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Influence des modalités d’irradiation sur la dose périphérique

2.2 Caractéristiques et conséquences de la dose périphérique

2.2.2 Influence des modalités d’irradiation sur la dose périphérique

Puisqu’il résulte notamment du passage des particules à travers la tête de l’accélérateur, le rayonnement secondaire dépend grandement de la structure de la machine utilisée et des paramètres d’irradiation. La dose hors-champ, quant à elle, est également liée au temps d’irradiation : si une modalité de traitement nécessite un temps plus long pour délivrer une même dose à la tumeur, alors la dose périphérique due aux fuites de la tête de la machine est susceptible d’augmenter. Or, les techniques avancées de radiothérapie modifient grandement la manière dont la dose est délivrée à la tumeur, à l’aide d’un ensemble varié d’accélérateurs, et présentent ainsi des niveaux de dose hors-champ très différents. Cette section dresse un rapide panorama de la dose périphérique rencontrée dans les diverses modalités de traitement.

RCMI

Dans une étude publiée en 2005, l’équipe de S. Kry rapporte que la dose périphérique associée aux traitements en RCMI est plus importante que pour les traitements en RC3D, à cause du nombre plus élevé d’unités moniteur (UM) nécessaires [Kryet al., 2005,Purdy, 2008,

Rubenet al., 2011]. Une unité moniteur, propre à chaque accélérateur, est une quantité de

rayonnement proportionnelle à la dose délivrée par la machine dans des conditions de référence. Puisque les techniques de RCMI ont notamment recours à une atténuation du faisceau pour moduler son intensité, un nombre d’UM plus élevé est nécessaire pour délivrer une même dose à la tumeur. Une augmentation du nombre d’UM signifie par conséquent une augmentation du temps d’irradiation (pouvant aller jusqu’à 2 à 10 fois le temps nécessaire en RC3D [Followillet al., 1997, Reftet al., 2006]), et donc davantage de dose due aux fuites. Le temps nécessaire est largement plus élevé pour l’irradiation ensliding window qu’en step and shoot, avec une différence pouvant aller jusqu’à un facteur 14 entre les deux techniques

[Sharmaet al., 2006].

Dans la même étude de 2005, Kry et al. indiquent que la RCMI nécessite, dans le cas du traitement du cancer de la prostate, entre 3,5 et 4,9 fois plus d’UM que la radiothérapie 3D conventionnelle. Ces observations sont confirmées par le rapport TG-158 de l’American Association of Physicists in Medicine (AAPM), qui indique tout de même que le mode d’irradiation «Flattening Filter Free» (FFF, sans cône égalisateur) diminue le niveau de dose périphérique en réduisant le nombre d’éléments diffusants

[Kryet al., 2017]. L’utilisation d’un MLC est également susceptible de réduire les doses

périphériques d’un facteur supérieur à 2 [Mutic and Klein, 1999]. À l’inverse, l’utilisation d’accessoires tels que les filtres en coin est susceptible de les augmenter d’un facteur 2 à 4

[Sherazi and Kase, 1985,Balasubramanianet al., 2006].

concernés par les faibles doses [Chargari and Cosset, 2013, Purdy, 2008], en particulier à cause du nombre plus important de faisceaux utilisés [Wang and Xu, 2007]. L’augmentation du temps d’irradiation et des volumes irradiés occasionnent une augmentation de la dose pour de nombreux organes à distance du champ [Howellet al., 2006]. Pour un traitement de la prostate, à 40 cm du champ, Wang et al. rapportent une dose pouvant être jusqu’à 3 à 5 fois plus élevée en RCMI qu’en RC3D [Wang and Xu, 2007] ; pour des traitements de la tête et du cou, l’équipe de D. Verellen estime une dose corps entier de 1969 mSv pour la RCMI contre 242 mSv pour la RC3D, ce qui représente une augmentation d’un facteur 8 du risque de second cancer [Verellen and Vanhavere, 2000]. Dans le cas des traitements pédiatriques, Klein et al. estiment que la dose proche du champ (à moins de 10 cm) est plus faible en RCMI qu’en RC3D, à cause des tailles de champ utilisées, généralement plus faibles, qui entrainent donc moins de diffusions dans le patient [Kleinet al., 2006]. En revanche, cet effet s’estompe à plus grande distance face à l’augmentation du nombre d’UM nécessaires, et la dose devient plus importante.

De manière plus générale, les doses périphériques observées en RCMI diffèrent grandement d’un traitement à l’autre. Tirée du rapport TG-158 de l’AAPM, la figure 18

ci-après représente l’évolution de la dose efficace hors-champ, par gray délivré à la tumeur, en fonction de la distance, pour différents traitements en RCMI (et un en tomothérapie).

Figure 18 – [Kryet al., 2017] Dose efficace (mSv/Gy) pour différents traitements en RCMI, en fonction de la distance au bord du champ. L’astérisque indique un traitement avec une forte modulation d’intensité, et les courbes continues représentent l’étendue empirique des doses périphériques associées à ces traitements.

Non seulement les valeurs de dose, à une même distance du champ, sont très différentes selon l’énergie des photons, la localisation de la tumeur et la machine utilisée, mais cette différence tend également à s’accroître avec la distance. Les traitements en RCMI sont donc associés à des doses périphériques très variées, et une même modalité de traitement ne signifie pas nécessairement une dose périphérique équivalente. Joosten et al. estiment,

notamment, que la dose périphérique peut varier d’un facteur 9 à 10 d’un modèle de linac à l’autre [Joostenet al., 2011].

Stéréotaxie

Malgré des tailles de champ largement plus faibles qu’en RCMI, la stéréotaxie, elle aussi, augmente les volumes concernés par les faibles doses [Chargari and Cosset, 2013]. Elle accroît de manière importante la dose périphérique [Shepherdet al., 1997], jusqu’à des niveaux pouvant atteindre 4 fois ceux observés en RCMI pour des traitements par CyberKnife

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[Pettiet al., 2006]. Également tirée du rapport TG-158 de l’AAPM, la figure

19 ci-après représente l’évolution de la dose hors-champ par gray délivré à la tumeur en fonction la distance, pour différents traitement en stéréotaxie.

Figure 19 – [Kryet al., 2017] Dose (mSv/Gy) pour différents traitements en stéréotaxie, en fonction de la distance au bord du champ. Les courbes continues représentent l’étendue empirique des doses périphériques associées aux traitements en RCMI (reportées de la figure

18).

De même que pour les traitements par RCMI (figure18), on observe une grande disparité dans les doses périphériques d’une configuration à l’autre, et les écarts augmentent avec la distance au champ. On constate, toutefois, que les doses périphériques mesurées pour les traitements stéréotaxiques sont généralement plus élevées que celles obtenues en RCMI. Cette augmentation est principalement due aux fuites et aux diffusions dans le collimateur

[Pettiet al., 2006, Vlachopoulouet al., 2011], et la dose hors-champ est ainsi directement

proportionnelle au nombre d’UM à partir de 40 cm du champ [Pettiet al., 2006]. Le nombre d’UM nécessaires à un traitement par CyberKnife

®

est, de plus, supérieur à celui nécessaire pour les autres modalités de traitement, entrainant une dose hors-champ 2 à 5 fois plus élevée que pour le GammaKnife

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L’installation d’un blindage supplémentaire dans le Cyberknife

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peut, toutefois, diminuer la dose jusqu’à 59% à moins de 30 cm du champ et entre 20% et 55% au-delà

[Chuanget al., 2008]. La dose périphérique est également plus faible pour des modèles plus

récents du CyberKnife

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[Delabyet al., 2016].

Dans le cas des traitements par GammaKnife

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, les doses proches du champ sont supérieures à celles observées pour le CyberKnife

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ou pour des accélérateurs linéaires conventionnels. En revanche, à distance du champ, Zytkovicz et al. rapportent que les doses périphériques sont bien plus faibles que dans le cas du CyberKnife

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. Notamment, pour un traitement occulaire, les doses mesurées au pelvis peuvent être inférieures d’un ordre de grandeur à celles obtenues avec le CyberKnife

®

[Zytkoviczet al., 2007].

Arcthérapie

En comparaison à la RCMI et de la stéréotaxie, les études sur le VMAT sont relativement peu nombreuses. Le traitement en VMAT, du fait de la rotation du faisceau, augmente la composante de diffusion dans le patient et présente des doses plus élevées à proximité du champ par rapport à la RCMI, pour laquelle les doses dans les organes éloignés sont plus importantes à cause des fuites de la tête de l’accélérateur [Poetaet al., 2015]. De manière générale, les doses hors-champ semblent tout de même plus faibles qu’en RCMI

[Hauri and Schneider, 2019, Blaiset al., 2012, Krishnanet al., 2019], toujours en raison d’un

temps d’irradiation moins important. Le rapport TG-158 de l’AAPM relève, pour le traitement de la prostate, 16% à 39% d’UM en moins par rapport à la RCMIstep and shoot, et 42% à 68% d’UM en moins par rapport à l’irradiation ensliding window [Kryet al., 2017].

Tomothérapie

Enfin, le niveau de dose hors-champ en tomothérapie est similaire à celui de la RCMI, également à cause du temps important nécessaire à l’irradiation [Meekset al., 2002], pouvant être jusqu’à 15 fois plus élevé qu’en RC3D pour délivrer une même dose à la tumeur

[Ramsey, 2006].