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L’indépendance de la Serbie et la France : perceptions et intérêts

L’indépendance serbe et la IIIᵉ République française : évolution des stéréotypes et

I. L’indépendance de la Serbie et la France : perceptions et intérêts

L’indépendance serbe apparaît comme une nouvelle étape dans la construction des représentations françaises de la Serbie. Le Congrès de Berlin modifie l’équilibre européen et il faut dépasser le cadre des institutions pour comprendre les sentiments des Français face à ce nouvel épisode de la question d’Orient. Cette évolution du contexte européen nécessite aussi de s’interroger sur la coïncidence de l’évolution des perceptions françaises de la Serbie et des intérêts économiques et politiques qui y apparaissent. L’indépendance fait évoluer les regards français sur les Balkans, au moment où la société française est elle-même marquée par l’alliance franco-russe et l’anti-germanisme qui déplacent le regard français vers l’Europe centrale, orientale et balkanique.

A. L’indépendance de la Serbie

1. Traité de San Stefano et Congrès de Berlin

La guerre russo-turque prend fin avec la victoire de la Russie. Lorsque les Russes arrivent aux portes de Constantinople, fin janvier 1878, la Porte accepte leurs conditions de paix et l’armistice est signé quelques jours plus tard. Ces conditions sont sévères : création d’une Bulgarie autonome qui comprend une grande partie de la Macédoine et qui s'étend de la mer Égée au Danube et à la mer Noire, indépendance de la Serbie, du Monténégro et de la Roumanie, dont les territoires sont agrandis aux dépens de l’Empire ottoman, et autonomie de la Bosnie-Herzégovine. Enfin, les Turcs sont condamnés à payer une indemnité de guerre et un accord russo-turc doit sauvegarder les intérêts russes dans les Détroits. Le 3 mars 1878, un traité est signé à San Stefano, en Turquie, pour entériner ces décisions et mettre formellement fin à la guerre791.

Les grandes puissances, qui ne se sont pas mêlées au conflit, craignent pour l’équilibre européen et refusent que la Russie commande le sort de l’Europe orientale. L’autonomie de la Bulgarie, qui deviendrait un satellite russe, et la question des Détroits paraissent, surtout, inacceptables à

166 l’Angleterre et à l’Autriche792. La Serbie, qui obtient une petite portion de territoire par rapport

au Monténégro, la Roumanie et la Grèce font également preuve de leur mécontentement. Finalement, la Russie recule et s’entend avec l’Angleterre, notamment sur la division de la grande Bulgarie et sur l’organisation d’une conférence européenne sous la supervision du chancelier Bismarck. Un congrès a donc lieu à Berlin du 13 juin au 13 juillet 1878 pour trouver de nouveaux accords793. Les puissances occidentales cherchent à maintenir la présence ottomane en Europe et la carte des Balkans est redessinée. Les États des Balkans ne sont pas invités à participer, ce qui permet aux grandes puissances de discuter en petit groupe de leurs intérêts794. La Bulgarie est séparée en deux entités, dont l’une est vassale de l’Empire ottoman (la Roumélie orientale) et l’autre autonome, au nord, avec Sofia comme capitale. L’indépendance de la Serbie et du Monténégro est définitivement reconnue mais ils perdent des territoires accordés par le traité de San Stefano, à l’exception de territoires bulgares accordés à la Serbie autour de la ville de Pirot. Les puissances reconnaissent l’indépendance de la Roumanie, proclamée en 1877, qui reçoit le nord de la Dobroudja avec le delta du Danube. L’Autriche-Hongrie obtient le droit d’occuper la Bosnie-Herzégovine et d’installer des garnisons à la frontière entre la Serbie et le Monténégro (sandjak de Novipazar). La Russie conserve Ardahan, Kars et Batoum en Anatolie orientale tandis qu’elle rend Alachkert et Bayezit. La Grèce doit se contenter de promesse et les minorités, notamment les Arméniens, doivent être protégés mais les termes de l’article sur ce point sont très vagues. Enfin, l’indemnité de guerre à verser par l’Empire ottoman a été réduite.

L’Empire ottoman est donc affaibli et diminué, l’Allemagne de Bismarck ressort victorieuse de ce congrès qui lui rend sa place de grande puissance et la Russie est déçue sans que le congrès ne soit pour elle une défaite. La Serbie est elle aussi déçue du soutien que la Russie apporte à la Bulgarie qui la pousse à se tourner vers l’Autriche-Hongrie. Milan Obrenović n’a pas obtenu la Grande Serbie espérée et, dans l’ensemble, le congrès tend à briser l’élan panslaviste des Russes et des Serbes795.

792 Sans compter que le traité signé entre la France, l’Angleterre et la Russie en avril 1856 pour la défense de

l’intégrité de l’Empire ottoman est encore formellement en vigueur. Voir ibid., p. 144.

793 Sur le congrès de Berlin, voir Barbara Jelavich, History of the Balkans… op. cit., vol. 1, p. 358-361. Voir

notamment la comparaison des cartes des traités de San Stefano et de Berlin p. 359.

794 Sont présents à Berlin Gorchakov et Shuvalov pour la Russie, Beaconsfield et Salisbury pour l’Angleterre,

Andrassy et Haymerle pour l’Autriche-Hongrie, Waddington pour la France, Count Corti pour l’Italie et Bismarck pour l’Allemagne, qui préside le Congrès. La Grèce, pays indépendant, est admise, mais il apparaît clairement que ses désirs sont secondaires pour les grandes puissances. Les États balkaniques sont seulement autorisés à envoyer des représentants qui peuvent présenter leurs vues aux sessions qui concernent leurs intérêts.

167 2. La nouvelle de l’indépendance de la Serbie

Alors que la crise d’Orient bat son plein et que la Russie et la Turquie négocient pour la paix, c’est dans la presse que les Français apprennent l’indépendance de la Serbie. Dès le 20 janvier 1878, Le Temps publie un compte rendu d’une lettre envoyée à la Gazette de l’Allemagne du Nord par Saint-Pétersbourg le 12 janvier. La Russie y mentionne ses intentions et fait référence à l’indépendance de la Serbie. Le 27 janvier, Le Petit Journal publie les conditions de la Russie et la dépêche informe que « l’indépendance de la Serbie serait proclamée, avec une petite rectification de frontières »796.

Le lendemain, pourtant, on peut lire dans le même journal qu’il « n’est pas certain que l’indépendance de la Serbie soit demandée par la Russie »797. Le même jour, Le Petit Parisien

publie la note communiquée à la presse par l’agence Havas sur les conditions de paix imposées par la Russie à la Turquie. On peut encore une fois y lire la mention de l’indépendance de la Serbie et le journaliste Gustave Eyriès commente :

Il est clair qu’en s’en tenant aux termes mêmes de l’Agence Havas, lesquels sont à coup sûr volontairement adoucis, nous allons assister à la dislocation de l’Empire ottoman. Le Monténégro agrandi ; la Serbie indépendante ; la Bulgarie dotée d’une autonomie administrative sont autant d’agents dans les mains de la Russie.798

Les Français prennent donc conscience de la réalisation d’une nouvelle étape de la question d’Orient. Au jour le jour, la presse rapporte les nouvelles et continue à mentionner au conditionnel l’indépendance de la Serbie. Les lecteurs apprennent finalement au début du mois de mars que « toutes les conditions concernant le Monténégro, la Serbie et la Roumanie sont réglées »799. La Russie a obtenu leur indépendance et affaibli l’Empire ottoman. Le 23 mars, Le Petit Journal cite le Journal de Saint-Pétersbourg qui a publié le texte du traité de paix : « Le Monténégro, la Serbie et la Roumanie sont déclarées indépendants ; les deux premiers recevront une augmentation de territoire, la Roumanie une indemnité en argent »800.

796 « Les affaires d’Orient », Le Petit Journal, 27 janvier 1878, p. 1. 797 « L’armistice et la paix », Le Petit Journal, 28 janvier 1878, p. 1. 798 Ibid.

799 « Les préliminaires de paix », Le Petit Journal, 6 mars 1878, p. 1. 800 « Les affaires d’Orient », Le Petit Journal, 23 mars 1878, p. 1.

168 3. Retour de la France dans le concert européen

Alors que la défaite face à la Prusse en 1871 avait isolé la France sur la scène européenne, l’Autriche-Hongrie prend l’initiative de l’inviter à participer au Congrès de Berlin801. Après

une courte hésitation, la France accepte l’invitation802.

Le 7 juin 1878, soit quelques jours avant la réunion du congrès où il doit se rendre, le ministre des Affaires étrangères William Waddington présente à la Chambre des députés la conduite suivie par son cabinet. Il évoque l’importance de la neutralité de la France et l’émotion des Français face aux événements, déjà observées à l’occasion du déclenchement de la troisième crise d’Orient803. D’après lui, le congrès est nécessaire pour maintenir la paix en Europe, mais il rappelle les conditions posées par la France pour y participer. En effet, la France accepte de venir sous réserve que toutes les puissances signataires du traité de 1856 soient représentées au congrès et que n’y soient abordées que les questions soulevées par la question d’Orient. Elle refuse ainsi la mention des questions occidentales ou, même, des affaires liées à l’Égypte, au Liban et aux Lieux saints. Waddington affirme, sous l’approbation générale, qu’éviter ces sujets vise à sauvegarder « les intérêts généraux de l’Europe »804. En réalité, les éviter permet surtout

à la France de protéger les intérêts qu’elle a dans ces régions805. Il insiste également sur

l’attachement de la France au maintien de la paix, qui s’explique par le plan Freycinet806, grande

campagne de travaux publics lancée en janvier 1878 sur le territoire français, qui ne doit pas être bouleversé, mais aussi par l’Exposition universelle qui doit avoir lieu à Paris en octobre 1878.

Quelques mois après le Congrès, le 14 décembre 1878, Waddington prend la parole au Sénat et s’exprime pour la première fois sur ces événements. Il estime que la conférence diplomatique a été l’occasion pour la France de retrouver sa place dans le concert européen : « C’était la première fois, depuis nos désastres, que le Gouvernement de la République rentrait dans la

801 L’Autriche-Hongrie appelle d’abord à la tenue d’un congrès à Vienne.

802 Les Républicains viennent d’accéder au gouvernement et ils sont divisés sur la conduite à tenir. Certains

encouragent un rapprochement avec la Russie (pour pouvoir se tourner contre l’Allemagne) et refusent donc de participer à un congrès qui obligera la Russie à abandonner une partie de ses gains. Les autres estiment que se rendre à Berlin rendrait à la France sa place dans le concert européen, ce qui lui permettrait de rétablir son rang et de lancer une politique d’expansion coloniale. C’est la seconde tendance qui l’emporte.

803 Voir chapitre 2, III.

804 Annales du Sénat et de la chambre des députés, Imprimerie et librairie du Journal officiel, Paris, A. Wittersheim

& cie, 1878, T. VIII., p. 158. Chambre des députés, séance du 7 juin 1878.

805 Voir notamment la question d’Égypte, dans Henry Laurens, Les crises d’Orient, Paris, Fayard, 2017, p. 235-

249.

806 Waddington cite les « grands travaux pacifiques, à commencer une œuvre considérable de communications

intérieures, un vaste réseau de chemins de fer ». Annales du Sénat et de la chambre des députés, op. cit., 1878, T. VIII., p. 158. Chambre des députés, séance du 7 juin 1878.

169 grande famille européenne et faisait entendre sa voix dans le concert des grandes puissances »807. Il fait référence à la défaite de 1871 et insiste sur le retour de la France sur l’échiquier européen. Si l’Allemagne a souligné l’importance de sa position durant le congrès, Waddington cherche à faire valoir auprès de ses pairs la position de la France : « Je crois aussi que la France y a gagné, car ce qui fait aujourd’hui notre force en Europe, c’est que tout le monde sait, c’est que tous les cabinets savent que la politique française est une politique pacifique, loyale et honnête »808. Ces propos ressemblent pourtant à un lot de consolation, puisque la France n’a joué qu’un rôle modeste durant le congrès. Toujours dans cette optique, et sous couvert de déplorer le poids porté par les grandes puissances, son discours laisse transparaître une certaine fierté qui doit convaincre de la position de la France : « Je ne puis dire qu’une chose, c’est que jamais dans ma vie je n’ai senti plus profondément ce qu’était la responsabilité, ce qu’était le fardeau de représenter une grande nation dans une assemblée pareille »809. Cette volonté de se mettre en avant peut ainsi être lue à travers le prisme de

l’antagonisme franco-allemand. Il consacre ensuite « quelques mots »810 à l’état de la situation

consécutive au traité de Berlin : son discours met en avant le fait que le congrès a surtout été pour lui une occasion de rejoindre la politique européenne. Sur la Serbie, le ministre ne prononce que deux phrases sur la délimitation des frontières serbes. La délégation française est arrivée à Berlin sans intentions relatives à la Serbie, car elle ne veut pas s’opposer à la politique austro-hongroise811.

La France a une position discrète lors du congrès et conserve la politique de neutralité déjà en place au moment de la crise de 1875-1877, position qui ne correspond guère à la responsabilité décrite par Waddington. D’ailleurs, un an et demi plus tard, le député Louis Legrand demande à la Chambre que la France sorte du silence dans lequel la guerre de 1870-1871 l’a plongée :

Il n’est pas possible de laisser se prolonger plus longtemps la situation de silence que le Parlement s’était volontairement faite depuis 1871 en ce qui concerne nos relations extérieures. Il n’est pas possible de laisser dire plus longtemps que cette tribune est la seule en Europe où l’on ne discute pas la politique étrangère.812

807 Annales du Sénat et de la chambre des députés, Imprimerie et librairie du Journal officiel, op. cit., 1878, T. XI.,

p. 83. Sénat, séance du 14 décembre 1878.

808 Annales du Sénat et de la chambre des députés, op. cit., 1878, T. XI., p. 83. Sénat, séance du 14 décembre 1878. 809 Ibid.

810 Ibid, p. 84.

811 Čedomir Popov, Francuska i Srbija 1871-1878, op. cit., p. 413.

812 Annales du Sénat et de la chambre des députés, op.cit., 1880, T. VIII., p. 106. 18 juin 1880, Chambre des

170 Ainsi, il estime qu’après avoir décidé de participer au Congrès de Berlin et de s’être donc investie dans la politique européenne, la France doit sortir de son silence et s’intéresser aux Affaires extérieures. Il loue la politique de Freycinet, qui fait des communications plus fréquentes que ses prédécesseurs sur les relations internationales, mais estime que ce n’est pas suffisant. Membre de la gauche républicaine, Louis Legrand se sert ainsi du Congrès de Berlin pour plaider pour une France présente sur le plan international.

4. L’opinion française et le Congrès de Berlin

Tandis que les parlementaires discutent du retour de la France au sein du concert européen, la presse se charge de diffuser les travaux du congrès. Le 12 juin 1878, la rubrique « Le Congrès » (parfois appelée « À Berlin ») apparaît en une du Petit Parisien ; le journaliste Maxime Ramon y signe un article et affirme :

[…] nous tiendrons très exactement nos lecteurs au courant des délibérations du congrès, car notre correspondant M. Robert Marguin, de passage à Berlin, a bien voulu consentir à y prolonger son séjour pour nous transmettre ses renseignements dont on a pu déjà apprécier l’exactitude à propos de l’attentat.813

Ce dernier a en effet couvert l’attentat contre Guillaume, empereur d’Allemagne814. Le

lendemain, Le Temps débute la publication d’une rubrique « Le Congrès de Berlin » qui s’ajoute à celle « Affaires d’Orient » déjà existante : le journal doit lui aussi faire appel à des collaborateurs sur place815. Dans Le Figaro, après un article « Le Congrès » signé par J. Cornély

le 13 juin 1878, une rubrique « Le Figaro à Berlin » apparaît le 14 juin : « Le correspondant dont nous avons déjà parlé et qui nous a fourni de si excellents renseignements sur l’attentat de Nobiling, nous envoie aujourd’hui de Berlin la première dépêche relative au Congrès de Berlin »816. Ce dernier se nomme De Poelitz. Dans Le Petit Journal, une rubrique quotidienne intitulée « Le Congrès » est reliée à un service télégraphique spécial à Berlin à partir du 13 juin 1878. Elle publie aussi des comptes rendus des décisions prises par les puissances dans des sous-catégories par pays ou enjeux (par exemple : « les Détroits » le 8 juillet 1878). À noter que la Serbie et le Monténégro y sont présentés dans la même sous-catégorie. Certains jours, dans Le Figaro, ces rubriques ne paraissent pas, souvent en raison d’autres événements

813 « Le Congrès », Le Petit Parisien, 12 juin 1878, p. 1. 814 Voir Le Petit Parisien du 9 juin 1878.

815 « Le Congrès de Berlin », Le Temps, 14 juin 1878, p. 1. 816 « Figaro à Berlin », Le Figaro, 14 juin 1878, p. 1.

171 importants, comme la revue de l’armée de Paris (20 juin 1878) ou les préparatifs de l’Exposition universelle. Presque quotidiennement les informations sont toutefois diffusées auprès des Français à travers la presse, avec un petit décalage seulement817, et cela dénote un intérêt des Français pour la situation en Europe orientale.

Dès l’ouverture, Maxime Ramon écrit : « Demain s’ouvre à Berlin ce congrès européen qui peut avoir sur les destinées de l’ancien continent une influence si considérable »818. Et Le

Figaro819 de se justifier : « Nos lecteurs nous rendront cette justice que nous ne les saturons pas de politique. Mais dans les circonstances actuelles, nous croirions manquer à nos devoirs de journalistes si nous ne placions en évidence ce qui nous parvient au sujet d’un événement qui doit régler l’état de l’Europe »820. Les journalistes perçoivent donc les enjeux politiques des

événements qui occupent l’Europe. Alors que depuis le début de l’année se profile le démembrement de l’Empire ottoman, le journaliste Maxime Ramon se questionne :

La grosse difficulté est de savoir ce qu’on mettra à sa place. Dans cette contrée où les races et les religions sont si étrangement mêlées, sans être confondues, les divisions sont profondes et les haines violentes. Si le Grec, le Slave, le Bulgare (qui n’est Slave qu’à moitié), le Roumain détestent tous l’Osmanli, ils se jalousent et se haïssent encore plus fortement les uns les autres. Comment s’y prendra-t-on pour concilier les droits et les prétentions de chaque race ? Comment pourra-t-on satisfaire les uns sans froisser les autres ?821

On note la perception des identités qui, dans les Balkans, reposent sur les communautés religieuses, et les inquiétudes sur l’avenir de l’Europe. Pour la Serbie, la question récurrente est celle des territoires qui doivent lui être accordés. Le 18 juin 1878, Le Temps rapporte les paroles de Ristić, alors qu’il espère encore être accepté au congrès : « Pourvu que nous ne nous étendions que vers l’ouest, on ne nous empêchera pas d’annexer un territoire, d’ailleurs peu considérable, où, quoi qu’en aient dit beaucoup de publicistes ethnographes, les Serbes sont plus nombreux que les Bulgares »822. Il fait référence aux territoires autour des villes de Niš et de Pirot. Quelques jours plus tard, le 21 juin 1878, on peut lire dans Le Petit Journal que les

817 Le numéro du 6 juillet 1878 publie par exemple une information reçue le 4 juillet au soir, ou le numéro du 7

juillet une information reçue le 5 au soir, etc.

818 « Le Congrès », Le Petit Parisien, 13 juin 1878, p. 1. 819 Qui n’est pas un journal politique.

820 Le Figaro, 14 juin 1878, p. 1.

821 « L’Empire d’Orient », Le Petit Parisien, 17 juin 1878, p. 1. 822 « Le Congrès de Berlin », Le Temps, 18 juin 1878, p. 1.

172 « Serbes sont très exigeants ; mais leurs prétentions seront repoussées. Ils demandent la partie occidentale de la Bulgarie ; on leur enlèvera ce que le traité de San Stefano leur accorde de la Bosnie »823. Le 6 juillet 1878, finalement, Le Petit Journal déclare :

Le Congrès a, aujourd’hui, définitivement réglé les délimitations de la Serbie et du Monténégro. […] Pour la Serbie, le point litigieux était le district de Pirot, que la Russie voulait donner à la Bulgarie. Sur la demande énergétique de l’Autriche, Pirot a été adjugé à la Serbie.824

En effet, le traité signé à Berlin attribue Pirot à la Serbie, tandis que San Stefano l’accordait à la Bulgarie. Toutefois, quelques semaines plus tard, Charles de Mazade, rédacteur politique de la Revue des Deux Mondes, regrette les conséquences du congrès pour la Serbie :

Tout est en suspens au milieu d’un mécontentement à peu près universel. La Serbie en est