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5.3 Analyses sur l’ensemble de l’échantillon

6.4.2 Perfectionnisme

Le graphique 12 indique les scores moyens obtenus sur le CAPS. Contrairement à nos attentes, les élèves tout-venant en CM2 obtiennent le score global le plus important sur cette échelle (m = 73,64 ; ety = 15,36). Cet effet est d’amplitude intermédiaire (d = 0,40). Les EHPI (m = 67,76 ; ety = 14,13) obtiennent un score global plus élevé que leurs pairs de même niveau scolaire (m = 62,93 ; ety = 16,65). Selon la classification de Cohen, la différence observée entre les EHPI et les élèves tout-venant en 6ème est faible (d = 0,30).

Le groupe d’EHPI est plus homogène avec un écart-type inférieur à celui des autres groupes, cependant le test d’homogénéité des variances de Levene n’est pas significatif, pour aucun des scores. La même tendance est retrouvée pour les deux dimensions de perfectionnisme : les EHPI obtiennent un score moyen plus élevé que les enfants tout venant en 6ème mais inférieur à celui de leurs pairs de même âge. Nous observons en particulier que les EHPI obtiennent un score de perfectionnisme orienté vers soi plus élevé que leurs pairs de même niveau scolaire (respectivement m = 38,34 ; ety = 9,03 et m = 34,79 ; ety = 9,07). Cet effet est d’amplitude intermédiaire (d = 0,39).

0 10 20 30 40 50 60 70 80 Perfectionnisme orienté vers soi

Perfectionnisme socialement induit Score global S c o re m o y e n HP NHP 6ème NHP CM2

Graphique 12 : Histogrammes des scores de perfectionnisme pour le groupe d’EHPI (HP, n=67), le groupe d’élèves tout-venant en 6ème (NHP 6ème, n=58) et le groupe d’élèves tout-venant en CM2 (NHP CM2, n=45).

Les analyses d’inférence mettent en évidence des différences significatives entre les groupes expérimentaux pour le score de perfectionnisme orienté vers soi (F(2, 167)= 5,19 ; p<.01). Les comparaisons planifiées indiquent que les EHPI obtiennent un score de perfectionnisme orienté vers soi plus élevé que les enfants tout-venant en 6ème (F(1, 167)= 4,87 ; p<.05). La différence entre les EHPI et le groupe tout-venant en CM2 n’est pas significative (p>.05).

Nous observons aussi des différences significatives entre les groupes expérimentaux pour le score de perfectionnisme social (F(2, 167)= 4,29 ; p<.05). Les comparaisons planifiées indiquent que les EHPI obtiennent un score moyen inférieur à celui des enfants tout-venant en CM2 (F(1, 167)= 4,87 ; p<.05). La différence entre les EHPI et le groupe tout-venant en 6ème n’est pas significative (p>.05).

En prenant en compte le score global de perfectionnisme, il existe des différences significatives entre les 3 groupes expérimentaux (F(2, 167)= 6,20 ; p<.01). Les comparaisons planifiées indiquent que les EHPI obtiennent un score global de perfectionnisme plus élevé que celui des enfants tout-venant en 6ème (F(1, 167)= 3,09 ; p<.05 unilatéral). La différence entre les EHPI et le groupe tout-venant en CM2 est significative (F(1, 167)= 3,97 ; p<.05) et indique un score moyen global plus élevé pour ce dernier.

6.4.3 Analyse des corrélations

Pour le groupe d’EHPI, nous observons des corrélations non négligeables entre les mesures d’anxiété manifeste et celles de perfectionnisme (tableau 33). Les scores globaux des deux échelles présentent une corrélation positive de force modérée (r =.33 ; p<.01). Le perfectionnisme orienté vers soi semble moins lié à des manifestations d’anxiété que le perfectionnisme induite socialement. En effet, la seul corrélation significative observée avec

le score de perfectionnisme orienté vers soi concerne la sous-échelle

« inquiétude/hypersensibilité » (r =.30 ; p<.05). En revanche le score de perfectionnisme social corrèle positivement avec plusieurs sous échelles d’anxiété manifeste, et notamment le score préoccupations sociales/concentration » (r=.40 ; p<.05), le score « inquiétude hypersensibilité » (r =.31 ; p<.05) et le score total d’anxiété manifeste (r =.35 ; p<.01). Enfin, le score total de perfectionnisme est lié à ces deux sous échelles d’anxiété manifeste, avec des corrélations positive et significatives de forces faibles à modérées.

Notons aussi que la sous-échelle de désirabilité sociale prévue par le R-CMAS n’est pas liée avec les scores de perfectionnisme (p>.05).

Caps OS Caps S caps Score global d’anxiété

manifeste 0,19 0,35** 0,33** Anxiété physiologique 0,10 0,18 0,17 Inquiétude/ Hypersensibilité 0,30* 0,31* 0,38** Préoccupations sociales/concentration 0,01 0,40** 0,24* Echelle de désirabilité 0,21 -0,05 0,11

Tableau 33 : Matrice présentant les corrélations pour le groupe d’EHPI (n=67) entre les échelles d’anxiété et celles de perfectionnisme (capsSO : perfectionnisme orienté vers soi ; capsS : perfectionnisme induit socialement ; caps : Score global de perfectionnisme). *p<.05 ; **p<.01

Pour le groupe d’enfants tout-venant en 6ème, nous observons un patron de corrélations différent celui des EHPI entre les scores de l’échelle de perfectionnisme et ceux de l’échelle d’anxiété (tableau 34). Dans ce cas, la sous-échelle de perfectionnisme orienté vers soi présente des corrélations positives importantes avec le score global d’anxiété (r = .51 ; p<.01),

le score « inquiétude/hypersensibilité » (r = .52 ; p<.01) et le score « préoccupations sociales/concentration » (r =.42 ; p<.01). En revanche, le score de perfectionnisme social présente des corrélations positives modérées avec le score global d’anxiété (r =.31 ; p<.05) et le score « préoccupations sociales/concentration » (r =.28 ; p<.05). Le score total de perfectionnisme présente des corrélations positives de force modéré avec les sous-échelles d’anxiété manifeste, sauf celle d’anxiété physiologique (.39< r <.45 ; p<.01). Notons aussi que l’échelle de désirabilité sociale présente des corrélations significatives de force modérée avec les scores de perfectionnisme (.27< r <.37 ; p<.05).

Caps OS Caps S Caps Score global d’anxiété

manifeste 0,51** 0,31* 0,45** Anxiété physiologique 0,17 0,09 0,14 Inquiétude/ Hypersensibilité 0,52** 0,25 0,43** Préoccupations sociales/concentration 0,42** 0,28* 0,39** Echelle de désirabilité 0,37** 0,27* 0,35**

Tableau 34 : Matrice présentant les corrélations pour le groupe d’enfants tout-venant en 6ème (n=58) entre les échelles d’anxiété et celles de perfectionnisme (capsSO : perfectionnisme orienté vers soi ; caps : perfectionnisme induit socialement ; caps : Score global de perfectionnisme). *p<.05 ; **p<.01

Pour le groupe tout-venant en CM2, les corrélations entre les scores d’anxiété manifeste et de perfectionnisme ne sont pas particulièrement marquées (tableau 35). Les seules corrélations significatives que nous observons concernent le perfectionnisme socialement induit. Cette mesure présente en effet des corrélations positives de force modérée avec le score global d'anxiété (r =.37 ; p<.05) et la sous-échelle "préoccupations sociales/concentration" (r =.43 ; p<.01).

Caps OS Caps S caps Score global d’anxiété

manifeste -0,03 0,37* 0,22 Anxiété physiologique -0,18 0,10 -0,03 Inquiétude/ Hypersensibilité 0,08 0,28 0,23 Préoccupations sociales/concentration -0,08 0,43** 0,23 Echelle de désirabilité -0,03 -0,07 -0,06

Tableau 35 : Matrice carrée présentant les corrélations pour le groupe d’enfants tout-venant en CM2 (n=45) entre les échelles d’anxiété et celles de perfectionnisme (capsSO : perfectionnisme orienté vers soi ; caps : perfectionnisme induit socialement ; caps : Score global de perfectionnisme). *p<.05 ; **p<.01

6.5 Discussion

Dans ce chapitre, nous nous sommes intéressé à l’étude des caractéristiques conatives des EHPI. Nous attendions particulièrement des différences sur des mesures de perfectionnisme et d’anxiété entre cette population et les enfants tout-venant. Nous avons également exploré des dimensions de personnalité établies sur le modèle des « Big 5 » afin de juger de la pertinence de leur utilisation auprès des EHPI.

Les différences entre les EHPI et les élèves tout-venant ne sont pas importantes sur l’échelle de perfectionnisme, en tenant compte des deux groupes contrôles. Cette tendance s’explique par le fait que les élèves de CM2 obtiennent des scores très élevés sur le CAPS, par rapport aux élèves tout-venant de 6ème d’une part, et aux EHPI d’autre part. Nous avons constaté des scores particulièrement élevés de la part des élèves de CM2 dans une des écoles, notamment sur la dimension de perfectionnisme socialement induit. La passation du CAPS pour ce groupe s’est fait de façon collective, en présence de l’institutrice et il est possible que cette condition de passation ait eu un impact sur la réponse des sujets. D’autres travaux doivent déterminer si il existe des variations du perfectionnisme au cours du développement, et son impact sur le fonctionnement psychique dans une perspective life-span.

Nous avons mis en évidence des liens entre le perfectionnisme et l’anxiété manifeste qui corroborent les résultats de Hewitt et al. (2002). D’autre part, les EHPI obtiennent un

score de perfectionnisme orienté vers soi plus important que le groupe contrôle en 6ème. Ils ont donc des attentes plus élevées que leurs pairs de même niveau scolaire quand à leurs critères de réussite. En revanche, les deux groupes obtiennent des scores similaires sur l’échelle de perfectionnisme socialement induit. Nous suggérons que le perfectionnisme reflète une mauvaise estimation par l’individu de ses capacités, susceptibles de l’entraîner dans un sentiment d’échec chronique anxiogène. Cette interprétation est relativisée par l’absence de différence entre les EHPI et les groupes contrôle. Les résultats rapportés dans littérature de ce domaine (voir Olszewski-Kubilius, Kulieke, et Krasney, 1988 pour une synthèse) rapportent des scores d’anxiété moins importants chez les EHPI en comparaison à des groupes de même âge. Pour la plupart des études dans ce domaine, et c’est le cas de la nôtre, les échantillons d’EHPI sont constitués à partir d’individus déjà identifiés et donc soumis à une forme de reconnaissance, comme l’intégration à une école pourvu d’un mode de prise en charge pédagogique particulière. Il est possible que l’anxiété soit plus importante chez des EHPI non-identifiés, comme peuvent l’attester les psychologues ou psychiatres confrontés à ces enfants. Dans la pratique, la co-existence entre un perfectionnisme marqué et des symptômes d’anxiété pourrait être un bon indicateur de l’existence d’un haut potentiel. Notons aussi qu’il peut exister un lien entre la désirabilité sociale et le perfectionnisme et nous suggérons d’intégrer une échelle de désirabilité sociale le CAPS.

En ce qui concerne la personnalité, la méthode classique de construction d’échelles implique de définir le domaine, de rassembler ou créer des items, de les expérimenter sur un large échantillon, d’en faire l’analyse et d’en évaluer la fidélité et la validité. D’une part nous n’avons pas utilisé l’ACL de manière régulière (eq. 120 mots au lieu de 300). D’autre part l’ACL a été construit sur des données recueillies auprès d’adultes. Dans cette mesure, notre démarche a été purement exploratoire, sans disposer d’hypothèse a priori. Les résultats indiquent cependant l’existence de phénomènes non négligeables susceptibles d’être exploitables dans la compréhension du haut potentiel, quel que soit la manière dont s’exprime ce dernier. Nous constatons notamment que les EHPI ont une forte tendance à choisir d’avantage d’adjectifs pour se décrire. Gendre et al. (1996) indiquent que le nombre d’adjectifs cochés n’est pas seulement une variable artefactuelle mais contient un sens psychologique. Elle est en effet associée à des interprétations impliquant l’expressivité. Par ailleurs, le nombre d’adjectifs cochés est une composante des échelles d’ouverture et d’extraversion. Nous observons dans ce sens que les EHPI se distinguent des enfants tout-venant de même niveau scolaire dans ces deux domaines. Dans une étude préliminaire,

Shaughessy et al. (2004) suggère l’existence de facteurs de personnalité susceptibles de caractériser les EHPI. Ils concluent en indiquant qu’il est souhaitable de prendre en compte ces différences dans les pratiques concernant cette population. Nos résultats confirment cette assertion, et nous pensons que les facteurs de personnalité pourraient s’avérer utile dans les choix d’orientation des EHPI. Par exemple, certains de ces élèves se sentiront plus à l’aise en suivant une pédagogie traditionnelle quand d’autres tireront bénéfice d’une accélération, ou d’un programme pédagogique enrichi. Nous avons également mis en évidence une tendance à l’introversion chez les filles à haut potentiel intellectuel. Ce résultat est intéressant car il suggère des différences de personnalité entre les garçons et les filles chez les EHPI qui doivent être prises en compte dans l’identification. Dans la pratique, il est possible que les filles à haut potentiel intellectuel soient plus difficilement repérables par les enseignants, par exemple, du fait d’une introversion plus prononcée qui les rendrait en quelque sorte invisibles parmi un groupe d’élève. De futurs travaux pourront déterminer si il est possible de mieux cerner les besoins pédagogiques des enfants à haut potentiel en se servant des profils individuels de personnalité.

7 ANALYSES MULTIVARIEES

7.1 Introduction

Dans cette partie, nous avons voulu prendre en compte les trois grandes dimensions de la trilogie de l’esprit. Notre objectif est de déterminer à quel point il est pertinent de considérer l’ensemble de ces dimensions pour caractériser les EHPI. Nous nous plaçons dès lors dans une perspective multivariée en utilisant les différences psychologiques que nous avons mesurées pour identifier des profils d’EHPI. Dans les chapitres précédents, nous avons pu mettre en évidence la possibilité de caractériser les EHPI sur d’autres dimensions psychologiques que la simple mesure de l’intelligence. Nous avons donc opérationnalisé expérimentalement une procédure d’identification des EHPI basés sur l’ensemble des tests utilisés dans cette étude. La question qui se pose concerne le profil d’identification optimal des EHPI. Peut-on se satisfaire de la simple prise en compte de variables cognitives ou peut-on améliorer la précisipeut-on de l’identificatipeut-on en introduisant des variables affectives et conatives ?

L’analyse discriminante peut-être utilisée afin de prédire l’appartenance à un groupe par une série de variables numériques. Nous avons choisi une analyse pas à pas qui va choisir à chaque étape la variable la plus discriminante et l’inclure dans le modèle de discrimination. Nous pouvons grâce à ce modèle classer les sujets dans des groupes distincts. Cette analyse détermine donc les variables les plus importantes à prendre en compte pour discriminer au mieux les groupes, et organise un classement à partir d’une équation établie avec ces variables. Selon cette équation, un sujet va donc être classé dans un des groupes statistiquement établis. Dans le meilleur des cas, l’équation permet classer correctement 100% des sujets.

Ainsi, nous avons utilisé l’analyse discriminante afin de déterminer à quel point l’appartenance au groupe EHPI (variable dépendante), peut-être prédite sur une série de variable indépendantes (mesures que nous avons effectuées). Cette analyse permet aussi d’indiquer la contribution de chaque variable indépendante dans la prédiction de l’appartenance à un groupe.

Nous présentons une procédure d’analyse en deux grandes phases. Dans la première, nous effectuerons l’analyse discriminante en considérant séparément les trois composantes de la trilogie de l’esprit. Cette démarche nous permettra d’évaluer le pouvoir discriminant des

indices de chaque dimension psychologique étudiée. Puis, nous prendrons en compte l’ensemble des indices des dimensions mesurées afin de voir si la discrimination est plus efficace. Nous pourrons également avoir une idée des variables les plus importantes à prendre en compte pour discriminer les enfants tout-venant de EHPI.

Notons ici que les élèves tout-venant en CM2 n’ont pas rempli l’inventaire de personnalité, ce qui limite notre investigation. Nous n’avons donc pas tenu compte de ce groupe dans cette partie d’analyse.