• Aucun résultat trouvé

Définition et propriétés des fragments

2.6 Les fragments

2.6.1 Définition et propriétés des fragments

Définition

Nous définissons les fragments comme des structures syntaxiques sous-phrastiques où l’on interprète un contenu sémantique propositionnel du type message, capables de réaliser un acte de parole. Ils se caractérisent par un décalage entre leur structures syntaxique et sémantique : ils n’expriment en syntaxe qu’une partie du contenu qui est interprété. En (105a), par exemple, la syntaxe exprime un adjectif, mais le contenu sémantique interprété inclue l’adjectif, plus le contenu de la phrase de l’énoncé précédent, qui est sélectionné par l’adjectif, mais absent de la structure syntaxique. Cette dissymétrie syntaxe-sémantique est donc la caractéristique principale des fragments.

(105) a. A : -Me voy a casa. B : -Estupendo. A : -’Je rentre à la maison.’ B : -’Très bien.’

b. A : -Whose bike did you ride ? B : -Leo’s. / - ?Leo. A : -’A qui est le vélo que tu monte ?’ B : -’A Leo.’ / ’Leo.’

Fernández (2006) étudie les fragments, qu’elle désigne ’énoncés sous-phrastiques’ (

Non-Sentential Utterances, dans l’original anglais), et les décrit de façon similaire : comme

des énoncés qui n’ont pas la forme d’une phrase complète mais qui expriment un contenu sémantique phrastique, normalement un contenu de type proposition ou question

(Fernández (2006)). Elle signale que le contexte ne fournit pas seulement le contenu, mais aussi impose des contraintes syntaxiques, comme illustre l’exemple (105b), où le fragment

Leo’s doit porter les marques grammaticales du mot auquel il est anaphorique ; ici, le cas

génitif. Entre autres, la traduction française, où les deux options, avec ou sans le marquage grammatical, sont possibles, suggère que le degré d’acceptabilité des fragments sans marquage syntaxique est variable entre les langues.

Similairement, Schlangen (2003), qui étudie les fragments sous une optique basée sur la cohérence, signale que le contenu des fragments « va au delà de ce qui est exprimé par sa

sémantique compositionnelle, c’est-à-dire, par le contenu exprimé par les mots et la syntaxe » (Schlangen (2003) : 2). Il insiste sur le fait que le contenu non exprimé par la syntaxe est inféré du contexte. Comme Fernández (2006), il indique que les fragments ont surtout lieu dans le dialogue, où ils constituent un pourcentage considérable.

Il insiste aussi sur les contraintes syntaxiques de certains fragments ; par exemple : ils doivent être définis, s’ils sont composés par un SN ; ils doivent être constitués de

syntagmes ; et, s’ils sont anaphoriques à un syntagme précédent, ils ne doivent pas avoir de marquage syntaxique (en forme de cas ou de préposition) différent du marquage de la source (105ab).

En revanche, il distingue deux types de fragments selon la relation qu’ils ont avec leur source : fragments résolus via identité et fragments résolus via inférence. Les premiers sont anaphoriques à un syntagme précédent, et sont interprétés grâce à l’identité d’un de ses composants, comme en (106a), où la réponse de B est anaphorique au syntagme interrogatif What healthy substance, ’Quelle substance saine’.

Les deuxièmes précisent d’une inférence de la relation sémantique qui s’établit entre eux-mêmes et leur source. En (106b), par exemple, la réponse de B est interprété comme une extension de l’énoncé de A, exprimant une cause. Avec cette différence, Schlangen (2003) indique que bien que certains fragments gardent un lien syntaxique avec leur source, on trouve aussi des cas où ils n’ont pas du tout de lien syntaxique. La section 8.4.1 traite ce type de fragments :

(106) a. A : -What healthy substance does seaweed contain ? B : -Lots of vitamins ? A : -’Quelle substance saine ont les algues ?’ B : ’Beaucoup de vitamines ?’ b. A : -Seaweed is good for you. B : -Lots of vitamins.

A : -’Les algues font du bien.’ B : -’Beaucoup de vitamines.’

Pour Schlangen (2003), les fragments sont interprétés grâce à leur relation discursive avec leur contexte. Ils seraient donc le résultat d’une sous-spécification : le contenu interprété mais non réalisé dans le fragment est sous-spécifié, car il est récupérable du contexte. Schlangen (2003) place ainsi la source du contenu non exprimé dans les relations

discursives, ce qui a une conséquence sur leur interprétation. Les fragments seraient donc interprétés selon la relation discursive, ou de cohérence, qu’il entretient avec le contexte dialogique.

Ainsi, pour interpréter un fragment, il est nécessaire de connaître le type de relation discursive qu’il entretient avec son contexte. Pour cela faire, il propose une taxonomie qui classifie les fragments selon leur type de relation discursive ; il suffit donc d’identifier le type de fragment pour pouvoir l’interpréter. Cela est illustré par l’exemple (107), qui est classé comme un fragment du type élaboration, car il constitue une extension du contenu précédent :

(107) a. I talked to Peter. Yesterday. ’J’ai parlé à Pierre. Hier.’

Pour Abeillé and Delaveau (2016), les fragments correspondent à des phrases incomplètes à verbe elliptique.

Diversité des fragments

On peut grouper les fragments en deux groupes selon une propriété précise : le type d’anaphore qu’ils contiennent. En effet, les fragments récupèrent une partie de leur contenu du contexte grâce aux relations anaphoriques qu’ils entretiennent avec des mots de ce contexte. L’identification de la source de l’anaphore est facilité par la présence dans la cible des marques grammaticales de la source. On trouve deux types de relations anaphoriques : de surface, si la source se trouve dans le contexte linguistique ; et profonde, si elle se trouve dans un contexte non linguistique18.

Tous les fragments analysés par Schlangen (2003) récupèrent leur contenu d’une source linguistique : le dialogue, et appartiennent Par conséquence au groupe de fragments avec une anaphore de surface. Également, Fernández (2006) n’inclut pas des fragments à anaphore profonde, car elle considère que les fragments doivent avoir la propriété qu’« (Une partie de) leur contenu sémantique doit provenir du contexte » (The main

property of NSUs, namely the fact that (part of) their descriptive content has to be resolved contextually (Fernández (2006) : 10)).

Les fragments d’anaphore profonde se distinguent des premiers car ils récupèrent une partie de leur contenu du contexte non linguistique. Le SN de l’exemple (108a) illustre ce différent groupe de fragments ; la source de l’anaphore ne se trouve pas dans le contexte linguistique, mais référentiel. Elugardo and Stainton (2005) notent que l’on ne trouve ces fragments uniquement dans le dialogue, mais qui sont présents partout dans la vie

quotidienne sous forme de titres, gros titres, étiquettes, affiches, etc (108) : (108) a. (A remarque par la première fois la robe de B) A : -Belle robe !

b. Made in Germany. ’Fabriqué en Allemagne.’ c. Prix Nobel de littérature, la règle du jeu. d. Congratulations. ’Félicitations.’

Parfois ces fragments semblent avoir une syntaxe particulière, comme le gros titre de (108c), où un SN indéterminé est juxtaposé à un SN défini ; c’est pourquoi cette thèse ne traitera ni le titres ni les étiquettes ni les affiches, mais seulement les fragments, profonds et de surface, issus d’une interaction dialogique. Aussi, Elugardo and Stainton (2005) observent que parfois la source des fragments d’anaphore profonde ne peut pas être récupérée dans certains cas ; par exemple, si l’antécédent se trouve dans les connaissances partagées des locuteurs, ou s’il appartient aux connaissances partagées d’une convention sociale (108d).

On peut noter cependant qu’Elugardo and Stainton (2005) font référence aux mots qui peuvent réaliser des actes de parole, comme une salutation, ou les félicitations de (108d). L’analyse des fragments du corpus présenté en 7 montre cependant que ces mots ont en effet une anaphore profonde, mais ne récupèrent pas leur contenu exclusivement du contexte référentiel, comme (108a), mais aussi de l’acte de langage qu’ils réalisent lors de leur énonciation.

Ces mots-actes de parole ont été analysés différemment par différents auteurs ; Ginzburg and Sag (2000) fournissent une méthode pour analyser ce type d’exemples comme des

ellipses contextuelles. Ils proposent la création de contextes discursives comme celui de

féliciter, avec un contenu tel que Je te souhaite __, qui est apporté par l’acte même de

féliciter. Dans ces cas le contenu sémantique est déterminé par le type d’interaction communicative. Le chapitre 7 présente un analyse de ces énoncés comme des fragments à anaphore profonde.

Cependant, les mots qui peuvent réaliser des actes de parole ne sont considérés comme des fragments ni par Schlangen (2003) ni par Fernández (2006). En effet, ces travaux décrivent les fragments comme des structures dotées de contenu sémantique

propositionnel. Or, ces mots manquent de contenu propositionnel, raison pour laquelle Schlangen (2003) et Fernández (2006) les excluent de leurs classifications de fragments. En revanche, Fernández (2006) considère des fragments les expressions comme Mhmm, qui expriment aussi un acte de parole (l’acknowledgement ou suivi), mais qui sélectionnent, à la différence des mots-actes, un contenu propositionnel. Également, Schlangen (2003) distingue explicitement les énoncés qui ont un contenu propositionnel des énoncés qui n’en ont pas, où il inclut les mots qui réalisent des actes de parole mais qui manquent de contenu propositionnel avec des conditions de vérité.

Les classification des fragments de Schlangen (2003) et Fernández (2006) excluent donc les mots-actes car ils manquent de contenu propositionnel. Or, on trouve aussi des phrases qui manquent de contenu propositionnel, comme (109abc) :

(109) a. Que tenga usted un buen día. ’Je vous souhaite une bonne journée.’ b. Te prometo que no lo volveré a hacer. ’Je te promets que je ne le ferai plus.’ c. Yo os declaro marido y mujer. ’Je vous déclare mari et femme.’

En effet les exemples de (109abc) constituent des phrases à tête verbale, mais elles manquent de contenu propositionnel, car ces phrases n’expriment pas l’engagement du locuteur avec un contenu propositionnel, et n’ont pas par conséquence de valeur de vérité.

Elles constituent néanmoins des phrases, qui réalisent des actes de parole, comme saluer (109a), s’engager (109b) ou changer l’état de l’interlocuteur (109c). Ils constituent respectivement des actes expressif, commissif et performatif (Searle (1975)). Il semble ainsi que toutes les phrases ne véhiculent pas un contenu propositionnel, comme suggère Gazdar (1981b) : certaines expriment un autre type d’engagement du locuteur, qui donnent lieu à divers actes de parole. Or, si la présence de ce type de phrases dans la langue n’est pas mise en doute, il ne devrait pas être différent pour les fragments qui de façon analogue n’expriment pas de contenu propositionnel, mais un autre type

d’engagement du locuteur. (110abc) :

(110) a. Buenos días. ’Bon journée.’ b. Una copa ?. ’Un verre ?’ c. Castigado ! ’Puni !’

Un modèle d’analyse des fragments doit ainsi pouvoir inclure ces cas, dépourvus de contenu propositionnel mais qui réalisent un acte de parole, et les considérer comme des fragments, avec ses particularités par rapport au reste des fragments. La section 2.7.4 développe cette différence, et justifie l’inclusion des exemples de (110abc) dans l’ensemble des fragments, tout en distinguant les propriétés différentes que ceux-ci pourraient avoir.

Le fragment et l’énoncé

Nous distinguons le fragment, unité syntaxique, comme la phrase, de l’énoncé, unité appartenant au domaine de la pragmatique. Ils désignent deux objets linguistiques distincts. Le fragment fait référence à une structure syntaxique, dont la tête peut être réalisé par une diversité de parties du discours, et qui peut adopter divers types

syntaxiques et véhiculer différentes valeurs illocutoires grâce à leur contenu sémantique. L’énoncé, En revanche, désigne la production langagière émise par un locuteur, qui réalise un acte de parole spécifique (Searle (1975)). Ainsi, un énoncé peut être formé par une phrase, par un fragment, par plusieurs fragments ou phrases, ou par des combinaisons des

deux.19 La section 7.4.2 approfondi dans la relation entre les fragments et les énoncés.

Les travaux qui ont traité les fragments ne font pas cette distinction entre fragment et énoncé. Par conséquence, les unités d’analyse correspondent parfois à des énoncés contenant plusieurs structures fragmentaires, comme l’exemple ((142) de Fernández (2006) présenté dans cette section.

Le fragment et la phrase averbale

La phrase averbale se caractérise par le fait d’avoir une tête prédicative, réalisé par une partie du discours différent du verbe, qui est saturé. Elle forme ainsi des structures symétriques, dont le contenu sémantique est le résultat de la combinaison des contenus apportés par la syntaxe (111a). Cette symétrie distingue la phrase averbale du fragment, dont le contenu exprimé par la syntaxe n’est qu’une partie du contenu sémantique (110abc).

Ainsi, un prédicat qui n’est pas saturé correspond à un fragment, car son contenu inclut le contenu des arguments sélectionnés par le prédicat mais non exprimés par sa syntaxe. Le fragment de (111b), par exemple, est formé par un prédicat preciosa, ’très belle’, auquel manque son sujet. Le contenu sémantique de ce sujet (’la jupe’) est néanmoins interprété, donc présent dans son contenu propositionnel, mais il n’est pas exprimé par la syntaxe. On note ainsi que les fragments (111b) peuvent correspondre à des prédicats que pourraient former des phrases averbales s’ils étaient accompagnées des arguments qu’ils

sélectionnent, comme c’est le cas de (111a) : (111) a. Preciosa la falda. ’Très belle, la jupe.’

b. Preciosa. ’Très belle.’

Lefeuvre (1999), comme Schlangen (2003) et Fernández and Ginzburg (2002), ne distingue pas entre le concept d’énoncé (appartenant au domaine de la pragmatique) de

19. On trouve aussi des syntagmes séparés de la phrase où ils appartiennent par un point. Cette ponctuation journalistique produit des effets variés, similaires en occasions à ceux de la prosodie, et constitue une figure de style qui ne justifie pas une analyse de ces syntagmes comme des fragments : "Je suis allé hier. Avant- hier." (Exemple de (Nathalie Sarraute, Pour un oui, pour un non, Gallimard, 1982, p. 18), cité par Abeillé and Delaveau (2016)).

l’unité syntaxique en question. Si Schlangen (2003) et Fernández and Ginzburg (2002) s’intéressent aux fragments, qu’ils désignent ’énoncés sans verbe’ (non-sentential

utterances, dans l’original anglais), le travail de Lefeuvre (1999) groupe les fragments et

les phrases averbales, qu’elle réunit sous le terme ’phrase averbale’. Sa définition de phrase ne décrit pas cependant une unité syntaxique, mais semble correspondre au concept d’énoncé. En effet, selon sa définition de phrase averbale, celle-ci se caractérise par réaliser un acte parole, qu’elle appelle modalité : « La phrase averbale est une structure syntaxique constitué d’un prédicat averbal et d’une modalité selon deux possibilités. Le prédicat averbal est relié par la modalité, à un sujet explicite ou implicite. Ou bien, le prédicat est simplement posé par la modalité. »

Cette définition correspond donc à trois types de structures syntaxiques : premièrement, des structures composées de prédicat et de sujet, qui constituent des phrases averbales (111a) ; deuxièmement, des prédicats non saturés par leur sujet, qu’elle appelle ’à sujet implicite’, et qui correspondent à des fragments (puisque le ’sujet implicite’ est interprété mais absent de la syntaxe, donnant ainsi lieu à une structure asymétrique) (111b) ; troisièmement, des structures non prédicatives dont le prédicat est apporté par l’acte d’énonciation, qui constituent aussi des fragments car elles sont asymétriques (112)20 :

(112) Una cerveza, por favor. ’Une bière, s’il vous plaît.’

La ’phrase averbale’ de Lefeuvre (1999) semble ainsi correspondre aux énoncés sans verbe de Schlangen (2003) et Fernández and Ginzburg (2002), mais on y trouve des différences notables.

Le manque de distinction entre les concepts de phrase, fragment et énoncé a des

conséquences différentes dans ces travaux. D’un coté, les travaux de Schlangen (2003) et Fernández and Ginzburg (2002) considèrent comme des unités d’analyse des énoncés composés par plusieurs fragments. D’un autre, Lefeuvre (1999) groupe des phrases averbales avec les fragments par leur propriété commune d’être des énoncés sans verbe.

Les fragments et autres structures averbales

Fernández-Ramírez (1986) et Ramírez (2010) détaillent une variété de structures sans verbe sous la dénomination ’phrases nominales’ (Oraciones nominales, dans l’original espagnol). Ils distinguent plusieurs types de structures sans verbe : premièrement, les vocatifs (113a) ; deuxièmement, les insultes ou propos galants (Dicterios et requiebros, en espagnol), qui combinent le caractère déictique des vocatifs avec une charge affective et expressive, qui peut être valorisante (113b) ou dévalorisante (113c).

Troisièmement, il présente les dites ’exclamatives réflexes’, qui sont anaphoriques à un élément du contexte : un segment de l’énoncé précédent (113e), à un participant (113e), à un objet non linguistique (113f), ou à la situation d’énonciation (113g)21.

Fernández-Ramírez (1986) y inclut aussi une structure très particulière : des SP introduits par le complémenteur con, où le SN contient une relative. Ces SP expriment ainsi un contenu phrastique, apporté par la relative, et une valeur illocutoire exclamante (113h). Ces SNs exclamantes avec relative se trouvent aussi sans le complémenteur con, mais subordonnés à des interjections (113i).

Quatrièmement, Fernández-Ramírez (1986) distingue un type d’exclamatives qui exprime une estimation (113j) ; cinquièmement, des SN présentatifs (113k) ; sixièmement, des SN directifs (que Fernández-Ramírez (1986) nomme oraciones nominales voluntativas ’phrases nominales de volonté’) (113l) ; septièmement, les phrases bimembres, ou structures sans tête où un prédicat est précédé d’un SN topicalisé anaphorique au sujet qu’il sélectionne (113m). Huitièmement, Fernández-Ramírez (1986) considère aussi les syntagmes disloqués comme résultat d’une topicalisation (113n) ; Neuvièmement, les constructions nominales absolues (113o), et enfin, les gros titres et didascalies (113p) :

(113) a. Oiga, buen hombre ! ’Ecoutez, bon homme !’ b. ¡Mi rey ! ’Mon roi !’

21. Ces structures, nommées Exclamativas reflejas en espagnol, sont connues aussi comme expresiones ecoicas,

citativas o metalingüísticas. Il sépare ce type des dites phrases nominales thaumatiques, aussi anaphoriques

à un objet non linguistique ou à une situation (¡África ! ¡Admirable país ! ’L’Afrique, admirable pays !’). Ces expressions se distinguent des précédentes par deux propriétés : elles sont propres au langage poétique, et elles sont anaphoriques à des objets non linguistiques qui se trouvent absents du contexte non linguistique.

c. ¡Valiente idiota ! ’Quel idiot !’

d. A : -¿Se marea usted, quizás ? B : -¿Marearme yo ?

A : -’Vous avez le mal de mer, peut-être ?’ B : -’Avoir le mal de mer, moi ?’ e. ¿Un millonario como tú preocupado de estas cosas ?

’Un millionnaire comme toi soucieux de ces affaires ?’ f. ¡Un millón de pesetas ! ’Un million de pesetas !’

g. ¿Por quién me toman ?¿Media hora hablando’ y aún no lo sé ? ’Pour qui me prenez vous ?

Une demie heure à en parler et encore je ne le sais pas ?’

h. ¡A él sí que había que matarlo !Con la mujer que tiene y los niños tan ricos. ’Lui, il faudrait le tuer ! Avec la femme qu’il a et les enfants aussi mignons.’ i. Pues anda, que las sobrinitas baturras que nos han caído a última hora ! ’Alors, regarde les petites nièces abruties qui sont arrivés au dernier moment.’ j. Vaya una noche de invierno, señores. ’Quelle nuit d’hiver, messieurs !’ k. Después de comer,un rato de siesta’, para ponerse de nuevo a la labor. ’Après manger, un moment de sieste pour pouvoir se remettre au travail.’ l. ¡Señores viajeros al tren ! ’Messieurs les voyageurs, au train !’

m. A :-¿Y los nietos ? B : -Bien. Esos bien. A : -’Et les petits-fils ?’ B : -’Bien. Ceux-là, bien.’ n. Gente no recibía mucha el director.

’De gens il n’en recevait pas beaucoup le directeur.’

o. Don Juan de Carvajal, cardenal de Sant Angelo, fue omne alto de cuerpo, de gesto blanco, y el cabello cano.

’Monsieur Juan de Carvajal, cardinal de San Angelo, était un homme de grand carrure, de peau claire, et les cheveux bancs.’

p. De Gaulle, contra ’Le Figaro’. ’De Gaulle contre ’Le Figaro”

convient d’identifier lesquelles correspondent à la définition de fragment, c’est-à-dire, celles qui ont un contenu sémantique propositionnel et une discordance

syntaxe-sémantique. Les insultes ou les propos galants (113bc), les syntagmes à valeur exclamante (exclamatives réflexes) (113defg) et les exclamatifs évaluatives (113j)

constituent des fragments, car ils expriment un contenu propositionnel dont une partie est récupérée du contexte situationnel. S’ils sont réalisés par des SN, ils sont anaphoriques à un objet non linguistique (un locuteur ou un élément de la situation). Également, les SN présentatifs (113k) et les SN directifs (113l) complètent aussi leur contenu avec des éléments présents au moment de l’énonciation (comme l’interlocuteur) et à l’énonciation même. Enfin, les constructions absolues (113o) et les bimembres (113m) peuvent

constituer des fragments si elles ne réalisent pas les arguments qui saturent leur prédicat. Si en revanche, le prédicat est accompagné par l’argument qu’il sélectionne, il constitue une phrase averbale (113mo).

En revanche, certains de ces types ne constituent pas de fragment, comme les vocatifs (113a) et les syntagmes disloqués (113n), n’expriment pas de contenu propositionnel par eux mêmes (les vocatifs constituent des ajouts, et les disloqués font partie du contenu propositionnel de la phrase où ils s’intègrent). Aussi, les syntagmes à valeur exclamante