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1.3 Principaux usages du dihydrogène

1.3.2 Hydrogène énergétique

A ce jour les applications en tant que vecteur énergétique sont encore marginales en France. Une filière énergétique hydrogène tend néanmoins à se mettre en place dans de nombreux pays, européens avec l’installation de plus de 50 stations d’approvisionnement en Allemagne prévue en 2015, mais aussi dans le monde notamment au Japon, en Corée du Sud et plus généralement en Asie. A cela s’ajoute l’utilisation en tant qu’additif dans le gaz naturel (méthane), pour obtenir un carburant présentant une combustion plus propre (Hythane®).

Contrairement au paragraphe précédent, traitant des usages de l’hydrogène hors énergie, il s’avère difficile de donner des estimations chiffrées concernant la répartition de consommations d’hydrogène dans les usages énergétiques actuels et à venir, au regard de l’incertitude des nombreux scénarios proposés.

La demande énergétique mondiale atteignait en 2010 près de 12,7 Gtep dont près de 80 % est d’origine fossile. La production mondiale en hydrogène actuelle, si elle était uniquement utilisée à des fins énergétiques, ne permettrait de couvrir que 1,6 % des besoins énergétiques, et son développement demanderait un effort substantiel d’investissements tant pour la production que pour les infrastructures de transport et de distribution.

1.3.2.1 Propulsion spatiale etmoteur thermique

D’un point de vue énergétique, la principale application industrielle de l'hydrogène-énergie est la propulsion spatiale. L’hydrogène est utilisé comme carburant pour assurer la propulsion des fusées et lanceurs spatiaux. L’intérêt majeur réside dans sa forte densité énergétique massique puisque sa combustion permet de libérer environ 121 MJ/kg. Cette combustion est réalisée par de l’oxygène pur. Ainsi, Ariane 5 emporte 162 t d'oxygène liquide et 28 t d'hydrogène liquide pour l'alimentation de son moteur cryogénique. A noter que le secteur de l’aérospatial est actuellement en plein essor avec le développement de cette activité dans les pays émergents (Brésil, etc.), notamment par la mise en orbite prévue de satellites.

Il pourrait aussi être envisagé une application plus large dans le domaine du transport par moteur à combustion interne. Tout comme le gaz naturel, l’hydrogène est en effet un carburant gazeux qui peut être directement brûlé dans un moteur thermique. Cependant, au regard des réticences sociales importantes concernant le management (stockage, sécurité, etc.) de ce vecteur énergétique, une telle diffusion est peu probable.

Des applications de cogénération (production conjointe de chaleur et d’électricité) sont envisageables, comme c’est le cas avec le méthane.

L’utilisation industrielle de l’hydrogène carburant se développe également pour le transport en véhicules lourds, moyennant la réalisation de quelques modifications sur les moteurs : adaptation des injecteurs, taille du moteur, utilisation de matériaux résistant à l’hydrogène, modification des bougies et réglage du moteur différent [28]. Plusieurs constructeurs automobiles ont réalisé des démonstrations de véhicules fonctionnant à l’hydrogène-carburant (BMW, Mercedes, Mazda, etc.). Toutefois, du fait d’un problème de volume du moteur, le développement des véhicules fonctionnant à hydrogène s’oriente plutôt vers l’utilisation de piles à combustibles.

1.3.2.2 Pile à Combustible (PAC)

Le principe de la pile à combustible est d’utiliser un combustible pour produire de l’électricité (Figure 6). Les véhicules possédant des piles à combustibles sont de la même technologie que les véhicules électriques. Le principal intérêt est de proposer des autonomies plus intéressantes que les véhicules électriques seuls. Ces systèmes peuvent également être développés en prolongateur d’autonomie pour les véhicules électriques sur batterie, mais restent sujets à la problématique de stockage de l’hydrogène (volume, risque, acceptation). En outre, la production d’électricité par les moteurs à combustion permet d’atteindre des rendements de 30 à 35 % au plus, alors que sur une pile à combustible on observe des

rendements de 60 % environ. Cela implique que la pile à combustible permet de consommer moins de dihydrogène pour un même résultat.

Le fonctionnement d’une pile est fondé sur un duo d’électrodes sur lesquelles ont lieu une réaction d’oxydo-réduction. L’hydrogène est oxydé à l’anode, les protons migrant dans un électrolyte et les électrons par le circuit électrique, tandis que l’oxygène est réduit à la cathode. Le produit de la réaction est une molécule d’eau. A noter que certaines technologies de pile (dites à « oxyde solide ») permettent de transiter les anions d’oxygène (O2-) plutôt que les cations, la réaction de combinaison ayant lieu à

l’anode.

Les rejets de la pile sont donc uniquement de la vapeur d’eau. Les rendements de conversion électriques sont en théorie proches de 80-90 % contre 50 % maximum (rendement de Carnot) pour les moteurs thermiques. Les rendements réels sont plus généralement de l’ordre de 40 - 60 %, ce qui reste plus élevé que les moteurs thermiques [29].

Figure 6. Schéma de principe d’une pile à combustible fonctionnant à hydrogène [30]

A ce jour, les technologies de piles à combustible sont classées selon la nature de l’électrolyte utilisé [29]. Elles sont présentées ci-dessous.

- AFC (Alkaline Fuel Cell), ou piles à combustible alcalines, où les piles fonctionnent sur un mélange hydrogène/air en présence d’un électrolyte alcalin, le plus souvent de la potasse concentrée (30 à 45 % en masse de KOH). Fonctionnant à basse température (80 °C), elles sont adaptées à des utilisations embarquées de faibles puissances (1 à 100 kW) ;

- PEMFC (Proton Exchange Membrane Fuel Cell) : pile à combustible à membrane polymère, où les charges transfèrent au sein d’une membrane échangeuse de protons, avec une faible perméabilité aux gaz et des propriétés d’isolant électronique. Fonctionnant à basse température (80 °C), elles sont adaptées aux applications portables ou de transports, voire stationnaires (10 mW à 1 MW). Il s’agit de la solution privilégiée pour le transport en véhicule par empilement de PEMFC, permettant de gagner en autonomie et puissance ;

- PAFC (Phosphoric Acid Fuel Cell): pile à combustible à acide phosphorique, où l’électrolyte est de l’acide phosphorique immobilisé dans une matrice de carbure de silicium. Les PAFC possède une technologie la plus aboutie. Leur température de fonctionnement (200 °C) fait

qu’elles sont particulièrement adaptées à une utilisation en stationnaire pour une cogénération chaleur et électricité (200 kW à 10 MW) ;

- MCFC (Molten Carbonate Fuel Cell): pile à combustible à carbonates alcalins fondu, où l’électrolyte correspond à des carbonates fondus, eg. Li2CO3K2CO3. Ces piles fonctionnent à

des températures moyennes élevées (500 °C à 650 °C) afin de conserver les propriétés électrochimiques des carbonates fondus. Leur utilisation est exclusivement en stationnaire pour des applications locales et de fortes puissances (500 kW à 10 MW) ;

- PCFC (Protonic Ceramic Fuel Cell): pile à combustible à céramique protonante, où l’électrolyte est une céramique conduisant les protons. Ces piles fonctionnent à des températures élevée (jusqu’à 700 °C) et sont plus adaptées à des installations stationnaires (1 kW à 1 MW) ;

- SOFC (Solid Oxyde Fuel Cell): pile à combustible à oxyde solide, où l’électrolyte est un système multicouches de céramiques fonctionnelles. Ces piles fonctionnent aux températures les plus élevées (1000 °C).

Tableau 11. Synthèse de la nature de la technologie de pile à combustible préconisée en fonction du domaine

d’application et des puissances demandées [29] [30]

Type de pile Nom complet Electrolyte Température

nominale (°C)

Gamme de puissance

Applications préférentielles

AFC Pile à combustible alcaline (alkaline

fuel cell) KOH 80 1 à 100 kW

Transports, stationnaires

PEMFC

Pile à combustible à membrane polymère (Proton exchange membrane

fuel cell) Polymère protonique 80 10 mW à 1 MW Portables, transports, stationnaires PAFC

Pile à combustible à acide phosphorique (Phosphoric acid fuel

cell)

H3PO4 200 200 kW à 10 MW

Transports, stationnaires

MCFC

Pile à combustibleà carbonates alcalins fondus (Molten carbonate fuel cell)

Li2CO3 /

K2CO3 650 500 kW à 10 MW Stationnaires

PCFC Pile à combustible à céramique

protonante (protonic ceramic fuel cell)

Polymère

protonique 400-700 1 kW à 10 MW Stationnaires

SOFC Pile à combustible à oxyde solide (Solid oxyde fuel cell) ZrO2 / Y2O3 600-1000 1 kW à 10 MW Stationnaires

1.3.2.3 L’Hythane® : Mélange d’hydrogène et de gaz naturel

L’une des principales utilisations ne nécessitant que peu de modifications des infrastructures existantes et rapportées par les principaux observateurs pourrait être l’utilisation en mélange avec du méthane, soit en vue d’une réinjection dans le réseau de gaz national, soit en tant que mélange pour les transports à base de GNV (Gaz Naturel pour Véhicule).

Techniquement, un mélange d’hydrogène avec le gaz naturel à hauteur de 4 à 6 % en volume (voire jusqu’à 20 %) dans le réseau de gaz serait acceptable, permettant de s’affranchir partiellement des besoins en gaz naturel d’origine fossile et permettant d’obtenir une meilleure combustion, donc un rejet en polluants moindres [4]. Lorsque le mélange H2/CH4 est utilisé dans une problématique transport, le

nom de mélange est l’Hythane® (marque déposée par une entreprise US). L’intérêt d’un tel mélange est

d’améliorer les performances des moteurs à combustion fonctionnant au biogaz, ceci grâce à la présence d’hydrogène à hauteur de 10 à 20 % [31].

Une discussion à l’échelle européenne est en cours pour arrêter et harmoniser règlementairement le pourcentage accepté d’H2 dans les réseaux, variant entre 2 à 6% dans les différents pays de l’UE.

Plusieurs programmes d’utilisation d’Hythane® ont été lancés ces dernières années en Europe, et très

ADEME GRHyd coordonné par GDF Suez «Gestion des Réseaux par l’injection d’HYdrogène (H2) pour

Décarboner les énergies »).

En France, où le mode de transport GNV est d’une diffusion restreinte sur le réseau de transport, l’un des premiers projets d’ampleur sur l’Hythane® est le projet Althytude (Alternative Hydrogène dans les

Transports Urbains à Dunkerque). Ce projet, mené entre 2005 et 2010, a permis de démontrer l’intérêt d’utiliser ce mélange qui améliore la combustion du gaz naturel et diminue les émissions polluantes (formaldéhyde et particules, et potentiellement des NOx) [31] [32]

Au regard des scénarios énergétiques envisagés et des avancées technologiques de ces dernières années, la principale conclusion est qu’une injection réseau d’un mélange H2/CH4 serait une solution

favorable au développement d’énergies renouvelables intermittentes, apportant une flexibilité à l’interface des réseaux énergétiques électriques et gaz. De plus, l’impact environnemental, en termes de réduction d’émission en gaz à effet de serre CO2, serait toujours favorable à l’injection d’hydrogène

en mélange avec le méthane (ou gaz naturel) [33].