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et leur comportement

2. Il faut manager les acteurs

Depuis les analyses sociologiques et en particulier celle de Crozier et Fridberg dans L’acteur

et le système, il apparaît nécessaire de manager, à deux niveaux et de manière combinatoire,

l’individu et le groupe.

2.1 Il faut manager l’acteur en tant qu’individu

Un individu dans une entreprise est un rouage nécessaire du fonctionnement général ; il doit coopérer pour travailler avec les autres membres de l’organisation mais il n’en conserve pas moins ses valeurs et ses objectifs, sa sensibilité et ses comportements, face aux différentes situations dans lesquelles il va se trouver.

Il doit réaliser ses buts, se sentir reconnu et valorisé tout en s’intégrant dans un groupe qui peut avoir d’autres orientations et d’autres comportements.

Il faut donc tenir compte du rôle de l’individu dans l’organisation, de sa responsabilité mais aussi analyser les influences de l’organisation sur l’individu.

Le rôle, le comportement, et la perception de l’individu dans nos organisations modernes posent certains problèmes. Par exemple, l’individu est-il responsable de ses gestes au sein d’une organisation ou est-ce l’organisation elle-même qui doit porter le blâme des gestes posés ? Certains analystes perçoivent l’organisation comme néfaste à l’individu. Au sein de larges organisations, l’homme perdrait-il son individualité ? Que reste-t-il de l’individu une fois qu’il intègre une organisation ?

a) Les différents angles d’approche de l’individu

Aujourd’hui, pour comprendre les attitudes et les comportements des individus en tant que tels et dans une organisation, il est nécessaire de croiser plusieurs domaines :

– la physiologie humaine : les comportements sont fonction des besoins biologiques de

l’homme ; il s’agit donc pour les entreprises de les prendre en compte dans les conditions de travail pour limiter les accidents, les maladies, la fatigue ;

– la psychologie humaine : ce domaine d’analyse essaie de comprendre les mécanismes qui

enclenchent les comportements pour remédier aux dérives ; la psychologie délimite des « normes » qui sont des modèles de conduite dans un système de valeurs accepté par une société : le « normal » renvoie à des règles, à des conventions, nécessaires au sein d’une organi-sation qu’un manager utilise pour « cadrer et recentrer » les comportements des acteurs. Bien sûr, toutes les variations par rapport aux normes ne relèvent pas de mesures coercitives ; – la sociologie : l’étude des sociétés et des mécanismes qui amènent les individus à adopter

tel ou tel comportement permet de mieux comprendre les réactions des acteurs au sein des organisations, en fonction du contexte et du cadre social de l’entreprise.

Ainsi, la personnalité, les attitudes individuelles et collectives des acteurs, mieux comprises et analysées, peuvent être gérées et canalisées.

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b) Le rôle de l’individu dans l’organisation

De manière formelle

On assigne à tout individu acteur d’une organisation, une place avec un rôle, des tâches et une certaine étendue de responsabilité :

fonctions, tâches : ensemble d’opérations, de réflexions et d’actions liées à un domaine

de la gestion (par exemple, commercial ou financier) nécessaire pour la réalisation de l’activité de l’entreprise, en liaison avec d’autres fonctions ;

responsabilité : délimitation d’une zone d’activité, de travail dans laquelle l’individu

possède une marge de manœuvre pour décider et agir seul et avec l’équipe qu’il dirige ; l’individu responsable devra rendre compte de ses résultats, justifier de ses choix pour conserver la confiance accordée et poursuivre son action.

Cette description objective rationnelle n’est pas suffisante pour expliquer la réalité du comportement des acteurs au sein des organisations.

De manière réelle

Les analyses menées depuis une cinquantaine d’années mettent en évidence les dimensions sociologique et psychologique des individus :

– ce sont les individus qui, au sein des organisations, quelle que soit leur fonction assignée,

décident, agissent et déterminent les résultats et la performance de l’entreprise ;

– les choix des individus sont fonction de leurs valeurs. Il faut tenir compte de l’identité, de

la personnalité des individus, pour comprendre leurs attitudes et leurs comportements réels, au-delà de ce que l’on attend « théoriquement » d’eux ;

– la participation des individus à une organisation se fait sur une base volontaire, plus ou

moins influençable. Pourquoi un individu accepte-t-il de participer volontairement à une action dans une organisation ? Il s’engage pour des motifs personnels de salaire, de profit, de reconnaissance, de pouvoir…, car l’organisation lui permet de satisfaire ses désirs ; – les individus participeront à l’organisation s’ils estiment qu’elle sert leurs objectifs et

leurs intérêts et s’ils estiment que les bénéfices retirés de cette participation sont plus

élevés que ses coûts ;

– les individus agissent en fonction de l’information limitée qu’ils ont et de leurs

représen-tations qui peuvent s’avérer inefficaces pour leur intérêt.

Il faut aussi tenir compte des interactions entre l’individu et l’organisation.

Un individu au sein d’une organisation se construit, au fur et à mesure du temps, des situa-tions et de l’expérience, un réseau de relasitua-tions, des habitudes et des comportements qui peuvent être un peu « décalés » voire « déviants » du cadre qui lui a été fixé.

Par exemple, M.  Crozier explique très bien que, si un acteur délaisse une partie de son pouvoir ou de son autorité, il se crée des zones d’incertitude « récupérables » par d’autres acteurs comme leviers de pouvoir.

Une zone d’incertitude est une partie d’un domaine, d’une activité, d’un service qui

comporte des indéterminations d’ordre technique ou commercial ou financier ou humain ; nécessairement, l’acteur qui maîtrise un peu mieux une zone d’incertitude par ses compé-tences, son expérience, détient alors une source de pouvoir qu’il peut utiliser pour ses intérêts ou ceux de l’organisation.

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Le rôle de l’individu dans l’organisation est donc difficile à appréhender sous toutes ses dimensions et n’est donc pas neutre pour l’efficacité de l’entreprise.

c) La gestion de l’individu dans l’organisation par la motivation

La motivation représente les forces qui agissent sur une personne pour l’amener à se comporter d’une façon précise, orientée vers un but(1).

La motivation ne peut expliquer à elle seule le niveau de productivité et les bons résultats d’une organisation, mais elle y contribue sensiblement.

Une organisation efficace doit susciter et stimuler une participation et une contribution forte de ses salariés donc gérer leur motivation de manière permanente.

Les facteurs de motivation des salariés sont nombreux et diffèrent selon les individus ; les managers peuvent agir à plusieurs niveaux pour essayer de canaliser l’énergie de ces acteurs essentiels pour l’organisation  : la satisfaction des besoins et la rémunération en sont les principaux.

La motivation par la satisfaction des besoins

Les besoins sont de nature et de niveau différents. Au travers des tâches attribuées et de l’organisation du cadre de travail, il semble nécessaire de satisfaire les besoins de tout individu, tels qu’ils sont définis par la pyramide de Maslow (chaque niveau doit être satisfait avant de passer au niveau supérieur) (cf. « Outils et méthodes ») :

– les besoins physiologiques (alimentation, habitation…) et d’hygiène (conditions de travail) ;

– les besoins de sécurité (stabilité de l’emploi, sécurité psychologique) ;

– les besoins d’appartenance (établissement de rapports interpersonnels chaleureux, intégration dans un groupe, une culture) ;

– les besoins d’estime (réussite, reconnaissance, respect individuel et collectif) ;

– les besoins d’accomplissement personnel (participation active, créativité, autonomie). Les salariés peuvent aussi être motivés par la réalisation d’autres besoins :

– les résultats : selon le modèle d’attente en action(2), la motivation au travail est déter-minée par les convictions d’une personne sur les rapports entre l’effort consenti et les résultats attendus. Les acteurs sont motivés pour travailler quand ils espèrent que leur action apportera des résultats satisfaisants pour eux et pour l’organisation ;

l’équité : selon le modèle de l’équité(3) les salariés comparent les contributions (apports,

efforts) et les résultats des actions réalisées par plusieurs personnes ; la motivation vient des rapports considérés comme justes et équitables, entre contributions et résultats, pour des personnes équivalentes.

(1) R. Kanfer, C.R. Wanberg, T.M. Kantrowitz, « Job Search and Employment: a Personality-Motivational Analysis and Analytic Review », Journal of Applied Psychology, 2001.

(2) D. Vandewalle, W.L. Cron, J.W. Slocum, « The Rule of Goal Orientation Following Performance Feedback », Journal

of Applied Psychology, 2001.

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La motivation par la rémunération

Au-delà de la satisfaction de différents besoins, la motivation est largement liée au système de rétribution, dans son niveau et dans son utilisation.

Des études ont montré que la capacité des rémunérations à motiver les individus dépend de plusieurs facteurs : le niveau, le moment opportun, le lien avec la productivité, la durabilité, l’équité, la visibilité. Le management doit donc bien gérer tous les paramètres des rémuné-rations, les types de rétribution et la manière de les utiliser, chacun ayant des atouts et des limites.

À titre illustratif, il est possible de répertorier les avantages et les inconvénients de quelques systèmes de rémunérations :

Types de rémunération Avantages Limites

Partage des gains

de productivité Pour un niveau de production et de coût précis Peut être complexe à calculer et à présenter

Intéressement Récompense la rentabilité organisationnelle Un individu influe peu sur la rentabilité de l’ensemble

Fonction des compétences Récompense de nouvelles compétences Le coût du travail augmente en raison de l’augmentation des compétences maîtrisées

Plan d’avantages flexibles Adapté à la demande individuelle Coût administratif élevé, utilisation difficile

In fine, la motivation peut être un levier important si elle est bien gérée.

2.2 Il faut manager l’acteur dans le groupe

Les travaux des sociologues ont permis d’élaborer des définitions des groupes, reprises par les gestionnaires. Il convient de s’interroger sur la manière de les gérer au sein des entre-prises afin que les groupes soient source de synergie et non de blocage.

a) Délimitation d’un groupe

Dans le champ de la sociologie, un groupe  d est appréhendé comme un collectif de personnes qui se sentent appartenir à une même entité. Un groupe n’est pas une juxtapo-sition d’individus mais un bien collectif avec un rapport au groupe, symbolique ou réel, dans lequel se tissent des communautés d’action et des pensées qui orientent les conduites des membres du groupe.

Plusieurs types de groupes sont alors repérables :

– groupe de grande taille constitué pour une durée courte sans lien particulier (par exemple

une foule dans un parc d’attraction) ;

– groupe de grande taille constitué pour une durée courte avec un intérêt commun (par

exemple un cortège de manifestants défilant dans les rues) ;

– groupe constitué pour une durée longue avec un nombre restreint de personnes ayant un objectif commun (par exemple une association) ;

– groupe constitué pour une durée longue avec un nombre restreint de personnes ayant des affinités communes (par exemple une bande de jeunes).

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En psychologie sociale, on différencie :

– le groupe de référence : « groupe auquel un individu se rattache en tant que membre car il désire s’y identifier » ; le groupe de référence a une fonction sociale, normative, protectrice ;

– le groupe d’appartenance  : groupe auquel un individu participe (par hasard ou par choix) ; le groupe d’appartenance peut ou non être aussi un groupe de référence.

Le groupe doit agir de manière organisée et coordonnée pour que l’objectif soit atteint ; chaque individu constituant le groupe doit donc coopérer, accepter de ne pas seulement prendre en compte ses propres intérêts et participer à l’œuvre commune.

Le groupe peut être permanent ou temporaire, formel ou informel, pour une fonction ou un projet, constitué de deux personnes ou d’un grand nombre.

Toute entreprise est une organisation qui doit constituer puis gérer des groupes de travail.

b) Les analyses des phénomènes de groupe

Toute action collective au sein d’une organisation est influencée par les objectifs de chaque acteur, de son degré d’information, des relations entre ces acteurs. Les divergences d’intérêts et les dissymétries d’information conduisent à des problèmes d’agence qu’il faut gérer et réduire par des procédures et des règles.

La dynamique de groupe