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Les procédés ne nécessitant pas de lumière

2.4 Production d’hydrogène par voie microbienne

2.4.4 Les procédés ne nécessitant pas de lumière

Dans la catégorie des bioprocédés ne dépendant pas de la lumière, en absence d’oxygène, certaines bactéries fermentaires sont capables de dégrader des sources organiques en un biogaz composé d’hydrogène et de dioxyde de carbone.

Ainsi, des bactéries anaérobies strictes (i.e. genre Clostridium sp. ou extremophiles du genre Thermotoga sp.) ou anaérobie facultative (Enterobacter sp.) produisent de l’hydrogène par fermentation de la matière organique [67].

Dans le cas des bactéries anaérobies strictes, les voies de production principales sont les voies de fermentation des sucres en acétate et en butyrate selon les équations suivantes :

Voie acétate C6H12O6 + 2 H2O → 4 H2 + 2 CH3COOH + 2 CO2 (2.14)

Voie butyrate C6H12O6 → CH3CH2CH2COOH + 2 CO2 + 2 H2 (2.15)

Il est à noter que pour la voie de production d’acétate, quatre moles d’hydrogène sont produits par mole de glucose alors que seulement deux moles d’hydrogène sont produites par mole de glucose dans le cas de la voie butyrate.

Les bactéries du genre Clostridium sp. présentent le plus souvent simultanément les deux voies de production, avec des rendements moyens maximum de l’ordre de 2 à 2,5 moles d’hydrogène par mole

de glucose (voir figure ci-dessous). Les rendements les plus élevés sont rapportés pour des bactéries extrêmophiles du genre Thermotoga sp., avec des métabolismes n’utilisant que la voie acétate.

Dans le cas des bactéries anaérobies facultatives, de la famille des entérobactéries, la voie de production d’hydrogène est sensiblement différente via l’utilisation d’une formate lyase et non d’une hydrogénase. Ainsi le formate produit par fermentation par les différents microorganismes de cette famille (Enterobacter sp., Escherichia coli, etc.) est alors scindé en hydrogène et dioxyde de carbone par une formate lyase, selon l’équation suivante [68] :

HCOOH --> H2 + CO2 (2.16)

Figure 22. Représentation schématique de la production d’hydrogène par fermentation sombre [69] [70]

Dans le cas des procédés en fermentation sombre, le substrat principal concerne l’utilisation de sources organiques soit sous forme de sucres simples ou complexes dans le cadre de l’utilisation de microorganismes pures, soit sous les mêmes formes mais également des déchets ou effluents complexes pour des cultures mixtes naturelles [3]. Dans ce dernier cas, un contrôle très fin des procédés est nécessaire afin de garantir les performances, au regard des nombreuses contaminations bactériennes possibles et de la multiplicité des voies métaboliques.

Ces procédés, contrairement aux photo-bioprocédés, s’affranchissent du besoin en lumière et donc peuvent être réalisées dans des procédés dits intensifs. Les productivités observées sont alors de l’ordre de 80 mmol.L-1.h-1 [63].

2.4.4.2 Les cellules d’électrolyse microbienne

Dans le cas des procédés d’électrolyse microbienne, la réaction de production d’hydrogène n’est pas directement portée par les microorganismes mais par une réaction abiotique.

En effet, en absence d’oxygène, de nombreux microorganismes, dits « électroactifs », sont capables de convertir la matière organique en CO2 et en électrons et protons. En appliquant une tension donnée, les

électrons et protons sont transférés dans un autre compartiment abiotique pour réaliser la réaction de synthèse en hydrogène (voir Figure 23).

Comme dans le cas de la photofermentation, mais en place d’énergie lumineuse, la différence de potentielle appliquée au système permet aux microorganismes d’assimiler des sources simples de carbone, tels que les sucres simples (glucose) ou des molécules organiques produites lors de la fermentation sombre (acides gras volatils à courtes chaines du C2 au C6, des alcools) [71].

Figure 23. Représentation schématique de la production d’hydrogène en cellules d’électrolyse microbiennes [71]

Le métabolisme microbien en jeu n’est donc pas spécifique à la production d’hydrogène ; il est lié à la capacité de transfert des électrons à un support solide (anode). En fonction de la tension appliquée et des conditions du milieu, il est à noter que de nombreuses autres réactions peuvent être réalisées au sein du compartiment cathodique (synthèse de H2O2, de NaOH, de biomolécules, etc.).

Les principaux microorganismes isolés et identifiés comme électroactifs appartiennent à de nombreux groupes microbiens différents (actinobactéries, firmicutes, acidobactéries, protéobactéries (α, β, γ, δ)) [72]. Ces microorganismes sont appelés ARB pour « anode respiring bacteria » car ils présentent une faculté à échanger des électrons avec une électrode.

Comme dans le cas de la fermentation sombre, des procédés en cultures pures peuvent être utilisés avec des espèces du genre Geoalkalibacter sp.. Cependant, au regard des capacités métaboliques restreintes de ces microorganismes (peu de substrats), la majorité des procédés utilisant des effluents complexes sont opérés en cultures mixtes, où les processus microbiens en jeu sont encore peu connus. La réaction globale de réaction est la suivante :

CH3COOH + 2 H2O + Energie Electrique (ddp) → 4 H2 + 2 CO2 (2.17)

Dans le cas de ces procédés présent, les gaz sont produits dans deux compartiments différents et peuvent donc être séparés physiquement, i.e. le CO2 à l’anode et l’H2 à la cathode, avec une pureté

théorique de 100 % pour l’H2 produit, s’affranchissant ainsi d’une étape coûteuse de purification. Les

rendements énergétiques peuvent atteindre près de 80%.

Sur le principe, une cellule d’électrolyse microbienne ou « Microbial Electrolysis Cell (MEC) » est un procédé où les substrats organiques sont oxydés à l’anode en présence d’un biofilm microbien qui joue le rôle d’électro-catalyseur [73]. En comparaison avec les procédés chimiques d’électrolyse de l’eau, les MEC fonctionnent avec des tensions 5 à 10 fois plus faibles divisant d’autant le coût en énergie électrique de l’hydrogène produit [72]. Elle constitue une solution parfaitement adaptée à une situation où des besoins locaux en hydrogène avec traitement d’effluents. Le rendement maximal théorique d’une MEC est de 3 moles d’hydrogène produit par mole d’acétate. En couplant un procédé de fermentation sombre avec une MEC, il est possible d’envisager des rendements de l’ordre de 8 à 9 moles d’hydrogène par mole de glucose (en théorie jusqu’au maximum de 12 moles par mole de glucose).