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Outils d’analyse

3. MOYENS ET MÉTHODES

3.3. Outils d’analyse

Une fois l’acquisition des données terminée, un traitement supplémentaire de ces ensembles de données est nécessaire pour faciliter l’analyse des configurations de flux correspondantes. Un certain nombre d’outils analytiques sont déployés dans le cadre de cette thèse, soit pour utiliser les données expérimentales acquises afin de faire des prévisions basées sur des bases théoriques, soit pour aider à mieux comprendre le phénomène physique sous-jacent.

Ces outils sont présentés dans cette section.

3.3.1. Analyse par stabilité linéaire

La théorie de la stabilité linéaire (LST) a été traditionnellement utilisée dans les études sur les instabilités hydrodynamiques à la fois dans les couches de cisaillement libre et les couches limites. C’est un outil polyvalent qui permet de prédire l’apparition d’instabilités, les longueurs d’onde et/ou fréquences associées et les taux de croissance spatiale. Il repose sur l’hypothèse qu’un écoulement de base parallèle (c’est-à-dire que l’écoulement ne varie pas dans le sens de l’amplification des perturbations) est instable aux perturbations ondulatoires infinitésimales. La formulation du solveur LST est brièvement décrite ci-dessous.

Le champ d’écoulement instantané peut être étendu comme suit: U = U + eU où U (= [u, v, w]) est l’écoulement de base qui satisfait à l’équation de Navier-Stokes constante et incompressible et eU (= [eu, ev, ew]) représente les perturbations ou les fluctuations de vitesse. Si le flux de base est supposé être parallèle et que les perturbations sont considérées comme infinitésimales et semblables à des vagues, ces perturbations peuvent être représentées par la fonction suivante,

e

U (x, y, z, t) = ψ(y)ei(αx+βz−ωt) (1)

où ψ(y) est la fonction propre de la perturbation, α et β sont les nombres d’ondes complexes dans le sens de l’écoulement et de l’envergure respectivement, et ω est la fréquence angulaire. Comme les instabilités augmentent dans le sens de l’écoulement, l’évolution du nombre d’ondes dans cette direction α (= αr− iαi) est particulièrement intéressante, cari représente le taux

de croissance des perturbations correspondant aux différents modes d’instabilité. Le nombre d’ondes dans le sens de l’envergure (�) est également complexe. Cependant, l’invariance du champ d’écoulement dans le sens de l’envergure donne i = 0. La fréquence angulaire (ω) est réelle car la formulation spatiale de la LST est appliquée ici comme déjà mentionné.

L’évolution de l’écoulement et donc des perturbations qu’il contient est régie par les équa-tions incompressibles de Navier-Stokes (voir Schlichting & Gersten, 2016, pour la dérivation). L’expansion du flux instantané est appliquée à l’équation de Navier-Stokes et tous les termes ne comportant que l’écoulement de base sont négligés. De plus, en partant de l’hypothèse de perturbations infinitésimales, tous les termes quadratiques de ces composantes fluctuantes sont également négligés. Il en résulte les équations de Navier-Stokes linéarisées qui régissent l’évolution des perturbations et qui sont données dans l’équation 2.

∇ · eU = 0 (2a)

∂ eU

∂t + (U· ∇) eU + ( eU· ∇)U = −ep

ρ + ν2Ue (2b)

Ici, ρ est la densité du fluide et ν est la viscosité cinématique. Les équations 2a et 2b représen-tent respectivement la conservation de la masse et du moment. En remplaçant la fonction de flux de la perturbation donnée dans l’équation 3.3 par l’équation 2 et en négligeant eu, ew et ep, on obtient l’équation d’Orr-Sommerfeld.

" 2 ∂y2 − α2− β2 2 − iRe(αu + βw − ω)  2 ∂y2 − α2− β2  + iRe  α 2u ∂y2 + β 2w ∂y2 # ψ(y) = 0 (3) La fonction propre ψ(y) avec les conditions limites défiées est ensuite mappée sur le domaine de Tchebychev et, en conséquence, les dérivés de deuxième et quatrième ordre sont exprimés sous forme de matrices de dérivés de Chebyshev. Ces calculs sont effectués avec l’algorithme (et la suite MatLab) fourni par Weideman & Reddy (2000). Comme indiqué précédemment, les perturbations liées aux différentes instabilités ne croissent que dans le sens du courant (x) et, par conséquent, β et ω sont tous deux fournis en entrée de l’équation. En conséquence, l’équation 3 peut être réorganisée comme un problème aux valeurs propres avec uniquement le nombre d’onde dans le sens du courant �. Ce problème est ensuite résolu selon la technique de matrice complémentaire proposée par Bridges & Morris (1984). Le facteur N d’amplification (Van Ingen,1956,2008) de chaque mode d’instabilité avec une fréquence et une longueur d’onde données λz (= 2π/βr) est évalué par l’intégrale explicitée dans l’équation 4,

N (x, λz, ω) = Z x

x0(λz,ω)

−αi(x, λz, ω)dx (4)

où, x0z, ω) est la première position où le mode d’instabilité considéré est instable. Dans les deux configurations d’écoulement étudiées, cette formulation LST est utilisée pour estimer les

caractéristiques de stabilité du champ d’écoulement respectif.

3.3.2. Decomposition orthogonal aux modes propres dans l’espace spectral

Afin de mieux comprendre les différents modes d’instabilité de la couche de mélange plane et, éventuellement, analyser la croissance de la couche, on cherche à déterminer l’organisation spatiale de l’écoulement pour une valeur fréquentielle donnée.. À cette fin, une décomposition orthogonale aux modes propres (POD) appropriée a été appliquée sur l’ensemble de la série temporelle obtenue par PIV. La POD, proposée pour la première fois par Lumley (1967), est une technique permettant d’identifier objectivement les structures cohérentes dans un écoulement turbulent. Une forme spécifique de POD appelée décomposition orthogonale propre spectrale (SPOD) (Delville et al.,1999; Towne et al.,2018) est utilisée dans cette thèse. Les modes SPOD décrivent des structures dans un flux statistiquement stationnaire qui sont cohérentes à la fois dans l’espace et dans le temps. Ici, la décomposition du tenseur trans-spectral (transformée de Fourier directe du tenseur de corrélation obtenue à partir de données expérimentales) est effectuée. Ainsi, cette méthode aboutit à des modes propres qui oscillent chacun à une seule fréquence, ce qui est avantageux pour étudier la configuration de cette thèse.

La formulation de la SPOD se trouve dans Delville et al. (1999) qui l’ont également appliquée sur une couche de mélange plane et ont observé l’organisation des structures primaires et sec-ondaires dans le premier mode. Cependant, ils ont appliqué le SPOD sur des données de vitesse acquises à partir de mesures ponctuelles par fil chaud alors qu’ici, il est appliqué pour la première fois sur des mesures de PIV corrélées dans l’espace et dans le temps. Dans un article récent, Towne et al. (2018) montrent également la formulation et la procédure de la SPOD et discutent de sa relation avec la décomposition en mode dynamique et l’analyse de résolution. En fait, une implémentation MatLab fournie par les auteurs est utilisée ici pour effectuer des mesures SPOD sur nos données expérimentales.

La méthode est maintenant brièvement décrite. Considérons une variable stochastique eQ(Ω, t) qui, dans les travaux actuels, est constituée par les fluctuations des séries temporelles acquises au moyen de la PIV. Ici, Ω représente le domaine spatial des mesures tandis que t est le temps. Dans un premier temps, les champs vectoriels de vitesse mesurés sont convertis du domaine temporel au domaine fréquentiel en utilisant une transformée de Fourier discrète (TFD) comme suit: e Q(Ω, f ) = Z −∞ e Q(Ω, t)· e−i2πftdt (5)

Le tenseur trans-spectral à chaque fréquence est alors calculé par l’équation,

S(Ω, Ω, f ) = eQ(Ω, f ) eQ(Ω, f ) (6)

représente le complexe conjugué. Le problème de valeur propre intégrale à résoudre pour décomposer le champ de flux est alors donné par l’équation 7a,

Z S(Ω, Ω, f )W (Ω)Ψ(Ω, f )dΩ = Λ(f )Ψ(Ω, f ) (7a) Θ(f ) = Z e Q(Ω, f )Ψ(Ω, f )p Λ(f )dΩ (7b)

où, Ψ(Ω, f ) est la fonction propre dépendant de la fréquence et Λ(f ) est la valeur propre cor-respondante qui est représentative de l’énergie cinétique turbulente intégrée (TKE) des fluctu-ations de ce mode particulier. La variable W (Ω) est un Hermitien à définition positive. Les vecteurs propres correspondants (Θ) sont calculés par l’équation

La méthode de Welch (1967) est utilisée ici. La série temporelle est décomposée en un certain nombre de sous-ensembles ou blocs qui se chevauchent et qui comportent chacun un nombre égal d’images (Nf r), et la TFD est calculée sur chacun de ces blocs. Les composantes de Fourier d’une fréquence particulière dans tous les blocs sont empilées et le SPOD est effectué. On obtient ainsi un nombre de modes SPOD égal au nombre de blocs à chaque fréquence. Ci-après, les notations Ψ(f, k) et Λ(f, k) seront utilisées pour désigner respectivement la fonction propre et les valeurs propres de chaque mode (k) à une fréquence particulière (f ).

La détection des structures cohérentes en rotation et l’étude de leur dynamique et de leurs interactions dues au forçage appliqué sont souhaitées. À cette fin, il est nécessaire de reconstruire les champs de vitesse à partir des modes SPOD. Ceci est fait selon l’équation 8.

e QR(Ω, t) =X f " X k Θ(f, k)Ψ(f, k)p Λ(f, k) # · ei2πf t (8)

4. DÉVELOPPEMENT ET CARACTÉRISATION