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Le jeûne dans le cadre du cancer n’a encore jamais fait l’objet d’étude sur la base de modèles comportementaux ou motivationnels. Cependant, en sciences sociales, il existe plusieurs modèles théoriques pour analyser les comportements. Sur 82 théories identifiées par Davis et al, les trois théories les plus fréquemment utilisées sont le modèle transthéo- rique (33%), la théorie du comportement planifié (13%) et la théorie sociale cognitive (11%) (Davis et al., 2015). Dans le domaine plus spécifique de la santé, on retrouve également parmi les principaux modèles, le modèle de croyance en santé, la théorie de l’autodétermination (Shankland et Lamboy, 2011) ainsi que l’approche du processus d’ac- tion en santé (Noar et al., 2004).

3.1.1 La théorie sociale cognitive

La théorie sociale cognitive de Bandura (1997) repose sur quatre construits qui sont : • le sentiment d’auto-efficacité (ou d’efficacité personnelle) qui se définit comme la confiance qu’un individu a en sa capacité à exercer un contrôle sur un comportement • les attentes de résultats (physiques, sociaux ou auto-évaluatifs) que l’individu a

au regard du comportement

les objectifs ou les buts que se fixe l’individu pour réaliser le comportementles facteurs socio-structurels qui désignent les facilitateurs et les obstacles à la

réalisation du comportement

D’après Bandura, l’auto-efficacité a un effet direct sur le comportement ainsi que des effets indirects via les attentes de résultats et les facteurs socio-structurels (voir figure 8). Les attentes de résultats, les facteurs socio-structurels et le sentiment d’auto-efficacité ont également un effet indirect sur le comportement via les objectifs que se fixe l’individu (Bandura, 2002, 2004). La théorie sociale cognitive a déjà été utilisée pour analyser les effets d’interventions visant le changement de comportement lié à l’activité physique et à la nutrition dans le cancer (Stacey et al., 2015).

Construit théorique 3.1. Les modèles théoriques en santé Sentiment d’auto-efficacité Attentes de résultats Physiques Sociaux Auto-évaluatifs Facteurs socio-structurels Objectif Comportement

Figure 8 – La théorie sociale cognitive pour les comportements de santé de Bandura (1997)

3.1.2 Le modèle transthéorique

Le modèle transthéorique de Prochaska et DiClemente (1983) est un modèle com- portemental qui a été appliqué à divers comportements de santé comme fumer, boire de l’alcool, faire de l’exercice physique ou prendre des précautions (Ogden, 2018). Il a également montré son utilité dans la compréhension du processus de décision des modi- fications du comportement alimentaire (Di Noia et Prochaska, 2010). Cependant, la très grande majorité des études utilisant le modèle transthéorique ne mesurent que les 5 stades de changements (Hashemzadeh et al., 2019). Ces cinq stades correspondent à des étapes au travers desquelles passe un individu qui initie un changement de comportement (voir figure 9) :

Pré-contemplation : l’individu n’identifie pas de problème vis-à-vis de son com- portement. Il n’envisage donc aucun changement.

Contemplation : l’individu perçoit l’intérêt de changer de comportement mais hésite car il perçoit également les bénéfices de son comportement actuel. Il est dans une période de réflexion où il pèse les pour et les contre d’un changement.

Préparation (ou détermination) : l’individu a décidé de modifier son comportement et planifie la phase d’action

Action : l’individu initie le changement de comportement.

Construit théorique 3.1. Les modèles théoriques en santé

L’individu peut avoir des rechutes, c’est-à-dire sortir du processus pour retourner à un stade précédent.

Figure 9 – Le modèle transthéorique de changement selon Prochaska et DiClemente (1983)

Cependant, ce modèle est bien plus riche car il intègre également d’autres éléments : • une balance décisionnelle qui représente les avantages et les inconvénients liés au

changement de comportement

la mesure du sentiment d’efficacité personnelle défini comme la confiance qu’un individu a en sa capacité à exercer un contrôle sur un comportement

les processus qui représentent les stratégies à utiliser pour modifier le comporte- ment

3.1.3 Le modèle de croyance en santé

Le modèle de croyance en santé de Rosenstock (1974a,b) est un modèle motivationnel utilisé pour divers comportements de santé comme la prise de médicaments, l’utilisation de préservatifs, la vaccination ou l’arrêt du tabac (Carpenter, 2010). Il inclut plusieurs variables qui influencent le comportement (Rosenstock, 1974b; Janz et Becker, 1984; Ar- mitage et Conner, 2000; Ogden, 2018) (voir figure 10) :

la vulnérabilité perçue (risque de développer un problème de santé)la gravité perçue (gravité du problème de santé)

les bénéfices perçus associés à l’adoption du comportementles coûts perçus associés à l’adoption du comportement

Construit théorique 3.1. Les modèles théoriques en santé

la motivation qu’une personne a de s’engager dans des comportements de santéle contrôle perçu

des stimuli (ou incitations à agir) interviennent pour favoriser le passage à l’acte

Variables démographiques Vulnérabilité perçue Gravité perçue Bénéfices perçus Coûts perçus Incitations à agir Motivation à la santé Contrôle perçu Probabilité d’action

Figure 10 – Le modèle de croyance en santé selon Ogden (2018)

3.1.4 La théorie de l’action raisonnée

La théorie de l’action raisonnée postule que le comportement dépend de l’intention que l’individu a de réaliser ledit comportement (Fishbein et Ajzen, 1975). Cette intention est influencée par deux facteurs qui sont :

• les attitudes qui évaluent la désirabilité du comportement et de ses conséquences • les normes subjectives qui évaluent l’influence et l’opinion des proches sur le com-

Construit théorique 3.1. Les modèles théoriques en santé

Les attitudes d’une personne envers un comportement sont elles-mêmes influencées par des croyances subjectives que la personne formule vis-à-vis des effets attendus par le fait d’effectuer le comportement. Les normes subjectives sont, elles, influencées par des croyances sur les normes perçues par l’individu vis-à-vis du comportement et sa mo- tivation à se plier à ces normes. La théorie postule également que tous les autres facteurs pouvant influencer le comportement le font de manière indirecte à travers les attitudes et les normes (voir figure 11).

Attitudes Normes sociales Intention Comportement Croyances comportementales Croyances normatives

Figure 11 – La théorie de l’action raisonnée de (Fishbein et Ajzen, 1975)

3.1.5 L’approche des processus d’action en santé

L’approche des processus d’action en santé de Schwarzer et al. (2011) postule que l’adoption, l’initiation et le maintien d’un comportement de santé suivent un processus en deux phases. Une phase motivationnelle et une phase volitionnelle. L’individu commence par décider s’il adopte un comportement puis il met en place des actions pour initier ou maintenir le comportement. Durant la phase motivationnelle, l’intention est influencée par trois déterminants qui sont :

• les attentes de résultats

• la perception des risques (ou évaluation de la menace) • le sentiment d’auto-efficacité

L’individu suffisamment motivé pour initier un nouveau comportement va rentrer dans la phase volitionnelle qui se divise en trois autres phases. Dans la première phase, l’individu planifie son passage à l’acte pour adopter le comportement. La seconde phase concerne le passage à l’acte concrètement tandis que la troisième phase vise au maintien du compor- tement. L’auto-efficacité perçue est présente à chaque phase (voir figure 12). Ce modèle repose en partie sur le fait que l’auto-efficacité est reconnue comme l’un des meilleurs prédicteurs de l’intention et de divers comportements de santé (brossage de dents, usage efficace de contraceptifs, auto-examen des seins, intention d’utiliser des seringues propres chez les toxicomanes, intention d’arrêter de fumer, intention de respecter un programme d’activités physiques et de perdre du poids) (Ogden, 2018).

Construit théorique 3.2. Intégration des modèles théoriques : l’exemple du MICC