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Phénomènes analysés comme des ellipses

2.5 L’ellipse III : les phrases elliptiques espagnoles

2.5.2 Phénomènes analysés comme des ellipses

Brucart and Macdonald (2012) considèrent pour l’espagnol les types d’ellipse suivants : premièrement, le gapping (83a), deuxièmement, le sluicing (83b), troisièmement, le

stripping (83c), et quatrièmement, le pseudostripping (83d)16 : (83) a. Luisa fue a París y María a Londres.

’Luisa est allée à Paris et Marie à Londres.’ b. Alguien me habló pero no recuerdo quién.

’Quelqu’un m’a parlé mais je ne me souviens pas de qui.’ c. Juan ama a María, pero no ama a Ana.

’Jean aime Marie, mais il n’aime pas Anne.’

d. Juan ama a María y Pedro ama a María también. ’Jean aime Marie et Pierre aime Marie aussi.’

Saab (2009), en cohérence avec la distinction de Lobeck (1995) (Hankamer and Sag (1976) pour l’anglais), distingue deux types d’ellipses par leur propriétés syntaxiques : locale (groupant l’ellipse de SV de l’anglais, le pseudo-stripping et le sluicing) et non locale (gapping et stripping). Les ellipses locales sont plus contraintes syntaxiquement et se distinguent des non locales par les propriétés suivantes : elles sont sensibles aux contraintes d’îlots, et elles peuvent avoir un non-constituant comme antécédent. Plusieurs travaux (Depiante (2004), Saab (2009), Brucart and Macdonald (2012)) distinguent entre les deux types de constructions formées avec la prophrase négative, en position initiale (83c) (stripping) ou finale (83d) (pseudo-stripping), par ses propriétés différentes.17 Saab (2009) et Brucart and Macdonald (2012) notent la similitude du

16. Les dénominations espagnoles sont : premièrement, vaciado (Brucart (1999)), deuxièmement, trun-

camiento (Brucart (1999)), troisièmement, desnudamiento (Depiante (2004)) et quatrièmement, pseudo- desnudamiento (Depiante (2004)) o ellipse du ST (Brucart and Macdonald (2012) emprunte le terme TP (syn- tagme de temps) des approches minimalistes.). Notons ainsi que le phénomène décrit par le terme stripping en

anglais correspond au pseudostripping espagnol.

17. Attention à l’évolution de la terminologie : Brucart (1999) désigne la construction à prophrase négative initiale négation corrective, et à la construction avec prophrase ou adverbe polaire final stripping, alors que dans Brucart and Macdonald (2012) on trouve une inversion du terme stripping : il appelle stripping la construction avec une prophrase initiale, et il désigne la construction à prophrase ou adverbe polaire final, ellipse de ST

comportement syntaxique du stripping et de l’ellipse du SV anglais en appelant le stripping

ellipse du ST, qui correspondrait à un syntagme théorique (posé par des approches

minimalistes (Chomsky (1995))) qui contiendrait, entre autres, le verbe elliptique et la négation, qui serait le seul résidu de l’ellipse.

Le gapping

Dans les cas de gapping, comme il a été illustré plus haut, le deuxième conjoint d’une structure coordonnée a comme résidu le sujet et un dépendant du SV (Maria et à Londres en (84), respectivement) :

(84) Luisa fue a París y María _ a Londres. ’Luisa est allée à Paris et Marie à Londres.’

Brucart (1999) propose le parallélisme syntaxique comme une contrainte syntaxique du

gapping et distingue quatre types de phrase où on les trouve : la coordination copulative

(84) ou adversative (85a), les phrases juxtaposées (85b), les comparatives (85c), et les coordination scindées en dialogue (85d) :

(85) a. Elisa tiene mucho genio, pero Luis _ todavía más. ’Elisa a beaucoup de caractère, mais Luis encore plus.’ b. Luisa odia las acelgas, yo _ el brécol.

’Luisa déteste la blette ; moi le brocoli.’

c. Luis cuida a su madre mucho mejor que Antonia _ la suya.

’Luis prend soin de sa mère beaucoup mieux qu’Antonia de la sienne.’

d (Dans un bar) A : -Julia se ha comprado un reloj. B : -Ya lo sé. Y su amiga _ unas gafas nuevas.

A : -’Julia a acheté une montre. B : -’Je le sais. Et son amie des nouvelles lunettes.’ Brucart and Macdonald (2012) complètent la description des propriétés du gapping en espagnol : Le résidu du gapping est formé par au moins deux syntagmes. Au moins l’un des deux est un argument, et l’autre peut être soit un argument (85bc) soit un ajout (85a) ; le

premier syntagme est un topique contrastif, et le second, un focus contrastif. De plus, le premier est souvent anaphorique au sujet du premier conjoint (85abc), mais il peut être aussi anaphorique à un autre argument (86a). La construction où se trouve le gapping doit être parallèle avec celle de sa source. La subordination ne permet pas ce parallélisme, mais on le trouve dans des coordinations avec plus de deux gaps, ou ellipses du verbe (86b). Enfin, Brucart and Macdonald (2012) observent que le gapping peut avoir un antécédent discontinu. En (86a), par exemple, le deuxième conjoint récupère tout le contenu du premier conjoint, avec tous les arguments du verbe. Cette possibilité montre que l’antécédent d’un gapping n’est pas un verbe, mais le SV complet.

(86) a. A Antonia la convocó Luis y a María Julia. ’Antonia, l’a convoquée Luis, et Maria, Julia.’

b. Alex toca el violin, Marta el piano, y Pascual el saxo. ’Alex joue le violon, Marta du piano, et Pascual, du saxo.’ c. Luis toca el violin el viernes en aquel bar y María el piano. ’Luis joue du violon le vendredi dans ce bar là, et Maria du piano.’ d. Juan cree que va a ganar España y María Argentina.

’Juan croit que l’Espagne va gagner et Marie l’Argentina.

On peut noter aussi que le gapping se distingue de la coordination de séquences par la nature des arguments. Dans le gapping l’un des deux syntagmes du résidu est anaphorique au sujet, alors que dans la coordination de séquences les deux syntagmes sont

anaphoriques à des arguments du SV. C’est cette propriété qui lui permet d’ailleurs d’être analysée comme une coordination sans ellipse. Une autre différence entre le gapping et la coordination de séquences est que les syntagmes qui forment le premier peuvent dépendre de têtes différentes (86d), alors que les syntagmes du second doivent se trouver au même niveau.

Le pseudo-stripping

Brucart and Macdonald (2012) exposent des propriétés du pseudo-stripping, qui se caractérise par la présence d’un adverbe polaire (también, tampoco ’aussi’, ’non plus’) ou d’une prophrase (si, no ’oui’, ’non’), qui est facultative dans les phrases à tête verbale, mais obligatoire dans les cas de stripping. Dans ces cas, l’ensemble du SV, sauf l’adverbe polaire (87a), est elliptique. Le sujet et l’adverbe ou prophrase sont soumis à la contrainte de parallélisme syntaxique : la variation de l’ordre de mots peut transformer complètement la structure de la phrase (87bc) :

(87) a. Luis gana mucho dinero y María también _. ’Luis gagne beaucoup d’argent et Maria aussi _.’ b. Julia ha lavado el coche y María todavía no. ’Julia a lavé la voiture et Marie pas encore.’

c. Julia ha lavado el coche y no Miguel (*todavía). ’Julia a lavé la voiture et pas Miguel (encore).’

López (1999), (suivi par Depiante (2004) et Saab (2009)) analyse le premier argument de ces constructions comme des topiques, supposant qu’un contenu phonique ou syntaxique a été effacé (ou non réalisé phonologiquement) à droite de l’adverbe ou prophrase. Brucart and Macdonald (2012) observent que le pseudo-stripping peut avoir lieu dans des

conversations, dans une structure indépendante énoncé par un locuteur différent de celui qui a énoncé la source (88a). Brucart and Macdonald (2012) trouve aussi des exemples avec une relation cataphorique avec leur antécédent (88b).

Une autre propriété, cité déjà par Brucart (1987), est la possibilité d’apparaître dans certains contextes de subordination. La cible peut se trouver dans une subordonné (88c). Cette exemple est ambigu, car le topique du pseudo-stripping peut être interprété comme anaphorique au sujet de la subordonnée (Maria), ou au sujet de la phrase matrice (yo). Dans le premier cas, le pseudo-stripping est subordonné avec le conjoint qui le précède, alors que dans le second cas, il est coordonné à l’ensemble de la phrase précédente. Ángel Gallego (2009) intègre cette exception affirmant que l’ellipse ne peut pas avoir une

relation hypotactique, mais paratactique avec son antécédent, et que si bien que le

pseudo-stripping est subordonné, la relation paratactique de la cible avec la source n’est pas

altéré par la présence de la subordination creo que, ’je crois que’ : (88) a. A : -Tengo prisa. B : - Yo también.

A : -’Je suis pressé.’ B : -’Moi aussi.’

b. Quizas usted no, pero la mayoría nos equivocamos. ’Peut-être pas vous, mais nous nous trompons presque tous.’ c. Yo creo que María tiene razon, pero Luis no.

’Je crois que Marie a raison, mais pas Luis.’

Brucart (1999) note que le stripping est grammatical en coordination, mais pas en

subordination. La conjonction mientras, ’alors que’ en (89a) a une fonction coordonnante, alors qu’en (89b) elle introduit une subordination :

(89) a. Juan estudiaba, mientras que tú, no. ’Juan étudiait, alors que toi, non.’ b. *Juan estudiaba, mientras tú, no. ’Juan étudiait, pendant que toi non.’

D’un autre coté, Bosque (1984) présente des exemples de prophrases subordonnées, et pour expliquer ce contraste, il apporte la même explication que Kehler (1994) : Les prophrases peuvent former des ellipses à lien syntaxique, mais aussi des ellipses à lien discursif dans certains contextes, comme c’est le cas des coordinations adversatives, où elles peuvent être cataphoriques (90a) :

(90) a. Jesús dice que no, pero yo creo que al final volverá a Barcelona. ’Jésus dit que non, mais je crois qu’à la fin il rentrera à Barcelone.’

Le stripping

Des études récentes ont fait évoluer les analyses des syntagmes à prophrase négative initiale ; Brucart (1999) emploie le terme négation corrective de Bosque (1984), et

distingue la négation corrective (pseudo-stripping), de la négation contrastive (stripping). La possibilité pour le pseudo-stripping mais pas pour le stripping, d’avoir comme ajout

l’adverbe todavía, ’encore’, qui sélectionne un prédicat de contenu propositionnel (87bc), signale que le pseudo-stripping, mais pas le stripping est doté d’un contenu propositionnel. Ainsi, Brucart (1999) analyse le stripping, ou négation corrective, comme une structure dépourvue de contenu phrastique (et Par conséquence non elliptique) ; comme un type d’ajout. Brucart (1999) considère aussi d’autres structures similaires, les syntagmes de soustraction (91a). Il analyse ces structures comme des ajouts dotés de liberté

positionnelle, qui peuvent ainsi avoir une relation anaphorique ou cataphorique avec leur référent. On peut ainsi considérer que ces structures, avec celles qui commencent avec un adverbe polaire (91b), s’intègrent dans un groupe de constructions plus grand, les ajouts libres (Brucart (1999)). Les prophrases et les adverbes polaires peuvent être coordonnés, ou juxtaposés aux arguments qu’ils sélectionnent :

(91) a. Excepto Luis, todos los demás estudiantes del curso han aprobado. ’Sauf Luis, tous les autres étudiants du cours ont réussi.’

b. Yo me voy a casa, y también María. ’Je rentre à la maison, et aussi Marie.’

Brucart and Macdonald (2012) observent que le stripping est possible dans certaines questions, mais pas toujours (92ab). En autre, Vicente (2006) observe que le stripping peut apparaître dans certaines subordinations, comme (92c), où la prophrase est anaphorique au segment qui se trouve dans la phrase matrice, le syntagme qui le suit au contenu de la subordonnée. Le contenu sémantique de la prophrase peut être paraphrasé comme Juan

no piensa, ’Juan ne croit pas’, et le contenu du syntagme qui le suit, comme el Madrid no va a ganar la liga, ’Madrid ne gagnera pas la ligue’ :

(92) a. A : - ¿A quién se lo ha dicho Pedro ? B : - ?No a María. A : -’A qui l’a dit Pierre ?’ B : -’Pas a Marie.’

b. A : -El numero trece trae trae mala suerte. B : -No a toda la gente. A : -’Le numéro treize porte malheur.’ B : -’Pas à tout le monde.’

c. A : -¿Qué equipo piensa Juan que va a ganar la liga ? B : -Me parece que no el Madrid.

’Quelle équipe pense Jean qui va gagner la ligue ?’ B : -’Je crois que pas Madrid.’ (93) a. A : -¿Qué le ha regalado Juan a todo el mundo ? B : -No un libro a María.

A : -’Qu’est-ce que Jean a offert à tout le monde ?’ B : -’Pas un livre à Marie.’ b. A : -¿Qué le ha regalado Juan a todo el mundo ? B : ?No a María un libro. A : -’Qu’est-ce que Jean a offert à tout le monde ?’ B : -’Pas à Marie un livre.’ c. A : -¿Quién confía en quién ? B : -* No Juan en María / *No en María Juan. A : -’Qui fait confiance à qui ?’ B : -Pas Jean à Marie / Pas à Marie Jean.

Vicente (2006) note aussi des contrastes dans l’ordre de mots de la source. Le contraste de (94) montre que le stripping, à prophrase initiale, apparaît plus facilement quand le sujet du premier conjoint est postverbal (94a). En revanche, le pseudo-stripping, à prophrase finale est plus facile avec un sujet preverbal :

(94) a. Vino Juan, pero no Pedro. ’Est venu Jean, mais pas Pierre.’ b. ?Juan vino, pero no Pedro. ’Jean est venu, mais pas Pierre.’ c. Juan vino, pero Pedro no. ’Jean est venu, mais Pierre non.’ d. ?Vino Juan, pero Pedro no. ’Est venu Jean, mais Pierre non.’

Depiante and Vicente (2009) attribuent ces contraintes à des contraintes sur la structure informationnelle, qui semble devoir être parallèle dans les structures de la source et de la cible. Ainsi, ils regardent la structure informationnelle du stripping et du pseudo-stripping : Le stripping (92a) et le pseudo-stripping (92cb) semblent possibles si le syntagme qui accompagne la prophrase est coréférent à un objet postverbal dans le premier conjoint. Cependant, si l’objet est topicalisé, seulement le stripping devient difficile :

(95) a. Juan ha leído un libro pero no una revista. ’Jean a lu un livre mais pas un magazine.’ b. Juan ha leído un libro pero una revista no. ’Jean a lu un livre mais un magazine non.’ c. A Chomsky Juan lo ha leído, pero a Postal no. ’Chomsky, Jean l’a lu, mais Postal non.’

d. ?A Chomsky Juan lo ha leído, pero no a Postal. ’Chomsky, Jean l’a lu, mais pas Postal.’

Ces contrastes permettent d’observer une contrainte générale pour certaines ellipses comme le stripping et le gapping, et une contrainte supplémentaire pour les ellipses avec des prophrases. Ainsi, premièrement, la contrainte générale de parallélisme établit que les focus et topiques du résidu doivent se trouver dans un ordre parallèle aux syntagmes auxquels ils sont anaphoriques. Deuxièmement, la contrainte des prophrases négatives dit que le résidu du stripping (à prophrase négative initiale) peut seulement être un focus, alors que le syntagme du résidu du pseudo-stripping (à prophrase ou adverbe polaire final) peut être soit un focus soit un topique.

Le sluicing

Le sluicing (96a) se trouve fréquemment dans le deuxième conjoint d’une coordination. Le conjoint est composé d’une phrase qui subordonne une interrogative indirecte, de laquelle on n’a que le mot interrogatif. L’ensemble de l’interrogative indirecte, sauf le mot

interrogatif, est donc élidé. Le sluicing a une contrainte syntaxique évidente : il n’y apparaît qu’avec des prédicats qui sous-catégorisent des interrogatives indirectes, des verbes de connaissance. Aussi, la coordination est souvent adversative (96a). Le sluicing peut aussi se

trouver sans coordination, en dialogue (96b) ou pas (96c) :

(96) a. Alguien me habló pero no recuerdo quién _.

’Quelqu’un m’a parlé mais je ne me souviens pas de qui _.’ b. A : -Va a venir Pablo. B : -Sabes cuándo ?

A : -’Pablo va venir.’ B : -’Tu sais quand ?’

c. Va a venir Pablo. No sé cuándo. ’Pablo va venir. Je ne sais pas quand.’ Le sluicing peut aussi, en certains cas, avoir un mot interrogatif anaphorique à un argument non spécifique du prédicat verbal du premier conjoint, qui peut être explicite (’alguien’, en (96)), ou implicite (l’objet indirect de (97a)). Aussi, si le verbe

sous-catégorise un argument dont la réalisation est obligatoire, l’argument doit être explicite pour que le sluicing soit grammatical (Brucart (1999)). Ainsi, en (97a) le verbe

donó, ’a offert’ sous-catégorise deux objets dont seulement un est obligatoire, et le sluicing

est possible, même si l’antécédent n’est pas présent. Par contraste, en (97b), dio, ’a donné’ sous-catégorise deux objets obligatoires, et le sluicing n’est donc pas grammatical sans l’antécédent :

(97) a. Donó un libro pero no sé a quién.

’Il a fait offert d’un livre mais je ne sais pas à qui.’ b. *Dio un libro pero no sé a quién.

’Il a donné un livre mais je ne sais pas à qui.’

Également, le mot interrogatif peut être anaphorique à un ajout qui ne se trouve pas dans le premier conjoint (98a) : (98). Aussi, Brucart (1999), contre Fiengo and May (1994), signale qu’il n’y a pas d’isomorphisme structurel dans le sluicing, comme on peut voir dans le contraste entre la phrase elliptique (98b) et la reconstruction du contenu du premier conjoint, agrammatical, en (98c). Le contenu sémantique elliptique de (98b) ne

correspond pas, avec la même syntaxe, au contenu de premier conjoint : (98) a. Sé que ha de viajar, pero no sé adónde.

’Je sais qu’il doit voyager, mais je ne sais pas où.’ b. Admite haberle conocido, pero no recuerda cuándo. ’Il admet l’avoir connu mais il ne se rappelle pas de quand.’

c. *Admite haberle conocido, pero no recuerda cuándo haberle connocido. ’Il admet l’avoir connu mais il ne se rappelle pas de l’avoir connu.’

Brucart (1999) analyse si le sluicing à des contrainte syntaxiques. Pour cela il regarde les contraintes d’extraction. Ainsi, si le sluicing a un lien syntaxique, il devrait être soumis aux contraintes d’îlots de Ross (1967) On observe ensuite si elles sont respectées :

Premièrement, les structures coordonnées, qui sont des îlots pour l’extraction, ne peuvent pas extraire un seul conjoint d’une coordination. On observe cependant que le sluicing ne respecte pas cette contrainte (99a) :

(99) a. Luis y uno de los americanos estuvieron bailando, pero no recuerdo cuál de ellos.

’Luis et l’un des américains ont dansé, mais je ne me souviens pas duquel d’entre eux.’

b. *No recuerdo cuál / qué americano y Luisa estuvieron bailando. ’Je ne me souviens pas de quel américain et Luisa ont dansé.’

Deuxièmement, on considère l’extraction des SN complexes, qui sont aussi des îlots pour l’extraction : un complément de nom ne peut pas s’extraire hors d’un SN qui le sélectionne (100a). Le sluicing semble ne pas respecter non plus cette contrainte : en (100b), le SN interrogatif a cual de ellos est coréférent au complément ministro, ’ministre’ qui se trouve à l’intérieur du SN complexe (la noticia de que han asesinado a un ministro francés) ’la nouvelle qu’on a assassiné un ministre français’, et n’est donc pas soumis non plus à cette contrainte :

(100) a. *No recuerdo a cuál / qué ministro francés he oído la noticia de que han asesinado.

’Je ne me souviens pas de quel ministre français j’ai entendu la nouvelle qu’il a été assassiné.’

b.He oído la noticia de que han asesinado a un ministro francés, pero no recuerdo a cuál de ellos.

’J’ai entendu la nouvelle qu’on a assassiné un ministre français, mais je ne me souviens pas lequel d’eux.’

Troisièmement, on ne peut pas extraire un élément qui se trouve à l’intérieur d’une subordonnée qui constitue le sujet d’un autre prédicat (101a). En (101b), au contraire, le SN prueba concluyente, ’preuve concluante’ a été extrait d’une subordonnée (que ha

alegado una prueba concluyente, ’qu’ils ont allégué une preuve concluante’) :

(101) a. *No pienso decir qué prueba concluyente es cierto que han alegado. ’Je n’ai pas l’intention de dire quelle preuve concluante il est vrai qu’ils ont alléguée.’ b. Es cierto que ha alegado una prueba concluyente, pero no pienso decir cuál.

’Il est vrai qu’ils ont allégué une preuve concluante, mais je ne vais pas dire laquelle.’

Quatrièmement, on ne peut pas extraire un élément d’une interrogative enchâssée dans une autre (102a). Dans l’exemple (102b), l’antécédent du syntagme interrogatif est un SN (uno de nuestros dos sofás, ’lequel de nos deux sofas’), qui se trouve en effet enchâssé dans l’interrogative indirecte introduite par dónde, ’où’ :

(102) a. *No recuerdo cuál de nuestros dos sofás me preguntó dónde habíamos comprado.

’Je ne me souviens pas duquel de nos sofas on m’a demandé où on avait acheté.’ b. Me preguntó dónde habíamos comprado uno de nuestros sofás, pero no recuerdo cuál de ellos.

’Il m’a demandé où on avait acheté un de nos sofas, mais je ne souviens pas lequel.’ Ces arguments montrent que le sluicing ne partage pas les contraintes d’extraction des syntagmes interrogatifs, ce qui correspond avec les ellipses décrits par Kehler (1996) comme ellipses à lien discursif et avec les ellipses non locales de Saab (2009).

Autres constructions analysées comme elliptiques

Certaines constructions, comme les comparatives et l’effacement contenu dans

elliptiques (Kennedy (1994), Merchant (2012)). Brucart (1999) considère les

comparatives comme des structures de subordination avec un parallélisme syntaxique similaire à celui de la coordination, où on peut trouver des cas de gapping, comme illustré en (85c). Brucart and Macdonald (2012) observent que dans les comparatives (103a), le matériel elliptique est identique à celui de la source, et que le résidu est différent, et par conséquence, contrastif. Ainsi, on note que ce sont des structures qui, comme la

coordination, permettent l’apparition du gapping :

Brucart and Macdonald (2012) mentionnent aussi un autre type de comparatives de l’espagnol, avec de (103b), qui se distingue des comparatives avec que (103a) car il ne permet pas l’ellipse (103c). Ils autorisent seulement les ellipses de complément, s’ils ont un verbe de dire subordonné :

(103) a. Juan tiene tantos hermanos como María. ’Juan a autant de frères que Maria.’

b. Juan tiene mas hermanos de los que tiene María. ’Juan a plus de frères que Maria en a.’

c.*Juan tiene mas hermanos de los que María. ’Juan a plus de frères que Maria.’

d. Juan tiene mas hermanos de los que decía.