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En quoi de telles recommandations apportent-elles des modes de contrôle précis? Les trois premières propositions sont relativement peu opératoires alors que les deux dernières constituent une illustration concrète d'un des principes de l'étude de Calantone et alii (1995) qui nous paraissait trop peu précis jusqu'ici:

«

un facteur-clé qui facilite l'innovation est la flexibilité organisationnelle» (principe 36)128. Elles sont toutefois trop génériques pour constituer des moyens de contrôle opératoires.

Certains auteurs cherchent par ailleurs à modéliser l'incertitude sans chercher à se lancer dans une démarche complexe d'intelligence artificiellel29• C'est le cas de Newton et Pearson (1994) qui étudient la possibilité d'application de la théorie des options à la R&D. Toutefois, si la méthode qu'ils proposent permet d'enrichir l'évaluation de programmes de R&D en prenant en compte une mesure d'incertitude, la mesure de la volatilité reste difficile à faire en l'absence de marchés de référence, encore moins de marchés efficients. Cette approche n'apporte donc pas de MC spécifique. La souplesse demandée dans la formalisation ou dans l'évaluation est donc une

128Cf. 8.1.1. L'étude de Calantone et alii. « Principles ofnew product management: exploring the beliefs ofproduct

practitioners »

129 Des chercheurs comme Kimbler et Ferrell (1995) jugent même que leur propre proposition de modèle d'intelligence artificielle appliquée à la R&D est « décevante» !

notion trop générique pour nous aider à constituer un moyen de contrôle précis de PIHT même si elle paraît constituer un contexte favorable à la gestion d'un PIHT.

2.4.3.2. Dans quelle mesure un PIHT peut-il gérer une marge de manœuvre?

La question de cette souplesse est évoquée sous un angle différent par Nakhla et Soler (1996) : «comment concilier d'une part, décentralisation des décisions et marges d'autonomie au niveau des acteurs-métiers, nécessaires pour permettre au mieux le traitement des événements qui émergent tout au long des processus de conception et d'autre part l'exercice d'une solidarité susceptible de permettre la tenue des objectifs globaux du projet? ». Si la littérature n'offre pas de solution immédiate à ce problème, la gestion du « slack » ou « marge de manœuvre» constitue dès lors une réponse intéressante à cette question: cette approche a en effet pour intention de garantir une certaine créativité dans le cadre de la délégation d'autorité, tout en respectant les choix de l'organisation.

Ce concept de slack a été initié par Cyert et March (1970).

TI

peut être défIni comme «la

différence entre les paiements nécessaires pour maintenir une organisation et les ressources obtenues de l'environnement par la coalition. (u.) Le slack procure une source de revenus pour financer l'innovation qui ne pourrait être autorisée en période de difficultés »130. Etant donné

l'importance de la pression qu'engendre un PIHT, nous repérons ainsi un PC associé à l'EC « décision », à savoir « gérer le slack ».

Parmi les propositions de mise en œuvre de ce concept, l'approche de Schiff et Lewin (1973) de slack budgétaire est pertinente . Ces deux auteurs proposent en effet une revue détaillée d'activité

(<<in depth Review »), qui pratiquée à intervalles réguliers, permet de déterminer le degré de slack

nécessaire dans le déroulement du projet. De telles revues permettent de déterminer le délai qu'il est possible d'autoriser à l'activité ou

«

time-span »131.Etant donné les changements de référence

qu'un PIHT peut connaître,

«

Recourir à une ou plusieurs revues détaillées du projet (in depth Review)>> constitue donc un MC associé à ce PC «gérer le slack ».

TI

se distingue du MC

130Cyert et MaTch (1963) définissent le slack en pages 278 et 279.

Chapitre 2 : contrôle possible de PIHT - 168-

«

Evaluer la performance du processus d'un projet juste après la fin du projet» et du MC

«

Conduire un audit ex-post formel détaillé longtemps après la fin du projet» J32par le fait qu'il

n'impose pas a priori l'élément à évaluer.

Au-delà de cette approche, il apparaît même que la souplesse puisse se gérer en faisant varier l'intensité du contrôle. Levinson et Moran (1987) développent en effet les concepts de contrôle lâche

«(

loose coupling ») et de contrôle strict

«(

tight coupling »). Ils montrent en effet à l'aide

d'entretiens auprès de vingt neuf praticiens de la R&D qu'une navigation permanente entre ces deux styles de contrôle est nécessaire, spécialement au passage entre les différentes phases de R&D. Il est ainsi possible de repérer un autre MC,

«

Naviguer entre un contrôle strict et un contrôle relâché entre les phases de gestion d'un projet

»,

associé au PC

«

Gérer le slack» et à

l'EC

«

décision» de PlliT.

Midler (1992) propose enfm une typologie des attitudes à tenir dans les conflits qu'engendre la gestion de projet d'innovation: détachée, accommodante, compétitive ou encore coopérative. Combinés avec cette notion de navigation entre contrôle un strict et un contrôle relâché, ces attitudes permettent d'identifier deux MC associés au PC

«

Gérer le slack»:

«

Exercer un contrôle relâché en adoptant une attitude détachée ou accommodante

»

et

«

Exercer un contrôle strict en adoptant une attitude compétitive ou coopérative

».

Du point du vue d'un chef de PlliT, il peut donc s'agir soit de donner, soit de reprendre de la marge de manœuvre aux différentes fonctions. Si nous ajoutons la notion d'attentisme proposée lors de l'analyse des opposantsI33,

nous sommes en mesure d'ajouter à ces deux attitudes le choix de laisser les choses en l'état et de ne pas intervenir intentionnellement ! Il s'agit dans ce cas de ne pas accroître la pression mise sur le projet, sans toutefois donner plus d'espace aux acteurs du projet d'innovation: nous considérons donc que le système de contrôle possible de la décision d'un PlliT peut être enrichi des trois MC suivants:

«

Donner de la marge de manœuvre (exercer un contrôle relâché en adoptant une attitude détachée ou accommodante) »,

«

Prendre de la marge de manœuvre

132 Cf. 2.3.3.2. Certains auteurs recommandent de ne recourir à des moyens de contrôle formels d'évaluation du

résultat d'un PIHT que dans certains cas

133Cf. le MC «Faireface à court terme au peu d'envie desfonctions de prendre sous leur responsabilité les risques

(exercer un contrôle strict en adoptant une attitude compétitive ou coopérative)>> et enfin

«

Maintenir la marge de manœuvre en l'état ».

Ce dernier MC peut même être complété par un mode de contrôle proche, même s'il est relativement immatériel: il s'agit du MC

«

Ne pas changer de choix stratégique d'allocation des ressources en cours de projet» associé au PC

«

Piloter ['allocation des ressources aux tâches ».

Nous n'avons étonnamment pas trouvé de référence significative dans la littérature en dehors de celle proposée par Calantone et alii (1995).

TI

est donc directement issu du principe suivant:

Principe %en

accord 38 Une fois qu'un choix a été fait en ce qui concerne une stratégie d'allocation 67%

des ressources, les entreprises ont une meilleure performance si elles se concentrent sur la mise en œuvre de ces stratégies plutôt que d'essayer d'en changer

Tableau 2.35 Calantone et alii (1995): principe de stabilité dans l'allocation de ressources

En conclusion, nous constatons que l'ensemble des facteurs critiques de succès de PIHT repérés par Brockhoff (1994) sont désormais couverts par un mode de contrôle spécifique, comme le montre l'analyse des trois derniers facteurs faite dans le tableau ci-après:

Chapitre 2 :contrôle possible de PIHT -170 -

Critère Mode de contrôle concerné

5 Menace ou opportunité soudaine - Recourir à une méthode d'évaluation formalisée des

et sérieuse risques, l'AMDEC par exemple

6 Complexité de la technologie - Définir la technologie de production du produit ou service - Définir la technologie spécifique au produit ou service - Arbitrer entre des dimensions Coûts/Délais/Qualités

15 Phase du cycle de vie du produit - Positionner le produit ou service développé par rapport à ceux utilisés par le client externe

- Positionner le produit ou service développé par rapport à ceux offerts par l'entreprise

- Arbitrer entre des dimensions Coûts/Délais/Qualités

Tableau

2.36

Relation entre les facteurs-clés de succès repérés par Brockhoff

(1994)

non

encore analysés et les moyens de contrôle liés

à

la décision de PIHT

C'est donc par la mise en évidence de sept moyens de contrôle associés au PC «Gérer le slack» et d'un MC associé au PC

«

Piloter l'al/ocation des ressources aux tâches» que nous terminons

la recherche des modes complémentaires de contrôle possibles de PIHT. Ces derniers modes de contrôle repérés constituent un ensemble de réponses possibles à la question de la gestion de la marge de manœuvre par l'équipe-projet, au cœur de la décision de PIHT. Ajouté aux différents modes de contrôle qui nous paraissaient artificiellement à cheval entre processus et résultat134, nous achevons ainsi la mise en évidence des modes de contrôle de l'élément intermédiaire

«

décision ».

134 Cf. Tableau 2.32 Associations possibles entre les éléments de contrôle et les processus de contrôle de PIHT

2.5. Les modes possibles de contrôle d'un projet d'innovation de haute technologie

La collecte des modes de contrôle adaptés aux PIHT que nous venons de mener est bien une synthèse sélective des modes de contrôle adaptés à un PIHT parmi toutes les propositions faites par la littérature. Nous pouvons donc tout d'abord présenter une vision synthétique du cadre d'analyse avec un dénombrement des moyens de contrôle pour chacun des processus de contrôle repérés dans la section 2.5.1. Nous proposons ensuite une vision plus détaillée de l'ensemble des modes de contrôle repérés (section 2.5.2.).

Chapitre 2 :contrôle possible de PIHT - 172-

2.5.1. Synthèse du cadre d'analyse des modes possibles de contrôle de PIHT

Nous pouvons ainsi proposer une synthèse de ce cadre d'analyse en dénombrant le nombre de MC possibles par couple Elément de