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II. Présentation synthétique des entreprises

3. Les perceptions de la mixité

Nous ne disposons que des entretiens de l’encadrement, et en particulier du directeur du personnel ouvrier que nous avons déjà rencontré à plusieurs reprises. Pour nos interlocuteurs, la présence de femmes sur des postes autrefois tenus exclusivement par des hommes paraît aujourd’hui naturelle, ce qui traduit une certaine banalisation de la mixité professionnelle. « Depuis que je suis dans l’entreprise,

je n’ai jamais eu de réflexion d’un homme qui dirait que tel poste n’est pas fait pour une femme »,

remarque ainsi le directeur de la production. Et le DRH affirme aussi : « il y a eu des évolutions de la

part des hommes et la présence de femmes sur ces postes devient naturelle ». Le même déplore

cependant le fait que « l’on est resté très machiste dans l’industrie métallurgique et que l’entreprise

reste une structure d’hommes ». De fait, il existe encore des secteurs presque fermés aux femmes, par

exemple l’usinage ou la maintenance, et par ailleurs les femmes ne bénéficient quasiment pas de promotion. Dans un autre registre, nos interlocuteurs soulignent l’intérêt de la mixité en insistant sur l’apport positif de la présence des femmes en termes de relationnel, de respect et de coopération.

Le poids des charges lourdes…

Les raisons avancées pour expliquer le maintien d’une certaine division sexuée du travail dans les ateliers n’ont pas changé depuis notre visite : l’absence ou l’insuffisance de formation technique et la manipulation de charges lourdes seraient des obstacles majeurs à la présence des femmes sur un certain nombre de postes. Le directeur des ressources humaines admet cependant que des robots ont été introduits là où les pièces étaient trop lourdes, y compris pour les hommes ! Quant à l’absence de promotion des femmes, elle semble plus liée à une certaine inertie et au poids des habitudes qu’à une nécessité absolue de disposer de compétences techniques précises.

4. Quel avenir pour la mixité professionnelle ?

L’élargissement de l’accès des femmes à des emplois dits masculins a toujours été lié dans cette entreprise à des phases de croissance de l’activité de l’entreprise, dans un contexte de pénurie de main d’œuvre masculine, et au développement de nouveaux produits. Il s’est également inscrit dans une stratégie globale visant à stabiliser la main d’œuvre pour tenter de garantir la qualité des produits. La période actuelle, marquée par les difficultés du secteur de la mécanique et la forte progression du taux de chômage dans la zone d’emploi, n’apparaît pas forcément très favorable au renforcement de la mixité professionnelle à BOÎTEMATIQUE. Par ailleurs, le développement de la production de la nouvelle transmission va se faire cette fois sans embauche supplémentaire de personnel et avec un effectif qui va diminuer en raison de la poursuite de la politique de rationalisation du travail et de la production. Enfin, les discours positifs sur l’accès des femmes aux postes masculins ne repose plus une volonté stratégique de la direction de développer la mixité professionnelle.

Il existe cependant un certain nombre de conditions et d’éléments plutôt favorables à la mixisation dans l’entreprise : la banalisation de la place des femmes dans l’activité de production et leur installation durable dans l’emploi constitue un premier aspect ; l’exigence croissante de qualité et les effets positifs de la présence des femmes en termes de relationnel constituent également des aspects plutôt favorables à la féminisation ; par ailleurs, l’objectif d’amélioration continue de la santé et de la sécurité au travail qui se traduit par des investissements visant à assurer une meilleure ergonomie des postes pourrait également faciliter l’accès des femmes à certains métiers. Enfin, la baisse annoncée de la population active alsacienne et le risque de pénurie de main d’œuvre qui se profile pourrait aussi avoir un impact positif pour l’emploi des femmes dans cette entreprise, mais à un horizon plus lointain. Personnes rencontrées :

- le directeur des ressources humaines (ouvriers) - le directeur de la production

F. CONTACTEL

Cette grande entreprise de 2300 personnes a son principal site de production et son siège dans une zone industrielle située à une quarantaine de kilomètres de Strasbourg. Contactel fabrique et vend des matériels d’installations électriques (tableaux de distribution, boîtiers électriques) à usage domestique ou du secteur tertiaire et connaît une très forte croissance depuis de nombreuses années. Elle emploie un personnel en grande majorité féminin.

Les différentes visites que nous avons effectuées à Contactel depuis plus de 15 ans, nous permettent de dire qu’il existe dans cette entreprise une volonté affirmée d’améliorer globalement le niveau des compétences par des recrutements ou de la formation interne. Cette politique a quelque peu favorisé la qualification du personnel féminin mais n’a permis que très ponctuellement l’accès de femmes à des postes masculins. En 1996, nous avions concentré nos investigations sur l’usine qui était dirigée par une femme, et dans laquelle se trouvaient également une femme responsable d’atelier et deux femmes chefs d’équipe. C’est principalement cette unité qui a fait l’objet de la réenquête.

1. L’évolution de l’entreprise dans son contexte

Le groupe auquel appartient Contactel comprend 6700 personnes dont 3500 en France et 3200 à l’étranger, principalement en Allemagne, Pologne, Russie, Chine et Australie. Il se situe parmi les trois premiers mondiaux dans son secteur d’activité. Ce groupe connaît depuis une quinzaine d’années une très forte croissance interne et externe et cette évolution est mondiale.

Durant les années 90, le développement de Contactel s’est réalisé sur le site de production principal en Alsace qui comprend le siège et deux usines avec la construction de 3 autres usines (une usine a été fermée depuis). Les effectifs sont ainsi passé de 1000 à 2300 salariés entre 1990 et 2000 avec des recrutements annuels de l’ordre de 100 à 150 personnes dont deux tiers à la production, (principalement des femmes), et un tiers pour les techniciens et l’encadrement (presque exclusivement des hommes). Parallèlement, Contactel a étoffé au niveau national son réseau commercial qui dépasse les 400 personnes à ce jour.

Contactel s’est également attaché à développer les conditions d’une organisation du travail qui s’adapte à ces besoins croissants de production. Dès 1982, un accord a institué une réduction du temps de travail hebdomadaire à 35 heures pour la production, et en 1991 il a été signé un accord sur l’annualisation du temps de travail (1 820 heures). Ce dernier a été complété en 1994 par la mise en place du travail en 3 équipes et plus récemment en 4 équipes. En 1997, la réduction du temps de travail a été étendue au personnel administratif. Contactel a recours à un volant important d’intérimaires en production, principalement des femmes, ce qui lui donne une grande flexibilité.

Comme aucune extension n’était plus possible sur le site, Contactel a racheté des usines à partir de 2000, par prises de participations, afin d’élargir l’offre de ses produits. L’entreprise dispose ainsi de 3 sites en Alsace, un sur Grenoble et compte 3500 salariés en France.

Les effectifs en Alsace se sont stabilisés depuis le rachat des 2 autres sites. En 2002, les difficultés de la conjoncture ont conduit l’entreprise à réadapter ses structures. Le « plan 24 » organise, jusqu’en 2005, un redéploiement des effectifs sur les trois sites alsaciens et concernerait 400 personnes, hommes et femmes. Il s’agit de favoriser une mobilité fonctionnelle des salariés avec des mesures d’accompagnement permettant aux personnes concernées de jouir d’une employabilité interne mais aussi externe. Cette action touche très peu les postes de production mais est en grande majorité axée sur les postes tertiaires. Elle a pour but d’accroître les gains de productivité, plus difficiles à générer qu’en production.

Contactel a aussi un projet de mise en place d’une plate-forme logistique à côté d’un des autres sites alsaciens, qui concernerait une soixantaine de profils à trouver dans l’entreprise.