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LES MOYENS JURIDIQUES AU SERVICE DES NOUVELLES FINALITÉS

CONCLUSION DU TITRE 1

SECTION 2. LES MOYENS JURIDIQUES AU SERVICE DES NOUVELLES FINALITÉS

142. Présentation et division. Le droit de la responsabilité civile koweïtien a évolué dans son fondement de façon à favoriser l’indemnisation des victimes des dommages corporels. Il faut dès lors passer, pour permettre leur réparation, d’une responsabilité subjective à une responsabilité objective. Cela signifie que, désormais, il faut faire reposer cette responsabilité sur la notion de causalité. L’objectivité dans le nouveau régime koweïtien se trouve aussi, dans la quasi impossibilité donnée au responsable de s’exonérer. Il est établi que la victime ne peut réaliser son droit à réparation sur le fondement de la responsabilité personnelle qu’en prouvant l’existence d’une faute commise par le responsable, comme une imprudence, une négligence, un abus…etc. Du fait de la difficulté, voire de l’impossibilité de fournir cette preuve, le législateur français a cherché à minimiser cette charge en la plaçant sous le régime de la responsabilité du fait des choses dont la faute est présumée. Le législateur koweïtien, à ce propos, refuse cette façon de faire car il estime que cela ne fait qu’atténuer les conséquences du problème, en réduisant le nombre des victimes qui risquent d’être privées de leur indemnisation, sans le résoudre complètement. Le responsable peut toujours se retrancher derrière une cause externe454. Les dommages corporels doivent être garantis. C’est pourquoi le régime de la garantie du dommage à la personne a vu le jour. Cette dernière nouveauté, nous la retrouvons aussi au sujet du dommage corporel issu des régimes spéciaux de responsabilité en droit français455.

454A. ABDULBAKI, Les sources de l’obligation en droit civil koweïtien, Tome II, Dar Alfkir Alaraby, 1998, p.110 (En langue arabe).

455 Ainsi, A. MOHAMMAD affirme cette spécificité du droit koweïtien par rapport au droit français, en disant que « la garantie du dommage corporel en droit civil koweïtien n’est qu’une application singulière de la responsabilité sans faute du droit français au domaine beaucoup plus large » : A. MOHAMMAD, La garantie du dommage à la personne en droit koweïtien et la responsabilité sans faute en droit français, Op.cit., p. 256

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-D’un autre côté, le législateur français, au sujet du fondement à proprement parler, n’en a pas soumis de nouveau. La théorie du risque demeure le fondement légitime pour la plupart des régimes spéciaux de responsabilité en droit français456. Cette théorie du risque a connu un succès considérable en droit français. Elle a été reconnue par la loi à travers l’émergence des différents régimes spéciaux de responsabilité comme par exemple, pour le régime d’indemnisation des accidents de la circulation. Elle a aussi été reconnue par la jurisprudence lorsque celle-ci, au début du 19e siècle, a analysé l’article 1384, alinéa 1, comme posant un principe général de la responsabilité du fait des choses que l’on a sous sa garde dispensant les victimes de prouver la faute. Matériellement, l’existence d’une responsabilité sans faute en droit français a pour effet de favoriser l’étroite relation qui relie cette terminologie à la responsabilité pour risque. Mais le droit koweïtien nous en présente un autre, celui de l’idée de Mobâchara comme fondement d’une responsabilité objective. C’est la raison pour laquelle, nous allons examiner, tout d’abord le fondement du régime de la garantie du dommage à la personne en droit koweïtien (§1) et, ensuite, sur la nouvelle conception de la cause d’exonération en droits français et koweïtien (§2).

§1. Le fondement du régime koweïtien

143. Présentation et division. Le régime de la garantie du dommage à la personne, comme prévu en droit koweïtien, a certainement été inspiré du droit musulman. En effet, la note explicative précise que « cet article ramène à la vie juridique la règle musulmane de la garantie de l’auteur immédiat non volontaire »457. Néanmoins, cette inspiration n’est que partielle, voire sélective. En effet, aucun régime général ni spécifique n’était envisagé dans le droit musulman pour encadrer exclusivement le dommage corporel. Le fondement du régime de la garantie du dommage à la personne en droit koweïtien ne doit pas se référer uniquement au droit musulman. La note explicative du Code civil koweïtien affirme ainsi, à cet égard, que ce nouveau cas de responsabilité s’inscrivait dans le système de responsabilité islamique, mais il ne lui correspondait pas458. Le régime koweïtien de la garantie du dommage à la personne exclut donc le fondement juridique islamique (A). Cette exclusion servira de base pour montrer que la Moubâcharat al darar constitue le fondement juridique koweïtien sur lequel repose le régime

456 En ce sens, G. VINEY écrit : « l’extraordinaire mutation de la responsabilité civile s’est faite dans le seul domaine des accidents corporels et matériels. C’est dans ce domaine uniquement que sont apparus les cas de responsabilité sans faute » et que, par conséquent, « le besoin d’une justification nouvelle de la responsabilité s’est fait sentir » : G. VINEY, Introduction à la responsabilité, Op. cit., p.89., v. B. STARCK, H. ROLAND, L. BOYER : Les obligations., 1. Responsabilité délictuelle, 4 éd., Op. cit., n° 57 et s., p. 39 et s.

457 Voir, La note explicative du Code civil koweïtien, Op.cit., pp. 248 et s.

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-de la garantie du dommage à la personne (B). Ainsi, afin d’approfondir l’examen du fon-dement juridique koweïtien, une comparaison avec les fondements juridiques issus de la doctrine française sera proposée (C).

A. L’exclusion du fondement juridique islamique

144. La garantie : idée de base du système musulman d’indemnisation. Le droit islamique, à partir du principe fondamental « ni dommage ni endommageant »459 et de la règle de l’article 20 de la Majallat qui dispose que « les conséquences dommageables doivent être effacées », perçoit que l’idée de base de son système est de réparer le préjudice. Le débat a, en effet, été amené sur le terrain de la réparation pour laquelle est émise une terminologie particulière. Les jurisconsultes musulmans, plutôt que d’utiliser le mot « responsabilité » pour faire référence à l’engagement à une compensation pour le préjudice causé à autrui, utilisent les termes de « garantie »460 ou d’« amende ». Ces derniers sont ainsi utilisables dans ce cadre au sens de l’indemnisation461. Toutefois, il faut préciser que pour désigner la responsabilité civile en droit musulman, il est plus courant d’utiliser le terme de « garantie » que d’« amende ». La majorité des juristes musulmans anciens et contemporains a admis ce terme comme un cadre référence à cette conception462.

145. Dommage directement occasionné (art.887) ou non directement occasionné (art. 888) : règles régissant la responsabilité islamique dans tous ses aspects. S’appuyant sur

459 En d’autres termes, personne ne nuit aux autres et ne diminue aucun de leurs droits et, en retour, la victime ne doit pas lui nuire en lui causant des dommages. Ce principe fait partie des principes généraux de l’islam confirmé par le Coran et la tradition du prophète dans plusieurs textes. Voir Hadîth n° 2331 transmis par Ibn Maja ; n° 2176 par Ahmed. Il est ainsi codifié par l’article 19 de la Majallat. Nous trouvons ce principe dans d’autres traductions comme suit : « ne faites pas de mal, et ne rendez pas le mal par le mal », par O. CHAKCHUKI, La responsabilité délictuelle appliquée aux accidents d’automobiles en droit libyen, étude faite à la lumière du droit français et du droit égyptien, Thèse, Université de Nice, p. 8.

460 Le responsable est donc garant selon le droit musulman. Il en va de même avec l’étude de l’histoire du mot « responsable » en droit français. À ce propos, G. PIGNARRE écrit qu’« à l’origine, le terme responsabilité n’est pas connu. Ainsi, ne trouve-t-on pas dans le Digeste de considérations générales de ce mot. Cela ne signifie pas pour autant que la responsabilité n’existe pas. Cela implique seulement que celle-ci n’est pas nommée en tant qu’institution ». Elle ajoute que « si l’on se livre alors à une recherche étymologique, on trouve parmi les antécédents du mot responsable des mots multiples à sens multiples : respondre : (répondre de, répondre à) est lié à sponsio ainsi qu’à spondre (le sponsor est un débiteur, celui qui s’engage à quelque prestation… par ces glissements successifs, on parvient jusqu’au mot responsable qui, en tant que tel, n’apparaît qu’au Moyen Age ». G. PIGNARRE, « La responsabilité » : débat autour d’une polysémie », Resp. civ. et ass., Hors-série juin 2001, chr., n°2, p. 12. Pour aller plus loin, voir, J. HENRIOT, « Note sur la date et le sens de l’apparition du mot « responsabilité » » : Arch. Phil. Du dr., Sirey, 1977, T. XXII, La responsabilité, p. 59 et s ; M. VILLEY, « Esquisse historique sur le mot responsable », La responsabilité : Arch. Phil. Du dr., 1977, p. 45 et s.

461 Voir, notamment, A. KASIR, Le guide pour une étude des dispositions relatives aux dommages corporels, entre Al-Jawabîr Al-Charîa et les indemnisations légales, 1er éd, Almanhal, 2017, p. 80 (En langue arabe).

462 Voir, notamment, A. ALKAFIF, La garantie dans la doctrine musulmane, Damas : Dar Al-Fikr Al’ raby, 2000, pp. 352 (En langue arabe) ; W. ALZAHILIE, La théorie de la garantie ou la responsabilité civile et pénale dans la doctrine islamique, Dar Al-Fikr Al-Mou’sir, 2018, p. 304 (En langue arabe).

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-l’importance du préjudice, le droit musulman s’attache à la distinction en matière civile entre deux sortes de dommages, d’une part, celui directement occasionné et, d’autre part, celui indirectement occasionné463. La Majallat même dans un esprit de codification a divisé le livre de la responsabilité en deux chapitres, consacrés respectivement à l’un et à l’autre type de dommage, et édictant des règles différentes pour l’un et pour l’autre464. Nous ne trouvons pas, cependant, de définition explicite de ce qui est dommage direct et dommage indirect, seulement, la notion de l’auteur initial- Moutaçabbib- qui est abordée par l’article 888 de la Majallat. Ce dernier dispose que « la destruction Taçabbubane est le fait de causer la destruction d’une chose, c’est-à-dire d’agir sur une chose qui conduit à son tour à la destruction d’une autre chose. Celui qui agit de la sorte est dit auteur initial ». Le dommage ici, dit conséquence ou indirect, est celui qui « ne s’incorpore pas dans l’acte même, mais qui est seulement la conséquence de l’acte ».465 Ainsi, l’auteur Taçabbubane est celui qui accomplit un acte dont seulement la conséquence constitue le dommage. A contrario, le Moubâchir sera celui auquel le dommage est incorporé dans son fait préjudiciable ou celui qui accompli le dommage par lui-même. L’Article 887 de la Majallat définit le dommage occasionné par le Moubâchir comme étant « le dommage qu’on occasionne à la chose par soi-même »466. Ainsi, n’exerce pas un dommage direct celui qui, défaisant la corde qui retient un animal, lui permet de s’enfuir. L’idée de dommage direct ou non occasionné a donné lieu à différencier deux concepts dans le système musulman d’indemnisation : l’idée est, d’abord, de consacrer la spécificité du préjudice et du dommage, et, ensuite, de déterminer le mécanisme de rattachement du préjudice ou du responsable.

146. Le ta’adi : fondement de la responsabilité civile délictuelle en droit musulman. Cette distinction suit nécessairement l’existence des deux faits générateurs, à savoir : un fait immédiat et un fait non-immédiat. La distinction entre eux repose sur la notion de causalité. La Majallat, à propos de ce concept, a institué deux articles. Il s’agit de l’article 92 et de l’article 93 concernant respectivement l’auteur direct et l’auteur indirect ou initial. Le premier dispose

463 Certains auteurs parlent d’un dommage direct et d’un dommage par conséquence : voir O. CHAKCHUKI, La responsabilité délictuelle appliquée aux accidents d’automobiles en droit libyen, Op.cit., p. 11 et suivantes.

464 É. TYAN, Le système de responsabilité délictuelle en droit musulman, Op.cit., p. 201.

465 Voir notamment, A. EL-SANHOURY, « La responsabilité civile et pénale en droit musulman », Rapport présenté au deuxième Congrès international de droit comparé tenu à La Haye en 1937, Al qan. Wal. Iqt., 1945, ann. XV, 2ème partie, p. 7 ; voir aussi du même auteur, Les sources du droit dans la doctrine musulmane, Tome I, Le Caire : Centre de Recherches Arabes, 1967, p. 47 (En langue arabe).

466 À propos de la notion de Moubâchir, voir S. BAZE, L’explication de la Majallat, Tome 1, Beyrouth : Maison du livre scientifique, p. 60 (En langue arabe) ; également, M. ALZARGA, Introduction générale à la jurisprudence islamique, 1er éd., Tome 2, Damas : Dar al-Qalam, 1988, p. 1045 (En langue arabe) ; A. ALZARGA, L’explication des règles jurisprudentielles islamiques, 5e éd., Damas : Dar al-qalam, 5e éd., 1998, p. 447 (En langue arabe).

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-que « l’auteur direct est garant même si son action n’est pas préméditée », alors -que le second dispose que « l’auteur initial n’est garant que si son action est préméditée ou fautive ». On peut ainsi dire que le dommage direct, selon l’article 92, est régi par une théorie objective et le dommage indirect, selon l’article 93, par une théorie subjective. Par exemple, l’auteur direct selon le concept de la causalité est celui qui donne un coup directement à la lampe, tandis que l’auteur indirect est celui qui coupe la corde à laquelle est suspendue la lampe. Du fait de l’importance de l’idée du dommage dans le système musulman, la majorité des auteurs musulmans considère que c’est dans le préjudice que réside le fondement juridique de la responsabilité civile délictuelle islamique. Ils ont, par conséquent, institué l’article 92 de la Majallat, autrement dit, la théorie objective comme règle générale, et l’article 93 -la théorie subjective- comme exception467. Tandis que d’autres ont accordé à la théorie objective issue de l’article 92 un rôle très limité, en la considérant comme exception à la règle générale régissant la responsabilité civile délictuelle, à savoir l’article 93 subjectif. Pour ce dernier courant, le ta’adi (le dépassement) sera, par conséquent, le fondement légitime468. I. ALDESSOKI-ABOLILE soutient cette dernière opinion ; il constate que le ta’adi est le fondement légitime, tout en reconnaissant les deux théories objective et subjective comme des règles parallèles469. Un troisième groupe consiste que le système de la responsabilité délictuelle en droit musulman a pris une position intermédiaire distinguée entre deux pointes extrêmes ; la première s’inspirant de la théorie du risque et la seconde de la théorie de la faute, purement subjectiviste470.

Comme nous l’avons déjà mentionné, en droit musulman, la question de la réparation est celle de la responsabilité. En effet, à partir de la première, il essaie de fonder la deuxième. Pour ainsi comprendre le fondement de la responsabilité délictuelle islamique, il faut savoir, tout d’abord, que le « daman », autrement dit la garantie, correspond, d’un point de vue terminologique, plus exactement à la théorie générale des obligations en droit positif que ce soit en droit français ou en droit koweïtien, et non à la théorie de la responsabilité. Nous pouvons donc dire que les sources du daman (garantie), en droit musulman sont : le contrat, l’itlâf (la destruction) et l’occupation. L’itlâf correspond à l’institution de la responsabilité civile

467 A. MOHAMMAD, La garantie du dommage à la personne en droit koweïtien et la responsabilité sans faute en droit français, Op.cit., p. 148. Pour assurer ainsi son raisonnement, il dit que nous pensons que la règle de Moubâcharat contenue dans l’article 92 de la Majallat procède du principe général qui dispose « ni dommage ni endommagement ».

468 É. TYAN, Le système de responsabilité délictuelle en droit musulman, Op.cit., p. 201.

469 I. ALDESSOKI-ABOLILE, La responsabilité civile entre la restriction et l’extension, Koweït : Dar al-nahda al-arabiya, 1980, p. 76 (En langue arabe).

470 Voir en ce sens, C. CHEHATA, « La théorie de la responsabilité civile dans les systèmes du pays du Proche-Orient », Op. cit., pp.894-896.

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-délictuelle en droit positif471. Cette dernière est alors définie fondamentalement en droit musulman comme la responsabilité encourue par le fait de la destruction ou de la détérioration causée, sans lien d’obligation préexistant, du bien d’autrui472. Il semble donc dès lors logique de rechercher, dans la notion de l’itlâf, le fondement juridique.

À ce titre, il apparaît clair que l’itlâf n’a concerné, au début, que les dommages matériels. Les atteintes causées à la personne physique n’étaient régies que par les règles de la Diya473. Cette dernière était, à l’époque, synonyme de vengeance privée. La responsabilité musulmane, en ce qui concerne les dommages corporels, ne fait pas de distinction entre la responsabilité civile-qui est toutefois, réservée pour l’essentiel à la possibilité d’indemniser les dommages par voie de réparation par nature et à la responsabilité pénale si l’acte était volontaire ou involontaire. À cette époque, seule la responsabilité pénale était invoquée lors d’un dommage corporel. Cela explique que l’on n’ait pas cherché à étendre la responsabilité puisque l’on faisait très peu cas de l’individu en termes de dommage corporel. Une conclusion émanant des jurisconsultes musulmans se fait jour : le talion ne s’applique qu’en matière de blessures volontaires et seulement sur la personne capable ; le paiement du prix du sang, la « Diya », est requis pour les blessures involontaires474. Elle était, ensuite, traitée dans des chapitres distincts du talion et dans les compositions applicables en matière de meurtre ou de lésions corporelles. La distinction inclue par les articles 92 et 93 de la Majallat n’avait donc aucune raison d’être. Notre analyse précédente soutient que le préjudice moral ne donne jamais lieu à la responsabilité civile en droit musulman475 dans la mesure où celle-ci ne cible que la destruction purement matérielle. Cette particularité de traitement du dommage matériel nous amène alors

471 Néanmoins, il a été convenu à l’unanimité, dans la doctrine contemporaine d’utiliser le terme de « garantie » dans le sens de la responsabilité civile délictuelle. Voir, par exemple, A. KASIR, Le guide pour une étude des dispositions relatives aux dommages corporels, entre Al-Jawabîr Al-Charia et les indemnisations légales, Op., cit., p. 29 (En langue arabe). A propos des conditions de la mise en œuvre de la responsabilité délictuelle dans le droit irakien par exemple, A. KASIR précise que la faute est la première condition de la responsabilité délictuelle de l’itlâf, ibid., p. 76. ; Encyclopédie de l’Islam, Tome II, Paris 1965, p. 107.

472 Voir aussi supra n°102 pour la position du droit musulman envers la réparation du préjudice.

473 I. ALDESSOKI-ABOLLILE, La responsabilité civile entre l’extension et la restriction, Op.cit., p. 67

474 Toutefois, lorsque l’état de légitime défense est admis en droit musulman, on peut dire qu’il s’agit d’une ébauche de distinction entre la responsabilité pénale et civile ; les incidences, quelqu’en soit la nature, obtiennent réparation par la Diya. De ce fait, les jurisconsultes préfèrent mettre en avant la légitime défense par rapport à la loi du talion. Par contre, à circonstances identiques, ils sont plus enclins à faire valoir le paiement des compositions émanant de l’auteur de l’infraction. On peut aussi conclure que, dans certains cas, la Diya constitue un moyen de répression (peine privée), pour réparer un préjudice résultant d’une atteinte à l’intégrité physique causée non intentionnellement, ou comme un moyen de compensation (réparation du préjudice).

475 Voir A. EL-SANHOURY, « La responsabilité civile et pénale en droit musulman », Rapport présenté au deuxième Congrès international de droit comparé tenu à La Haye en 1937, Op.cit., p. 20 ; également dans le même sens : C. CHEHATA, Théorie générale de l’obligation en droit musulman hanéfite, Paris : Sirey, 1969, n° 232, p. 159. Pour un avis contraire, voir A. KAZEMI-RACHED, L’islam et la réparation du préjudice moral, Genève : Librairie Droz, 1990.

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-à la première distinction entre dommage immédiat et non-immédiat issue des articles 887 et 888 de la Majallat476. Ces deux derniers sont combinés à l’idée de l’itlâf, l’itlâf étant la raison de l’existence de la responsabilité civile. Il est à la fois le fait générateur de la responsabilité et la finalité de celle-ci. Il est donc loisible de dire que, pendant cette période, le préjudice était le fondement juridique de la responsabilité civile en droit islamique et que la distinction opérée par les articles 92 et 93 de la Majallat n’avait aucune valeur juridique mais purement pratique.

Ensuite, ces règles, réglementant essentiellement les dommages matériels, ont même englobé même les domaines du meurtre et des lésions corporelles. Ainsi, pour trouver un moyen de restreindre les cas de vengeance privée et familiale, les jurisconsultes musulmans ont dû