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Toute organisation doit être structurée

1.1 La nécessité d’organiser

Dès qu’une action atteint un certain degré de complexité ou qu’il s’agit d’action collective, il est nécessaire d’organiser, c’est-à-dire de diviser et coordonner. Cette double exigence

(division et coordination des tâches) est le fondement de la structure.

Le travail de l’organisateur (créateur de structure) s’apparente au travail de l’architecte. L’architecte doit agencer les pièces de l’immeuble, c’est-à-dire organiser l’espace (qui est dans ce cas le moyen) pour assurer un certain nombre de fonctions (réception, préparation des repas, sommeil, etc.) tout en réalisant une cohérence d’ensemble. Le plan représente l’architecture retenue.

De façon comparable, le travail de l’organisateur consiste à agencer la répartition des tâches pour assurer les différentes fonctions permettant à l’entreprise de fonctionner. L’organigramme représente de façon formelle l’organisation retenue.

L’organisation suppose donc division et coordination des tâches. La structure va matéria-liser cette division et assurer la coordination par des mécanismes appropriés.

La structure matérialise les principes d’organisation : division et coordination des tâches.

1.2 Il y a de nombreux choix à faire pour structurer

Longtemps, l’étude des structures est restée marquée par une approche très normative privilégiant un aspect particulier : l’unité de commandement chez Fayol avec la

préconi-sation d’une structure hiérarchique comme structure idéale, la compétence fonctionnelle chez Taylor avec la préconisation d’une structure fonctionnelle comme structure idéale !

La théorie contemporaine, et notamment celle de Mintzberg qui a dressé une remarquable

synthèse des travaux, privilégie une approche analytique contingente qui définit les diffé-rents paramètres à combiner pour élaborer une structure, non pas idéale mais acceptable dans un contexte donné.

Pour structurer l’organisation, c’est-à-dire déterminer la composition des éléments et leurs interrelations, plusieurs choix fondamentaux doivent être réalisés.

a) Quelles frontières ? La frontière de l’organisation

Les choix d’internalisation/externalisation définissent les frontières de l’organisation. En

effet, il s’agit de choisir si telle ou telle activité (ou fonction) doit être exercée par l’organisation elle-même (en interne) ou s’il est préférable de les faire exécuter à l’extérieur de l’entreprise selon des modalités contractuelles les plus diverses. De tels choix sont déterminés à la fois par : – des considérations stratégiques : démarche de la chaîne de valeur qui conduit à externaliser les

activités peu créatrices de valeur, nécessité de recourir à des alliances pour accéder à certains marchés, à certaines technologies ou disposer d’un pouvoir de négociation suffisant, etc. ; – des considérations de techniques productives et/ou des considérations financières :

économies d’échelle, taille critique de certains équipements nécessitant des alliances, éventuellement entre concurrents ;

exemple

Dans le domaine automobile où Renault et PSA construisent en commun des éléments de moteur qui sont ensuite montés sur des automobiles en concurrence.

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oute reproduction non autorisée est un délit.

– des considérations plus strictement organisationnelles liées à l’arbitrage coûts de transaction/

coûts d’organisation et à la dynamique des relations d’agence, notamment arbitrage entre la régulation contractuelle du marché et la régulation hiérarchique de l’organisation.

Ce qui est internalisé relève de l’organisation, donc de la régulation organisationnelle, ce

qui est externalisé relève de la régulation contractuelle (selon les modalités les plus diverses :

filiale, franchise, marché négocié, marché concurrentiel « pur », etc.).

De fait, l’époque contemporaine est marquée par le développement de structure en réseau où la frontière organisationnelle est floue  : logiques contractuelles et logiques organisa-tionnelles se complètent (exemple : filiale commune, franchise). La structure « interne » de l’entreprise doit alors prendre en charge des relations externes qui doivent être coordonnées et contrôlées sur un mode plus organisationnel que contractuel.

exemple

Le GIE Airbus commercialise des avions fabriqués par le consortium où chacun des partenaires prin-cipaux garde son autonomie, contracte avec le GIE pour assurer la fourniture d’éléments (ailes, fuse-lage, aménagements intérieurs, etc.), mais est en fait intégré dans une logique organisationnelle d’ensemble qui recouvre les liens contractuels et, in fine, pose le problème de l’intérêt de l’internalisa-tion des activités de producl’internalisa-tion.

La structure, lieu de la régulation organisationnelle, doit intégrer des éléments de régulation contractuelle.

b) Quel découpage ? La départementalisation et la structure

La départementalisation correspond à la manière dont les activités sont réparties dans l’entreprise. Longtemps, le découpage des activités était le seul critère retenu pour analyser la structure d.

Historiquement, Fayol retient un découpage par fonctions qui privilégie l’unité de

comman-dement. Taylor préconise un découpage qui met en avant la compétence technique et

la spécialisation. L’évolution des grandes entreprises, notamment General Motors sous l’impulsion de A. Sloan(1), mais aussi Dupont de Nemours et General Electric étudiés par

A. Chandler(2), les pousse à développer des activités très diversifiées sur des marchés non

homogènes. La départementalisation repose alors sur des couples produit-marché. Cette organisation multidivisionnelle (appelée « M Form » par O. Williamson(3)) va être la forme prédominante de nombreuses grandes entreprises dans les années 60-70 avant qu’elles n’effectuent un recentrage sur leur métier de base dans les années 80.

L’essor de grands projets a conduit à développer d’autres formes de découpage du travail (telles que la structure matricielle, l’organisation par projet, etc.) qui permettent de structurer les actions de groupes de travail temporaires devant réunir des compétences très diverses. L’effort contemporain d’analyse théorique a porté sur les facteurs poussant à tel ou tel type de découpage, plutôt que sur la recherche d’une modalité privilégiée de départementalisation. Les représentations structurelles qui en découlent abandonnent même la représentation classique sous forme d’organigramme, tant le découpage des activités paraît moins important que la cohérence d’ensemble des paramètres de structuration.

(1) A. Sloan, Mes années à la General Motors Hommes et Techniques, 1964. Traduction de My Years with General Motors, 1963. (2) A. Chandler, Stratégies et structures de l’entreprise, Éditions d’Organisation, 1972. Trad. de Strategy and Structure, 1962. (3) O. Williamson, The Economic Institutions of Capitalism, The Free Press, 1985.

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c) Quel degré de spécialisation ? La spécialisation du travail

La spécialisation d horizontale est la forme prédominante de la division du travail ; elle

correspond au découpage des tâches dans l’ordre séquentiel de leur réalisation tout au long d’un processus de fabrication. La spécialisation horizontale améliore la productivité.

La spécialisation verticale correspond à la séparation de la réalisation du travail de son

administration, de son contrôle ; autrement dit la spécialisation verticale traduit l’exis-tence d’un pouvoir hiérarchique.

La définition de ces deux axes de spécialisation du travail, horizontal et vertical, permet de distinguer :

l’élargissement du travail consiste à déspécialiser horizontalement le travail, c’est-à-dire

à intégrer à un poste de travail des tâches au préalable attribuées à plusieurs postes de travail le long de la même séquence de production ;

l’enrichissement des tâches consiste à intégrer à un poste de travail les tâches de contrôle,

éventuellement de préparation (planning, ordonnancement, etc.), préalablement assurées par un membre de la hiérarchie.

exemple

Des ouvriers qui installaient des éléments de tableau de bord étaient contrôlés par un contremaître et avaient des séquences de travail préparées par un chef d’atelier ; après enrichissement de leur poste de travail, ces ouvriers se voient confier le matin un programme global de travail : c’est à eux d’organiser dans le détail leur journée, de contrôler leur travail et de le rectifier éventuellement.

d) Quel degré de décentralisation ? La décentralisation verticale et horizontale

Ces deux paramètres concernent la délégation de pouvoir et sont donc conditionnés par les modes de direction (cf. chapitre 6).

La centralisation peut se définir par la concentration de tous les pouvoirs de décision en un

seul point de l’organisation, alors qu’une structure est décentralisée lorsque le pouvoir est dispersé entre de nombreuses personnes.

A priori, la centralisation est le mécanisme le plus puissant pour coordonner les décisions

dans l’organisation, mais la décentralisation d est nécessaire pour trois séries de raison : – les limites cognitives du décideur : un seul responsable ne peut pas comprendre toutes

les décisions, ni traiter toutes les informations que les systèmes d’information sophis-tiqués font remonter jusqu’à lui ;

– la recherche d’un temps de réaction rapide aux conditions locales : plus la décision est

décentralisée plus la réaction de l’organisation sera rapide (exemple : une grande banque

française a eu pour thème publicitaire : « C’est oui ou c’est non, mais c’est tout de suite », pour valoriser le fait que le pouvoir d’accorder un crédit dépendait de l’interlocuteur que le client avait en face de lui) ;

– la motivation des individus : décider est un facteur de motivation.

Toutefois, il convient de souligner que décentralisation et centralisation sont des situa-tions extrêmes d’un continuum de situasitua-tions où les décisions sont plus ou moins centra-lisées/décentralisées par la combinaison de deux facteurs : le « lieu » de décentralisation et l’intensité de la décentralisation.

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La décentralisation verticale consiste à transférer le pouvoir formel de décision (en totalité

ou en partie) vers le bas de la ligne hiérarchique, c’est-à-dire vers le lieu d’exécution de la décision.

La décentralisation horizontale est le passage du contrôle des processus de décisions à des

personnes situées en dehors de la ligne hiérarchique. Ce sont des individus en position de conseil ou de support logistique qui ont un pouvoir formel sur les décisions.

Les choix de décentralisation/centralisation sont largement interdépendants avec les mécanismes de contrôle, de coordination et d’animation.