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La conduite des négociations est si répandue dans la vie quotidienne qu’il est difficile d’en être toujours conscients quand cela arrive. Nous négocions avec nous-mêmes, par exemple, le budget de dépenses mensuelles pour un loisir coûteux, avec nos enfants sur la nécessité d’aller au lit ou avec notre partenaire sur la destination du prochain voyage commun. Sans s'en rendre compte, beaucoup de gens négocient plus d'une fois par heure.128 En revanche, l’hypothèse que l’exercice régulière de la négociation, conduit à de meilleures aptitudes de négociateurs, n'est pas confirmée dans la pratique. Force est de constater, que beaucoup de négociations échouent parce que les parties ne peuvent s'entendre, ou se satisfont de résultats médiocres.

C’est dommage, car selon le spécialiste LEWICKI, les résultats des négociations menées affectent directement la satisfaction individuelle, les rapports familiaux et amicaux, le statut

127 THOMANN (C.), Klärungshilfe 3. Das Praxisbuch, Reibek, Rowohlt. 2007, pp 53 - 55

128 LEWICKI (R.J), Verhandeln mit Strategie - Das große Handbuch der Verhandlungstechniken, St. Gallen /

146 social et la réussite économique. Ainsi, la perception de soi-même influencée aussi par notre

capacité à négocier.

Pourquoi j’en fais référence ici ? Car nous avons vu dans les chapitres précédents, que le niveau de satisfaction personnelle et de confiance en soi sont déterminants pour la prédisposition et la fréquence d’implication dans des conflits.

Nous avons tous donc à priori intérêt à acquérir des techniques de négociation constructives, soit dans un but de prévenir le conflit, ou le cas échéant, pour le résoudre rapidement tout en atteignant des résultats durables et satisfaisants pour tous.

Mais comment bien négocier dans une médiation ? Quels sont les éléments à en tenir compte ? Je voudrais profiter de cette section pour faire une excursion vers la technique de médiation, dont le médiateur, au moins, doit disposer pour réussir sa mission. J’aimerais attirer l’attention vers l’existence de différents styles de négociation, et spécifier ceux, qui sont particulièrement prometteurs dans un cadre de médiation.

Notions de base

La négociation est un moyen de parvenir à une décision pluraliste dans le but de régler de manière définitive un conflit objectif ou subjectif existant. La négociation peut avoir lieu à travers la communication interpersonnelle, l’évaluation intra-personnelle et la prise de décision collective. La complexité de la négociation demeure dans l’interaction des influences individuelles de toutes les personnes concernées et l'influence mutuelle du groupe dans le processus de prise de décision collective.129

§ 1. Négociation distributive

Un problème de négociation né, si une ou plusieurs alternatives pourraient apporter une amélioration pour chacune des parties impliquées dans une négociation, mais que ces alternatives existantes sont évalués différemment par les parties. Si les parties portent de

147 l’attention uniquement sur l’objet de négociation, il en résulte inévitablement un problème

distribution (négociation distributive). Les intérêts et positions des parties sont en conflit les uns vis-à-vis les autres et les résultats obtenus au cours de la négociation doivent être divisés entre les parties. La zone d'accords possibles (ZOPA130), est limitée par les limites que les négociateurs se fixent individuellement.

Les négociateurs se trouvent alors dans un dilemme : Le résultat possible des négociations est en corrélation positive avec la volonté de comportement concurrentiel et en corrélation négative avec la volonté d’un comportement coopératif. Le meilleur résultat ne peut être atteint que par un comportement concurrentiel (unilatéral), alors que le pire résultat est produit par la coopération. 131

B comportement de coopération B comportement concurrentiel

A comportement de

coopération

Les deux parties coopèrent, les résultats individuels sont bons.

A coopère, B rivalise, le résultat pour

A est très mauvais, le résultat pour B

est très bon. A comportement

concurrentiel

A rivalise, B coopère, le résultat pour

A est très bon, le résultat pour B est très mauvais.

Les deux parties rivalisent, les résultats individuels sont mauvais. Source: LAX & SEBENIUS, The Manager as Negotiator: The Negotiators Dilemma: Creating and Claiming Value , Boston: Little Brown and Co, 1992, p. 21

130 Zone of possible agreements

131 RAIFFA (H.), The Art and Science of Negotiation. 1982 Cambridge MA: Belknap Press, 1982, pp. 115-119

L’éventail de solutions possibles partie B

L’éventail de solutions possibles partie A ZOPA

148 Le gain de l’un signifie par conséquent la perte l’autre. L’impact relationnel de résultats

obtenus dans une négociation distributive est fort et la poursuite de la relation est uniquement possible si une des parties accepte un résultat en dessous de son optimum théorique.

Un exemple concret132 de la négociation distributive est la grève des 114 jours des imprimeurs newyorkais pendant l’hiver 1962-1963. Bertram POWERS, représentant des syndicats, avait ainsi pu forcer une augmentation de salaire de près de 300 pour cent pour les travailleurs. La perte de recettes à cause de la grève (20 000 imprimeurs) représentait, au moment des négociations, déjà 108 millions de dollars américains, de sorte que les éditeurs n'avaient pas d'autre choix que d’accepter les exigences exorbitantes de l'union syndical. En outre, POWERS imposait l'interdiction des distributeurs automatiques de journaux comme mesures de réduction de coup, car il les estimait dangereux à l'emploi.

De prime abord les négociations menées par Bertram POWERS était alors une pleine réussite. Mais les pertes élevées pendant la grève et le carcan économique de l'interdiction de l'optimisation des coûts, conduisait la majorité des éditeurs à la faillite dans le mois à venir et de milliers d’imprimeurs de New York au chômage.

Cet exemple illustre non seulement l'absence d'anticipation et d’évaluation de l’impact de la part du négociateur, mais montre bien aussi que la solution perdant-gagnant peut, à terme, mener à une solution perdant-perdant. La "grève des imprimeurs" montre qu’une négociation modérée est une condition préalable au succès durable dans une négociation: Celui qui négocie avec l’intention de nuire, se nuit.

§ 2. La négociation « intégrative »

Un deuxième exemple133 va me servir de base pour illustrer la différence entre négociation distributive et intégrative.

Un auto-stoppeur se trouve au bord de l’autoroute en direction de Lille et tient dans sa main une pancarte sur laquelle figure « Marseille ». Un conducteur s'arrête pour lui signaler son erreur. Le jeune homme demande s’il peut monter quand même dans la voiture pour avancer

132 NIERENBERG (G.), Gut verhandelt ist doppelt gewonnen, München Management Buchclub, 1971 S. 39 133 Ibid

149 quelques kilomètres. « Oui, mais ne vouliez-vous pas partir à Marseille?», demande le

conducteur. « Non, je veux aller à Lille. Mais si j’affiche une mauvaise direction, au moins quelqu'un s'arrête pour me faire remarquer mon erreur. Et la plupart du temps ces gens finissent par m’amener un bout de chemin. »134

L’idée de base est donc d’agrandir l’éventail des solutions possibles. 135

L’agrandissement de cet éventail consiste ici dans le fait de faire réaliser au conducteur qu’il va également atteindre sa cible s’il prend l’auto-stoppeur. L’attitude du conducteur en vers l’auto-stoppeur (ou le fait de prendre un auto-stoppeur) peut être à l’origine plutôt négative, car le conducteur craint par exemple de devoir avoir une conversion pendant tout le voyage. L'auto-stoppeur en est conscient et élargi le gâteau en offrant de confirmer l'image de soi du conducteur: Philanthrope ou donneurs de leçon ? Le fait d’apprendre sur l'erreur cautionne une dépendance entre son image de soi (moteur primaire) et la perception (l'image externe) que l'auto-stoppeur en a.

Le conducteur atteint alors son objectif de négociation en investissant dans son image extérieure (plutôt philanthrope que donneurs de leçon) et l'auto-stoppeur atteint son objectif principal des négociations: On l’emmène.

L’exemple vise à montrer à la fois l’influence d’intérêts élémentaires136 dans notre stratégie de négociation et aussi le lien entre créativité dans le processus de négociation et le résultat possiblement atteignable.

i. Conditions structurelles

Il existe un certain nombre d’exigences structurelles permettant l’optimisation de la négociation intégrative :

- Créer une atmosphère de négociation coopérative et axée sur les faits, en respectant des règles de négociation coopérative implicite et explicite

134 Cet exemple est issu d’un séminaire pratique d’Ivo Greiter « Kreativität in der Praxis ». 135 « agrandir le gâteau » pour faire référence à la Partie 2, Chapitre 1, Section 1, §1

136 Ceci faisant référence à MASLOW Abraham, Devenir le meilleur de soi : Besoins fondamentaux,

150 - Communiquer les propres intérêts et essayer de comprendre les intérêts des autres

- Etre créatif dans la définition de l’objet de négociation

- Chercher une solution juste pour tous les participants, à savoir une solution, qui satisfait tous les participants de manière durable

Ces critères sont repris sous l’abréviation FOTE (Fair, Open, Trustful Exchange). Le concept a été développé par H. RAIFFA.137

Il évoque également la considération de données spécifiques différentes de cas en cas :

- Est-ce qu’il existe des groupes d’intérêts « invisibles » ? Est-ce qu’il y a des chevauchements avec d’autres domaines d’intérêt, qui influenceraient le négociateur dans son comportement ?

- Est-ce qu’il y a une seconde chance possible ou est-ce une « finale »? Est-ce que la négociation a lieu en pleine volonté ? Est-ce que le « temps » un facteur influant le résultat ?

- Y at-il une norme au sein du groupe, qui imposerait au négociateur principal (le porte-parole) d’adopter un certain comportement ?

Eventuels erreurs de perception, de mémoire ou encore de jugement de par des individus ou des groupes sont décisifs pour la réussite du processus de négociation intégrative. Une prise en compte exacte des données spécifiques exige souvent la connaissance des résultats les plus importants des sciences du comportement.

ii. Fondements socio-psychologiques pour les tactiques de négociation intégrative

Dans ses contributions autour de la théorie de décision, Herbert A. SIMON138, co-fondateur de la psychologie cognitive, déclare que «la capacité à penser de l’humain est, par rapport à la

137 RAIFFA (H.) The Art and Science of Negotiation. op.cit., pp 92 - 94

138 SIMON (H.), « A Behavioral Model of Rational Choice », The Quarterly Journal of Economics, Vol.

151 complexité de l'environnement dans lequel il vit, très modeste. Au lieu d’une prise de décision

rationnelle, l’humain se contente de trouver des solutions et des pistes d'action « assez bonnes ».139 Cette rationalité limitée repose sur deux raisons - préjugés (biases = distorsion) et heuristiques (disponibilité) – et font l'objet de nombreuses études psychologiques.

Selon un travail de WILLENBROCK140, l’humain reçoit, en état de repos sur son fauteuil, jusqu’à 11 millions de sensations. Une analyse séquentielle de toutes les impulsions de stimulation est impossible. Seule une petite partie de l'information disponible est effectivement transformée en connaissance (l'expérience) et sert au cerveau humain à formuler l’hypothèse sur "comment les choses" sont (la perception). Ce processus de présomption par induction, se construit à partir de plusieurs images individuelles (tel un puzzle) réellement perçues et se termine par le remplissage (les morceaux de puzzle manquants), sur une base de raisonnement personnel individuel, imprégnés de nos expériences, valeurs, et tout ce qui influe sur notre cheminement de pensée. Ceci a lieu en dehors de notre conscience et est appelé « inférence inconsciente »141.

La perception de l'individu est influencée par:

- L’intensité des impulsions de stimulation émanant de l’émetteur (complexité, la force du signal)

- La capacité de perception objective du destinataire (audition, vision, la maîtrise de la langue)

- L'évaluation subjective par le percepteur.

Il est possible d’influer sur la complexité et la force du signal en choisissant un lieu de négociation calme, en veillant à une prononciation claire, une structure de phrase simple et une sémantique consciemment claire (choix de mot non-ambiguë, absence d'utilisation de métaphores). Mais aussi la communication non verbale, l'écoute active et le fait de donner un

feedback à l’autre partie jouent un rôle important pour l’émission de signaux clairement

perceptibles. Ainsi, le médiateur doit sensibiliser les participants à la possibilité d’erreurs de perception causée par une déficience sensorielle ou par une maitrise insuffisante de la langue

139 Ibid

140 WILLENBROCK, (H.), « Das Geheimnis der guten Wahl », GEO , vol. 08, 2008 p. 138-152 141 SIMON (H.), A Behavioral Model of Rational Choice, op.cit., p.53

152 (par exemple dans le cas où les parties seraient de différentes nationalités) Dans ce cas des

interprètes peuvent réduire considérablement l'impact.

L’intérêt est l’augmentation de la perception objective (factuel, réel), qui lie les parties autours d’évidences et de compréhensions communes et de diminuer la perception subjective. Cette dernière est difficile à cerner, car elle est propre à chacun, impalpable, et son impact n’est pas quantifiable. Pour les participants issus de différents milieux culturels, en particulier dans les médiations internationales, le choix des mots, les gestes et les expressions du visage peuvent avoir une signification différente selon chaque contexte culturel et conduire à des interprétations erronées142.

La science parle d’un « effet de halo » pour décrire le phénomène de percevoir une corrélation entre caractéristiques quasi indépendantes ou très peu contiguës. Pour donner un exemple concret, il y a une tendance à lier l'attractivité d'une personne au dégrée de confiance qu’on peut avoir en elle. Au même titre, une personne employant un dialecte fort ou peu commode peut être jugé d’une intelligence inférieure (le film « les ch'tis » illustre parfaitement ce préjugé).

D’autres effets manipulateurs possibles sont :

- L'effet d'ancrage (anchoring , évoqué plus haut) se réfère à l'assimilation d'une valeur numérique perçue (durant un stade tôt des négociations) comme valeur de référence prédéterminée

- L’effet de positionnement sériel : la perception de beaucoup d’informations dans un court laps de temps, peut engendrer (hypothèse d’ « un seul canal » / l'effet primauté et de régence = primacy and regency effect) une prépondérance sur à la première et la dernière information reçue.

- L’effet d'excès de confiance est appelé le phénomène de surestimation systématique des propres compétences et connaissances, et donc la surestimation de sa propre position de négociation par rapport aux partenaires commerciaux. L'excès de confiance est une des

142 Par exemple, dans les cultures occidentales, le geste d'ouvrir les bras, les paumes de main vers le haut, pour

manifester «l’ouverture » est entendu dans l'Islam comme une mesure défensive contre le «mauvais œil». Le claquement de doigts (signifiant «idée» à l’occident) est interprété dans l’Islam comme une négation. La geste du cercle en joignant index et pouce (pour signaler «bon») est en Orient considéré comme "l'œil du mal». La liste des éventuels malentendus entre les cultures pourrait remplir des rayons entiers de bibliothèques et on ne peut que deviner combien de guerres ont été ainsi déclenchés.

153 raisons, prouvées de manière empirique, pour l'échec de nombreuses négociations entre

parties rationnelles. Le phénomène est encore plus amplifié lorsque les parties négocient entre elles, sans passer par un modérateur tel que le médiateur.

- L’effet de polarisation de groupe (Groupthink) restreint le processus créatif au sein des groupes. Irving JANIS143 a prouvé qu’au sein de groupes il est possible d’assister à une tendance à la perception sélective pour parvenir à un consensus aussi proche que possible de la position de leader. Si en plus on peut constater un excès de confiance auprès du leader, la situation s’aggrave davantage.

- L'information est également évaluée en fonction de prédispositions personnelles à raisonner en stéréotypes. Un stéréotype est la généralisation de propriétés attribuées à un groupe, dont chaque membre est présumé disposer. (ex : les femmes négocient toujours de manière rationnelle, les Asiatiques négocient toujours avec un agenda caché). Ces stéréotypes sont dangereux, surtout parce que les informations qui contredisent le stéréotype, sont dévaluées inconsciemment. 144

- L’attribution causale désigne le fait d’attribuer des causes aux résultats. Selon la théorie de l’attribution, certaines personnes peuvent générer l'explication de résultats positifs par des causes internes et les résultats négatifs par des causes externes145. On sous-estime ainsi l’influence de facteurs situationnels sur le comportement personnes et surestime en même temps les facteurs dispositionnels.

L'ensemble de toutes les prédispositions est appelé «attitude» et résume la tendance à réagir à certains stimuli avec des évaluations constantes. Si une information reçue est en contradiction avec l’attitude de la personne, une situation de conflit née et on parle de « dissonance cognitive ».

ZIMBARDO a démontré expérimentalement que la dissonance cognitive peut conduire à l'auto-tromperie inconsciente par déformation de vérité. Dans le processus de transition vers la catégorisation, on assiste à une comparaison de l'information perçue avec des schémas issus

143 JANIS (I.) (1918-1990), Psychologue américain, Professeur à l’University of Berkeley, CA.

144 ZIMBARDO, (G.) & GERRIG, (R. J) Psychologie, München, Pearson Education Deutschland, 2004 p. 44 145 Anecdote à ce sujet : Durant mon enfance, mon père raisonnait de la manière suivante : Quand je le rendais

fière par une action ou un exploit il disait à ma mère « ah, regarde ma fille ». Quand je n’étais pas sage ou l’école téléphonait à mes parents, il disait « Qu’est-ce qu’elle a fait encore, ta fille » ?

154 d’expériences antérieures (« similaire à ») et la conclusion sur « les choses comme elles se

présentent à nous » selon le nombre de concordances avec ces expérience acquises.

Il est possible de modifier ces attitudes et même indispensable, si on a l’ambition de devenir un bon négociateur. Au même titre, il est important, surtout en tant que médiateur, d’affiner ses sens d’analyse pour déceler l’existence d’illusions cognitives et détecter de prédispositions individuelles chez les participants d’une médiation.

iii. Pondérations et préférences

Une des caractéristiques essentielles de la négociation intégrative est la négociation simultanée de plusieurs objets (multi-issuing), avec une pondération et une préférence différentes de participant en participant. Le résultat global de la négociation est la somme de trocs entre les négociateurs : le négociateur est prêt à faire des concessions sur un point lui étant moins important pour atteindre un meilleur résultat à l'objet préféré.

Ceci exige que les parties communiquent mutuellement leurs préférences et les prennent en compte par la suite.146 En outre, selon H. RAIFFA, la divulgation délibérée de préférences réduit le risque de choisir un style de négociation compétitive et d’échouer ainsi dans les négociations intégratives.

Cependant, l’expression de préférences peut résulter également de décisions inconscientes ou de la non-divulgation de préférences réelles. Pour cette raison, la connaissance de la formation des préférences est une condition importante pour l'application d'une tactique de négociation intégrative. Ainsi, les besoins fondamentaux147 jouent un rôle essentiel dans la formation de préférences. Si, par exemple, une personne a un besoin important de réalisation de soi, son attention est focalisée plutôt sur le succès et les profits. Si une personne a un grand besoin de sécurité, elle va opter plutôt pour une stratégie de prévention de pertes.

De la hiérarchie des besoins découlent encore d’autres dimensions socio-psychologiques. L'équité procédurale (besoin d'estime) signifie que les acteurs de négociation estimant subjectivement satisfaisants la qualité d'interaction, seraient plus disposés à accepter des

146RAIFFA (H.) The Art and Science of Negotiation. op.cit., pp 98-99

155 rendements moins avantageux que si la qualité d'interaction avait été insatisfaisant148. Le

souhait d’élimination du sentiment d'incertitude (besoin de sécurité) conduit le négociateur avec une aversion au risque à prendre des décisions et à se mettre d’accord beaucoup plus rapidement que les parties affines au risque, qui défendent beaucoup plus longtemps, même au risque de l'échec, leurs objectifs de négociation.

Du souhait de réputation positive (maintaining face= sauver la face) découle l’effort des parties pour une communication constructive, basée sur la confiance et le respect. En particulier dans la perspective de relations futures, les négociateurs tentent généralement « de transmettre une image de soi globale positive à l'autre côté »149.

Edward Tory HIGGINS (*1946), un autre psychologue américain, Directeur du Centre scientifique de la Motivation (Motivation Science Center), distingue entre focus de promotion (l’état final positif étant le gain) et le focus de prévention (l’état final positif étant l'absence d'un événement négatif). Dans une étude publiée en 2005, il démontre, que les personnes avec un focus de promotion obtiennent de meilleurs résultats globaux au cours de négociations menées. Dans les négociations entre personnes avec un focus de promotion, ces