• Aucun résultat trouvé

Quels sont les motivations et les facteurs expliquant la pratique du jeûne chez des patientes atteintes d’un cancer du sein ? : une approche qualitative et quantitative en psychologie de la santé

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Quels sont les motivations et les facteurs expliquant la pratique du jeûne chez des patientes atteintes d’un cancer du sein ? : une approche qualitative et quantitative en psychologie de la santé"

Copied!
261
0
0

Texte intégral

(1)

HAL Id: tel-02921399

https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-02921399

Submitted on 25 Aug 2020

HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés.

Quels sont les motivations et les facteurs expliquant la

pratique du jeûne chez des patientes atteintes d’un

cancer du sein ? : une approche qualitative et

quantitative en psychologie de la santé

Sébastien Mas

To cite this version:

Sébastien Mas. Quels sont les motivations et les facteurs expliquant la pratique du jeûne chez des patientes atteintes d’un cancer du sein ? : une approche qualitative et quantitative en psychologie de la santé. Psychologie. Université Paul Valéry - Montpellier III, 2019. Français. �NNT : 2019MON30037�. �tel-02921399�

(2)

Délivrée par l’Université Paul-Valéry Montpellier 3

Préparée au sein de l’école doctorale 60

"Territoires, Temps, Sociétés et Développement"

Et de l’unité de recherche EA 4556

"Laboratoire Epsylon. Dynamique des Capacités Humaines et des Conduites de Santé"

Spécialité : Psychologie du développement

Présentée par : Sébastien MAS

Quels sont les motivations et les facteurs expliquant

la pratique du jeûne chez des patientes atteintes

d’un cancer du sein ? : une approche qualitative et

quantitative en psychologie de la santé

Soutenue le 18 décembre 2019 devant le jury composé de

Madame Florence COUSSON-GÉLIE, Professeur Directrice de thèse Université Paul-Valéry Montpellier 3

Madame Marie PRÉAU, Professeur Rapporteure

Université Lumière Lyon 2

Monsieur Olivier DESRICHARD, Professeur Rapporteur Université de Genève

Monsieur Raphaël TROUILLET, Maître de Conférence Examinateur Université Paul-Valéry Montpellier 3

Monsieur Patrice COHEN, Professeur Examinateur

(3)

Résumé

Introduction

Ces dix dernières années, la pratique du jeûne dans le cadre du cancer a suscité un in-térêt croissant de la part de la communauté scientifique, des patients et des médias. Les quelques études sur les rongeurs ont fait l’objet d’une importante médiatisation suscitant des espoirs chez les personnes atteintes de cancer. Pourtant, la revue de la littérature réalisée par le Réseau National Alimentation Cancer met en évidence le manque d’études chez l’être humain (NACRe, 2017). À ce jour, seule une étude de faisabilité a été publiée (de Groot et al., 2015). Si les résultats semblent plutôt positifs, la taille de l’échantillon ne permet aucune conclusion sur un potentiel effet positif ou négatif du jeûne. Les pratiques actuelles des personnes jeûnant pendant leur cancer posent donc certaines interrogations. Quels sont les motivations et les facteurs expliquant cette pratique ? Quelles sont les ca-ractéristiques sociodémographiques des personnes effectuant un jeûne ? Quelles sont leurs modalités de pratique et leur perception des effets du jeûne dans le cadre du cancer ?

Objectifs et méthode

À l’heure actuelle, il n’existe aucune donnée scientifique en sciences sociales sur la pratique du jeûne en cancérologie. Afin de mieux comprendre les motivations et les déterminants de cette pratique, ce travail de thèse s’appuie sur deux approches méthodologiques diffé-rentes :

• Une étude qualitative qui a pour objectif d’analyser, par des entretiens semi-directifs, les motivations à jeûner de personnes ayant pratiqué un jeûne dans le cadre d’un cancer du sein. Cette étude explore également la perception des effets du jeûne, ses modalités de pratique ainsi que les barrières et facilitateurs à la pratique du jeûne dans cette population.

• Une étude quantitative basée sur le modèle intégré de changement de comporte-ment (théorie du comportecomporte-ment planifié et autodétermination) qui a pour objectif d’analyser les facteurs prédisant la pratique du jeûne chez des patientes atteintes de cancer du sein.

Principaux résultats

Les résultats des deux études mettent en évidence diverses modalités de jeûne. Il appa-raît que le type de jeûne le plus pratiqué est le jeûne hydrique (55%) suivi par le jeûne partiel (38%). Le jeûne se pratique en concomitance avec la chimiothérapie pour 80% des

(4)

jeûneurs. De plus, 88% d’entre eux jeûnent au moins une fois par mois.

Les entretiens qualitatifs, portant sur 16 patientes ayant eu un cancer du sein, mettent en évidence trois raisons principales à la pratique du jeûne chez ces femmes pendant la maladie :

• Éviter ou diminuer les effets secondaires des traitements • Améliorer l’efficacité de la chimiothérapie

• Se sentir active pendant les traitements

L’analyse quantitative, portant sur 345 personnes et basée sur le modèle intégré de changement de comportement, montre un rôle central de la régulation autonome comme déterminant de la pratique du jeûne (β = 0,11 ; IC 95% [0,06 ;0,15]). La relation entre la régulation autonome et l’intention de pratiquer un jeûne prend le pas sur les relations entre les croyances de la théorie du comportement planifié (attitudes, normes sociales et contrôle perçu) et l’intention de pratiquer un jeûne.

Conclusion

L’ensemble des données met en évidence que les personnes qui jeûnent ont un niveau so-cioéconomique plus aisé que la moyenne de la population. Le jeûne pratiqué dans le cadre d’un cancer du sein est principalement utilisé pour éviter ou diminuer les effets secon-daires de la chimiothérapie. Il est donc majoritairement réalisé en concomitance avec les traitements par chimiothérapie. Nos données montrent également l’importance de l’expé-rience passée pour prédire les comportements de jeûne. En effet, les personnes ayant déjà effectué un jeûne dans le cadre de leur cancer sont capables de prendre en compte leur perception de contrôle comme une source motivationnelle pour développer une intention de jeûner contrairement aux personnes n’ayant jamais jeûné dans le cadre d’un cancer. Ces données indiquent que les patientes fondent leur intention de jeûner sur des motiva-tions internes plutôt que sur une évaluation plus concrète des éventuels bénéfices du jeûne.

Mots-clés : Jeûne, Cancer du sein, Modèle intégré de changement de comportement,

(5)

Introduction

In the last decade, the practice of fasting in cancer has attracted growing interest from the scientific community, patients and the media. The few studies on rodents have been the subject of significant media coverage raising hopes among people with cancer. Ho-wever, the literature review carried out by the French Network for Nutrition and Cancer Research highlights the lack of studies in humans (NACRe, 2017). To date, only one fea-sibility study has been published in humans (de Groot et al., 2015). If the results seem rather positive, the sample size does not allow any conclusion on a potential positive or negative effect of fasting. The current ways cancer patients practice fasting in relation to their disease raise some questions. What are the motivations and factors explaining this practice ? What are the socio-demographic characteristics of these patients ? How do they fast and what is their perception of the effects of fasting in the context of their cancer ?

Objectives and Method

At present, there is no scientific evidence in social sciences on the practice of fasting in oncology. To better understand the motivations and determinants of this practice, this thesis work relies on two different methodological approaches in a breast cancer population :

• A qualitative study that aims to analyze, through semi-structured interviews, the motivations to fast of patients during their disease. This study also explores the perception of the effects of fasting, the way it was practiced as well as the barriers and facilitators to the practice of fasting in this population.

• A quantitative study based on the integrated model of behavioral change (theory of planned behavior and self-determination) which aims to analyze the factors predic-ting faspredic-ting in patients with breast cancer.

Main results

The results from our studies highlight various fasting modalities. It appears that the most practiced type of fasting is water fasting (55%) followed by partial fasting (38%). Fasting is undertaken alongside with chemotherapy for 80% of patients. In addition, 88% of pa-tients fast at least once a month.

The qualitative interviews, involving 16 breast cancer patients, highlight three main reasons behind fasting for women during their disease :

• Avoid or reduce the side effects of treatments • Improve the effectiveness of chemotherapy • Feel active during treatments

(6)

The quantitative analysis, involving 345 patients and based on the integrated model of behavioral change, highlights a central role of autonomous regulation as a determinant of fasting (β = 0.11 ; 95% [0.06, 0.15]). The relationship between autonomous regulation and the intention of fasting takes precedence over the relationships between attitudes, social norms and perceived control (beliefs of the theory of planned behavior), and the intention to practice a fast.

Conclusion

The results show that people who fast have a better socioeconomic level than the average population. Fasting for breast cancer patients is mainly used to prevent or reduce the side effects of chemotherapy. As a result, it is mainly performed alongside with chemotherapy treatments. Our data also highlights the importance of past experience in predicting fas-ting behaviors. Indeed, patients who have previously fasted during their cancer are able to consider their perception of control as a motivational source to develop an intention to fast, unlike patients who have never fasted during their disease. This indicates that pa-tients base their intention to fast on internal motivations rather than on a more tangible assessment of the potential benefits of fasting.

Keywords : Fasting, Breast Cancer, Integrated Model of Behavioral Change, Theory

(7)

Remerciements

En premier lieu, un IMMENSE merci aux patientes sans qui il n’y aurait pas d’étude. Merci d’avoir participé et merci de vous être confiées.

Je voudrais remercier ma directrice de thèse, le Pr. Florence Cousson-Gélie. En 2011, alors que le jeûne était encore un sujet pratiquement inconnu en cancérologie, elle est la seule à m’avoir fait confiance en percevant le potentiel intérêt de ce thème comme sujet de recherche. Si nos hypothèses de l’époque sur la croissance post-traumatique ont com-plètement volé en éclats dès les premiers interviews, cela n’a rendu l’aventure que plus passionnante. Avec son expérience, nous avons pu obtenir deux financements et de précieux partenariats. Grâce à elle j’ai notamment pu intégrer l’équipe du rapport NACRe compo-sée de personnes extrêmement compétentes et dotées d’une grande ouverture d’esprit. Les cliniciens m’ont initié à la réalisation d’une revue de la littérature plus que systématique pendant que les socio-anthropologues tentaient de me perdre dans les méandres de leur méthodologie. Merci également de m’avoir laissé une grande liberté d’action.

Merci également aux membres du jury qui ont accepté de m’offrir de leur temps pour lire et surtout évaluer ce travail de thèse. Votre jugement et vos remarques sont précieux. Je remercie également deux organismes qui m’ont accordé un financement. Le premier, fut le Cancéropôle Grand Sud Ouest qui finança la toute première étude sur les entretiens qualitatifs. Le second fut la Fondation ARC qui m’accorda une bourse d’un an afin que je puisse terminer ce travail dans les meilleures conditions.

Je remercie l’Institut du Cancer de Montpellier où j’ai passé près de 5 ans. Tout d’abord en travaillant comme ingénieur d’études grâce au Pr Grégory Ninot, puis durant les 2 premières années de la thèse. Ce sont les rencontres avec les patients, les échanges avec le personnel soignant (notamment de l’hôpital de jour) et surtout avec les ARC qui ont nourri ce projet de thèse sur le jeûne.

Je remercie l’équipe NACRe qui m’a accueilli et permis de participer à une pas-sionnante revue de la littérature. Je remercie particulièrement Paule et Bruno pour leur confiance et leur bienveillance ainsi que Julie et Juliette pour nos échanges, votre soutien sans faille et vos sourires réconfortants. C’est toujours un plaisir de vous revoir. Un très très grand merci, évidemment, à la fine équipe des socio-anthropologues qui m’ont offert

(8)

une plongée dans le monde de la recherche inductive sans bouteille. Patrice, François et Laura, merci pour nos échanges, votre travail, votre curiosité, votre ouverture d’esprit, votre gentillesse, notre super week-end à Rouen et j’en passe... J’ai beaucoup appris à vos côtés et je reste on ne peut plus convaincu que la multidisciplinarité est indispensable dans la recherche.

Merci à l’ensemble des doctorants du laboratoire Epsylon avec qui on ne s’ennuie jamais ! Des tonnes de discussions passionnantes avec Philippe notamment, mais aussi Roman, Fabrice, Arthur, Conchita (et les zèbres), Lola (et les SKs), Sibylle, Fred, Clara, Lorene, Edouard, Christine, MJ, JC, Kévin José, Sarah, etc. . . Désolé, vous êtes trop nombreux, mais je pense à vous tous.

Merci à Julie et Yannick qui sont toujours là quand on a besoin d’eux. Julie, tu es la personne qui m’a convaincu de faire une thèse quand j’hésitais encore et je t’en remercie. Merci à tous les deux pour vos encouragements mais aussi pour votre humour et votre disponibilité sans faille.

Merci à l’ensemble de l’équipe d’Epidaure pour tous les bons moments passés ensemble. Merci à Isa, Farida et Marie-Ève pour nos discussions du midi toujours passionnantes, à Florian pour ta grande tolérance envers le véganisme ;), à Apolline pour ta fausse can-deur et ta vraie capacité d’autodérision, à Elodie pour être l’unique personne à rigoler de mes blagues, à Jordan pour ses questions persistantes, à Louise pour le rire, les jeux, les discussions, tes patients et ton Fabio. Je n’oublie pas Marion, Bruno, Fanny, Lydie, Youssef (évidemment !), ma seconde maman Françoise et ceux que j’ai vus de façon plus épisodique. . .

Merci à l’équipe du Souffle LR qui m’a accueilli et permis non seulement de gagner un peu ma vie entre deux financements, mais également de mettre en pratique mon DU de tabaco. Cette association n’est remplie que de gens formidables (Rose, Yasmine, Natha-lie. . . ). Merci à Claire de m’avoir forcé un peu la main pour y entrer et merci à Sophie pour sa confiance et sa bienveillance.

Certains ne se sont pas retrouvés dans les remerciements et commencent à être déçus. Mais c’est parce qu’on garde toujours le meilleur pour la fin ! Mention spéciale donc à ceux qui m’ont supporté plus souvent que les autres et parfois inspiré dans mon travail. Vous tenez une place particulière dans mon coeur. Cependant, saurez-vous vous identifier avant de lire votre prénom ?

(9)

la réflexion jusqu’à l’absurde et j’adore ça ! Mais en vrai, elle a le coeur tendre et l’âme généreuse. Pour toi, Julie, ça sera ma citation préférée de Grucho Marx qui sert en temps normal à me définir : " De quoi qu’il s’agisse je suis contre."

En paraphrasant George Bernard Shaw, je dirais que vous, vous voyez des choses et vous vous dites : "Pourquoi ? Mais elle, elle rêve de choses qui n’ont jamais existé et se dit : "pourquoi pas ?". Ouverte d’esprit, curieuse et avec mille idées à la minute, Clémentine est une mine d’or dont il ne faut pas brider l’imagination.

Elle n’a pas choisi d’être psychologue mais ça pourrait changer. À l’écoute des autres, elle sait gérer les silences pour laisser parler les coeurs. À moins qu’elle n’ait fait siens les conseils de Leonardo da Vinci : "Savoir écouter, c’est posséder, outre le sien, le cerveau des autres". Mais Alice a aussi des choses à raconter et nos discussions régulières du mardi vont me manquer.

Un rayon de positivité et d’énergie. Un calme et une sincérité à toute épreuve qui favorisent la confiance et reposent les sens. Une sorte de parenthèse dans un monde en déliquescence. Ben oui, c’est ma petite Manon qui me permet régulièrement de reprendre un peu de. . . souffle (ou d’air...) ! Toujours le sourire aux lèvres, elle est totalement en accord avec Christophe André qui explique que : "Sourire mobilise 15 muscles, mais faire la gueule en sollicite 40."Faites comme Manon, "Reposez-vous : souriez !".

Cette thèse est un peu la sienne, car, tel un pygmalion, il me montra les bases de la recherche en master déjà. Un bon ami aussi qui me releva, chaque fois qu’à terre je vou-lais tout arrêter. Un excellent chercheur également plein d’idées stimulantes et concrètes à réaliser. Merci pour tout Paquito, tu sais bien que je n’aurais ici ni l’espace ni le temps pour te dire combien je te suis reconnaissant. En tout cas, c’est le coeur qui parle car d’après Hans Christian Andersen " la reconnaissance est la mémoire du coeur ".

Mon autre pygmalion est oncologue. Il me fit rédiger mon premier poster, répondre à mes premiers appels à projets, faire mes premières présentations importantes. Surtout, il me fit comprendre que la recherche s’inscrit dans un temps long et que la réalité de terrain s’impose toujours à la belle théorie. Malgré son statut et son expérience, il traite tout être humain comme son égal et l’écoute avec attention. En dehors du fait qu’il soit extrêmement "bordélique" (c’est pour faire plaisir à Sophie que je dis ça, je sais que tu retrouves toujours tes affaires) et jamais à l’heure, Xavier est quelqu’un sur qui on peut humainement et scientifiquement compter. Merci pour ta confiance mais également pour tout ce que tu m’as appris avec tact et délicatesse. Philippe Geluck a pensé à ta défense : " Au fond, est-ce que ranger ça ne revient pas un peu à foutre le bordel dans son désordre ? "

(10)

Trop généreux, il ne sait pas dire non et du coup. . . il est partout. Excellent chercheur, il aime les détails et la précision. Il anticipe un peu trop parfois ce qui l’amène à argu-menter sur des problèmes que les reviewers n’auraient probablement jamais envisagés ! En tout cas, sans lui, je n’aurais pas autant appris durant cette thèse. Mille fois merci, Mathieu, pour tout ce que tu m’as apporté que ce soit en temps ou en connaissance. Travailler avec toi est un bonheur mais surtout cela apporte énormément de sérénité. Je ne sais pas qui est Annelou Dupuis mais elle a raison : " Tu me consacres du temps, c’est le plus généreux de tous les cadeaux ".

Merci également à toute ma famille (Mireille, Christian, Judit. . . ) et les proches (So-phie, Mathieu...) pour leur soutien, leurs relectures, leurs questions, leurs recommanda-tions.

Et pour finir

Toujours à mes côtés depuis une vingtaine d’années Elle n’a jamais failli à me supporter.

L’esprit scientifique très affûté

Ses corrections ne laissent rien passer. Son jugement de très grande valeur N’a d’égal que son immense coeur. Avec empathie et bienveillance, Elle forge l’estime de soi des autres

Afin qu’ils développent leurs compétences. Par chance, je suis parmi ces autres ! Elle est mon amie, ma compagne, Mon amour qui m’accompagne Dans cette vie parfois compliquée

Où il vaut mieux être deux pour tout affronter. C’est une thèse à deux,

Une thèse pour deux,

(11)

À mon grand-père, Pierre, qui aurait été le plus fier de tous.

"Les hommes se trompent quand ils se croient libres ; cette opinion consiste en cela seul qu’ils sont conscients de leurs actions et igno-rants des causes par lesquelles ils sont déterminés." L’Ethique, Livre

(12)

Sommaire

Introduction 1

I Contexte

3

1 Le cancer du sein 4

1.1 Aspects médicaux du cancer du sein . . . 4

1.1.1 Anatomie du cancer du sein . . . 4

1.1.2 Incidence du cancer du sein . . . 4

1.1.3 Taux de survie et traitements . . . 5

1.1.4 Les facteurs de risques du cancer du sein chez la femme . . . 6

1.2 Vécus psychologiques dans le cancer du sein . . . 9

1.2.1 Stratégies de coping et cancer . . . 10

1.2.2 Stratégies de coping et changement de comportement alimentaire dans le cancer . . . 11

1.3 Les modifications alimentaires dans le cancer du sein . . . 12

2 Le jeûne 15 2.1 Les définitions du jeûne . . . 15

2.1.1 Définition clinique . . . 15

2.1.2 Consensus d’experts . . . 16

2.1.3 Définition empirique . . . 17

2.2 État des lieux du jeûne en cancérologie . . . 18

2.2.1 État des lieux de la production scientifique sur le jeûne . . . 19

2.2.2 Effets du jeûne sur la cancérogenèse et la prévention primaire des cancers . . . 20

2.2.3 Interaction du jeûne avec les traitements du cancer et effets pendant la maladie . . . 24

2.2.4 Conclusion sur l’état des lieux du jeûne en cancérologie . . . 26

2.3 Le jeûne dans un contexte social . . . 27

(13)

II Approche théorique

31

3 Construit théorique 32

3.1 Les modèles théoriques en santé . . . 32

3.1.1 La théorie sociale cognitive . . . 32

3.1.2 Le modèle transthéorique . . . 33

3.1.3 Le modèle de croyance en santé . . . 34

3.1.4 La théorie de l’action raisonnée . . . 35

3.1.5 L’approche des processus d’action en santé . . . 36

3.2 Intégration des modèles théoriques : l’exemple du MICC . . . 37

3.2.1 La théorie du comportement planifié . . . 38

3.2.1.1 Présentation de la théorie . . . 38

3.2.1.2 La théorie du comportement planifié et les comportements alimentaires . . . 39

3.2.1.3 Les limites de la théorie du comportement planifié . . . . 40

3.2.2 La théorie de l’autodétermination . . . 42

3.2.2.1 Présentation de la théorie . . . 42

3.2.2.2 La théorie de l’autodétermination et les comportements de santé . . . 45

3.2.3 Rationnel pour le modèle intégré du changement de comportement . 46 3.2.4 Composants théoriques du modèle intégré du changement de com-portement . . . 47

3.2.5 Validité du MICC . . . 49

3.3 La triangulation . . . 52

3.3.1 Définition . . . 52

3.3.2 Intérêt d’une approche quali/quanti dans le jeûne . . . 53

3.4 Problématique et hypothèses . . . 54

3.4.1 Question de recherche l’étude 1 . . . 55

3.4.2 Objectifs et hypothèses de l’étude 2 . . . 55

3.4.2.1 Objectif 1 . . . 55

3.4.2.2 Objectif 2 . . . 56

3.4.2.3 Objectif 3 et hypothèses . . . 57

III Méthodologie et résultats de la recherche

59

4 Étude 1 - Motivations et perceptions de la pratique du jeûne dans le cancer du sein : étude exploratoire par entretiens qualitatifs 60 4.1 Note sur l’étude qualitative . . . 60

(14)

4.3 Objectif . . . 61

4.4 Méthode . . . 61

4.4.1 Recrutement des patients . . . 61

4.4.2 Analyse qualitative . . . 61

4.5 Résultats . . . 63

4.5.1 Population . . . 63

4.5.2 Thèmes . . . 64

4.5.2.1 Raisons principales du jeûne . . . 65

4.5.2.2 Les autorités alternatives . . . 67

4.5.2.3 Adaptation du jeûne aux contraintes sociales . . . 68

4.5.2.4 Effets ressentis du jeûne pendant la chimiothérapie . . . . 68

4.5.2.5 Barrières et facilitateurs pendant la chimiothérapie . . . . 69

4.5.2.6 À la recherche d’une médecine plus intégrative . . . 70

4.5.3 Proposition d’une conceptualisation théorique . . . 70

4.6 Discussion . . . 73

4.7 Limites . . . 76

4.8 Conclusion de l’étude . . . 76

4.9 Éléments à considérer . . . 77

5 Étude 2 - Motivations et déterminants de la pratique du jeûne dans le cancer du sein : analyses quantitatives 79 5.1 Méthodologie commune aux 3 objectifs de l’étude . . . 79

5.1.1 Recrutement . . . 79

5.1.2 Mesures . . . 80

5.1.3 Résultats : Population . . . 84

5.2 Objectif 1 : Analyses des caractéristiques des personnes ayant jeûné . . . . 86

5.2.1 Rappel de l’objectif et des hypothèses . . . 86

5.2.2 Méthodologie . . . 86

5.2.2.1 Traitements et analyses statistiques . . . 86

5.2.3 Résultats . . . 86

5.2.3.1 Population . . . 86

5.2.3.2 Motivations à jeûner pendant le cancer . . . 88

5.2.3.3 Modalités de pratique du jeûne en cancérologie . . . 90

5.2.3.4 Perception des effets du jeûne . . . 92

5.2.3.5 Connaissances sur le jeûne et autorités alternatives . . . . 92

5.3 Objectif 2 : Le MICC chez les jeûneurs et les non-jeûneurs . . . 93

5.3.1 Rappel de l’objectif et des hypothèses . . . 93

5.3.1.1 Objectif 2 . . . 93

(15)

5.3.2.1 Mesures . . . 94

5.3.2.2 Traitements et analyses statistiques . . . 94

5.3.2.2.1 Sous-objectif 1 : . . . 94

5.3.2.2.2 Sous-objectif 2 : . . . 94

5.3.3 Résultats . . . 96

5.3.3.1 Population . . . 96

5.3.3.2 Description des variables du MICC . . . 99

5.3.3.3 Comparaison des variables du MICC . . . 102

5.3.3.4 Analyse de l’invariance du modèle . . . 102

5.3.3.5 Comparaison des pistes du modèle selon le groupe . . . 103

5.4 Objectif 3 : Analyses longitudinales du MICC . . . 108

5.4.1 Rappel de l’objectif et des hypothèses . . . 108

5.4.2 Méthodologie . . . 108

5.4.2.1 Traitements et analyses statistiques . . . 108

5.4.3 Résultats . . . 109

5.4.3.1 Population . . . 109

5.4.3.2 Analyses de corrélation . . . 111

5.4.3.3 Analyses principales . . . 114

IV Discussion générale

117

6 Discussion de l’objectif 1 : Analyses des caractéristiques des personnes ayant jeûné 118 6.1 Discussion . . . 118

6.2 Limites . . . 121

6.3 Conclusion . . . 122

7 Discussion de l’objectif 2 : Le MICC chez les jeûneurs et les non-jeûneurs 123 7.1 Discussion . . . 123

7.2 Sous-objectif 1 : Comparaison des variables du MICC . . . 123

7.3 Sous-objectif 2 : Modération de modèle et comparaison des pistes du modèle selon les groupes . . . 125

7.4 Limites . . . 126

7.5 Conclusion . . . 128

8 Discussion de l’objectif 3 : Analyses longitudinales 129 8.1 Discussion . . . 129

(16)

8.3 Conclusion . . . 132

V Résumé des déterminants et implications pratiques

133

9 Les principaux déterminants du jeûne dans le cancer du sein 134

9.1 Les raisons favorisant la pratique du jeûne . . . 134 9.1.1 Jeûne, effets secondaires de la chimiothérapie et médecines non

conventionnelles . . . 134 9.1.2 Jeûne, contrôle perçu et coping actif en cancérologie . . . 136

10 Implications pratiques 137

10.0.1 Piste 1 : Favoriser la pratique du jeûne . . . 137 10.0.2 Piste 2 : Limiter la pratique du jeûne . . . 139

11 Pistes de recherches 141

12 Conclusion 142

Bibliographie 143

Tables des Annexes 159

A Mes contributions 160

A.1 Rapport NACRe : Comprendre la place du jeûne en France. . . 160 A.2 Ressources utilisées pour l’analyse socio-anthropologique . . . 178 A.3 Article : Fasting and weight-los restrictive diet practices among 2,700

can-cer survivors : results from the NutriNet-Santé cohort . . . 187 A.4 Article : Why do women fast during breast cancer chemotherapy ? A

qua-litative study of the patient experience . . . 199

B Questionnaire de l’étude quantitative 217 C Flyer de recrutement pour l’étude en ligne 239

(17)

Liste des tableaux

1.1 Régime alimentaire, nutrition et activité physique pour le cancer du sein

avant ménopause (2017) . . . 7

1.2 Régime alimentaire, nutrition et activité physique pour le cancer du sein après ménopause (2017) . . . 8

4.1 Caractéristiques de la population . . . 64

4.2 Listes des thèmes et sous-thèmes . . . 65

4.3 Personnes mentionnées par les patientes ayant suggéré le jeûne pendant la chimiothérapie . . . 67

5.1 Présentation des variables du modèle . . . 83

5.2 Questionnaires aux différents temps de mesures . . . 84

5.3 Caractéristiques sociodémographies des personnes ayant jeûné (n=191) . . 87

5.4 Données médicales des personnes ayant jeûnés (n=191) . . . 88

5.5 Fréquence des jeûnes pendant le cancer . . . 91

5.6 Traitements pendant lesquels le jeûne a été pratiqué . . . 92

5.7 Les sources d’informations sur le jeûne (n=191) . . . 93

5.8 Caractéristiques sociodémographiques de la population de l’objectif 2 . . . 97

5.9 Données médicales de la population . . . 98

5.10 Description des variables du MICC . . . 100

5.11 Coefficients de corrélation entre les variables du MICC . . . 101

5.12 Comparaison des variables du MICC . . . 102

5.13 Indicateurs d’ajustement des données pour les différents modèles MICC . . 103

5.14 Estimations des paramètres standardisés du modèle pour les groupes non-jeûneurs et non-jeûneurs . . . 107

5.15 Caractéristiques sociodémographiques de la population . . . 110

5.16 Données médicales de la population . . . 111

5.17 Description des variables du MICC . . . 112

5.18 Coefficients de corrélation des variables du MICC . . . 113

(18)

Table des figures

1 Les trois phases métaboliques du jeûne. Source : Magazine Sciences et

Ave-nir, №820 - juin 2015 . . . 16

2 Évolution du nombre d’articles originaux relatifs aux études réalisées chez l’animal sur jeûne, régimes restrictifs et cancer (cancérogenèse ou interac-tion avec les traitements), identifiés jusqu’au 30/04/2016 - Rapport NACRe - 2017 . . . 19

3 Évolution du nombre d’essais cliniques déclarés dans la base ClinialTrials.gov et d’autres registres et du nombre d’articles correspondant à des études cli-niques sur le jeûne, régimes restrictifs et cancer. Rapport NACRe 2017 . . 20

4 Études de la revue systématique de Lv - 2014 . . . 22

5 Caractéristiques et principaux résultats des études expérimentales (non incluses dans la revue systématique, Lv 2014) portant sur le jeûne inter-mittent et la cancérogenèse - Rapport NACRe 2017 . . . 23

6 Caractéristiques et principaux résultats des études expérimentales portant sur les effets du jeûne intermittent ou non répété sur l’efficacité des traite-ments de chimiothérapie - Rapport NACRe 2017 . . . 24

7 Effets secondaires auto rapportés après une chimiothérapie avec ou sans jeûne. Safdie 2009 . . . 25

8 La théorie sociale cognitive pour les comportements de santé de Bandura (1997) . . . 33

9 Le modèle transthéorique de changement selon Prochaska et DiClemente (1983) . . . 34

10 Le modèle de croyance en santé selon Ogden (2018) . . . 35

11 La théorie de l’action raisonnée de (Fishbein et Ajzen, 1975) . . . 36

12 L’approche des processus d’action en santé de Schwarzer et al. (2011) . . . 37

13 La théorie du comportement planifié de Ajzen (1991) . . . 38

14 La théorie de l’autodétermination de Deci et Ryan (2000) . . . 44

15 Le modèle intégré du changement de comportement . . . 51

16 Triangulation des données sur la motivation et les déterminants de la pra-tique du jeûne dans le cancer du sein . . . 54

17 Flow Chart de l’étude 1 . . . 62

18 Top 3 des raisons de jeûner rapportées par les patientes* . . . 67

(19)

20 Flow Chart de l’étude 2 . . . 85 21 Motivations à la pratique du jeûne dans le cadre du cancer . . . 89 22 Représentation graphique des réponses ouvertes sur les autres motivations

du jeûne . . . 90 23 Type de jeûne pratiqué . . . 91 24 Perception des effets du jeûne sur les traitements et le cancer/tumeur . . . 92 25 Nombre de participants selon le niveau d’éducation par groupe . . . 99 26 Paramètres estimés des pistes causales des différentes variables du MICC

pour l’ensemble de la population . . . 105 27 Modèle de pistes causales mettant en évidence les relations entre les

diffé-rentes variables du MICC pour expliquer le comportement du jeûne . . . . 115 28 Niveau d’éducation des personnes pratiquant le jeûne selon trois études . . 119

(20)

Introduction

Le jeûne est une pratique ancestrale dont les mécanismes biologiques semblent com-muns à tous les êtres vivants. Cependant, il a été relativement peu étudié par la science chez l’être humain. Si l’on connaît les mécanismes de fonctionnement du jeûne en géné-ral, il existe peu d’études sur ses potentiels effets bénéfiques ou délétères sur différentes pathologies. Plus spécifiquement dans le cadre du cancer, son intérêt est apparu récem-ment avec notamrécem-ment les travaux de l’équipe de Valter Longo dont une étude clef a été publiée dans la revue "Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America" (PNAS) en 2008 (Raffaghello et al., 2008). Cette étude, menée sur des rongeurs, met en évidence un effet bénéfique du jeûne qui potentialiserait les effets de la chimiothérapie. En 2011, un documentaire d’Arte sur le jeûne, reprenant quelques-uns des travaux scientifiques en cours, bat des records d’audience en France et en Allemagne donnant ainsi accès à de l’information vulgarisée sur cette pratique à un très large public (Gilman et Lestrade, 2011). Devant la multiplication des études scientifiques sur le jeûne, les médias s’emparent du sujet avec des titres accrocheurs suscitant des espoirs chez les personnes atteintes de cancer. En pratique clinique, l’augmentation du nombre de ques-tions sur le jeûne auxquelles les oncologues doivent faire face pose la question du discours à tenir et donc de l’état de l’art dans ce domaine. C’est dans ce contexte que le Réseau National Alimentation Cancer Recherche (Nacre) a conduit une revue de la littérature systématique sur le jeûne, les régimes restrictifs et le cancer (NACRe, 2017). Dans ce rapport, auquel nous avons participé, aucune étude en sciences humaines n’a été trouvée sur la pratique du jeûne en cancérologie. Une analyse des livres grand public a donc été réalisée afin de mieux comprendre le contexte socioculturel du jeûne en France (Cohen et al., 2017). Cependant, la pratique actuelle des gens qui jeûnent pendant leur cancer malgré l’avis défavorable de leur oncologue pose question. Quels sont les motivations et les déterminants qui favorisent cette pratique ? Quelles sont les caractéristiques sociodé-mographiques des jeûneurs ? Quelles sont leurs modalités de pratique et leur perception des effets du jeûne dans le cadre du cancer ?

Après une présentation du cancer du sein et de son vécu psychologique par les patiente, cette thèse abordera les modifications alimentaires qui surviennent parfois lors d’un can-cer. Puis trois définitions du jeûne seront proposées afin de mieux cerner la variation des perceptions que le mot jeûne peut engendrer. Ce travail doctoral sera structuré en cinq parties. Nous présenterons, en première partie, un état des lieux des connaissances scientifiques actuelles sur les effets du jeûne en cancérologie ainsi que de la perception du

(21)

Introduction

jeûne dans un contexte social. La seconde partie nous permettra de définir les modèles théoriques qui seront utilisés et d’expliquer leur pertinence au regard du sujet traité. La troisième partie présentera tout d’abord une étude qualitative avec ses résultats et sa discussion. Cette première étude nous a permis d’affiner la suite des recherches en appor-tant des premiers éléments de compréhension sur la pratique du jeûne en cancérologie. Une étude quantitative sera ensuite présentée et déclinée en trois objectifs distincts avec leurs résultats. L’ensemble des discussions de l’étude quantitative sera présenté dans la quatrième partie. Enfin, une cinquième partie résumera les motivations et déterminants de la pratique du jeûne et proposera des implications pratiques ainsi que des pistes de recherche.

(22)

Première partie

Contexte

(23)

Chapitre 1

Le cancer du sein

1.1 Aspects médicaux du cancer du sein

1.1.1 Anatomie du cancer du sein

Le cancer est défini comme "une maladie caractérisée par la prolifération incontrôlée de cellules, liée à un échappement aux mécanismes de régulation qui assurent le développe-ment harmonieux de notre organisme. En se multipliant de façon anarchique, les cellules cancéreuses donnent naissance à des tumeurs de plus en plus grosses qui se développent en envahissant puis détruisant les zones qui les entourent (organes). Les cellules cancéreuses peuvent également essaimer à distance d’un organe pour former une nouvelle tumeur, ou circuler sous forme libre" (Ligue Contre le Cancer, 2018). Plus de 100 types de cancers sont actuellement identifiés et classés en fonction du type d’organe ou de cellules dans lesquelles ils débutent.

Concernant le cancer du sein, il existe différents types de cancer en fonction du type de cellules à partir desquelles ils se développent. Les plus fréquents sont les adénocarci-nomes (95%) qui se développent à partir des cellules épithéliales (carcinome) de la glande mammaire (adéno) (INCa, 2019a).

Deux types d’adénocarcinomes sont distingués :

Les adénocarcinomes in situ sont localisés à l’intérieur des canaux ou des lobules. La tumeur n’a pas infiltré le tissu voisin.

• En revanche, quand les tissus qui entourent les canaux et les lobules ont été infiltrés, on parle d’adénocarcinomes infiltrants.

1.1.2 Incidence du cancer du sein

L’Agence Internationale pour la Recherche sur le Cancer, organe de l’Organisation mondiale de la Santé, tient des statistiques épidémiologiques à jour sur le cancer accessible avec l’outil en ligne Globocan (Bray et al., 2013). À l’échelle mondiale, le cancer du sein est de loin le cancer avec le taux d’incidence (standardisé par l’âge) le plus élevé avec un taux de 46,3 cas pour 100 000 habitants, loin devant le cancer de la prostate (29,3 cas pour 100 000 habitants) et le cancer du poumon (22,5 cas pour 100 000 habitants). Cependant, l’incidence en France est bien supérieure à l’incidence mondiale. Celle du cancer du sein

(24)

Le cancer du sein 1.1. Aspects médicaux du cancer du sein

atteint 99,1 pour 100 000 habitants tout juste suivie par le cancer de la prostate avec une incidence de 99 pour 100 000 habitants et du poumon avec une incidence de 36,1 pour 100 000 habitants. Ces taux d’incidence plus marqués sont en partie explicables par des facteurs de risques qui touchent principalement les pays occidentaux (notamment le surpoids/obésité, le manque d’activité physique et la sédentarité).

Concernant la mortalité, on retrouve un classement identique entre la France et le reste du monde. Le cancer du sein apparaît comme le deuxième cancer le plus mortel, juste derrière le cancer du poumon, avec un taux de mortalité (standardisé par l’âge) de 15,4 pour 100 000 cas (26,3 pour le poumon).

Il est à noter que le cancer du sein peut également toucher les hommes. Bien que cette pathologie soit très rare chez eux, l’incidence semble en légère augmentation. Elle est passée de 0,86 pour 100 000 habitants à 1,06 pour 100 000 habitants au cours des trois dernières décennies (Oger et al., 2015).

1.1.3 Taux de survie et traitements

La survie des personnes atteintes d’un cancer du sein varie en fonction de la précocité du diagnostic. On parle de survie nette pour représenter la probabilité de survivre au cancer en l’absence d’autres causes de décès. Elle mesure le pourcentage de personnes en vie 5 ans après le diagnostic. La survie nette pour les femmes diagnostiquées entre 2005 et 2010 s’élève à 87% (INCa, 2019b). Cependant, pour des cancers du sein détectés à un stade précoce, la survie à 5 ans passe à 99% alors qu’elle n’est que de 27% pour un cancer métastatique.

Les traitements dépendent de plusieurs facteurs comme le type de cancer, sa locali-sation, son degré d’expansion (stade, grade...), du statut des récepteurs hormonaux ou génétique (HER2), des éventuelles contre-indications et de la santé générale du patient.

• Pour un cancer non métastatique, la chirurgie est le traitement de référence quand la tumeur est d’une taille opérable. Elle est souvent suivie d’une chimiothérapie ayant pour objectif d’améliorer les chances de guérison et de réduire les risques de récidive. Si la tumeur est trop volumineuse ou si le cancer est de type inflammatoire, la chirurgie peut être précédée par un traitement médical visant à réduire la taille de la tumeur (chimiothérapie néoadjuvante). Une radiothérapie et/ou une hormono-thérapie peuvent éventuellement compléter le traitement pour également diminuer les risques de récidive.

• Pour un cancer métastatique, l’objectif est bien souvent de ralentir le développement de la tumeur ou des métastases et d’améliorer le confort et la qualité de vie de la personne malade. Généralement, le traitement principal est un médicament de chimiothérapie.

(25)

Le cancer du sein 1.1. Aspects médicaux du cancer du sein

Dans tous les cas de tumeur hormonosensible, la chimiothérapie est remplacée par une thérapie ciblée et/ou une hormonothérapie.

1.1.4 Les facteurs de risques du cancer du sein chez la femme

Le World Cancer Research Fund (WCRF) est un organisme à but non lucratif qui fait autorité en matière de recherche sur la prévention des cancers. Il publie régulièrement des mises à jour sur les connaissances scientifiques notamment concernant les facteurs de risques et leur niveau de preuve scientifique (WCRF, 2018). Certains facteurs de risques comme le régime alimentaire, l’activité physique et le tabac peuvent être modifiés en changeant de comportement de santé. D’autres facteurs comme certaines mutations gé-nétiques ne sont en revanche pas modifiables. Au niveau de la littérature scientifique, une distinction est faite entre les femmes ménopausées et celles qui ne le sont pas car les effets des différents facteurs de risques varient selon cette variable.

(26)

Le cancer du sein 1.1. Aspects médicaux du cancer du sein

Table 1.1 – Régime alimentaire, nutrition et activité physique pour le cancer du sein avant ménopause (2017)

Niveau de preuve

Diminue le risque Augmente le risque

Convaincant

• Avoir une grande taille à l’âge adulte1

Probable

• Pratiquer une activité phy-sique d’intensité vigoureuse • Avoir un indice de masse

cor-porel normal2

• Avoir allaité

• Consommation d’alcool • Un poids élevé à la naissance

Limité

• Consommer des légumes pauvres en amidon (pour les cancers du sein ER-)

• Consommer des produits lai-tiers

• Consommer des aliments riches en caroténoïde

• Avoir un régime riche en cal-cium

• Avoir un activité physique régulière

1. La taille à l’âge adulte n’influence par directement les risques de développer un cancer. C’est un marqueur génétique, environnemental, hormonal et nutritionnel des facteurs influençant la période de croissance.

2. Un IMC normal se situe entre 18,5 et 25. Il s’obtient en divisant le poids (en kg) par la taille (en m) au carré.

(27)

Le cancer du sein 1.1. Aspects médicaux du cancer du sein

Table 1.2 – Régime alimentaire, nutrition et activité physique pour le cancer du sein après ménopause (2017)

Niveau de preuve

Diminue le risque Augmente le risque

Convaincant

• Consommation d’alcool • Avoir un indice de masse

cor-porel élevé1

• Avoir une grande taille à l’âge adulte2

• Avoir un poids élevé à l’âge adulte

Probable

• Pratiquer de l’activité phy-sique régulièrement

• Avoir eu un indice de masse corporel normal entre 18 et 30 ans1

• Avoir allaité

Limité

• Consommer des légumes pauvres en amidon (pour les cancers du sein ER-)

• Consommer des aliments riches en caroténoïde

• Avoir un régime riche en cal-cium

1. Un IMC normal se situe entre 18,5 et 25. Il s’obtient en divisant le poids (en kg) par la taille (en m) au carré.

2. La taille à l’âge adulte n’influence par directement les risques de développer un cancer. C’est un marqueur génétique, environnemental, hormonal et nutritionnel des facteurs influençant la période de croissance.

D’autres facteurs de risques viennent s’ajouter à ceux précédemment évoqués : • Les événements de la vie comme des règles précoces (avant 12 ans), une ménopause

(28)

Le cancer du sein 1.2. Vécus psychologiques dans le cancer du sein

ans augmentent le temps d’exposition aux oestrogènes et à la progestérone et ainsi, le risque de cancer du sein. Tous ces facteurs, dans le sens inverse (règles tardives, ménopause précoce, etc.), diminuent le risque de cancer du sein.

• Les radiations des traitements médicaux, surtout durant la puberté, augmentent les risques de cancer du sein même à faible dose.

• Certains médicaments comme l’hormonothérapie ou les contraceptifs qui contiennent des oestrogènes et de la progestérone augmentent aussi les risques du cancer du sein. • Enfin, les antécédents familiaux permettent de détecter les personnes à haut risque de cancer du sein, notamment les personnes ayant des mutations génétiques de type BRCA1, BRCA2 et p531.

Il est important de rappeler que parmi les facteurs de risques pouvant faire l’objet d’un changement de comportement, l’alimentation tient une place prépondérante dans le cadre du cancer du sein notamment chez les femmes. Une alimentation saine et équilibrée permet de réduire les principaux facteurs de risques puisqu’elle permet de contrôler l’indice de masse corporelle, d’avoir des apports suffisants en caroténoïde et en calcium et de limiter la consommation d’alcool.

1.2 Vécus psychologiques dans le cancer du sein

Le cancer du sein s’accompagne la plupart du temps de symptômes de fatigue, d’insom-nie, de perturbation cognitive ainsi que d’une détresse psychologique qui peuvent favoriser l’apparition d’un niveau clinique d’anxiété et de dépression (Bower, 2008; Andreu et al., 2012; Costa-Requena et al., 2013; Chirico et al., 2015). Ces symptômes peuvent avoir un effet négatif sur l’observance du traitement et sur la qualité de vie (Chirico et al., 2015). D’après la revue systématique de Maass et al. (2015) portant sur 17 articles, la préva-lence des symptômes dépressifs dans le cancer du sein varie entre 9,4% et 66,1% selon les études, tandis que la prévalence des symptômes d’anxiété varie entre 17,9% et 33,3%. Ces symptômes peuvent perdurer jusqu’à 5 ans après le diagnostic (Yi et Syrjala, 2017). Leurs prévalences diminuent progressivement au fil du temps. Si 50% des patientes ont des symptômes dépressifs, anxieux, ou les deux, la première année après le diagnostic, ils persistent encore chez 25% des patientes durant la seconde et la troisième année, puis chez 15% des patientes au bout de quatre à cinq ans (Burgess et al., 2005). Cependant, même en cas de guérison, d’autres troubles émotionnels peuvent persister comme notamment la 1. Les gènes BRCA sont des gènes ayant plusieurs fonctions notamment la réparation des dommages causés à l’ADN mais également la fonction de suppresseurs de tumeurs. La mutation de ces gènes chez certaines patientes les rend inactifs dans le cas du cancer du sein. Le gène p53 est également un gène suppresseur de tumeur mais avec spectre d’inactivation plus large concernant plusieurs types de cancer.

(29)

Le cancer du sein 1.2. Vécus psychologiques dans le cancer du sein

peur de la récidive d’un nouveau cancer qui toucherait environ 80% des patients ayant eu un cancer (tous cancers confondus) (Beckjord et al., 2014). En effet, l’avancée de la médecine et notamment l’amélioration du dépistage et des soins favorisent un allongement de l’espérance de vie des personnes atteintes de cancer. Cet allongement pose la question de l’ajustement psychologique des patients au cancer.

Parmi les stratégies d’ajustement à la maladie, le coping tient une place particulière car il peut soit atténuer soit exacerber la détresse psychologique des patients.

1.2.1 Stratégies de coping et cancer

Élaboré par Lazarus et Launier (1978), le coping désigne "l’ensemble des processus qu’un individu interpose entre lui et l’événement perçu comme menaçant, pour maîtri-ser, tolérer ou diminuer l’impact de celui-ci sur son bien-être physique et psychologique" (Paulhan, 1992). Le concept de coping regroupe plusieurs dizaines de techniques et de comportements différents pour gérer les émotions négatives. En 1997, dans son modèle révisé, Folkman propose une nomenclature qui divise le coping en 2 grandes catégories : le coping centré sur le problème (problem-focused) et le coping centré sur les émotions (emotion-focused) (Folkman, 1997). En 2004, pour améliorer la lisibilité des études qui portent sur le coping, l’auteure discute de l’intérêt d’ajouter deux autres catégories : le soutien social (social coping) et le coping centré sur le sens (meaning-focused coping) (Folkman et Moskowitz, 2004). Dans les situations évaluées par l’individu comme "contrô-lables", le coping centré sur le problème sera privilégié. En revanche, si la situation est considérée comme "incontrôlable" par l’individu, il préférera utiliser des stratégies cen-trées sur les émotions (Folkman et Lazarus, 1988; Watson et al., 1990). Il est important de préciser que si les individus privilégient des formes de coping, ils utilisent bien plusieurs formes de coping à la fois.

Selon la revue systématique de Mehrabi et al. (2015) portant sur 20 études, le coping centré sur le problème est le deuxième type de coping le plus utilisé dans le cancer du sein par les patientes après le coping centré sur la recherche de soutien social. Or, la revue systématique de Al-Azri et al. (2009), montre que le coping centré sur le problème dans les situations contrôlables est généralement associé à un bon ajustement émotionnel. Par ailleurs, différents facteurs influencent les stratégies de coping utilisées. Les personnes avec un niveau de revenus et un niveau d’éducation plus élevés sont plus aptes à utiliser des stratégies de coping positives que les personnes avec un niveau d’éducation et de revenus plus faibles (Drageset et Lindstrøm, 2005).

Dans une méta-analyse de 2014 portant sur les stratégies de coping dans le cancer du sein, les auteurs ont privilégié une approche distinguant les stratégies de coping favorisant l’engagement de celles favorisant le désengagement (Kvillemo et Bränström, 2014). Les

(30)

Le cancer du sein 1.2. Vécus psychologiques dans le cancer du sein

résultats mettent en évidence que les formes de coping basées sur l’acceptation de la mala-die et la réévaluation positive de la situation sont liées à un niveau plus élevé de bien-être et de santé. En revanche, les formes de coping basées sur le désengagement et l’évitement sont associées à un niveau plus faible de bien-être et de santé. Le fait d’entreprendre des actions directes pour améliorer la situation était également associé à un niveau plus élevé d’affect positif.

Ces résultats sont à mettre en perspective avec les modifications du comportement alimentaire fréquemment observées durant le cancer du sein qui s’apparentent à des stra-tégies de coping.

1.2.2 Stratégies de coping et changement de comportement

ali-mentaire dans le cancer

L’étude de Park et al. (2008) met en évidence une association entre certaines formes de coping comme les coping d’approche, de soutien social, de contrôle perçu sur la maladie et de sens de la vie et des changements positifs de comportement de santé, notamment au regard des comportements alimentaires. À l’inverse, d’autres formes de coping comme le manque de sens de la vie et le coping d’évitement sont associées à des changements négatifs de comportement de santé. L’impact positif de certaines stratégies de coping sur les comportements alimentaires avait déjà été mis en évidence en 1993 par Reardon et Ay-din. En particulier, l’importance de la réévaluation positive qui apparaît comme un unique prédicteur des changements de niveau de stress et d’alimentation. Les items utilisés dans cette étude montrent que les individus utilisant ce type de coping perçoivent la maladie comme un challenge duquel quelque chose d’utile pourra être apprit (Reardon et Aydin, 1993). Dans l’étude de Maunsell et al. (2002), les femmes ayant rapporté des changements de comportement alimentaire depuis le diagnostic de cancer du sein ont une baisse plus im-portante de leur score moyen de détresse psychologique dans l’année qui suit le diagnostic. Cependant, l’étude qualitative de Maley et al. (2013) portant principalement sur des femmes ayant eu un cancer du sein montre la difficulté qu’ont les patientes à faire des choix alimentaires sains malgré une volonté de changement de comportement à ce sujet. Si le cancer est souvent perçu comme un moment clef pour effectuer des changements comportementaux dans l’optique de prendre mieux soin de soi, le manque de soutien de la part d’un nutritionniste renforce chez certaines patientes un sentiment d’incertitude au regard de ce qu’elles peuvent ou non consommer comme aliments durant et après leur cancer. A cela peut s’ajouter un sentiment de culpabilité dû à leur comportement alimen-taire passé qu’elles perçoivent comme négatif. La vulnérabilité et la détresse psychologique qui sont engendrées par cette incertitude sont combattues par certaines patientes, en se

(31)

Le cancer du sein 1.3. Les modifications alimentaires dans le cancer du sein

focalisant sur l’alimentation. Cette reprise en main de leur alimentation redonne à ces patientes un certain sentiment de contrôle sur leur vie. Par ailleurs, il est à noter que les changements de santé ont plus de chance d’être réalisés par les personnes qui pensent que ces comportements sont associés à leur cancer (Costanzo et al., 2011).

Cependant, les modifications alimentaires durant le cancer du sein sont fréquentes et ne s’apparentent pas toujours à des stratégies de coping.

1.3 Les modifications alimentaires dans le cancer du

sein

La modification des comportements alimentaires dans le cadre du cancer est mise en évidence dans une étude de 2017 portant sur 117 femmes atteintes par un cancer du sein (de Vries et al., 2017). Dans cette étude, les comportements alimentaires ont été mesurés avant le diagnostic de cancer, ainsi que pendant le traitement, et ont été comparés à un groupe de 88 femmes témoins (sans cancer). Il apparaît que durant les traitements par chimiothérapie, l’apport énergétique total est diminué. Cependant, si les apports en gras, protéines et alcool diminuent, les apports en glucides et fibres alimentaires restent stables. Cette diminution des graisses et des protéines s’explique notamment par une baisse de la consommation de viande et de fromage. Comme les auteurs le suggèrent, ce comportement peut s’expliquer partiellement par une altération du goût causé par la chimiothérapie qui peut provoquer une aversion pour la viande (Steinbach et al., 2009; Boltong et Keast, 2012). Les auteurs mettent en avant également l’impact des symptômes causés par la chimiothérapie (bouche sèche, manque d’énergie, nausées, difficultés à mâcher). L’aug-mentation des symptômes apparaît négativement associée à la quantité totale d’apports énergétiques. Cependant, cette association ne se retrouve pas concernant les glucides et les fibres alimentaires qui, là encore, restent stables.

Au regard des études sociologiques, il nous semble que les explications des résultats de de Vries et al. (2017) ne peuvent être uniquement d’ordre physiologique. Tout d’abord, il est à noter que 66% à 68% de leur échantillon se composent de personnes avec un haut niveau d’éducation. Or, il est largement démontré que le statut socioéconomique influence le comportement alimentaire en favorisant les personnes avec un statut socioéconomique élevé (Pechey et Monsivais, 2016). Ces personnes font donc plus souvent le lien entre comportement alimentaire et cancer et sont plus enclines à modifier leur comportement alimentaire. Déjà en 2003, Chapman et Beagan mettaient en évidence trois groupes dis-tincts de personnes en fonction de leur perception de l’alimentation dans le cadre d’un cancer du sein. Le premier groupe se compose de personnes ne faisant pas de lien entre le cancer et le régime alimentaire. Ces personnes ont donc une consommation appelée

(32)

"tra-Le cancer du sein 1.3. Les modifications alimentaires dans le cancer du sein

ditionnelle", constituée de viandes transformées, de pommes de terre et de légumes. Le second groupe se compose de personnes dont l’alimentation reflète les recommandations officielles du "courant dominant" ("mainstream"). Ces personnes émettent l’hypothèse que ce comportement alimentaire réduit les risques de cancer. Le dernier groupe se compose de personnes qui adoptent une approche "alternative" focalisée sur les toxines, les car-cinogènes et les aliments protecteurs du cancer. Ce dernier groupe privilégie donc une alimentation biologique. Cependant, le fait d’avoir des croyances sur le lien entre cancer et alimentation n’est pas suffisant pour enclencher une modification du comportement. Le soutien de la famille, le statut socioéconomique, la culture alimentaire ont également une forte influence (Beagan et Chapman, 2004). Par ailleurs, si les femmes qui associent le comportement alimentaire au cancer sont plus enclines à adopter une alimentation dif-férente pour se prémunir des récidives, les femmes qui ne croient pas en cette association peuvent également modifier leur alimentation dans le but d’améliorer leur santé générale afin de mieux combattre le cancer ou mieux résister aux traitements (Adams et Glanville, 2005). Ces résultats font échos aux travaux de deux anthropologues qui se sont penchés sur la complexe relation entre alimentation et cancer (Cohen et Legrand, 2011). Ils ont réalisé 34 entretiens sur des adultes atteints de cancer, en traitement ou en rémission. Les auteurs notent que si

"pour beaucoup de malades, cette période marque une certaine soumission aux directives et interventions médicales [...] pour d’autres, les recherches per-sonnelles, l’influence de l’entourage ou les recours à des spécialistes du non conventionnel les amènent à rechercher une intervention complémentaire à celle de la cancérologie".

Ils mettent en évidence trois types "d’interventions" de la part des patients. La première consiste à fortifier le corps pour faire face aux traitements et pour optimiser l’action thérapeutique. La seconde vise à prévenir les effets secondaires des traitements dans la stimulation de l’élimination des produits toxiques des traitements (chimiothérapie). La troisième se centre sur la consommation d’aliments ou de boissons considérées comme anti-cancer.

Par ailleurs, ces modifications du comportement alimentaire semblent persister à dis-tance des traitements. Une étude de 2002 portant sur 3084 femmes ayant eu des traite-ments pour un cancer du sein depuis moins de 4 ans, met en évidence des modifications du comportement alimentaire pour 80% d’entre elles (Thomson et al., 2002). Les modi-fications les plus fréquemment rapportées sont une diminution de la consommation de viande rouge (61%), de fromage (53%), d’aliments gras (burger, fast food, aliments frits, pizza - entre 46 et 52%) et d’aliments sucrés (gâteaux, desserts, sucreries (47%) et une augmentation de légumes (60%), de fruits (58%) et de céréales complètes (39%).

(33)

Le cancer du sein 1.3. Les modifications alimentaires dans le cancer du sein

le cadre du cancer demande donc une approche globale. Elle nécessite de prendre en compte à la fois des facteurs physiologiques (effets secondaires des traitements), psycho-sociaux, socioéconomiques, culturels ainsi que les croyances véhiculées par les médias et les différents acteurs de santé. Car le jeûne, en tant que comportement alimentaire, est un phénomène de société qui bénéficie d’une importante médiatisation dans le cadre du can-cer. Les études scientifiques récentes remettent au goût du jour une pratique finalement très ancienne, préconisée par les trois principales religions monothéistes et plébiscitée par certains professionnels de médecines non conventionnelles.

(34)

Chapitre 2

Le jeûne

2.1 Les définitions du jeûne

2.1.1 Définition clinique

À l’heure actuelle, il n’existe pas de définition consensuelle du jeûne. En novembre 2017, le réseau NACRe a produit une revue systématique des données scientifiques sur la question du jeûne (NACRe, 2017). Ce rapport, auquel nous avons contribué pendant près de 18 mois, est le fruit de la collaboration de diverses unités de recherche. Dans le cadre de ce rapport, des définitions ont donc été formulées afin de clarifier la notion de jeûne dans le cadre des études cliniques.

"Dans les études cliniques, le jeûne intermittent est défini par un arrêt complet de l’ingestion de macronutriments (glucides, lipides, protéines) et de micronu-triments (vitamines, éléments-trace, minéraux en dehors de ceux contenus dans les boissons), sans restriction hydrique, pendant une durée de quelques heures à quelques jours. Entre les périodes de jeûne, l’alimentation est ad libitum. Dans certains protocoles, le jeûne alterne avec les autres régimes restrictifs (res-triction calorique, régime cétogène). Une reprise progressive de l’alimentation solide et des apports calorico-glucidiques est parfois proposée. Certains diffé-rencient, chez l’Homme, le jeûne complet du jeûne partiel dans lequel de petites quantités d’apports alimentaires sont autorisées, sous forme de bouillons de légumes, fruits ou jus de fruits, sans dépasser 250 à 300 kilocalories par jour. Chez l’Homme, le jeûne peut être considéré comme court s’il dure moins de 72 heures, et long lorsqu’il dure plus de 72 heures. "

L’adaptation physiologique au jeûne est continue et progressive. Cependant, on peut dis-tinguer quatre phases qui se succèdent comme suit (NACRe, 2017) :

(35)

Le jeûne 2.1. Les définitions du jeûne

Figure1 – Les trois phases métaboliques du jeûne. Source : Magazine Sciences et Avenir, №820 - juin 2015

Phase 1

Les heures qui suivent la prise du repas sont caractérisées par l’utilisation de réserves de glycogène (glycogénolyse hépatique) permettant d’utiliser les dernières ressources de glucose facilement mobilisables

Phase 2

Lorsque les réserves de glycogène diminuent, la glycémie et l’insulinémie baissent, induisant une diminution de l’utilisation de glucose des tissus in-sulinodépendants (muscles), au profit des tissus très gluco-dépendants (cer-veau, globules rouges). Durant cette phase 2, la lipolyse du tissu adipeux s’accélère

Phase 3

Après 1 à 5 jours de jeûne, l’épuisement des réserves de glycogène active la néoglucogenèse à partir des acides aminés (pouvant conduire à une fonte de la masse musculaire) ou du glycérol

Phase 4

Après 5/7 jours de jeûne, une production importante de corps cétoniques et leur oxydation au niveau cérébral permet une épargne protéique par dimi-nution de la néoglucogenèse au dépend des acides aminés

2.1.2 Consensus d’experts

En 2012, un panel d’experts a rédigé des recommandations concernant la "thérapie par le jeûne" (Wilhelmi de Toledo et al., 2013). Il est à noter que les auteurs de cet article

(36)

Le jeûne 2.1. Les définitions du jeûne

sont tous favorables au jeûne. La plupart d’entre eux encadrent des jeûnes régulièrement comme la première auteure de l’article, Wilhemi de Toledo, qui dirige deux cliniques privées de jeûne (Cliniques Buchinger). Par ailleurs, l’article est publié dans une revue allemande, pays dans lequel le jeûne semble beaucoup plus pratiqué qu’en France et peut même parfois être remboursé par la sécurité sociale (Lestrade, 2013; Delaby, 2014; Dac-cord et AFP, 2014). Dans cet article, le jeûne est défini comme "l’abstinence volontaire de nourriture solide et de stimulants (caféine, nicotine) pour une période limitée". Dans cette définition, deux notions intéressantes apparaissent qui font référence à des études parfois anciennes. La première concerne l’importance de l’abstinence volontaire. Cette prise en compte d’une dimension psychologique nécessaire au bon déroulement d’un jeûne selon les auteurs diffère de la définition purement biologique du rapport NACRe. Dans son livre "L’art de jeûner ", Toledo (2005) évoque l’étude de Huether et al. (1997) sur les rats. D’après cette étude, le jeûne pourrait potentialiser les effets de la sérotonine (qua-lifiée d’hormone du bonheur) et favoriser la baisse significative des hormones du stress (adrénaline, noradrénaline, cortisone) après les premières heures de jeûne. En revanche, une personne affamée qui subirait son jeûne (cas de famine) ne pourrait profiter des ef-fets bénéfiques de la sérotonine à cause du fort stress engendré par la peur de mourir d’inanition (Keys et al., 1950; Wilhelmi de Toledo et al., 2013). Pour rappel, on estime qu’une personne en bonne santé avec un indice de masse corporelle normal peut effectuer un jeûne hydrique pendant une durée d’environ 40 jours au maximum. La seconde notion concerne l’absence de stimulant comme la caféine et la nicotine pendant le jeûne. Cette recommandation très présente chez pratiquement tous les promoteurs du jeûne semble relever d’une connaissance empirique. Qu’elle soit fondée ou non, cette recommandation n’est pas argumentée scientifiquement dans l’article tout comme les recommandations qui suivent comme le fait de devoir garder un bon équilibre entre repos et activité physique pendant le jeûne. Ce mélange entre connaissances scientifiques et empiriques met en évi-dence un manque important d’études scientifiques sérieuses sur le sujet, ce qui laisse une place importante aux différents courants du jeûne pour exprimer leur connaissance em-pirique. En l’occurrence, l’importance de l’activité physique dans le cadre du jeûne n’est pas partagée par l’ensemble des courants du jeûne.

2.1.3 Définition empirique

Dans le cadre du rapport NACRe, nous avons analysé 61 ouvrages (liste des ouvrages en annexe A.2) rédigés par des auteurs tous favorables au jeûne. Les définitions du jeûne sont très variées et impossibles à énumérer. Cependant, l’analyse de ces différentes défini-tions est importante car l’accès à l’information de la part des patients ne se fait pas par le biais d’articles scientifiques mais bien par des livres grands publics, des sites internet ou par les articles et documentaires des médias.

(37)

Le jeûne 2.2. État des lieux du jeûne en cancérologie

Si plusieurs courants existent, s’inspirant mutuellement les uns les autres, une diffé-renciation des méthodes de jeûne peut s’opérer sur la base de trois critères : modalités, durée et fréquence.

Les modalités de jeûne :

• Les jeûnes secs (ou complets) sont des jeûnes sans eau ni nourriture. Ils sont relati-vement courts et ne peuvent pas dépasser 2 jours.

• Les jeûnes hydriques sont des jeûnes où seules l’eau et les tisanes sont permises. • En dehors de ces deux types de jeûne, il existe une palette de possibilités allant

de quelques apports caloriques (type bouillon et jus) à une mono-diète (souvent de fruits).

Les durées de jeûne varient de 16h à plusieurs semaines. Les jeûnes de 3 jours ou moins sont considérés comme des jeûnes courts et ne nécessitent pas forcément une préparation. Au-delà de 3 jours, tous les auteurs préconisent non seulement une préparation en amont (changement de régime alimentaire) et une période de reprise alimentaire proportionnelle à la durée du jeûne.

La fréquence varie énormément en fonction de l’objectif du jeûne. Pour rester en bonne santé, des auteurs récents comme Mosley et Spencer (Mosley et Spencer, 2014, 2016) proposent des jeûnes intermittents qui peuvent être hebdomadaires, mensuels ou même annuels. Par exemple, ces auteurs font la promotion du jeûne type 5/2 qui correspond à une alternance hebdomadaire de cinq jours d’alimentation normale et de deux jours de jeûne.

Conclusion

Le manque de données scientifiques rend difficile la caractérisation de la notion de jeûne. Si, pour les besoins d’études cliniques, une définition rigoureuse et précise comme celle du rapport NACRe apporte de la visibilité et permet la reproductibilité des protocoles, elle reste potentiellement limitée car peu en adéquation avec la littérature non scientifique disponible pour les patients.

2.2 État des lieux du jeûne en cancérologie

Le rapport du réseau NACRe, auquel nous avons participé, est la revue systématique la plus à jour sur la question du jeûne. Le rapport, outre le jeûne, passe également en revue les études portant sur la restriction calorique (faible apport de nourriture), la restriction protéique et le régime cétogène que ce soit sur les modèles animaux ou sur l’être humain. Il propose également une analyse socio-anthropologique qui a été menée conjointement avec

Figure

Figure 1 – Les trois phases métaboliques du jeûne. Source : Magazine Sciences et Avenir,
Figure 2 – Évolution du nombre d’articles originaux relatifs aux études réalisées chez l’animal sur jeûne, régimes restrictifs et cancer (cancérogenèse ou interaction avec les traitements), identifiés jusqu’au 30/04/2016 - Rapport NACRe - 2017
Figure 3 – Évolution du nombre d’essais cliniques déclarés dans la base ClinialTrials.gov et d’autres registres et du nombre d’articles correspondant à des études cliniques sur le jeûne, régimes restrictifs et cancer
Figure 7 – Effets secondaires auto rapportés après une chimiothérapie avec ou sans jeûne.
+7

Références

Documents relatifs

Les données portant sur la sexualité et recueillies à l’aide de questionnaires validés sont très rares : elles proviennent soit de grands essais de prévention (Fallowfield et

Le synode national de cette même année 1730 décide cependant, en raison du danger qui menace les Églises du Désert, « de ne point fixer un jour dans un avenir assez éloigné,

4.  Effet du jeune chez le patient atteint de cancer 5.  Restriction calorique ou jeune intermittent. 6.  Effet de la dénutrition chez le patient atteint de cancer soumis à

However, because our goal was to apply our solution without touching to the OpenMP runtime, we used the dynamic schedule with 1 iteration per chunks using an already sorted list for

50 ​ Algan, Y. L'importance de l'investissement dans l'éducation pour la croissance.. situations de communications pour répondre à des problèmes, des créations de projets ou

Among the major results, the development of a new uncalibrated inspection methodology with multiple views applied to the quality analysis in automotive wheel rims, the development of

Si le jeûne à visée thérapeutique (en particulier au cours du cancer) est extrêmement populaire dans les médias et sur les réseaux sociaux, force est de constater que les données

Si le jeûne à visée thérapeutique (en particulier au cours du cancer) est extrêmement populaire dans les médias et sur les réseaux sociaux, force est de constater que les