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Modèles pour le fond de lumière extragalactique

4.3 Interactions avec le fond de lumière extragalactique

4.3.1 Modèles pour le fond de lumière extragalactique

Le milieu intergalactique est baigné par des rayonnements de fond diffus. Le plus connu d’entre eux est certainement le fond diffus cosmologique, en micro-ondes, [177] qui est la lumière émise depuis la surface de dernière diffusion, à un décalage vers le rouge de 1100. Du point de vue des interactions avec l’astrophysique des hautes énergies, le fond diffus cosmologique est notamment responsable de la coupure GZK sur les rayons cosmiques d’ultra-hautes énergies. En revanche, l’énergie des photons se propageant dans le fond diffus doit être d’au moins plusieurs milliers de TeV pour qu’ils puissent être absorbés par le fond diffus cosmologique, ce qui est hors d’at- teinte pour des gammas observés avec H.E.S.S. Des fonds diffus plus énergétiques peuvent néanmoins altérer la propagation des photons à THE des sources extra- galactiques [178, 179, 180]. Pour des rayons gammas autour du TeV, les longueurs d’onde des fonds diffus impliqués dans le processus de création de paires vont de l’in- frarouge proche à l’ultraviolet. Le fond diffus extragalactique dans ces cette gamme d’énergie est appelé fond de lumière extragalactique (FLE). Comme montré sur la figure4.5, le FLE est beaucoup moins intense que le fond diffus cosmologique.

Etant beaucoup moins intense que le fond diffus cosmologique, le FLE à z = 0 est également beaucoup plus difficile à mesurer. En effet, les mesures en optique sont rendues quasiment impossibles par la présence de la lumière zodiacale, qui est plus intense que le FLE de plusieurs ordres de grandeur [181]. Une solution possible est alors de mesurer la lumière émise par toutes les galaxies pour en déduire une limite inférieure sur le niveau du FLE. Comme il est très difficile de mesurer directement le FLE, des modèles ont été développés pour estimer sa densité spectrale et son évolution avec le décalage vers le rouge.

La nature et l’origine du fond diffus de lumière sont fondamentalement différents du fond diffus cosmologique. Alors que le fond diffus cosmologique est émis à z ⇠ 1100 avec un spectre de corps noir puis simplement dilué et décalé vers le rouge par l’expansion de l’univers, le FLE constitue la somme de l’émission de lumière de toutes les étoiles depuis la formation des premières structures. De plus une partie de

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EBL

CMB

TeV γ absorption Energy (eV) -5 10 10-4 10-3 10-2 10-1 1 -1 10 1 10 m) µ ( λ Wavelength -1 10 1 10 2 10 3 10 4 10 5 10 -1 sr -2 W m -10 10 -9 10 -8 10 -7 10 -6 10

Figure 4.5 – Intensité des différents rayonnements de fond en fonction de leur longueur d’onde. Le fond de lumière extragalactique est représenté en bleu. Le fond diffus cosmologique est représenté en gris.

ce fond diffus de lumière est absorbée par les poussières interstellaires qui ré-émettent dans l’infrarouge, formant ainsi la bosse en infrarouge du fond diffus présenté sur la figure 4.5. La modélisation du FLE et de son évolution avec le décalage vers le rouge est donc complexe et fait intervenir différents ingrédients, qui présentent eux mêmes de grandes incertitudes, comme par exemple le taux de formation d’étoiles. Les modèles sont généralement classés en trois catégories, selon la méthodologie employée.

Les modèles dits d’évolution directe suivent l’histoire de l’univers depuis la for- mation des structures jusqu’à aujourd’hui. Les populations de galaxies sont estimées par des modèles semi-analytiques basés sur des simulations de formation de struc- ture. Pour les galaxies isolées, leur émission est obtenue en supposant des modèles pour la distribution de masse des étoiles ainsi que le taux de formation des étoiles. Dans le cas de fusion de galaxies, il faut également modéliser les évènements de nais- sance des étoiles catalysés par la fusion, ce qui peut être fait grâce à des simulations hydrodynamiques de fusion de galaxies. De plus, dans les galaxies les plus massives, la formation de jets au niveau des trous noirs super-massifs centraux ralentit le pro- cessus de formation d’étoiles, ce qui doit être également pris en compte. Finalement, l’émission des étoiles doit également être corrigée de l’absorption et ré-émission sur les poussières inter-stellaires, requérant l’utilisation de modèles supplémentaires. Les modèles d’évolution directe sont donc fondés sur de nombreux ingrédients, parfois incertains, ce qui se traduit par une grande incertitude sur le résultat final. Les modèles appartenant à cette catégorie sont par exemple [182, 183, 184] et peuvent varier de plus d’un facteur deux selon le modèle. Ils ont cependant l’avantage de pré- senter des recettes effectives dont les paramètres peuvent être adaptés, par exemple de façon à produire un modèle de limite inférieure ajusté sur les mesures de comp- tage de galaxie [185], ou encore pour s’adapter au cas de modèles cosmologiques

4.3. Interactions avec le fond de lumière extragalactique 53 différents [186].

Les modèles dits d’évolution inversée [187, 188, 189] essaient de se passer de certaines modélisations utilisées dans les modèles d’évolution directe en utilisant des mesures des luminosités de galaxie locales. L’idée est d’extrapoler ces observations locales au passé de l’univers pour simuler l’évolution de la densité de FLE au cours du temps. Pour effectuer ces extrapolations dans le passé, des prescriptions sont utilisées qui diffèrent selon le type de galaxie et la bande en longueurs d’onde considérée. Ces modèles, en utilisant des mesures locales, se fondent plus sur les observations que les modèles d’évolution directe.

Une troisième possibilité [190, 191, 192, 193] est de calculer le FLE à partir du taux de formation d’étoiles estimé empiriquement à différents décalage vers le rouges. Ces mesures peuvent être des grands relevés de galaxies ou des sondages de marqueurs des compositions chimiques, comme les différentes raies Lyman ↵. Le fond diffus est obtenu grâce à des modèles d’émission dépendant de différents paramètres tels que la distribution de masse des étoiles où la composition chimique, obtenus par les observations. Comme pour les autres modèles, cette émission est corrigée de l’absorption sur la poussière interstellaire avec des modèles d’évolution des poussières dans les galaxies.

La figure 4.6 montre le flux de puissance pour différents modèles du FLE. Le modèle Kneiske et al. 2010 [185] est un modèle d’évolution directe pour lequel les paramètres de certains ingrédients présentant de grandes incertitudes, comme par exemple le taux de formation des étoiles, sont ajustés de façon à ce que le modèle reproduise les estimations minimales obtenues à partir du comptage des galaxies. Ce dernier modèle est donc considéré comme un modèle minimal.

m ] µ Wavelength [ -1 10 1 10 102 3 10 ] -1 sr -2 [ nW mν I ν -1 10 1 10 Stecker et al.(2006) Dominguez et al.(2010) Franceschini et al. (2008)

Kneiske and Dole (2010), lower limit

Figure 4.6 – Flux de puissance du FLE et du fond diffus infrarouge pour quatre modèles différents.

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