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Planche III.2 : Etude des résolutions optimales sur images aéroportées : recherche de la

4.2 PASSAGE DU M² AU BASSIN VERSANT

Il est tentant de chercher à agglomérer ces résultats pour des surfaces plus importantes. Les études sur parcelle agricole montrent une bonne adéquation entre la lame ruisselée observée et la somme des lames ruisselées élémentaires estimées à partir des simulations de pluie (Collinet, 1985).

Pour le passage au bassin versant, Casenave affirme (communication orale) que l'on dépasse alors les limites de l'utilisation de cet outil, ce qui revient à douter du schéma d'agrégation du local au global. Pourtant plusieurs travaux internes à l'ORSTOM le préconisent.

Les travaux effectués au Sahel dans ma thèse montrent des résultats divergeants qui peuvent être résumés comme suit :

La solution habituellement utilisée pour estimer une valeur à l’exutoire consiste à utiliser une fonction de calage, relation linéaire entre valeurs calculées (somme des valeurs étendue au bassin versant) et valeurs observées (par mesures hydrologiques directes des débits à l'exutoire) de forme : (Lr.observée) = a * (Lr.calculée) + b [4.5] TRANSECT 12 0 1 2 3 4 5 6 0 500 1000 1500 Distance (m) Cla s se d e s ES E Calculé Observé TRANSECT 16 0 1 2 3 4 5 6 0 500 1000 1500 Distance (m) C la s s e des ESE

Partie II Echelles et changement d’échelle

Chapitre 4 Agrégation

où a et b sont des coefficients. Si l'on néglige le terme constant on peut alors parler de "coefficient de calage" CC entre valeurs estimées et observées :

(Lr.observée) = CC * (Lr.calculée) [4.6]

La somme des lames ruisselées élémentaires Lr et la lame totale LR observée, ont été

comparées sur sept bassins versants de trois zones : trois bassins de 98, 55 et 10 km² à Manga (Burkina Faso), deux bassins de 75 et 16 km² à Thyssé Kaymor (Sénégal) et deux bassins de 170 et 59 km² à Ndorola (Burkina Faso). Le coefficient de calage CC apparaît comme un coefficient d’abattement. Il oscille entre 50% et 90% dans les bassins des deux premières zones (gage d'une additivité possible), tandis qu’il présente une valeur très faible (7% à 30%) dans la troisième zone. L’anomalie apparente de ce troisième groupe est intéressante, car elle conduit à refuser l’utilisation systématique de la simple agrégation et contribue à s’interroger sur ses principes et ses limites.

Les raisons physiques du coefficient de calage

A supposer que les estimations de lames ruisselées (et donc d'infiltration) soient correctes sur le m² de détermination, le passage au versant, puis au bassin, se fait avec dérive par rapport au modèle additif Lri. Un versant ruisselle moins que l'ensemble de ses mètres carrés constitutifs par suite de biais entre mesure au simulateur et sous pluie naturelle, de zones propices à l'infiltration après quelques mètres de cheminement en surface, ou de concentration dans les chenaux (Planchon, 1991). Cette dérive est due à une série de processus physiques dont les plus notables sont :

- l'influence de l'amont, l'interaction de cases voisines, et l'effet cumulé des lames ruisselées : les cases ne sont pas indépendantes.

- la perméabilité en grand : processus de taille très supérieure à 1 m² : flaques, dépressions, fissuration, végétations par touffes, arborescence ... ;

- l'effet de la pente ;

- le devenir de la lame ruisselée dans les cases voisines ou lors de son parcours vers l'exutoire : pièges ou zones saturées ...

La plupart de ces processus tendent à diminuer le ruissellement qui arrive effectivement à l'exutoire et il est alors logique d'obtenir un coefficient CC inférieur à l'unité.

Quand le coefficient est proche de 1 toutes les pertes décrites précédemment jouent peu : l'additivité des processus est acceptable. Dans ce cas, certains processus de propagation des eaux ne peuvent se produire.

En particulier il est possible de montrer que le ruissellement en nappe pure et régulière est impossible au bout de quelques mètres lorsque sont observés des coefficients proches de l'unité (Puech, 1993) : au niveau de la taille d'un pixel, c'est-à-dire sur 20 à 30 mètres de long, l'écoulement doit se réduire à une succession de chenaux. Ceci est confirmé par les observations de terrain : dès la case élémentaire ces ruissellements se rassemblent en rigoles (Planchon, 1991). La vision d'une nappe continue paraît absurde. Hors cas de forte inondation, l’épaisseur d’une nappe continue ne peut être que de quelques millimètres. Dès lors elle est perturbée par les herbes, les cailloux et autres micro-dénivelées : dès les premiers mètres de parcours les écoulements se rassemblent obligatoirement en zones d'écoulements préférentiels. On passe en logique rivière et les flux vont se retrouver en quasi-totalité à l'exutoire.

Ainsi est confirmée l'une des hypothèses de base de la méthode, "le modèle retenu veut que l'eau ruisselant sur les parcelles parvienne immédiatement au chevelu hydrographique puis au collecteur principal" (Rodier et Ribstein, 1988).

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Chapitre 4 Agrégation

On voit alors apparaître deux cas possibles :

- les cas « normaux » lorsque les coefficients de calage sont raisonnablement proches de l’unité (CC entre 0.5 et 1), ce qui est observé sur beaucoup de bassins : l'additivité des processus entre le m² et le bassin versant y apparaît comme acceptable (bassins de Manga et Thyssé Kaymor). C’est le cas des zones avec croûtes de battance généralisées (cas des zones agricoles et de certains versants naturels).

- les cas « anormaux » (coefficient CC trop faible), pour lesquels l'additivité n'est plus acceptable. C’est le cas des cuirasses avec infiltration généralisée qui donnent une production globale quasi nulle à la base du versant (effet déjà indiqué par Rodier) tandis que la production locale, en haut de versant, peut être conséquente. La participation de ces zones ruisselantes au débit global est alors très faible.

4.3. DISCUSSION

L'agrégation suppose la connaissance des informations de base sur une case élémentaire, puis leur association pour définir un état relatif à une surface plus importante. Les problèmes concernent l'affectation d'une valeur numérique à une case élémentaire et la liaison entre les différentes mailles.

L’affectation d'une valeur numérique à une case élémentaire est une tâche relativement facile. Elle se ramène à un problème de caractérisation, de description statique des attributs et ne pose pas de problème majeur sinon celui de la mesure.

Par contre l'association de cases c'est à dire l'agrégation ou la désagrégation des informations pose d'emblée de graves problèmes :

D'une part, dans ce cadre on ne sait pas toujours très bien ce que l'on fait. On associe

des cases de forme géométrique, souvent carrées, qui supposent des flux de matières ou de liquide selon des faces, ce qui n'a rien de physique. On utilise des équations correctes de physique sur des schémas de liaison qui ne leur conviennent pas et l’association des flux peut alors être incohérente. Ainsi un des problèmes principaux est la méconnaissance de la liaison hydraulique entre cases voisines et donc à la caractérisation correcte des chemins de l'eau sur l'ensemble du bassin versant.

D'autre part on introduit le temps : désormais on va mélanger l'aspect spatial (descriptif

des cases) et l'aspect temporel (lien entre cases). Les liens horizontaux sont porteurs de la complexité temporelle.

Dans notre exemple, l’agrégation est apparue acceptable dans certains cas et inacceptable dans d’autres : n’étant pas généralisable elle est donc impropre. On remarquera que ce sont les résultats négatifs de nos tests qui portent l’enseignement fondamental : « l’élément qui ne marche pas, ce qui ne va pas dans le sens de ce que vous attendiez, c’est la chose la plus importante » (Feydmann cité par Klemes, 1997).

L’agrégation est rendue souvent très complexe sinon impossible par suite des non-linéarités, des hétérogénéités locales exacerbées par le changement possible de plusieurs niveaux d’organisation : du m² au bassin versant de 100 km² il y a un saut de 5 ordres de grandeur. Tant que l'on reste dans le même niveau d’organisation ou sur des niveaux voisins, l'agrégation paraît simple et possible. Mais quand on passe sur plusieurs niveaux il n'y a plus de liaison directe entre cause et effet.

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Chapitre 5 Désagrégation

CHAPITRE 5

DESAGREGATION