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7. AUTRES OPTIONS THÉRAPEUTIQUES PHARMACOLOGIQUES OU

7.1.3. Phytothérapie

Aucune étude portant sur l’efficacité des traitements à base d’extraits de plantes chez l’humain n’a été répertoriée relativement au traitement des symptômes systémiques persistants attribués à la maladie de Lyme. Les niveaux de preuve scientifique au regard de l’efficacité et de l’innocuité de la phytothérapie ont donc été jugés insuffisants.

Une étude publiée par Goc et Rath [2016] passe cependant en revue toutes les plantes pour lesquelles une activité anti-Borrélia aurait été démontrée en laboratoire. Selon les auteurs, la phytothérapie pourrait renforcer le traitement antibiotique et diminuer le risque de rechute. L’efficacité de cette approche thérapeutique serait variable d’un individu à l’autre, mais il semble qu’elle pourrait présenter des avantages souvent considérables.

Le choix de la plante dépendrait de l’état du patient ainsi que de ses symptômes.

En traitement d’attaque, différentes plantes sembleraient plus efficaces que d’autres comme les extraits de pépins de pamplemousse ou encore ceux de la cardère sauvage (Dipsacus sylvestris), deux produits naturels dont les propriétés anti-infectieuses contre B. afzelii auraient été démontrées en laboratoire. D’autres plantes telles que la racine de la griffe du chat (Uncaria tomentosa), la racine de cardère (Dipsacus fullonum), le

banderol (Otoba parvifolia) et la Stevia rebaudiana appelée aussi « chanvre d'eau » auraient démontré in vitro des propriétés antibactériennes contre les formes actives et les formes dormantes des bactéries du complexe B. burgdorferi s.l.

Perspectives et recommandations des sociétés savantes et des agences d’évaluation

La majorité des organisations dont les documents ont été retenus n’abordent pas l’efficacité des options thérapeutiques autres que par les anti-infectieux dans la prise en charge des personnes qui présentent des symptômes systémiques généraux et

persistants, qu’elles aient ou non un antécédent de maladie de Lyme avérée. Selon la HAS et la SSID-SSN, les données concernant la prise en charge non antibiotique de ce type de clientèle sont insuffisantes et ne permettent pas de tirer des conclusions [HAS, 2018b; Nemeth et al., 2016].

23 Serious bacterial infections acquired during treatment of patients given a diagnosis of chronic Lyme disease — United States. Disponible à : https://www.cdc.gov/mmwr/volumes/66/wr/mm6623a3.htm.

Perspective des cliniciens

Les cliniciens consultés ont un avis partagé quant aux thérapies autres que par anti-infectieux dans le contexte de symptômes systémiques généraux et persistants attribués à la maladie de Lyme, que la personne ait ou non un antécédent de maladie de Lyme avérée.

Certains cliniciens qui prescrivent fréquemment des traitements anti-infectieux prolongés simples ou combinés aux personnes qui ont des symptômes systémiques généraux et persistants attribués à la maladie de Lyme invitent leurs patients à la prudence et leur conseillent de s’en tenir uniquement aux traitements qu’ils prescrivent afin de ne pas créer trop de confusion. D’autres recommandent des traitements alternatifs à leurs patients, mais ils reconnaissent que la littérature concernant ce type de thérapie est très limitée, voire inexistante pour plusieurs de ces approches. Le choix des thérapies dépendrait de l’état du patient et de ses symptômes en plus de l’expérience passée du clinicien ainsi que de son niveau de confiance et de « confort » à l’égard de certaines approches.

La prise de produits naturels est l’approche la plus convoitée par les cliniciens consultés qui se spécialisent, notamment, dans la prise en charge de personnes présentant des symptômes systémiques généraux et persistants attribués à la maladie de Lyme et qui recommandent des thérapies alternatives. En effet, près de la moitié d’entre eux recommandent divers suppléments à leurs patients comme thérapie de soutien afin d’atténuer les effets indésirables des médicaments. Certains recommandent la prise orale de probiotiques, de vitamine C ou encore d’acide folique en plus de suppléments naturels d’ail afin d’essayer de reconstituer la flore intestinale ou le système immunitaire.

D’autres recommandent l’utilisation de différentes herbes, produits homéopathiques ou encore des vitamines ou minéraux tels que le magnésium pour atténuer les symptômes ressentis par les patients. Quelques médecins consultés vont même jusqu’à prescrire certains suppléments lorsque les patients y croient et qu’ils en font la demande et

lorsque le produit ne semble pas dangereux ou trop coûteux. La plupart des suppléments sont recommandés pour une durée indéterminée ou, du moins, tout au long du traitement anti-infectieux proposé. Un des médecins consultés recommande à ses patients la phytothérapie comme traitement d’entretien. Selon son expérience, cette thérapie permettrait d’éviter les rechutes chez plusieurs patients.

Le disulfirame est un médicament généralement administré dans les cas de dépendance à l'alcool, car il inhibe une enzyme nécessaire à son élimination, l'aldéhyde

déshydrogénase. Ce traitement a été prescrit à des personnes qui présentaient des symptômes systémiques généraux et persistants attribués à la maladie de Lyme par la majorité des cliniciens qui prescrivent des traitements prolongés. Ces cliniciens y ont eu recours principalement lorsqu’il n’y avait pas d’autres options thérapeutiques

envisageables pour des patients avec d’importantes atteintes qui compromettaient leur qualité de vie. Pour certains d’entre eux, bien que les résultats d’une étude parue au mois de mai 2019 semblent très prometteurs [Liegner, 2019], il est encore trop tôt pour conclure à l’efficacité du disulfirame dans le traitement des symptômes systémiques généraux et persistants attribués à la maladie de Lyme. Les mécanismes de toxicité et la

synergie de ce médicament sont encore mal connus, et son utilisation peut engendrer des effets indésirables importants chez certains patients. Plusieurs précautions doivent être prises, les patients doivent être suivis de très près et les cliniciens doivent se familiariser avec l’utilisation de ce médicament. Selon certains cliniciens consultés, le disulfirame exacerberait les symptômes au début du traitement et, bien que, les effets indésirables de ce médicament puissent être graves (p. ex., neuropathie périphérique, psychose, pensées suicidaires, hallucinations), des médecins le prescrivent à

contrecœur, puisqu’il est de plus en plus réclamé par les patients. Compte tenu de son profil d’innocuité, d’autres préfèrent cependant attendre les résultats de l’étude

américaine dirigée par le Dr Fallon avant d’administrer ce traitement de manière plus étendue à l’ensemble de leurs patients24.

Bien que la majorité des cliniciens interrogés qui se spécialisent, notamment, dans la prise en charge de personnes qui présentent des symptômes systémiques généraux et persistants attribués à la maladie de Lyme ne recommandent pas systématiquement l’oxygénothérapie hyperbare, plusieurs de leurs patients y ont tout de même recours à la suite de leur prise en charge par des cliniques privées ou par des médecins à l’étranger.

Certains patients auraient effectivement signalé des avantages importants, mais cette approche est coûteuse, peu pratique et ne semble pas entraîner une guérison ou une rémission durable selon des témoignages reçus. Cette approche doit être menée par du personnel correctement formé et qualifié, à défaut de quoi il pourrait y avoir de graves conséquences, parfois même mortelles. Quelques-uns des cliniciens consultés

recommandent l’oxygénothérapie hyperbare dans certains cas bien précis, notamment lorsqu’il n’y a pas de symptômes associés à une infection par Babesia. La majorité des cliniciens consultés croient également qu’il serait pertinent de mettre au point des études contrôlées appliquant des méthodes scientifiques validées pour évaluer l'efficacité potentielle de l'oxygénothérapie hyperbare chez des patients qui présentent des symptômes systémiques persistants post-traitement.

Selon des cliniciens qui se spécialisent, notamment, dans la prise en charge de personnes qui ont des symptômes systémiques généraux et persistants attribués à la maladie de Lyme, l’hyperthermie contrôlée est un traitement qui coûte extrêmement cher, qui ne semble pas très bien fonctionner et qui peut s’avérer très dangereux. Seulement deux de ces cliniciens y auraient recours, et ce, dans moins de 5 % des cas. Certains seraient d’avis que l’utilisation du sauna pourrait représenter un bon compromis. Selon l’expérience d’un des cliniciens, les patients qui combineraient le sauna et les bains d’eau froide s’en trouveraient généralement très bien.

Les traitements par chélation visant à éliminer la présence de métaux nuisibles dans l’organisme à l’aide d’un agent chélateur sont accessibles aux États-Unis, mais interdits en France. Pour plusieurs cliniciens consultés, le caractère rationnel de l’utilisation de ce procédé médical dans le contexte de la maladie de Lyme ne semble pas très clair.

24 ClinicalTrials.gov. Disulfiram: A test of symptom reduction among patients with previously treated Lyme disease.

NCT03891667. Disponible à : https://clinicaltrials.gov/ct2/show/NCT03891667.

Les patients se ruineraient pour suivre des traitements de chélation de métaux, et très peu auraient vu des améliorations.

Quelques-uns des cliniciens consultés qui se spécialisent, notamment, dans la prise en charge de personnes qui présentent des symptômes systémiques généraux et

persistants attribués à la maladie de Lyme préconisent le régime paléolithique, la diète cétogène ou encore le jeûne modifié aux protéines.

Les cliniciens du comité consultatif ne recommandent en aucun cas les options thérapeutiques décrites dans cette section pour les personnes qui présentent des

symptômes systémiques généraux et persistants attribués à la maladie de Lyme, qu’elles aient ou non un antécédent de maladie de Lyme avérée.

En résumé, la plupart des options thérapeutiques autres que par anti-infectieux n’ont fait l’objet d’aucune étude clinique qui aurait permis d’évaluer de façon optimale leur efficacité. Puisque la majorité des études disponibles, généralement descriptives, ont porté sur des adultes avec un antécédent de maladie de Lyme avérée, la généralisabilité et la transférabilité des résultats à la population pédiatrique ou aux personnes qui n’ont pas d’antécédent de maladie de Lyme avérée sont difficiles à apprécier.

Aucune des sociétés savantes ou agences d’évaluation n’a publié de recommandation relativement à l’utilisation de ces thérapies

alternatives.

Alors que les cliniciens du comité consultatif sont en défaveur du recours aux options thérapeutiques autres que par anti-infectieux, l’avis des cliniciens qui se spécialisent, notamment, dans la prise en charge de personnes qui présentent des symptômes systémiques généraux et persistants attribués à la maladie de Lyme est partagé.

Ceux qui prescrivent de telles thérapies basent leur choix sur l’état du patient et ses symptômes. Leur choix dépend aussi de leur

expérience passée ainsi que du niveau de confiance et de « confort » qu’ils ont à l’égard de certaines approches.

Autres options thérapeutiques pharmacologiques ou non pharmacologiques : que retenir?

En résumé, la plupart des options thérapeutiques autres que par anti-infectieux n’ont fait l’objet d’aucune étude scientifique robuste révisée par les pairs, ce qui a été souligné par deux organisations qui publient des recommandations. Bien que l’ensemble de l’information recueillie ne permette pas de statuer à propos de l’efficacité et de l’innocuité des options thérapeutiques autres que par anti-infectieux chez les personnes qui ont ou non un antécédent de maladie de Lyme avérée, elle suggère qu’il pourrait y avoir un intérêt à conduire des études et colliger des données dans le cas de certaines approches qui

semblent relativement sécuritaires.