Il termine son discours en mentionnant celui « pour qui la demande a été faite », sans pour autant donner son nom. Il fait référence à Mickiewicz, estime que la nation française n’a pas à donner une chaire à un étranger et que cette manœuvre cache une volonté d’enseigner le polonais.

Les rires de l’assemblée, et l’ironie de Cousin qui souhaite répondre au « respectable M. Auguis »452, semblent indiquer que les arguments du député n’ont pas été entendus. Le ministre de l’Instruction publique réplique en soulignant les erreurs d’Anguis et affirmant l’existence de monuments littéraires des pays slaves453. L’assemblée lui marque des signes

d’assentiment (« Très bien ! Très bien ! ») et le député du Var Alphonse Denis insiste à son tour sur ces monuments littéraires454 sous les marques d’approbation de la Chambre. Finalement, et

malgré les arguments d’Auguis, la chambre adopte le projet de loi455.

Après l’adoption du projet par la Chambre des députés, le Moniteur officiel publie, le mercredi 24 juin 1840, la séance du 22 juin 1840 à la Chambre des Pairs. Lors de cette séance, un nouvel exposé des motifs est présenté pour la création des deux nouveaux crédits. Ici, la chaire est évoquée avec un singulier dans le sommaire456 mais avec un pluriel dans le discours : « les crédits nécessaires pour deux créations nouvelles dont l’utilité est reconnue, l’établissement d’une Faculté des sciences dans la ville de Rennes, et d’une chaire de langue et de littérature slaves »457. Malgré ce pluriel, l’orateur fait mention de « la langue slave » et de ses « différens [sic] dialectes »458. Ces détails laissent une fois de plus transparaître la confusion qui règne auprès des acteurs responsables de la mise en place d’une chaire au Collège de France.

451 Ibid.

452 Ibid., p. 1488.

453 Il évoque, sans donner de détails, « chants populaires les plus naïfs jusqu’aux développements les plus raffinés

de l’art » et invite Anguis à aller consulter « un ouvrage publié récemment par un de nos compatriotes sur la langue et la littérature des Slaves », faisant référence à l’ouvrage du philologue Frédéric Gustave Eichhoff publié un an plus tôt : Frédéric Gustave Eichhoff, Histoire de la langue et de la littérature des Slaves… op. cit.

454 Avec, là encore, une « authenticité douteuse ». Voir Louis Leger, Le monde slave au XIXᵉ siècle, op. cit., p. 12. 455 Gazette nationale ou le Moniteur universel, 19 juin 1840, op. cit., p. 1488.

456 Ibid., 23 juin 1840, op. cit., p. 1519. 457 Ibid., 24 juin 1840, op. cit., p. 1541. 458 Ibid.

97 Ici, l’exposé des motifs est bref et met en avant la participation que représenterait ce nouvel enseignement à un « grand mouvement philologique et littéraire »459.

Le 7 juillet 1840, la Chambre des Pairs discute une nouvelle fois de ce projet et le baron de Gérando présente un rapport à l’assemblée. Il prononce un long discours, dans lequel il encourage à dépasser la dimension financière du vote du crédit pour en considérer les avantages scientifiques. Linguiste, philosophe, et considéré comme le fondateur de l’anthropologie française460, Gérando replace la création de cette chaire dans la perspective plus large d’une émulation qui mènerait le Collège de France à devenir un « établissement unique en Europe »461. Pour cela, il souhaite « que les grandes littératures, émules et diverses [...] reçoivent en France la même hospitalité ; que chacune d’elles ait sa chaire propre, parallèlement aux autres, que toutes ensemble ajoutent au Collège de France une nouvelle branche d’enseignement parfaitement lié ainsi dans ses divisions »462. Ici, les langues slaves doivent

donc contribuer, par l’originalité de leur étude, à faire rayonner le système scientifique français ; mais aucun contenu précis n’est vraiment présenté. Au moment où Louis Leger est arrivé au Collège de France en 1885, il a d’ailleurs noté : « En somme, personne, parmi ceux qui attaquaient ou défendaient le nouvel enseignement, n’avait une idée bien nette ni de son domaine, ni des services qu’il était appelé à rendre »463. Ces différents arguments ont emporté

l’adhésion de l’auditoire et la Chambre des Pairs adopte finalement le projet de loi à la séance du 9 juillet 1840464. L’idée de faire rayonner la science française a donc convaincu rapidement les Pairs. Le 15 juillet 1840, un décret entérine la création d’une chaire de langue et littérature slave au Collège de France. C’est, d’après Michel Espagne, la première tentative des Français de séparer les littératures étrangères en aires culturelles distinctes465.

459 Ibid.

460 Voir Jean-Luc Chappey, La Société des observateurs de l'homme, 1799-1804 : des anthropologues au temps

de Bonaparte, Paris, Société des études robespierristes, 2002 et Jean Copans et Jean Jamin, Aux origines de l’anthropologie française, Paris, Jean-Michel Place, 1994.

461 Gazette nationale ou le Moniteur universel, 8 juillet 1840, BNF, Microfilm D-71 200, 1840/07-09, p. 1637. 462 Ibid.

463 Louis Leger, Le Monde slave au XIXᵉ siècle, leçon d’ouverture du cours de langues et littératures d’origine

slave professé au Collège de France, Paris, Librairie Léopold Cerf, 1885, p. 13.

464 Gazette nationale ou le Moniteur universel, 10 juillet 1840, op. cit., p. 1655. 465 Michel Espagne, Le paradigme de l’étranger... op. cit., p. 325.

98 2. La place du serbe

À la Chambre des députés, le 20 avril 1840, la langue serbe tient une place non négligeable dans le discours de Victor Cousin. D’après lui, « l’enseignement de la langue slave devrait en comprendre au moins les cinq dialectes principaux ; l’esclavon primitif ou langue sacrée, le russe, le polonais, le bohémien, le serbe »466. S’il estime que le russe et le polonais sont les dialectes les plus parlés de la langue slave, il affirme que « le plus riche et le plus pur de tous les dialectes slaves est le serbe, qui est parlé dans la Servie, la Dalmatie, une partie de la Bohême et de la Croatie, par une population de 4 millions467 d’hommes »468. Au-delà de cette conception incorrecte d’une langue slave qui comprendrait différents dialectes469, soulignons cette mise en

avant du serbe par rapport aux autres « dialectes ». La notion de pureté doit être rapprochée de celle de nation : mentionner la pureté du serbe revient à faire référence à son potentiel national470. Cela rappelle l’engagement des romantiques pour les intérêts serbes, mentionné

précédemment. Le ministre ajoute que la « langue nationale serbe » s’est éteinte en 1389, au moment de la victoire ottomane sur les Serbes :

Ce qui ne périt pas alors du dialecte serbe se réfugia dans les montagnes, où se formèrent, des regrets de la patrie perdue et de la haine de ses oppresseurs, des chants populaires comparables, selon des critiques compétens [sic], à ce que nous offre de plus beau en ce genre la Grèce moderne471

L’utilisation de la bataille de Kosovo polje sert à souligner l’ancienneté de la langue serbe et à établir une continuité historique légitimante. Cette référence, ainsi que la mise en place d’une « configuration entre langue et nation »472, sont exploitées par les romantiques depuis le début

du siècle. L’emploi alterné des mots « langue nationale » et « dialecte » renvoie une nouvelle fois au caractère national du « dialecte » parlé par les Serbes, au moment où le nationalisme règne en Europe473. On retrouve également le parallèle avec la Grèce, introduit par les

466 Gazette nationale ou le Moniteur universel, 21 avril 1840, op. cit., p. 747.

467 D’après les chiffres avancés par René Girault pour la fin du XIXᵉ siècle, cette approximation semble plutôt

cohérente. Voir René Girault, Diplomatie européenne. Nations et impérialismes 1871-1914, op. cit., p. 120.

468 Gazette nationale ou le Moniteur universel, 21 avril 1840, op. cit., p. 747.

469 Voir Francis Conte, Les Slaves : aux origines des civilisations d'Europe centrale et orientale, VIe-XIIIe siècles,

Paris, Albin Michel, 1996, p. 109-131. Ou Nicolaas van Wijk, Les langues slaves. De l’unité à la pluralité, Gravenhage, Mouton & Co, 1956.

470 Voir Jean-Louis Chiss, « Les linguistes du XIXe siècle, l'’identité nationale’ et la question de la langue », dans

Langages, vol. 182, n° 2, 2011, p. 41-53. Voir aussi liens entre nation et langue ou nationalisme linguistique dans

Éric Hobsbawn, Nations et nationalismes depuis 1780, Paris, Gallimard, 1992, p. 189-241.

471 Gazette nationale ou le Moniteur universel, 21 avril 1840, op. cit., p. 747.

472 Jean-Louis Chiss, « Les linguistes du XIXe siècle, l'« identité nationale » et la question de la langue », op. cit.,

p. 43.

473 Voir Benedict Anderson, L’imaginaire national. Réflexions sur l’origine et l’essor du nationalisme, Paris, La

99 romantiques au début du siècle. Le baron de Gérando, lui aussi, fait plusieurs références à la langue serbe dans son discours à la Chambre des Pairs. Il évoque le « génie poétique » des chants populaires serbes et « la littérature serbe [qui] conserve dans ses chants lyriques les souvenirs nationaux »474. À noter que Cousin et Gerando tirent vraisemblablement leurs idées de l’ouvrage de Frédéric Gustave Eichhoff, intitulé Histoire de la langue et de la littérature des Slaves et publié un an plus tôt475.

À partir de 1840, deux cours sont assurés chaque semaine au Collège de France476 :

Période Premier cours Second cours

1840-1844 Mardi 13h45 Vendredi 13h45 1845-1848 Mardi 12h30 Samedi 9h 1848-1849 Mardi 10h30 Samedi 9h 1849-1852 Lundi 12h Samedi 9h 1853 Mardi 11h Samedi 9h 1854-1857 Lundi 11h Samedi 9h 1857-1861 Lundi 11h Mercredi 11h 1862-1872 Lundi 12h30 Mercredi 12h30 1873-1874 Lundi 9h30 Mercredi 9h30

Jusqu’en 1874, trois personnalités occupent cette chaire. Adam Mickiewicz477 y enseigne

jusqu’en 1844, suivi de Cyprien Robert478 de 1845 à 1857 et d’Alexandre Chodzko à partir de

474 Gazette nationale ou le Moniteur universel, 8 juillet 1840, op. cit., p. 1637.

475 Eichhoff évoque notamment les conséquences de la bataille de Kosovo polje sur les chants serbes (« à leur

dernière catastrophe, à la sanglante défaite de Kosovo, leur génie noblement enthousiaste, heureux mélange d’énergie et de souplesse, s’est fait jour à travers les ravages et les horreurs de la tyrannie turque, et a fui au sommet des montagnes, pour y chanter l’hymne de la liberté ») et utilise des expressions telles que « souvenirs historiques » ou « génie poétique ». Voir Frédéric Gustave Eichhoff, Histoire de la langue et de la littérature des Slaves… op.

cit., p. 268 et 259.

476 Archives en ligne Salamandre [consultées en avril 2017] 4 AFF 178-238 ; ACDF, 16 CDF 300 et 16 CDF 71. 477 Adam Mickiewicz (1798-1855) est un poète et écrivain, chef de file du courant romantique polonais. Il arrive

à Paris en 1832 et s’adresse aux Polonais depuis la France pour exalter leur liberté dans une ambiance de religiosité. Il est nommé au Collège de France en 1840, avant de tomber dans un mysticisme qui n’a sans doute pas été étranger à son éviction. A écrit notamment Ballades et romance (1822), Les Aïeux (1823, 1832 et 1861), Livre de la Nation

et du pèlerinage polonais (1832).

478 Cyprien Robert (1807-vers 1865) est un linguiste français spécialiste du monde slave. Il passe plusieurs années

dans les Balkans et publie de nombreux articles dans la Revue des Deux Mondes. Il fonde la Société slave (Société de l’émancipation des peuples slaves de Paris) en 1848. A écrit notamment Les Slaves de Turquie (1844), Les deux

panslavismes, situation actuelle des peuples slaves vis-à-vis de la Russie (1847), Le Monde slave, son passé, son