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CHAPITRE 2: L’ORGANISATION SPATIALE DES RÉGIONS MÉTROPOLITAINES

2.1 De la phase d’urbanisation à la phase de métropolisation

De manière générale, on considère que les pays occidentaux, participent depuis le XIXe siècle à un même modèle de croissance urbaine liée au processus d’industrialisation. Avec la révolution industrielle, la population des villes en Europe et en Amérique s’est mise à croître d’une manière jamais encore enregistrée auparavant. La ville est alors un lieu d’implantation des établissements de production industrielle dans lequel les flux convergents de connaissances, de savoir-faire, de sources d’énergies, de moyens et de réseaux de transport, de matières premières et de réserves de main-d’oeuvre sont rendus plus accessibles du fait de la centralité urbaine (Hohenberg et Lees, 1985). La ville est aussi un centre de décision économique ou centre transactionnel en polarisant les ressources financières et le capital, ainsi que les sièges sociaux des entreprises industrielles (Rochefort, 1989). Sans oublier que depuis toujours la ville est un lieu d’interaction sociale favorisant les échanges politiques, symboliques et culturels. Ainsi, la ville dans le contexte de l’industrialisation se caractérise par l’attribut de la centralité dans la mesure où elle concentre et polarise les activités et les ressources en fonction d’une plus grande efficacité ou rationalité du système industriel capitaliste.

Parallèlement à la montée de l’industrialisation, l’urbanisation s’explique également par l’effet d’incitation des personnes à délaisser les milieux ruraux lorsque ceux-ci n’offrent plus les conditions économiques suffisantes à la satisfaction des besoins de base ou des aspirations personnelles. Bairoch (1985) rappelle que dans le cadre de la révolution industrielle, c’est l’augmentation rapide de la productivité agricole qui a contraint un aussi grand nombre de personnes d’habiter la ville. Ce même phénomène de productivité agricole a aussi joué un rôle décisif dans le développement urbain puisque les besoins de main- d’œuvre diminuaient au fur et à mesure que la productivité augmentait. La conjonction de ces deux phénomènes a eu pour conséquence de créer une demande pour des emplois non- agricoles (localisés en milieu urbain) et simultanément une offre de main-d’œuvre (disponible en milieu rural). C’est ce qui expliquerait le déplacement des populations rurales vers les villes.

La baisse des coûts de transports a probablement eu une aussi grande incidence sur le processus d’urbanisation que l’augmentation de la productivité agricole. La diminution des coûts de transports permet d’élargir les marchés et favorise ainsi la production de masse. Cette production de masse exige des technologies industrielles plus intensives en capital ainsi qu’une concentration de la main-d’œuvre dans des lieux de travail beaucoup plus grands (Duranton, 1999). La période d’urbanisation débutant avec la révolution industrielle s’expliquerait par les forces d’attraction des villes sur les individus et sur les entreprises; ces forces d'attraction étant liées aux impératifs de économies d’agglomération pour la production industrielle.

Dans le contexte du début de la révolution industrielle, les villes se sont implantées près des ressources naturelles (gisements de charbon, de fer, etc.), à proximité des sources énergétiques (hydroélectricité) ou le long des axes de transport maritime. Plus tard, ce sont d’autres facteurs de localisation qui se sont avérés plus déterminants pour la croissance urbaine. Ces facteurs sont souvent associés à la présence d’infrastructures de transport ferroviaire, portuaire, routier et éventuellement aéroportuaire. À cela s’ajoute la disponibilité de la main-d’œuvre et celle des capitaux financiers pour soutenir la production ou simplement la présence d’un marché de consommateur important.

Vers la fin du XIXe et le début du XXe siècle l’urbanisation est marquée par une période où les villes-centres sont dominantes à l’intérieur de leurs environnements urbains respectifs. Ces villes demeurent relativement compactes et concentrent le pouvoir, la richesse, les

moyens de production et les différentes couches sociales sur un territoire restreint. C’est au sein des villes-centres que l’on retrouve le maximum de mixité et de proximité entre l’habitat, le travail, la consommation et les loisirs.

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IGURE

2.1

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VOLUTION DE L

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ORGANISATION SPATIALE AUX

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TATS

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Passage de la société industrielle vers la société postindustrielle

Production post-fordiste Intensification de la mondialisation et

du libre échange Désindustrialisation et montée du

secteur tertiaire avancé Montée des transports individuels

Dispersion spatiale des activités économiques vers les banlieues Forme urbaine polycentrique Montée en force du pouvoir suburbain

et fragmentation municipale Exode des classes moyennes et

supérieures vers la banlieue Ségrégation sociale et spatiale Spécialisation des fonctions urbaines (zones résidentielles, commerciales,

industrielles) Phase de métropolisation Passage de la société rurale vers la

société industrielle Production fordiste de masse Montée du secteur manufacturier

Développement des transports collectifs et début du transport

individuel Concentration des activités commerciales et industrielles dans le

centre-ville Forme urbaine monocentrique Hégémonie de la ville-centre sur les

banlieues

Concentration des richesses et mixité des classes sociales au centre de

l’agglomération Mixité des fonctions urbaines

(travail, résidences, etc.) Phase d’urbanisation

Si au début de l’industrialisation les centres urbains demeurent relativement denses, à mesure que les moyens technologiques le permettent, notamment dans le domaine des transports, les villes s’étendent graduellement vers la périphérie. Alors qu’en 1800, 20% seulement de la population des États-Unis habitait des zones urbanisées, la population urbaine s’élevait à 64% en 1950 pour s’établir à environ 80% de nos jours. La croissance urbaine a donc engendré des agglomérations de plus en plus grandes en termes de taille géographique et de population s’étalant bien au-delà de la ville-centre vers les banlieues.

La métropolisation correspond d’une certaine manière à un stade avancé du processus d’urbanisation se caractérisant par la diffusion spatiale des fonctions urbaines vers la périphérie des villes-centres. Ce phénomène correspond à un processus interne de restructuration économique, sociale et politique des agglomérations adoptant une forme spatiale étalée et polycentrique. La figure 2.1 fait la synthèse des différentes caractéristiques du passage de l’urbanisation vers la métropolisation.