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Perspectives d’évolution de la filière hydrogène énergétique

1.4.1 L’hydrogène comme vecteur de stockage

Alors que les applications énergétiques restent encore peu étendues, l’hydrogène pourrait constituer un élément important au sein des scénarios énergétiques élaborés par de nombreuses agences spécialisées, à l’horizon 2030 ou 2050.

L’hydrogène apparait notamment comme un élément central de nombreux scénarios, en particulier grâce à sa capacité à être un « pont » technologique pour le transport et le stockage d’énergie sous sa forme gazeuse (méthanation) et les circuits de distribution d’électricité (par piles à combustible). A ce jour, une des pistes qui paraît privilégiée serait d’injecter directement de l’hydrogène dans les réseaux existants de gaz naturel, afin d’en assurer le stockage et le transport au sein d’infrastructures préexistantes, sous réserve de leur compatibilité [4]. Cette utilisation est dénommée « Power-to-gas » où l’hydrogène peut être produit pour amortir transitoirement le surplus électrique, avec une utilisation soit directe en injection dans le méthane, soit en réalisant une réaction de méthanation permettant de générer du méthane alors facilement stockable et valorisable.

Suivant le même principe, le processus de méthanation peut être réalisé sur un hydrogène produit par voie biologique, en associant les processus de production de biogaz par méthanisation et la production d’hydrogène par électrolyse classique. Dans cette configuration, le CO2 serait fourni par le biogaz, la

réaction se déroulant à pression normale et à température mésophile (37 °C) et ne nécessiterait pas de catalyseurs autres que les microorganismes. Certains constructeurs industriels se positionnent actuellement sur ces voies de valorisation, par exemple Viessmann en Allemagne. Le principal inconvénient de cette filière réside dans le coût des électrolyseurs, qui devrait être divisé par un facteur cinq pour en garantir la rentabilité [4]. Il est intéressant de noter, que des solutions biologiques permettraient de palier à cette problématique, notamment via l’utilisation de piles d’électrolyse microbienne, mais qu’en l’état actuel des connaissances et du savoir-faire technologique (échelle pilote), un effort important de recherche et développement dans le domaine reste à être mené.

1.4.2 Différents scénarios envisagés  Scénario NegaWatt

Dans le scénario énergétique NégaWatt, l’utilisation d’énergies renouvelables permettait peu à peu de se substituer totalement à l’utilisation d’énergies fossiles et d’énergie nucléaire [34]. D’après ce scénario, il est prévu qu’en 2050, plus de 50 TWh puissent être directement injectés dans le réseau sous forme de méthane « synthétique », c’est à dire obtenu par méthanation* à partir d’hydrogène (voir figure ci-dessous). L’hydrogène aurait alors une place centrale de vecteur entre les deux principaux réseaux énergétiques français, qui sontle réseau de gaz naturel et le réseau électrique.

Figure 7. Situation de l’hydrogène au sein du scénario NégaWatt 2011 illustrant le potentiel de flexibilité et la

complémentarité entre réseaux à l’aide de procédés de méthanation [34]. Scénario de l’ADEME

Dans le cadre du scénario établi par l’ADEME à l’horizon 2020 et 2030, il est conclu que la part de l’hydrogène en tant que vecteur énergétique dans les transports restera faible au regard des contraintes technologiques actuelles. Notamment, les technologies des piles à combustible ne sont encore que peu éprouvées, les réseaux de stockage et d’approvisionnement sont à l’état très limités, sans oublier les contraintes réglementaires fortes sont autant de frein au développement d’une filière hydrogène [35]. Dans ce scénario, le stockage de l’hydrogène par méthanation en tant que levier de flexibilité entre les réseaux énergétiques français est également très largement évoqué, mais finalement non considéré dans le scénario final, puisque les technologies ne sont pas encore totalement éprouvées. Néanmoins, l’ADEME conseille d’envisager clairement l’hydrogène dans le panel des technologies possibles pour 2050, et plus précisément via l’utilisation de piles à combustible dans le cas d’une production d’électricité décentralisée [35].

Noter qu’une étude spécifique de l’ADEME publiée en 2013 et intitulée « Etude portant sur l'hydrogène et la méthanation comme procédé de valorisation de l'électricité excédentaire » [36] confirme l’intérêt du vecteur hydrogène dans l’organisation du système énergétique mondial. L’étude revandique notamment :

« Schématiquement, le déploiement du Power to Gas peut se résumer dans trois phases-clés : - A court / moyen terme, l’hydrogène se présente, en incorporation dans le réseau de gaz dans

des proportions maîtrisées (quelques %) et en usage direct sur des marchés de niche (via des piles à combustible notamment), comme une voie de valorisation d'excédents de productions d’électricité renouvelable conséquents.

- A plus long terme, une transition vers la production de méthane de synthèse permettrait de lever toutes les limites techniques liées à l’injection et de donner ainsi accès aux stockages souterrains de très grande capacité. En permettant par ailleurs de valoriser le CO2 issu entre autre de la purification du biogaz obtenu par méthanisation, la méthanation peut également apporter une contribution significative au déploiement massif du gaz renouvelable vers des usages tels que la mobilité ou la chaleur qui apparaissent difficiles à décarboner.

- En parallèle de ces développements dans le domaine énergétique, et dès à présent, des potentialités de substitution existent dans les usages industriels de l’hydrogène qui représentent environ 1 million de tonnes par an. En particulier, des usages diffus, de faibles volumes (industrie agro-alimentaire, électronique, etc.) pourraient d’ores et déjà être alimentés par de l’hydrogène produit par électrolyse.

Ces potentiels de substitution représentent un enjeu technique et économique pour le Power-to-Gas en développant certaines briques, mais également des enjeux en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre (la production d’hydrogène, essentiellement par vapo-reformage du gaz naturel, génère en France de l’ordre de 10 MtCO2/an). »

Scénario de l’ANCRE

L’ANCRE. Alliance Nationale de Coordination de la Recherche pour l’Energie. a présenté trois scénarios sont :

- « Sobriété Renforcée »,

- « Décarbonation par l’électricité », - « Vecteurs diversifiés ».

L’hydrogène se présente comme un élément central du scénario de décarbonation par l’électricité, via son utilisation en tant que vecteur énergétique dans des véhicules fonctionnant en piles à combustible [37]. Ce scénario est pourtant fortement pénalisé par les investissements en infrastructures à réaliser. L’injection de l’hydrogène dans le réseau de gaz naturel est également un élément de ces scénarios, avec l’éventualité d’une décarbonation progressive du réseau de gaz.

L’un des verrous de développement de la filière hydrogène en tant que vecteur énergétique réside également dans le surplus de consommation en énergie électrique, et dans les besoins en développement du parc automobile fonctionnant avec des piles à combustible, requérant des choix volontaristes liés au surcoût à initier cette filière.

 Synthèse

En conclusion, sur l’ensemble de ces scénarios la place de l’hydrogène dans le mix énergétique à l’horizon 2030-2050 est encore incertaine mais concernera le plus vraisemblablement dans un premier temps l’injection dans le réseau de gaz naturel; ceci étant en effet une première forme de stockage facilement mobilisable, soit en mélange direct avec le gaz naturel méthane soit via l’obtention d’un méthane synthétique par méthanation.

L’injection réseau serait en adéquation avec d’autres scénarios de valorisation de la biomasse qui prônent le développement d’une filière biogaz (méthane) en tant que bioénergies à l’horizon 2050 [34] [38]. Le vecteur hydrogène permettrait donc de faire un pont entre deux réseaux énergétiques majeurs (réseaux de gaz et d’électricité). Ce mode d’utilisation nécessiterait moins d’investissements en termes d’infrastructures et permettrait d’aller vers une décarbonation progressive des réseaux de gaz.

Dans ce cadre, tous les scénarios s’accordent à promouvoir une production propre en hydrogène, là même où le biohydrogène présente des avantages certains (peu d’impact environnemental, énergie renouvelable et durable, recyclage des déchets). Toutefois, les procédés de production en biohydrogène sont peu évoqués au sein de ces scénarios, vraisemblablement au regard des verrous technologiques à lever, liés à la complexité de la déconstruction de la biomasse lignocellulosique, de la maitrise des micro-organismes et/ou enzymes utilisées ainsi que de l'intégration de l'ensemble de ces procédés émergents au sein de filières plus globales de production [37].

2 Production de dihydrogène à partir des déchets

L’objet de cette deuxième partie est de référencer l’ensemble des techniques de production de dihydrogène à partir des déchets, classées selon deux voies : thermochimique et biologique. En plus d’exposer le principe de fonctionnement et les technologies associées, cette partie passe en revue les procédés d’épuration mis en place afin de garantir l’élimination des impuretés présentes dans les mélanges gazeux produits. Pour avoir une vision globale sur la chaine de production, les gisements de déchets, qui servent de matières premières pour les technologies de production d’hydrogène, sont répertoriés dans le premier paragraphe mais seront détaillés dans la suite du rapport.

Les paragraphes ci-après décrivent les particularités principales des technologies de production de biohydrogène à partir des déchets, actuellement utilisées à l’échelle semi-industrielle ou en phase de développement.

A noter que des fiches techniques, qui permettent d’avoir des caractéristiques techniques plus détaillées sur chaque technologie, sont incluses dans la suite du rapport (cf. chapitre 4).