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Phase de prise de conscience :

Une des premières étapes de tout programme de prévention est de s'assurer que tous les acteurs importants (direction, enseignants, élèves et parents) soient conscients de la gravité et de l'ampleur du problème. Le harcèlement doit être pris au sérieux par chacun, et surtout par le personnel enseignant/éducatif. Comme déjà signalé ci-dessus, les exemples pratiques permettent de voir que ce n’est pas toujours le cas. Il ressort de la littérature scientifique que le cyberharcèlement est un problème auquel trop peu d'attention a été accordée, jusqu'à ce jour, par les enseignants, les parents et les autres personnes clés dans la vie des enfants (Vandebosch e.a., leeronderzoek 2006-2007; Carney en Merell, 2001: 364-382). Un constat plus grave encore est l’existence de mythes

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qui circulent dans les couloirs des écoles et qui présentent le harcèlement comme un problème lié à la croissance des jeunes, par lequel chaque enfant doit passer, et qui assure une 'construction du caractère' (Carney et Merell, 2001 : 364-382). Si des conceptions de ce type apparaissent parmi le personnel éducatif d’une école, l’environnement scolaire risque d’être rapidement confronté à des problèmes de cyberharcèlement (Vreeman et Aaron, 2007 : 79). L’ information27 correcte de tous les

intéressés de la communauté scolaire (enseignants, élèves, parents) sur les conséquences du cyberharcèlement est l’approche par excellence destinée à faire disparaître ces mythes (Carney et Merrel, 2001 : 372; Agatston e.a., 2007: s59).

En ce qui concerne l’ampleur du harcèlement, nous constatons que les enseignants et les parents sous-estiment en général le problème du harcèlement (Walrave e.a., 2008a : 40). Différentes méthodes existent pour définir l’ampleur d’un problème dans un environnement scolaire bien déterminé, de sorte que chacun puisse en prendre totalement conscience. Un sondage anonyme28 peut être réalisée parmi les élèves, suite à un incident grave de harcèlement par exemple, pour quantifier le harcèlement. La version la plus connue d’un questionnaire de ce type est la Peer Relations Questionnaire29 (PRQ, le questionnaire sur les relations entre pairs). Les résultats des enquêtes de ce type mènent parfois à des chiffres étonnants car ils font apparaître de manière évidente que le problème est sous-estimé par le personnel scolaire et les parents. Selon Olweus, un PRQ et la stupéfaction qu’il suscite souvent sont une base de départ ‘idéale’ pour démarrer une politique de prévention du harcèlement

27 Tous les faits présentés doivent être étayés empiriquement. Se baser sur une présomption intuitive est une 'recette de désastre'.

28 L’avantage des études anonymes est que les élèves ont moins tendance à répondre aux réponses de façon ‘socialement correctes’ pour éviter les représailles éventuelles (des harceleurs ou enseignants).

29 Conçue par Olweus comme un instrument standardisé pour mesurer le problème du harcèlement à l’école. Ce questionnaire est utile lors de l’évaluation du programme de prévention car le même questionnaire peut être posé à des moments différents.

66 (Olweus dans Peterson et Rigby, 1999 : 481-492). Pellegrini (dans Stassen Berger, 2007 : 102) propose un questionnaire multi-méthodique pour évaluer le harcèlement à l’école. Les informations obtenues à l’aide d’études par ‘auto-rapportage’30 ou rapport des pairs31 peuvent selon elle être complétées par des données par observation32 et par analyse

de données publiques33. La collecte de données par des canaux

différents conduirait à une évaluation plus précise de l’ampleur du harcèlement. Il est également nécessaire, pour appréhender le cyberharcèlement, de travailler avec une définition précise du cyberharcèlement qui vise également le harcèlement par différents médias électroniques. Une étude qui tient compte de ces conditions permettra aux enseignants d’évaluer de quelle manière ce comportement est entré dans les habitudes. Elle peut également donner une réponse à la question de savoir si les actes de cyberharcèlement ont lieu pendant la journée ou après l'école à domicile et quels sont les moyens le plus souvent utilisés pour harceler (Kowalski e.a., 2008 : 128).

Les enseignants, mais aussi les parents et les élèves sont des groupes cibles pour les initiatives de prise de conscience (Campbell, 2005 : 3). Quelques exemples pratiques peuvent être une bonne source d'inspiration. En particulier pour les parents, nous constatons que de nombreuses écoles34 organisent une soirée d’information sur le cyberharcèlement. La ‘semaine contre le harcèlement’35 en Flandre tout comme ‘La journée à

30 Auto-rapportage : questionnaire anonyme sur les expériences propre de harcèlement en tant qu’auteur ou victime.

31 Rapport des pairs : on demande anonymement aux élèves d'identifier un comportement de harcèlement dans la communauté scolaire et de faire connaître les auteurs et les victimes.

32 Observation : rapport du harcèlement à l’école par des enseignants qui gardent soigneusement le comportement des élèves à l’œil.

33 Données publiques : l’analyse des données de ce type comme l’absentéisme, les plaintes officielles et les déclarations à la police.

34 L’asbl EVO (Educatieve Vereniging voor Ouderwerking) a organisé en Flandre de nombreuses soirées d’information : http://www.evovzw.be.

35 La semaine flamande contre le harcèlement (Vlaamse week tegen pesten) est une initiative du réseau flamand Kies Kleur tegen Pesten :

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thème cyberharcèlement’36 peuvent être soulignées comme des initiatives spécifiques destinées à faire prendre conscience du problème. Quelques communes et villes37 ont également fait l’expérience de session d’information dans les écoles par les corps de police locaux, avec pour objectif de faire comprendre aux jeunes que le cyberharcèlement peut donner lieu à des faits criminels et donc pénalement condamnables. Une initiative particulière de l’Enseignement communautaire gantois est la projection (gratuite) du film flamand Ben X38 (avec comme thèmes principaux l’autisme et le cyberharcèlement). Une série de brochures sont également disponibles, en provenance du secteur marchand39 et non marchand40, dans lesquelles les jeunes sont informés sur une série de risques spécifiques liés à l’utilisation d’Internet par des mineurs. Le Ministère flamand de l’enseignement41 dispose également d’une vaste documentation pour les enseignants concernant l'utilisation sécurisée d'Internet chez les mineurs, par laquelle le cyberharcèlement est notamment abordé.

Dans une étude sur le cyberharcèlement menée en Flandre, les auteurs proposent d’organiser une campagne d’information par les médias de masse, spécifiquement destinée aux jeunes, pour montrer clairement ce qu'est le cyberharcèlement et les conséquences graves qu’il peut avoir (Vandebosch e.a., 2006 a : 187). A l’étranger, nous retrouvons quelques exemples de campagnes de ce type. Ainsi les autorités fédérales des

36 La journée à thème sur le cyberharcèlement est une initiative de l’ASBL ZIJN (Beweging tegen Geweld,un mouvement contre la violence : http://www.vzwzijn.be/).

37 Nos exemples connus de communes où des informations de ce type sont données par la politique locale sont les Fourons, Turnhout, Gingelom et Nieuwkerken.

38 Lire les observations de Gie Deboutte à propos de Ben X sur :

http://www.klasse.be/leraren/archief.php?id=13089

39 Exemple de brochures du secteur marchand : MSN Belgique (‘Comme un poisson dans l’eau’: http://www.microsoft.com/belux/fr/presspass/2007/visje_net.mspx), Telenet (‘Le kit de sécurité en ligne pour la famille’ : http://telenet.be/1037/0/1/fr/prive/internet/le-kit-de-securite-en-ligne.htm l).

40Plus d’informations et de conseils aussi sur http://www.veiligonline.be/ ; http://www.saferinternet.be ; http://www.clicksafe.be ; http://www.actioninnocence.be 41 Le nom de cette brochure est ‘veilig online’ et peut être téléchargée intégralement sur

68 États-Unis ont ajouté à la campagne (classique) “Stop bullying now” une information sur le cyberharcèlement. Au Canada, les autorités d’Alberta ont créé un site Web spécial pour les adolescents (et leurs parents) avec des informations sur le cyberbullying (qui permet de savoir ce qu'est réellement le cyberharcèlement et quelles sont les formes de harcèlement en ligne punissables par la loi). Plus près de chez nous, on peut citer la campagne d'anti-cyberharcèlement42 de SIRE 43 (Stichting Ideële Reclame) aux Pays-Bas. La Pologne a également produit une vidéo pour sensibiliser les jeunes au problème du cyberharcèlement44. Lors du Safer Internet Day 2009 une nouvelle video a été présentée45.

Une autre approche serait d’aborder le problème dans des programmes télévisés destinés au jeune public. Nous pensons ici non seulement aux progammes d’informations orientés vers les jeunes ou des talk-shows mais également dans des fictions pour jeunes comme des feuilletons populaires parmi les jeunes.

Cette stratégie a pour avantage qu’un grand groupe de jeune est sensibilisé et informé sur le cyberharcèlement sans l'aspect directement éducatif (Vandebosch, 2006a : 188).