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Positionnement du travail de recherche

I.3 Modélisation des stratifiés composites

I.3.2 Modélisation des endommagements dans les tissus

Les modèles utilisés pour représenter le comportement des stratifiés tissés nécessitent de choisir au préalable une stratégie de modélisation. De fait, ce choix est un compromis entre trois variables : l’échelle de représentation des mécanismes et des scénarios d’en-dommagement, la dimension du problème à modéliser et la complexité du chargement appliqué. Les auteurs ont montré que le premier facteur est directement lié à l’observation expérimentale. En effet, l’ondulation des torons de fibres est la cause de l’initiation des fissurations matricielles ; leur localisation dans le pli est quant à elle définie par le motif de tissage. Comme pour les UD, un niveau de représentation trop fin nécessite un temps de calcul très long, supprimant ainsi la possibilité de l’utilisation du modèle pour des structures plus complexes.

La littérature est dotée d’une grande variété de modèles, résumés sur la Figure I.41, proposée par [Dixit et al., 2013].

Figure I.41 – Classification des méthodes de modélisation des stratifiés tissés[Dixit et al., 2013]

Au vu de leur nature multi-échelle, les tissus se classifient en trois grandes catégories : — Les modèles à l’échelle microscopique : utilisés pour caractériser le comportement

à très petite échelle, comme les torons, la résine ou encore les fibres et les interfaces fibre/résine. Des stratégies d’homogénéisation par changement d’échelle sont utilisées pour passer d’une modélisation à une autre.

— Les modèles à l’échelle mésoscopique (i.e. à l’échelle de la mèche). — Les modèles à l’échelle macroscopique (i.e. à l’échelle de la structure).

La suite de la section se focalisera sur les modèles utilisés pour prédire la ruine du matériau à l’échelle de la mèche puis à celle du pli.

I.3.2.1 Modèles à l’échelle de la mèche

La modélisation à l’échelle de la mèche présente beaucoup d’avantages. Elle permet de mieux comprendre les mécanismes et les scénarios d’endommagement, de faire des études d’influence sur les paramètres géométriques du motif de tissage ou encore des études d’in-fluence sur les techniques de tissage comme l’expliquent [Ivanov, 2009], [Daggumati et al., 2010] et [Melro, 2011]. La plupart de ces modèles utilisent des VER (Volume Élémentaire Représentatif) discrétisés avec des éléments 3D volumiques. Ils permettent de distinguer les mèches et la résine. Le modèle est le plus souvent sollicité avec un chargement simple, puisque l’objectif n’est pas de simuler un essai complet dans lequel les sollicitations sont plus ou moins complexes. [Zako et al., 2003]utilise cette approche sur un taffetas sollicité en traction dans la direction des renforts. Concernant les torons, un endommagement anisotrope est utilisé ; pour la résine, un endommagement isotrope lui a été défini.

Les résultats sont cohérents avec ce qui a déjà été trouvé dans la littérature puisque ce mo-dèle prédit une initiation des dommages dans les mèches transverses aux points de tissage, une propagation en surface dans les éléments volumiques et dans la longueur du toron. Ces résultats sont représentés sur la Figure I.42.

Figure I.42 – Évolution de l’endommagement dans un taffetas sollicité en traction dans la direction du renfort pour trois déformations (a : ε=1,01%, b : ε=1,14%, c : ε=2,01%) [Zako et al., 2003]

Il existe d’autres modèles à l’échelle de la mèche comme celui de[Daggumati et al., 2010], qui utilise le logiciel de maillage WiseTex développé pour les matériaux textiles. Les travaux effectués montrent l’influence des conditions limites sur la localisation de l’initiation des dom-mages. Ainsi, si les faces du tissu sont libres de se déplacer dans la direction hors-plan, alors l’initiation se fait au niveau du centre du toron orthogonal à la direction de chargement, sinon il s’initie sur le bord du toron.

[Melro, 2011] a recours à une autre méthode plutôt multi-échelle. Tout d’abord, le com-portement mécanique du toron et de la résine sont identifiés à l’échelle microscopique, puis implémentés dans un modèle mésoscopique à travers une loi homogénéisée. La résine est mo-délisée par une loi élasto-plastique endommageable, déjà identifiée par [Fiedler et al., 2001]. Ce modèle est appliqué à un satin de 5 ; la Figure I.43 présente l’endommagement du VER pour un chargement en cisaillement transverse.

Figure I.43 – Endommagement et courbes σ − ε pour différents diamètres de torons dans un VER soumis à un chargement en cisaillement transverse [Melro, 2011]

I.3.2.2 Modèles à l’échelle du pli

Le besoin de modéliser de grandes structures a permis l’émergence de modèles à des échelles plus grandes que celle de la mèche. Ainsi, les modèles homogénéisés sont les plus utilisés dans la littérature. Le principe global est de trouver une modélisation plus simple que la structure réelle du milieu c’est-à-dire que le milieu fortement hétérogène est remplacé par un milieu homogène équivalent ayant le même comportement macroscopique. L’endommagement est représenté de manière diffuse et non plus discrète comme dans les modèles précédents. Cependant, la présence de fissures est prise en compte à travers leurs effets sur les propriétés globales de la structure. [Iannucci, 2006] utilise une modélisation avec des éléments coques pour représenter le comportement à l’impact d’un tissu satin de 5. Les plis sont reliés entre eux par des éléments cohésifs représentant ainsi le délaminage. La ruine du pli est pilotée par plusieurs variables d’endommagement et concernant la rupture des mèches, deux cas sont distingués : la rupture en traction/compression dans les sens chaîne/trame et la dégradation de l’interface fibre/matrice. Les effets vitesses sont aussi pris en compte en cisaillement plan. Cette stratégie a été utilisée dans des cas de chargements statiques et de fatigue de plaques trouées par [Hochard et an C. Bordreuil, 2007].

Modèles multi-échelles

Parmi les études les plus récentes, on peut citer les approches multi-échelle. Cela consiste à déduire le comportement mécanique du toron à partir de l’étude à l’échelle microscopique des fibres et de la résine puis à homogénéiser le comportement du motif à l’échelle macrosco-pique. [Couégnat, 2008]utilise cette approche pour alimenter son modèle d’endommagement construit à partir des trois échelles. La Figure I.44 représente l’endommagement matriciel d’un tissu implémenté dans le modèle de l’auteur.

Figure I.44 – Représentation de fissures transverses d’un tissu par une approche multi-échelle

[Couégnat, 2008]

Pour pousser un peu plus la représentativité des modèles, des auteurs ont recours à la modélisation de phénomènes plus complexes tels que les frottements. Le modèle développé

par [Din et al., 2004] prend en compte les frottements et les déchaussements fibre/résine. Celui de [Obert et al., 2014]est doté de variables d’endommagement dépendant directement de l’évolution, de l’accumulation et de l’interaction des phénomènes d’endommagement à l’échelle du tissu. Ces modèles utilisent les procédures d’homogénéisation déjà développées par [Ladevèze et Labineau, 2003] pour les unidirectionnels.