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LES MALADIES

1.1. Pemphigus vulgaire

Le PV est une maladie bulleuse auto-immune, caractérisée par la production d’autoanticorps dirigés contre les systèmes de jonction inter-keratynocytaires [13].

1.1.1. Epidémiologie [14]

Le PV affectant des individus de moins de 20 ans a été décrit en utilisant divers termes tels que « PV juvénile », « PV de l’adolescent », « PV de l’enfant » et « PV pédiatrique ». Étant donné qu'une telle terminologie est source de confusion, le terme « PV de l’enfance » est utilisé pour décrire la condition chez les personnes de moins de 12 ans et « PV de l’adolescence » chez les personnes âgées de 12 à 18 ans.

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Pemphigus vulgaris (PV) est la forme la plus courante observée chez les enfants. Bien que la prévalence du pemphigus dans ce groupe d'âge soit inconnue, la PV infantile représente environ 1,4 à 3,7% du total des cas.

1.1.2. Etiopathogénie [15]

La pathogenèse du PV repose sur les IgG ciblant les protéines desmosomales DSG1 et DSG3.

La génétique semble contribuer à la pathogenèse de la maladie, car des associations spécifiques dans la population entre PV et plusieurs gènes HLA (Human Leucocyte Antigen) de classe II ont été décrites, et des associations avec des gènes non HLA ont également été signalées. Dans l'ensemble, les allèles HLA de classe II associés au PV les plus fréquemment rapportés sont HLA-DQB1 * 0503 et DRB1 * 0402, qui sont exprimés sur les cellules présentant l'antigène.

La plupart des patients PV avec uniquement des auto-Ac DSG3 développent un phénotype à dominante muqueuse, tandis que les patients présentant une réactivité DSG1 et DSG3 présentent des lésions muco-cutanées. Cela s'explique par l'hypothèse de compensation de (DSG) desmogléines (Fig.8). Dans la peau, la DSG3 n'est exprimé qu'au niveau des couches basales, tandis que la DSG1 est exprimé dans tout l'épithélium et peut donc compenser la perte de fonction de la DSG3. Cependant, dans la muqueuse, la DSG3 est exprimé dans tout l'épithélium, tandis que l'expression de la DSG1 est élevée dans les couches superficielles, et significativement plus faible dans les couches basales et donc la perte de DSG3 ne peut pas être compensée de manière adéquate par la DSG1. Cela explique pourquoi les patients présentant une réactivité DSG3 exclusive présentent uniquement des lésions muqueuses. Fait intéressant, la séroconversion de la réactivité DSG3 à DSG1 et vice versa peut se produire au cours de la maladie, avec une conversion correspondante du phénotype clinique du pemphigus.

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Figure 8 PV : Théorie de compensation de desmogléines [12]

1.1.3. Description clinique [12]

Les lésions buccales sont la première manifestation dans 50% à 70% des cas et surviennent chez 90% des patients au cours de la maladie.

Elles se caractérisent par des érosions douloureuses ; les cloques sont rarement intactes, probablement parce qu'elles sont fragiles et se rompent facilement.

Les zones les plus touchées sont la muqueuse buccale et palatine, les lèvres et les gencives. Les érosions sont multiples et présentes dans différentes tailles et formes irrégulières (Fig.9), elles s'étendent de façon périphérique et il y a généralement un retard dans la réépithélisation.

L'atteinte gingivale se manifeste principalement sous forme de gingivite desquamative. Les lésions peuvent s'étendre jusqu'au bord vermillon des lèvres, formant une croûte hémorragique fissurée.

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Les lésions buccales rendent l'alimentation difficile, altérant l'état général et nutritionnel. D'autres muqueuses peuvent être impliquées, y compris la conjonctive, la muqueuse nasale, le pharynx, le larynx, l'œsophage, le vagin, le pénis et l'anus.

L'atteinte orale peut persister pendant des mois avant d'évoluer vers l'atteinte de la peau ou d'autres muqueuses ; il peut également s'agir de la seule manifestation de la maladie.

Figure 9 PV : érosions des muqueuses labiales et linguales [13]

Pemphigus néonatal

Le pemphigus néonatal survient chez 30% à 45% des enfants de porteurs de PV, par le passage d'Ac maternels au fœtus à travers le placenta. Il se manifeste par des vésicules, des cloques et des érosions dès le moment de la naissance, et l'implication des membranes muqueuses et rare. Le pemphigus néonatal est transitoire et a tendance à disparaître spontanément en trois semaines, car il résulte du transfert d’Ac qui sont progressivement éliminés.

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1.1.4. Diagnostic [12, 13]

Le diagnostic de PV repose, sur :

 L’examen histopathologique qui montre un clivage épidermique et une acantholyse (Fig.10) ;

 L’immunofluorescence directe (IFD) cutanée qui met en évidence des dépôts d’IgG et de complément à la surface des kératinocytes avec un aspect en « maille de filet » (Fig.11);

 L’immunofluorescence indirecte (IFI) à la recherche d’anticorps circulants antisubstance intercellulaire (ces Ac sont positifs chez 84 % des cas publiés de pemphigus de l’enfant ayant eu une recherche d’anticorps par IFD) (Fig.12) ;  De façon plus récente, la détection d’anticorps antidesmogléine 3 (et parfois 1) par

Elisa, technique extrêmement sensible et spécifique pour le diagnostic et le suivi évolutif des pemphigus lors du traitement.

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Diagnostic différentiel

Établir le diagnostic chez les patients qui ne présentent que des lésions buccales est plus difficile que chez ceux qui ont une affection muco-cutanée. Lors du PV, les érosions buccales peuvent imiter plusieurs maladies, telles que la stomatite aphteuse, la stomatite herpétique aiguë, l'érythème polymorphe ou le syndrome de Stevens-Johnson, le lichen plan, le lupus érythémateux systémique, le pemphigus paranéoplasique et la pemphigoïde. Les cloques ne durent pas longtemps dans la bouche et la biopsie des érosions ne permet souvent pas de diagnostic. L'IFD est la méthode la plus précise pour le diagnostic du pemphigus muqueux.

1.1.5. Conduite thérapeutique [13]

Le traitement du PV de l’enfant repose habituellement, comme chez l’adulte, sur la corticothérapie générale, soit per os à la dose de 1 à 2 mg/kg par jour ou par bolus intraveineux. Dans certains cas, l’existence d’une corticorésistance, d’une corticodépendance ou d’effets secondaires importants (diabète, hypertension artérielle, prise de poids, retard de croissance, acné, hirsutisme, candidose, infections sévères...) conduisent à l’utilisation de traitements adjuvants immunosuppresseurs ou immunomodulateurs, notamment les

Figure 11 PV : IFD intensité modérée pour les marqueurs IgG et C3, distribution de fluorescence

intercellulaire, prédominant dans les couches inférieures de l'épithélium.

Figure 12 PV : IFI avec IgG intra-épithéliales intercellulaires

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immunoglobulines (Ig) polyvalentes, la dapsone, l’azathioprine, la ciclosporine et le mycophénolate mofetil.