• Aucun résultat trouvé

Origine et particularités

2.2 Caractéristiques et conséquences de la dose périphérique

2.2.1 Origine et particularités

Les collimateurs présents à la sortie de la tête de l’accélérateur et les blindages pouvant éventuellement l’entourer arrêtent la majorité des photons qui ne sont pas dirigés vers le champ de traitement. Les photons restants, formant alors un faisceau, constituent le rayonnement dit «primaire» de l’accélérateur. Toutefois, à cause de la nature aléatoire des déplacements de ces particules, il existe toujours une probabilité qu’elles puissent traverser la collimation ou être diffusées dans les différents éléments de l’accélérateur et dans le patient lui-même, formant ainsi le rayonnement dit «secondaire». Puisqu’elles peuvent être dirigées hors du faisceau, ces particules peuvent déposer leur énergie dans des régions éloignées de la tumeur, formant la dose périphérique ou hors-champ. Selon son origine, le rayonnement secondaire peut être séparé en trois composantes [Xuet al., 2008], représentées ci-dessous sur la figure13.

Figure 13 – Représentation des principales sources de rayonnement hors-champ en radiothérapie.

La première composante correspond au rayonnement diffusé dans le patient et son environnement. Elle provient principalement du champ de traitement où la majorité des photons du rayonnement primaire interagissent, mais peut également provenir de la table de traitement ou des éléments proches. La seconde composante est issue des particules diffusées dans la tête de l’accélérateur, notamment dans la collimation et le cône égalisateur. Enfin, la troisième composante correspond au rayonnement de fuite à travers l’accélérateur, traversant la collimation ou d’autres parties de la tête sans être arrêté.

L’importance de ces différentes composantes évolue avec la position, et notamment avec la distance au bord du champ. La figure14, ci-dessous, représente la contribution des différentes composantes du rayonnement secondaire à la dose périphérique selon la distance au champ

Figure 14 – [Giessen and Hurkmans, 1993] Variation relative des différentes contributions à la dose périphérique en fonction de la distance au champ, pour un champ 10×10 cm2.

La diffusion dans le patient est majoritaire à proximité du champ de traitement, mais sa contribution à la dose périphérique décroît rapidement avec la distance. La contribution combinée des fuites et des diffusions dans l’accélérateur est faible à proximité du champ, mais augmente rapidement pour devenir la principale source de dose périphérique après environ 17 cm dans le cas étudié par Giessen et al.

La proportion de la dose due uniquement aux diffusions dans l’accélérateur est de 20% à 40%, selon l’appareil utilisé, l’énergie des photons, la taille du champ et la distance jusqu’à la région traitée [Kaseet al., 1983]. La contribution individuelle des fuites de l’accélérateur est toujours faible, mais augmente avec la distance jusqu’à être prédominante après 60 cm pour des champs de 10×10 cm2 et 40 cm pour des champs de 5×5 cm2 [Kaseet al., 1983].

En plus de ces trois sources de rayonnement secondaire, lorsque l’énergie des photons est suffisamment élevée, ceux-ci peuvent subir des réactions photonucléaires dans les matériaux de l’accélérateur, provoquant la production de neutrons qui irradient également à distance du champ. Ces interactions possèdent un seuil en énergie propre à chaque matériau, mais ce dernier se trouve généralement au-delà de 6 MeV. En radiothérapie, les neutrons apparaissent donc généralement pour des tensions supérieures à 6 MV, et leur contribution est considérée comme négligeable en dessous de 10 MV [Stovall, 1995]. En RCMI, la majorité des traitements sont réalisés à 6 MV et évitent ainsi la production de neutrons [Xuet al., 2008].

Énergie des photons hors-champ

À cause de la contribution importante du rayonnement diffusé dans le patient et dans l’accélérateur, le spectre en énergie des photons hors-champ peut être très différent de celui rencontré dans la région traitée. Pour un faisceau de 6 MV, l’énergie moyenne des photons dans le champ, à la profondeur où la dose est maximale, est d’environ 1.6 MeV

perdu une partie de leur énergie et la moyenne se trouve plutôt entre 0.2 MeV et 0.6 MeV

[Scarboroet al., 2011,Edwards and Mountford, 2004]. Nous verrons par la suite en 2.3.1que

cette différence pose d’importants problèmes pour la mesure de la dose périphérique.

Variation avec la position de mesure et les paramètres d’irradiation

Du fait de son origine, la dose périphérique est loin d’être distribuée de manière homogène dans le patient, impliquant un risque de pathologie secondaire très largement variable selon la localisation du traitement et la région périphérique considérée. Cette dose peut, de plus, différer selon les paramètres d’irradiation et en particulier selon la taille du champ et l’énergie utilisée. De nombreuses études, toutefois, ont pu examiner le comportement de cette dose grâce à des mesures réalisées sur fantômes ou in vivo5

, et observer de nombreux points communs entre les différentes modalités de traitement.

Quels que soient l’énergie, la taille du champ et le milieu irradié, la dose périphérique décroît avec la distance au bord du champ [Sherazi and Kase, 1985]. La majorité des études s’accordent pour affirmer qu’elle suit une décroissance exponentielle avec la distance, liée à l’atténuation des photons dans le milieu [Kaseet al., 1983, Mutic and Klein, 1999,

Balasubramanianet al., 2006, Stern, 1999, Stovall, 1995]. Cette décroissance est illustrée

ci-dessous sur la figure15, tirée d’une étude de Shahban et al., dans laquelle la dose périphérique est mesurée à plusieurs profondeurs dans une cuve d’eau irradiée par une source de Cobalt 60.

Figure 15 – [Shahbanet al., 2017] Évolution de la dose avec la distance au bord du champ, pour différentes profondeurs, dans le cas d’un fantôme d’eau irradié par une source de Cobalt 60 en champ 7×7 cm2. La valeur est donnée en pourcentage de la dose mesurée dans l’axe du faisceau pour chaque profondeur.

Les auteurs, ainsi que de nombreux autres, mettent également en évidence une augmentation de la dose périphérique avec la profondeur, visible ci-après sur la figure 16

pour plusieurs tailles de champs et deux distances latérales.

Figure 16 – [Fraass and Geijn, 1983] Évolution de la dose avec la profondeur pour différentes tailles de champ, à 5 cm (a) et à 20 cm (b) du bord de champ, dans le cas d’un fantôme d’eau irradié par un faisceau de 10 MV ou une source de Cobalt 60. La valeur est donnée en pourcentage de la dose maximale mesurée sur l’axe du faisceau pour chaque taille de champ.

Puisque l’origine des rayonnements secondaires est différente à proximité et à distance du champ, la variation de la dose périphérique avec la profondeur dépend directement de la distance par rapport à la zone de traitement. On voit sur la figure16que lorsque la mesure est effectuée à proximité du champ, la dose tend à augmenter avec la profondeur [Kaseet al., 1983,

Fraass and Geijn, 1983, Shahbanet al., 2017]. Cette augmentation est due, premièrement, à

cette distance) du fait de la divergence du faisceau. On observe ainsi une augmentation plus rapide avec la profondeur pour les grands champs, pour lesquels l’angle d’ouverture est plus important [Fraass and Geijn, 1983]. De plus, en profondeur, beaucoup de photons ont déjà perdu une partie de leur énergie et les diffusions Compton sont davantage susceptibles de les diriger hors de l’axe du faisceau [Shahbanet al., 2017]. À distance du champ, la figure16(b) montre que l’augmentation est moindre avec la profondeur. Puisque la proportion de la dose provenant des fuites et des diffusions dans la tête de l’accélérateur est plus élevée, l’effet des diffusions dans le faisceau observé précédemment est diminué. À des distances encore plus élevées, certains auteurs mettent en évidence une diminution de la dose périphérique avec la profondeur, due à l’atténuation des photons dans le milieu, qui proviennent alors presque exclusivement de la tête de l’accélérateur [Kaseet al., 1983]. Plusieurs études, de plus, relèvent une dose à la peau très élevée provenant des électrons de contamination, issus des interactions des photons dans la tête de l’accélérateur [Fraass and Geijn, 1983,Kryet al., 2006].

De manière générale, un plus grand champ équivaut à une plus grande dose périphérique

[Kaseet al., 1983, Kryet al., 2017, Choforet al., 2010]. Lorsque les mâchoires sont écartées

pour augmenter la taille du champ, la surface de diffusion des photons sur la collimation devient plus importante et la dose périphérique augmente, même à grande distance. Cet effet géométrique est illustré ci-après sur la figure17.

Figure 17 – Illustration de l’effet de la taille du champ sur les diffusions dans le collimateur : un champ plus grand équivaut à une plus grande surface de diffusion vers les régions hors-champ.

On a, de plus, davantage de diffusions dans le patient à cause du volume irradié plus important et donc une augmentation de cette composante du rayonnement secondaire

[Kaseet al., 1983]. Cet effet est tout de même moins visible à grande distance du champ,

lorsque les fuites prennent plus d’importance [Stovall, 1995,Fraass and Geijn, 1983].

Finalement, les études relèvent peu de variations avec l’énergie des photons émis

[Kaseet al., 1983, Balasubramanianet al., 2006, Stovall, 1995], avec tout de même une

augmentation pour les traitements à haute énergie due à la présence de neutrons

[Howellet al., 2006]. Dans une étude des doses périphériques délivrées par un linac

équipé d’un collimateur multilame avec une tension de 6 MV, Balasubramanian et al. évoquent, à 10 cm de profondeur, des doses équivalentes à 0,11 % de la dose dans l’axe à 20 cm du champ et 3,42 % à 5 cm, cette dernière valeur pouvant atteindre jusqu’à 5,03 % en présence

d’un filtre en coin. Pour un faisceau de 15 MV, les doses correspondent à 0,14 % de la dose dans l’axe à 20 cm, 3.07% à 5 cm, et 5,56 % avec un filtre en coin [Balasubramanianet al., 2006].

Bien qu’ils puissent être très variables selon les conditions d’irradiation, la plupart des études rapportent des niveaux de dose hors-champ de l’ordre de quelques pourcents de la dose délivrée à la tumeur, équivalents à quelques cGy, sur des régions pouvant tout de même être étendues [Fraass and Geijn, 1983,Choforet al., 2010].